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Le défi du samedi

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29 novembre 2008

Studio a louer - Tilleul

Mon chéri,

Depuis que tu es parti, je n’arrête pas de pleurer… S’il te plaît ! Reviens ! Dorénavant, je promets de te faire confiance !… Les questions pour savoir avec qui tu étais, qui tu as rencontré… c’est fini !

Oui, tu en as marre, je te comprends, c’est ma faute, je le reconnais… C’est parce que j’ai peur de te perdre, mon trésor !

Je veux te prouver ma bonne foi en t’offrant un petit cadeau… Tu voulais partir en vacances ? J’ai trouvé un endroit charmant pour bercer notre amour. Je te laisserai même faire ton jogging matinal sans courir derrière toi pour épier tes moindres faits et gestes… Je t’aime mon poussinet ! Mis à part, le bruit du vent et le cri des mouettes, le studio que j’ai déniché est garanti sans bruit… Il est au dernier étage d’un petit immeuble, avec vue sur la mer… Il n’y a pas d’ascenseur, mais je sais que tu grimperas les escaliers avec entrain, mon beau sportif… J’oublie de te dire qu’il y a un grand jardin tout autour, nous pourrons, en toute discrétion, prendre des bains de soleil et nous baigner nus au clair de lune… Certains jours, lorsque la barque sera accrochée au ponton, nous pagayerons sur l’eau en imaginant que nous sommes à Venise…

S’il te plait mon chéri, dis oui ! Je te jure de ne pas être jalouse pendant le séjour !

Je t’aime, je t’aime, je t’aime…

Ta poussinette

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29 novembre 2008

La lettre de Fanfan (Poupoune)

Cher monsieur Jean-Marc,

 

Je vous écris parce que je suis bien copine avec Lulu qui m’a dit que vous pourriez m’aider.

 

Je me fais des cheveux pour une histoire un peu louche, au point que j’en perds le sommeil et déjà que dans ma branche, on dort pas beaucoup, je peux pas trop me permettre.

 

Je m’appelle Francine mais les gens m’appellent Fanfan ou, le plus souvent, ils m’appellent pas. J’ai connu Lulu du temps qu’on travaillait ensemble chez la Rolande, jusqu’à ce que j’aille finalement travailler chez Madame Suzanne. C’est pas que j’étais pas bien chez la Rolande, au contraire, mais faut dire ce qui est : la clientèle est plus chic chez Madame Suzanne et la turlute ouvrière, c’est sympa, mais ça paie moins que la gaudriole bourgeoise.

 

On est quand même resté en contact Lulu et moi et c’est quand je lui ai raconté mon histoire qu’elle m’a dit que je devrais vous en parler, rapport à votre métier. D’ailleurs, si je puis me permettre, vous avez bien fait de pas garder Jean-Marc De la Motte. C’est vrai que John MacDermott ça fait plus crédible, pour un détective.

 

Alors voilà. Chez Madame Suzanne, comme je vous disais, la clientèle est plutôt chic. A cause du quartier, bien sûr, mais pas seulement. Y a des petits extras que la clientèle de standing apprécie, comme le thé et les fruits que Madame Suzanne offre gracieusement, comme elle dit, et ça y avait pas chez la Rolande. Moi je vois pas très bien pourquoi ils trouvent ça tellement distingué de manger une pomme avant de s’envoyer en l’air avec une fille de joie, mais je suis pas de la haute, alors je dois pas pouvoir comprendre.

 

Toujours est-il que, donc, chez Madame Suzanne, il traîne pas trop de loulous des mauvais quartiers, c’est plutôt du beau linge, alors ça permet de travailler plus en confiance, vous voyez ? Je vous dis ça parce qu’on se méfie jamais d’un gars en complet qu’on appelle « Monsieur », hein, alors c’est pour ça que je l’ai cru, le petit mari , quand il m’a raconté son histoire…

 

Le petit mari c’était le voisin. Il habitait juste la maison à coté de celle de Madame Suzanne. Les filles l’aimaient pas trop, et moi non plus d’ailleurs, rapport à sa dame qu’on connaissait toutes. C’est sûr que ça mettait personne très à l’aise, cette histoire : on saluait la dame qu’était toute charmante et très enceinte et on savait qu’on aurait sans doute le petit mari entre les cuisses dans les trois jours, alors c’était pas agréable. On n’est peut-être pas très bien placé pour donner des leçons de morale mais en attendant, nous, on trompe personne. En tout cas personne qui serait pas au courant. Et puis pas sous son nez. Bref, on l’aimait pas, le petit mari. Mais c’était un client et le client est roi. Là-dessus, Madame Suzanne, elle est intraitable : on ne met pas dehors un client qui paie et qui se conduit correctement avec les filles.

 

Bon, toujours est-il que le petit mari, c’était un habitué et comme tous les habitués, il avait ses préférences. Au bout d’un moment, il demandait souvent après moi. Il était du genre à plier l’affaire rapidement, par contre c’était un qui causait. Avec moi en tout cas il causait et il me racontait des trucs que je vous jure bien que j’avais pas besoin de savoir ! Des trucs du genre intime, voyez. Le petit mari, il disait qu’il était pas heureux en ménage… Bon, ça, ils le disent tous, à croire que c’est une excuse valable dans leur milieu pour se payer une tranche de plaisir avec une professionnelle, mais le petit mari, lui, il s’arrêtait pas là. Bon, je vous passe les détails, parce que nous c’est un peu comme les curés, voyez, on a un genre de secret professionnel, mais en gros le petit mari il était prêt à tout ou presque pour disparaître, comme qui dirait…

 

Moi, au début, je faisais mine de l’écouter, par politesse et puis parce qu’il avait payé, de toute façon, et tant qu’il causait moi je pouvais me remettre en ordre tranquillement pour le suivant, mais au bout d’un moment il s’est mis à échafauder un plan et il voulait que je l’aide.

 

C’était franchement tordu alors j’étais pas trop partante, mais il a commencé à parler d’argent et vous savez ce que c’est, hein ? Moi, si on me paie… Notez bien, je suis pas vénale, mais les frais d’entretien, comme on dit, c’est à notre charge et de nos jours, un brushing ou une manucure, ça coûte une fortune, alors je crache pas sur une petite prime, voyez ?

 

Voilà l’histoire : il voulait que je l’aide à faire croire qu’il avait été kidnappé. Rien que ça ! Faut bien être de la bourgeoisie bedonnante et bien-pensante pour inventer des trucs pareils plutôt que de dire à sa bourgeoise qu’on s’en va, non ? Bref. Il disait qu’il était sûr qu’elle paierait même pas et qu’au pire, si elle payait, ça l’empêchait pas de disparaître, y aurait juste un peu plus d’oseille à partager… Alors bon, vu qu’il parlait de montants avec plein de zéros, j’ai pas trop chipoté non plus, voyez. Et puis s’agissait pas de faire vraiment quelque chose de mal : il voulait juste que je me déguise pour faire une vidéo, un genre de demande de rançon, et puis après quelques jours on devait se retrouver au bord du canal pour qu’il me donne la récompense qu’il avait promise.

 

Moi, j’ai fait le truc et on a fait livrer la cassette à sa dame. Soit dit en passant, il avait raison, elle a pas payé. C’est dingue, non ? Et vous savez ce qu’elle a envoyé à la place de la rançon ? Un message qui disait « Gardez-le » ! Notez, moi, ça m’a fait rire, j’avoue, mais lui… Bon, c’est sûr que c’était pas le coup du siècle, le petit mari, mais quand même… c’est pas très moral tout ça. Enfin moi, ce que j’en dis… Toujours est-il que je suis allée comme prévu au rendez-vous près du canal et il est jamais venu. Il devait me donner mon argent et partir en barque jusqu’à je sais pas où, où il avait prévu de prendre une voiture. Ou un train. Ou je sais plus quoi. Tout ça, c’était plus mon affaire, voyez. Sauf que de petit mari y en avait point au rendez-vous quant à sa barque, ben elle flottait mollement sur le canal, avec personne dedans.

 

J’ai bien pensé que j’avais été drôlement naïve de croire à ses promesses et qu’il m’avait bel et bien roulée, mais pas deux jours plus tard voilà que la flicaille débarque chez sa dame et lui dit qu’il est mort, son petit mari… Je me suis renseignée un peu de-ci de-là, discrètement, voyez, faudrait pas que Madame Suzanne apprenne que j’ai fait ce genre d’heures supplémentaires, et figurez-vous qu’il se raconte que le petit mari serait mort d’un enlèvement qu’aurait mal tourné. Alors qu’on sait donc, vous et moi, qu’il a pas plus été enlevé que moi je suis pucelle.

 

Lulu elle dit que quand un mystère est insoluble, c’est là que vous êtes le meilleur, alors si vous êtes pas trop occupé en ce moment (mais Lulu elle dit que vous avez autant de clients en un an qu’elle en une nuit) ce serait bien gentil de voir si vous pouvez pas détricoter cette embrouille. Et au passage retrouver au moins une partie des sous qu’il m’a jamais donnés, feu le petit mari. Comme ça je pourrai même vous payer. A défaut je vous proposerais bien un forfait à l’œil chez Madame Suzanne, mais je sais ce que Lulu serait capable de vous faire alors je me doute que vous serez pas intéressé. D’ailleurs elle a insisté pour que vous passiez par elle pour me contacter si vous voulez bien m’aider. Elle doit avoir confiance, mais pas plus que de raison.

 

Je vous remercie bien par avance, Monsieur Jean-Marc, et j’espère à bientôt pour le travail. Le vôtre, pas le mien.

 

Francine « Fanfan » Delonges.

29 novembre 2008

Message in a bottle (Joe Krapov)

bouteille_a_la_mer

 

Dest. :
Université de Rennes 3
Equipe de recherches Tornado
A l’attention d’Isaure Chassériau
Campus du Marché haut
35000 RENNES

 

QUI veut voyager loin ménage sa mâture
Mais le vent a soufflé si fort sur mon bateau
Que mon mât s’est brisé, touchant mes ligatures :
Je suis cloué au lit avec un lumbago ! 

QUOI ? Je serais donc, moi aussi, chose fragile,
Barcasse ballotée au gré des éléments
Avec le bois qui craque et les câbles qui filent
Tandis que je croyais être fait de ciment ? 

COMMENT apprécier cette île retirée
Où le docteur hier m’a prescrit le repos
Alors que samedi je partais en virée
Du pas vif des aventuriers frais et dispos ? 

OÙ je suis, sur le bord du sentier des douaniers,
Je puis à peine me tourner, craignant la chute.
L’île est déserte et je n’ai rien que mon cahier
Pour me dépeindre en Gulliver à Lilliput.


dds_37_bateau_et_phare3

 

QUAND les médicaments feront-ils leur effet ?
Quand pourrai-je appuyer mes bras sur les béquilles
Pour aller réparer les bris et les méfaits
Que l’ouragan causa au mât et à la quille ? 

POURQUOI ne pas pousser en rampant jusqu’au phare,
Prévenir d’un message Isaure Chassériau ?
Elle m’emmènerait d’un coup huit jours plus tard :
Là je remarcherais, j’aurais l’air moins idiot 

Que celui de Kafka transformé en cafard,
Plongé avec terreur dans le fond du plumard.
Ah que vienne le temps de ma métamorphose !
Ah que vienne la fille en couettes et robe rose !

29 novembre 2008

Chers amis du Net (MAP)

 

  Chers amis,

 

J’avais promis de vous narrer
ma participation au « Vent des Blogs »
 mais figurez-vous que je me suis heurtée
 à une difficulté incontournable : 

 

 

D_fidus

 

 et je me suis donc retrouvée le bec dans l’eau :

 

Bec_dans_l_eau

 

 Espérons que la prochaine édition sera plus réussie.

Avec toutes mes amitiés, je vous embrasse.

 

MAP

29 novembre 2008

Candidature (Joye)

Mathilde SCRIBOUILLEUSE
12345 ruée des Défiants
61559 Bar-le-baron


Bar-le-baron, le mardi 25 novembre 2008

 

Objet : Candidature au poste de gardienne de phare

 

Madame, Monsieur,

 

Votre annonce pour un poste de gardienne de phare a retenu toute mon attention.

Titulaire d'une maitrise en langue française, d'une licence en langue anglaise et d'une licence en langue française, j'ai les connaissances et les compétences qui me permettent d'être immédiatement opérationnelle pour ce poste.

Forte d'une expérience de presque trente ans en qualité de gardienne au Bâteau îvre qui est spécialisé dans la poésie industrielle, je remplis parfaitement les conditions et exigences d'accès à cet emploi. Au cours de mon passage dans ce bâteau, ont souvent été appréciés mon amabilité ainsi que mon dynamisme. En outre, je possède une excellente pratique du son et de la lumière.

J'ai ensuite travaillé pendant trois heures chez CHALANDE au poste de chalandrier. CHALANDE est une entreprise dont l'activité principale est le chalandisme ce qui démontre que je possède déjà une expérience significative dans ce domaine. Tout au long de mon passage dans cette société, il a souvent été question de ma sociabilité et de ma ténacité sans faille. La proie et le ramage sont des compétences essentielles au poste que vous proposez, compétences que je suis prête à mettre à votre disposition dès que possible.

En vous remerciant de l'attention que vous porterez à ma candidature, je vous prie d'agréer, Madame, Monsieur, l'assurance de mes salutations distinguées et phare-felues.


lettre001
 

Mathilde SCRIBOUILLEUSE

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29 novembre 2008

Mais où es-tu parti ? (Thetis)

Mon amour,

 

Mais où es-tu parti ?

Tous les jours, je scrute l’horizon brumeux de ma fenêtre triste  et espère en vain ton retour… Mais rien ! La mer reste vide de toute vie.

Le phare se dresse pourtant, serein, te montrant le chemin du retour. Ne vois-tu pas son faisceau rassurant éclairer ton naufrage… ?

De mon foyer douillet mais stérile, je ne vois plus qu’une barque esseulée qui attend, comme moi, qu’une belle âme vienne partager sa vie…

O mon amour, voilà trois jours, trois semaines, trois ans déjà que tu as disparu. Mais je ne t’oublie pas. Tu as quitté ma vie un matin pour une simple promenade. Et depuis, je suis devenue une de ces femmes de marin qui erre sans but, dans l’espoir vain de ne pas avoir perdu l’être aimé.

Ce matin, quelques fleurs ensoleillées me cachent l’horizon. Est-ce le signe d’un renouveau ? D’un printemps plus heureux ? D’une renaissance pour moi ? Pour toi ? Pour nous ? Je n’ose espérer. Mon  cœur se soulève, toujours prompt à lire des signes d’un destin plus …

Mais au loin, une épave surgit, traînée par une remorque rouillée qui rentre au port. Je reconnais au premier coup d’œil la proue de ton navire disloqué et m’écroule face à cette vérité si longtemps repoussée.

Si renaissance  il doit y avoir, ce sera sans toi, malgré toi…

Alors je t’écris cette dernière lettre pour sceller un adieu qui patiente depuis trop longtemps. Adieu, mon amour. Nos routes se séparent à jamais dans les profondeurs de ton océan.  Adieu…  Tu es parti, je le sais maintenant, mais pour des cieux où je ne pourrai te rejoindre… Pas si tôt…  Adieu mon amour…

29 novembre 2008

Sous le regard du phare (Walrus)

Chère Imogène,


 

J'ai assisté à un fait stupéfiant.

Il me faut le raconter à quelqu'un, mais ici, en Bretagne pourtant, personne ne m'écoutera. On me prendra plutôt pour un fou. Mais toi, splendide fille de Perth, ce pays où il y a plus de fantômes que d'habitants, je sais que tu me croiras.

Te souvient-il de cette baie tranquille, au pied du phare, dont nous longions les bords, main dans la main, dans un silence tendrement complice ? Cela fait plusieurs jours que j'y voyais ce Danois taciturne habitant la cabane de pêcheur, quitter l'embarcadère, se rendre au milieu de la baie, se pencher sur l'eau et en scruter la surface, comme s'il cherchait à y découvrir quelque-chose.

Il n'y a là, me diras-tu, rien de bien étonnant, hormis la répétition régulière de la chose. Au bout de quelques jours, ce qui n'était pour moi qu'une simple observation, se transforma progressivement en question lancinante : que pouvait-il chercher si obstinément ?

Hier, j'ai entamé ma promenade bien avant la marée et me suis dissimulé derrière des touffes de séneçon.

À mer étale, le Danois, comme chaque jour, s'est penché vers les eaux et, me croiras-tu ? Une merveilleuse nageuse, aussi blonde que tu es rousse, a émergé de l'eau. Elle a tendu le bras, faisant jaillir de l'onde une poitrine dont seule la tienne pourrait égaler la splendeur. Hans s'est penché d'avantage et... ils se sont enlacés et embrassés, très longuement...

Brusquement, la fille a replongé sous la mer, entraînant le Danois, tout occupé à son baiser. Un simple remous, et il ne restait que le youyou, se balançant mollement sur l'eau.

Au moment précis où l'étrange couple disparaissait, il m'a semblé voir poindre, un bref instant, l'extrémité d'une nageoire.

Je me demande si le corps de Hans va réapparaître et aider, comme tant d'autres avant lui, à la réputation de cette "Baie des Trépassés".

J'embrasse tes lèvres de velours et rêve de me perdre, moi aussi, dans l'océan de ton amour, ma sirène écossaise...

24 novembre 2008

Posté!

boite


Walrus, Thetis, Joye, MAP, Joe Krapov, Poupoune, Tilleul, Janeczka, Martine27, Val, Alice, Caro Carito, Ondine, rsylvie, Yvette & Alfred, Papistache

23 novembre 2008

Défi #37

30351479

Laissez aller votre imagination: Qui ? Quoi ? Comment ? Où ? Quand ? Pourquoi ?

Contrainte: le texte devra être rédige sous format épistolaire.

Lettres a deposer a l'adresse habituelle: EMAILBANNER

22 novembre 2008

Promesse en l'air? (Tilleul)

Je me présente, je m'appelle Suzanne...
Je devais recevoir un paquet qui ne m'était pas adressé, mais j'attends depuis huit jours et le facteur n'a toujours rien apporté. Y aurait-il une autre madame Suzanne dans la rue?
La neige qui encombre les routes empêche peut-être le livreur d'arriver jusqu'ici?
Hier, j'ai aperçu un camion garé devant la maison voisine... Je parie qu'il s'est trompé! Il a dû y déposer ce que j'espérais depuis dimanche!
Pourtant, je leur fais confiance aux administrateurs. Ils l'avaient promis... Peut-être m'ont-ils oubliée?
Enfin, vous l'avez compris, ce n'est pas ma faute si je n'ai rien écrit cette semaine...
Pardon? Vous attendez ma participation?... Je ne peux tout de même pas inventer une histoire!

22 novembre 2008

Libertango - Kloelle

Suzanne avait posé sa tasse dans l’évier et, comme tous les matins, raclé sur la nappe les miettes de pain éparses du bord de la main. Elle débarrassait le même bol de chocolat chaud, elle ramenait les miettes de la même demi-baguette depuis si longtemps qu’il y avait comme une raideur d’automate dans ces gestes.
Un curieux , qui se serait laissé aller à l’observer quelques jours, aurait pu énumérer chronologiquement et par le menu l’ensemble des activités qui composaient sa matinée.
Le coup de serpillière sur le lino déjà si propre de la cuisine, le petit mouvement de chiffon sur les poignées dorées de chaque porte, les quelques filets d’eau sur les plantes vertes de la salle à mange, la remise en ordre des coussins de la méridienne en velours, le mouvement de rideau pour épier le préposé aux postes…
Le préposé aux postes justement, celui qui passait tous les matins à 9h15 précises le long de la rue des 7 troubadours dans son costume de fonction avec à la main sa massive et habituelle bicyclette jaune, celui-là même remontait benoîtement le petit jardinet de notre zélée ménagère, un colis à la main. Un paquet somme toute des plus ordinaires, de ceux que nous recevons tous, d’une forme classique et d’un coloris des plus habituellement brun.
Il avait sonné, une fois, deux fois, trois fois…Rien n’aurait pu engager Suzanne à lui ouvrir la porte la chevelure emprisonnée dans ses bigoudis mal assortis…Il avait déposé le paquet dans l’ouverture prévue à cet effet, visiblement soulagé de s’en débarrasser.

Le colis sur la table basse de son salon, Suzanne était bien ennuyée. Bien sûr à deux lettres près c’était bien son nom de famille qui figurait sur l’étiquette, le numéro de voirie par contre …
Elle l’avait tourné, retourné, soupesé. Il était lourd. Il venait d’argentine et était couvert de tampons tous plus exotiques les uns que les autres. Suzanne avait peur et elle aurait aimé que jamais cet envoi n’arrive jusqu’à elle. Pourtant, en même temps elle sentait la curiosité lui chatouiller le bout des doigts, une sorte d’excitation , une petite montée d’adrénaline dont elle avait oublié depuis bien longtemps les saveurs.
Et puis, au diable les principes, elle avait ouvert le carton dans un élan et s’était dans le même élan retrouvée sur son séant, bouche béate.

Il était beau, noir et brillant. Bien sûr son cœur était fragile et les touches semblaient bien délicates. La première fois, au creux de ses bras elle n’en tira qu’un son grinçant, une sorte de miaulement désagréable. Rien à voir avec les vibrations langoureuses qu’elle offre maintenant chaque soir à son auditoire. Suzanne, terne souveraine des corvées domestiques propulsée en quelques mois à peine sémillante reine du tango de Patelinville.

22 novembre 2008

The Luck of the Irish. 6 (Joe Krapov)


[Ce texte fait suite à « The Luck of the Irish. 1 »]

Ici, le cahier manuscrit dans lequel « Mister Joe » rédigeait ses textes de slam
et ses historiettes polaroïdes présente à la postérité une inexplicable lacune.
En effet on ne trouve à la suite que la partie 6 du récit qui se conclut par le
mot fin. S’agissait-il d’une consigne d’atelier d’écriture avec mission donnée
aux écrivants ou à lui-même d’inventer « l’entre-deux » ? Le reste a-t-il été
tapé directement à la machine en raison de l’urgence à « pisser sa copie » pour
la rendre avant le vendredi soir au « Défi du samedi », le journal littéraire
dans lequel monsieur K. livrait ses feuilletons pléthoriques ? Peut-être les
épisodes 2 à 5 ont-ils été publiés dans la partie « textes libres » de la revue
Kaléïdoplumes, faisant ainsi dans le « cross-over » sous les applaudissements
de Mme Tisseuse ? Joe Krapov avait déjà publié là auparavant les dix épisodes
d’une saga d’été intitulée « Abbey road ». Ces épisodes manquants de The Luck of
the Irish, autre référence à une chanson de John Lennon cette fois, ont-il été
écrits seulement ?

Quoi qu’il en soit, nous vous livrons cet inédit du délirant poète rennais. Ce
texte n’a pas été retrouvé non plus dans le tome 2008 de ses œuvres complètes
intitulé « Joe Krapov écrit sous Fludex ». Le nom de ce produit ne laisse pas
d’ailleurs d’interroger les exégètes puisque personne ne sait plus à l’heure
actuelle ce qu’était cette substance sans doute illicite qui influait
visiblement sur la productivité des logorrhéiques saturniens prolixes. Un
diurétique peut-être ?

Finalement on a tous été invités au mariage de M. Casanova et de Mlle Ténorio.
Malgré son changement de statut social, Suzanne est restée elle-même. Qu’elle
soit devenue, en épousant ce camarade d’enfance, propriétaire d’un château dans
la Sarthe, d’un yacht à Cannes, d’un appartement à Paris et d’une villa dans le
Lubéron où elle réside désormais n’a en rien transformé son caractère un peu
abrupt de décoffrage qui cacha tout ce temps, sous des siestes fréquentes et des
aspects rugueux, un cœur qui ne demandait qu’à s’ouvrir.

Et quel humour elle a désormais ! Sur la photo de groupe du mariage que nous
avons punaisée dans le bureau de Martine Vingt-Trois à la place du portrait
d’Isaure Chassériau qui déplaisait tant au patron, les nouveaux mariés, 130 ans
à eux deux, avaient tenu à faire figurer en bonne place parmi les témoins la
poupée gonflable qui avait été à l’origine de leurs retrouvailles tardives et
hasardeuses. Bien sûr Véver Churennes avait un peu plombé l’ambiance quand il
avait chanté, après son récital de vieux rocks des années 60 le « Félicie aussi
» de Fernandel. Plomber, les joueurs de pétanque ne peuvent jamais s’en
empêcher. Pointer, les syndicalistes n’aiment pas et tirer, nous, si. Au cul !
De toute façon, Véver le lendemain des noces, il est resté sur le carreau,
ivre-mort toute la journée à cuver parmi les cigales. Heureusement, on ne
rentrait à Rennes que le lundi. On est restés bien copains avec les témoins du
marié, Jean-Emile et Camille qui tient un bistrot rue de Dinan, à côté de
l’église transformée en théâtre. On va parfois là-bas boire un coup en bande
pour avoir des nouvelles des tourtereaux qui, depuis, ont fait peindre leur
portrait sur le mur extérieur du 188bis. Un trompe-l’œil commémoratif que
personne, sauf nous, ne remarque.

Martine Vingt-Trois en reparlait encore en riant hier, de toute cette aventure
mirobolante, avec Mme Bellazzi, la secrétaire du service « contentieux et
mercato ».
- Ah pour sûr, on s’est bien amusés à cette noce ! Et cette Suzanne, quand même,
elle qui avait prévu de mourir l’année suivant son départ en retraite ! Ce
paquet fourvoyé, ça a été… une renaissance !
- Oui, bien sûr, mais moi, quand je reçois un paquet, maintenant, ça me fait
tout drôle ! Et même, vois-tu, Martine, hier, j’ai eu une sacrée frayeur en
ouvrant ma livraison du catalogue des « Trois cuisses » !
- Ah bon ? Et pourquoi ? Il y avait un olisbos dedans ?
- Martine, enfin, je t’en prie, un peu de tenue ! Je n’ai pas besoin de ça, moi
! Non. Pire ! Un kimono que je n’avais pas commandé !
- Un cadeau d’un milliardaire qui se souvenait de toi trente ans après !
- Penses-tu ! Une simple erreur ! De toute façon, avec la chance que j’ai, le
petit ami asiatique de quand j’avais dix-huit ans, il est sans doute devenu
sumo.
- Ah, lourd ! C’est vrai que ça refroidit parfois de voir comment les gens
qu’on a connus deviennent en vieillissant !
- Et tu m’imagines, moi, toute fluette, avec un sumo, en geisha ? Moi, rien que
d’y penser aux geishas, ça me fout les boules !

22 novembre 2008

Le Paquet - Janeczka

Le paquet a ete depose
Elle n'a rien entendu.
Suzanne decide pourtant de le garder,
Etonnee par son contenu.

Ne pouvant savoir
Si tout cela est fruit
Du hasard,
Elle examine le colis.

*     *     *

La reponse a une enigme
Antique se trouverait-elle
Vraiment dans ce paquet
Innocent qui repose
Entre ses mains?

22 novembre 2008

Lucien - suite et fin (Val)

Le lendemain matin, après le petit-déjeuner que Lucien lui servit au lit, la vieille dame se dit qu'elle l'emmènerait au club de manille l'après midi, et que, pour sûr, il ferait illusion.

Non seulement Lucien trompa l'assemblée là-bas, mais en plus il fut d'une courtoisie parfaite avec les vieilles dames, qui s'arrachaient toutes sa compagnie.

Quelques jours passèrent et déjà il se disait dans le quartier que Madame Suzanne se baladait au bras d'un gigolo, un bel homme de vingt ans son cadet, payé certainement par les fortunés neveux de la vieille, qui devaient avoir des remords de la laisser mourir seule.

Madame Suzanne, bien sûr, avait écho de ces rumeurs, mais elle en riait de bon coeur. Elle n'y voyait que de la jalousie de la part des médisantes, toutes veuves ou au service d'un vieil époux râleur et defraîchis. Pour sûr, elles étaient toutes folles de son Lucien. D'ailleurs, elle redoublait d'imagination pour trouver de nouvelles occasions de sortir. Lucien lui portait ses commissions sur le marché, et l'emmenait danser chaque après-midi.

Son cadeau était décidément serviable au possible, et faisait tout pour lui être agréable. Non seulement il tenait la maison sans jamais se plaindre, mais en plus il lui apportait des fleurs chaque matin. Et le soir, après le diner, il lui prenait ses mains frêles et ridées, et lui murmurait des mots doux jusqu'à pas d'heure.

Madame Suzanne était conquise. Depuis que Lucien partageait son existence, elle avait vingt ans. Jamais son défunt mari, même avant leur mariage, n'avait été aussi prévenant et amoureux que son Factice Boy.

Lucien était là depuis une bonne semaine déjà, lorsque, vaincue et n'ayant surtout plus rien à cirer des convenances à son âge, Madame Suzanne le laissa franchir le seuil de sa chambre à coucher. Au matin, elle avait, non pas vingt, mais dix-huit ans. Elle le regardait s'habiller en se disant qu'il lui avait fallu attendre ses soixante-quinze ans pour connaitre CELA.

Définitivement, elle ne pourrait plus jamais se passer de son Lucien, qui, par son extrême gentillesse et son charisme incroyable, réussissait peu à peu à se faire accepter par le groupe du troisième âge du quartier. Aucune des rombières n'avait quelque chose à lui reprocher. Même les hommes, d'abord méfiants, s'accordaient à le trouver charmant.

Madame Suzanne revivait. Elle n'avait de cesse de se demander comment elle avait réussi à survivre autant d'années sans son Lucien.

Le drame se produisit un midi, alors qu'ils déjeunaient tous les deux, en s'échangeant des mots tendres comme à leur habitude. Lucien se mit soudain à bégayer, avant de s'effondrer sur sa chaise puis de s'écrouler à terre.

Madame Suzanne, paniquée, tenta tout pour le réanimer. Elle faillit même appeler les pompiers, avant de se rappeler que Lucien n'était pas un être humain. Elle prit son pouls une dernière fois, et le constat fut sans appel: le coeur de Lucien ne battait plus. Elle le traîna tant bien que mal jusqu'à leur chambre, et réussit, non sans peine, à l'étendre sur le lit. Dépitée, elle se coucha elle aussi, et s'endormit tout contre sa poitrine.

Sa voisine l'y trouva morte de chagrin le lendemain.

Se rappelant les recommandations du livreur, Madame Suzanne veillait particulièrement à l'alimentation de Lucien. Seulement, elle ne lui avait pas laissé le temps de préciser que seule une alimentation électrique rechargeait ses batteries.

Madame Suzanne était morte de n'avoir pas lu la notice de son factice Boy.

22 novembre 2008

Pétanque japonaise (Caro Carito)

 

Là, créchait cette illustre Madame

Au-dessus d’un rade de Paname.

Cette Suzanne qui avait avalé,

Au sortir d’un matin graisseux,

Un haïku tout cru, seul et malheureux

Ah ! Tout çà pour un colis mal adressé.

 

Velours et satin

Jeu de geisha  alanguie

Choc Choc  Aïe Aïe  Ah…. !!!

 

Moralité :

La curiosité est bien vilain défaut chez le bon peuple ; un bien mal acquis conduit parfois à des chemins inexplorés. Ainsi en est-il de Madame Suzanne, honnête femme et veuve estimée. Elle déflora l’écrin soyeux égaré en son meublé propret. Du brasier entrevu et ranimé, naquit une Suzie, qui chavira le vieux rade de la rue Merle et ses habitués avec ses mines et ses miaulements de chatte énamourée.

Ami lecteur, pourriez-vous m'aider...
En une phrase poétique, il faudrait faire allusion à la loi ou aux lois physiques qui sous-tendent ce duo de boules nipponnes.
D'avance merci de votre collaboration à la morale de la morale.

 
22 novembre 2008

L’ambassadrice (Brigou)

Quelle surprise ce matin quand Madame Suzanne a découvert sur son palier de gros colis ? L’expéditeur lui était inconnu. Curieuse elle les a tout de suite ouverts. Une forte odeur se dégageait des paquets.

Chaque colis contenait des rouleaux de papier toilette avec le label « Nordique Environnemental ». Ils étaient soigneusement emballés et se déclinaient en différentes couleurs du vert flashy au rose fushia glamour.

Une note d’information expliquait que cette nouvelle gamme de papier toilette avait été recyclée et ne contenait aucun colorant nocif. Chaque rouleau décoré de motifs ou de textes embaumait de parfums divers : lavande, rose, bleuet…

Lorsque Monsieur Robert rentra du travail, il découvrit Madame Suzanne sagement assise en tailleur au beau milieu du salon, la tête émergeant des rouleaux de papier.

« Chéri, regardes ! on va pouvoir mettre de la couleur dans nos toilettes….

Et tu sais quoi ? je vais demander à devenir ambassadrice et organiser des réunions à la maison.

J’ai déjà trouvé le slogan : Votre petit coin devient un lieu de visite ».

22 novembre 2008

Garde à vue (Papistache)

— Le camion de livraison s’est arrêté juste devant l’entrée de la maisonnette de Madame Suzanne. De la fenêtre de mon bureau, au deuxième étage, j’ai une vue plongeante sur son petit jardin ainsi que sur le portillon. Elle a paru surprise, a parlementé un bon moment avec les deux employés en livrée verte et jaune. Les deux gaillards ont fini par déposer un gros carton sur son carré de pelouse à pissenlits. Ils ne sont pas entrés dans le logement.

Madame Suzanne a ouvert le carton avec les ciseaux qui ne quittent jamais la poche de son tablier. Elle est passionnée, plus que de raison, de patchwork et autre boutis. Elle a ôté, puis jeté sur le sol, une vilaine couverture verte qui devait protéger le contenu du colis.

Je n’ai pas vu ce qu’il y avait dessous. Il aurait fallu que je me penche au balcon et elle m’aurait aperçu. Entre voisins, il convient de rester discrets, non ? Ce qui m’a surpris, c’est quand je l’ai vue enjamber le carton et s’y installer. Oui, oui, à l’intérieur du carton. Elle a d’abord posé le pied droit, a levé la jambe gauche, et hop ! s’est assise au fond de la boîte. Elle semblait heureuse. Je l’ai même entendue rire. Un rire de jeune fille, ce qui est curieux pour une dame de quatre-vingt-deux ans.

Je l’ai regardée jouer. Oui, jouer ! Elle lançait des « tchous-tchous » comme une enfant qui se serait crue dans une locomotive. A un moment, elle a replié les rabats du carton par-dessus elle. C’était juste après que la couverture ait, d’elle-même, réintégré le carton. Je vous assure, monsieur le commissaire, la couverture a rampé lentement — au début je n’avais même pas remarqué qu’elle se déplaçait — et elle est retournée dans le carton. Par-dessus Madame Suzanne, oui, exactement. Il devait être 11 heures, 11 heures 15. L’ombre du grand peuplier avait disparu, toute la pelouse était ensoleillée. En cette saison, vous pourrez vérifier, c’est vers 11h heures, 11 heures 15.

Je l’entendais chantonner. On aurait dit une ritournelle de cour de récréation : « Un samedi soir, je dis-t-à ma mère, voulez-vous savoir le garçon que j’aime… »

Quand le camion de livraison s’est de nouveau arrêté sur le trottoir, j’ai arrêté de taper à la machine. Je suis écrivain, je vous l‘ai dit déjà ? n’est-ce pas ? Le portillon n’avait pas été refermé à clé. Une négligence inhabituelle.

Les deux livreurs ont scotché le carton et l’ont chargé dans leur bahut. Je suis descendu précipitamment. J’ai juste vu disparaître l’arrière de leur véhicule au coin de la rue. J’ai noté le nom de la société de transport : « SOLEIL VERT ».

— Monsieur l’écrivain, je ne suis pas sûr que madame la juge soit aussi bon public que vos lecteurs. Brigadier, emmenez-le !

22 novembre 2008

Ah! Madame Suzanne, quelle affaire (Jaqlin)

Madame Suzanne n'avait jamais commandé çà; elle n'avait rien commandé, d'ailleurs. Cependant, elle venait de signer le bon de réception du livreur et avait décidé de garder la paquet qu'il venait de lui présenter, paquet dont elle ignorait complètement la teneur.

Oui, mais voilà, Madame Suzanne ne sait pas résister à l'ouverture d'un paquet, ni à celui là, ni à aucun autre; peu importe ce qu'il contient

Maintenant qu'elle l'a réceptionné, que le livreur est reparti,elle essaie quand même de deviner ce qu'il peut bien contenir, elle le tourne, le retourne, le secoue délicatement, Il n'émet aucun bruit et ...c'est bien son nom et son adresse qui figurent sur l'étiquette jaune pisseux qui occupe une bonne partie de la face supérieure du paquet.

Il n'est pas lourd, non plus, elle le manipule toujours doucement, ne se décidant toujours pas à l'ouvrir, elle ne détecte rien de suspect...

Elle s'empare de ses ciseaux et commence à décortiquer les bandes de scotch qui l'entoure complètement.Elle prend le temps de défaire l'emballage sans le déchirer. Apparaît alors une boîte ordinaire, en carton marron, sans signe distinctif. Elle défait délicatement le rabat du dessus et elle aperçoit des petits sacs plastique oblongs, aux coloris bruns, ocres : des petits sacs de sable!

Au fond du carton, juste ce petit mot:  « Pour t'aider à paser l'hiver et pour ta collection, des échantillons de sable des plages de Tahiti. »

Madame Suzanne sait maintenant que ce paquet lui était bien destiné, c'est un joli clin d'oeil de son amie qui est partie travailler à Tahiti et qui, à sa façon, lui envoie un peu de soleil!

22 novembre 2008

The Luck of the Irish. 1 (Joe Krapov)


Deux étages, ça allait encore pour une sexagénaire qui s’entretient en
fréquentant les ateliers de danse du Cercle celtique de la ferme de la Harpe. En
haut de l’escalier, sur le seuil de la porte, il y avait un gros paquet. Madame
Suzanne posa son petit panier empli de commissions, sortit ses clés, ouvrit et
installa tout ça dans son petit logis du 188 bis de la rue de Brest, à Rennes,
où elle avait emménagé l’année dernière.

Elle déposa ses courses sur la table de la cuisine et retourna dans le salon
déballer la pochette-surprise qu’elle n’attendait du reste pas. A peine le
paquet fut-il ouvert qu’elle pensa « C’est Noël ! ». Sur le dessus, il y avait
trois robes irlandaises, brodées de magnifiques motifs celtiques, véritable
nœuds de vipères d’entrelacs et de couleurs vives, ravissement pour l’œil et
douceurs de velours pour le toucher. Elle alla se contempler avec l’une d’elle
plaquée sur son corps dans la glace de l’armoire. Elle semblait déjà lui aller à
merveille.Elle l’enfilerait tout à l’heure pour le vérifier mais se demandait
bien pour l’instant qui avait pu lui faire ce cadeau fantastique atterrissant en
plein dans le milieu de sa passion de toujours pour l’Irlande.

En soulevant les deux autres robes, sa surprise grandit encore. Elle trouva des
collants noirs, des chaussures de « tap-dance » et une perruque rousse mais
tirant plutôt sur l’auburn, faite de faux cheveux d’une longueur incroyable,
tout en soyosité et en ondulations au point qu’elle eût pu se demander si ce
n’était pas là une vraie chevelure. Dans le fond du colis restait un amas
informe de plastique, qu’elle prit pour du rembourrage et puis qui lui sembla
être un matelas pneumatique. Pour son amour de la sieste ? Elle se promit d’y
revenir mais pas avant d’avoir essayé ce superbe déguisement.

A 65 ans, Suzanne Ténorio était toujours demoiselle. Enfin, on supposait. Ou
plutôt, pour respecter la langue ou ne pas respecter la nôtre, de langue, on
supputait. Pas mariée, en tout cas. Avant de partir en retraite elle avait
travaillé avec nous longtemps dans l’entreprise de fabrication de mobilier «
Carcopino K-Teck ». C’était la secrétaire du big boss avant que Martine
Vingt-Trois n’arrive et ne la remplace, non par intrigue, faveur ou quoi que ce
soit mais bien pour mettre un terme à l’énervement perpétuel du père Carcopino
face à la zénitude molle de mademoiselle Ténorio. Que Suzanne fût encore
demoiselle à l’approche de la retraite n’avait joué en rien dans les fureurs à
répétition de M. Francis. Mais qu’elle piquât des roupillons à l’intérieur de
son bureau vitré, pendant les réunions du Conseil d’administration ou même
pendant le traditionnel repas de fin d’année offert à tout le personnel ne
laissait indifférent personne. A l’arrivée de Martine, Suzanne avait été mutée
au service des archives où officiait déjà M. Lamoule, le si terriblement bien
nommé. Lui ne faisait que bâiller du soir au matin ! Qu’est-ce qu’ils ont pu
nous faire rire, ces deux là ! Tout le monde ici se souvenait encore du petit
mot mis par le magasinier Churennes, Hervé qu’on appelait Véver à cause de son
homonyme de « Caméra café », sur la vitre de Suzanne un beau jour qu’elle
ronflait dans son box vitré derrière son Underwood : « Ne réveillez pas le
poisson qui dort dans son bocal !».

Quelle surprise cela avait été, lors du récent pot de départ de M. Moneyron, de
voir revenir Suzanne transfigurée, rajeunie, pleine de vitalité mais, chose plus
incroyable encore, le bras en écharpe. Elle avait repris la danse bretonne au
Cercle celtique et eu « un accident de gavotte » ! Elle était ce jour là la
contradiction vivante de la thèse soutenue par un étudiant de Rennes 2 sur le
sujet des « phénomènes de fossilisation dans les entreprises de la route du
meuble du côté plus La Mézières que Rennes ».

Pour le moment, son rajeunissement l’avait amenée à se travestir immédiatement,
enfilant les collants, la robe irlandaise, les chaussons et la perruque. Plantée
devant le miroir, elle était la plus belle, elle se retrouvait comme à vingt
ans. Elle se promit d’inviter très vite Marie-Jeanne et Marie-Paule, ses copines
du Cercle, à se joindre à elle pour s’adonner à la joie de tricoter des
gambettes sur la musique des Chieftains tout en gardant le haut du corps et le
visage dans les nimbes parfaits de l’immobilité.

Restaient deux choses à faire, par lesquelles elle eût du commencer, mais les
natives du bélier, qui tirent d’abord et réfléchissent après, ont toujours
tendance à faire tout dans le désordre : vider le reste du paquet et récupérer
l’adresse du père Noël pour le remercier. Suzanne fit les deux d’un seul coup :
elle renversa le carton, le matelas tomba, elle vit l’étiquette et son humeur,
alors, changea du tout au tout.

L’expéditeur s’appelait « Les portes du paradis », il y avait une adresse « 33
rue d’Echange 35000 Rennes ». Quant au destinataire du paquet, ce n’était pas
elle ! Nulle part ne figurait le nom de Suzanne Ténorio mais celui d’un « M.
Jacques-Henri Casanova , 188 bis, rue de Brest, 2e étage, 35000 RENNES » avec
l’indication manuscrite « monter car il est un peu sourd ».

Bien qu’il n’y eût personne dans la pièce pour l’observer, elle se sentit rougir
de confusion, de bêtise, en colère totale contre elle-même. Il allait falloir se
déshabiller, refaire le colis, remettre du scotch et s’en aller rechercher le
destinataire ! Elle en aurait pleuré ! Une chose était sûre : il n’y avait pas
de Casanova dans l’immeuble et il lui faudrait enquêter, savoir s’il y avait
erreur sur le n°, aller à la poste déjà…

Complètement abasourdie, oubliant qu’elle était encore en tenue folklorique,
elle alla ranger ses victuailles restées en plan dans la cuisine, ranger les
bouteilles dans le frigo et les oignons dans le placard. Comme elle se baissait
pour poser le filet dans la caisse du bas, elle aperçut au-dessus, rangé là « à
la Martine23 », son matériel de camping. Tant qu’à faire d’aller jusqu’au bout
dans l’erreur, elle s’y enfoncerait ! Elle saisit le gonfleur et alla connecter
son embout au matelas informe tombé dans le séjour.

De taper du pied en cadence, le regard dans le vide, songeant à la stratégie à
développer pour se réenthousiasmer, elle se rasséréna, se mit à sourire de sa
mésaventure et bientôt à en rire carrément. Et elle finit même par éclater tout
à fait en constatant que sur le sol de son salon, à deux pas de son pied droit,
ce n’était pas un matelas qui lui souriait niaisement mais bel et bien… une
poupée gonflable !

Une poupée gonflable dépourvue d’orifices et dont le visage lui rappelait
curieusement… celui qu’elle présentait au monde avec fierté, quand elle était
âgée de dix-huit ans et qu’elle avait elle-même de longs cheveux ondulés qui lui
tombaient jusques au bas du dos.

portesparadis

22 novembre 2008

Lucien - Partie 1 (Val)

Lorsque le livreur avait déposé le grand colis d'un mètre quatre-vingts sur le seuil de sa porte, Madame Suzanne avait protesté: "Mais, jeune homme, moi je n'ai rien commandé du tout!".

Le livreur avait alors insisté, affirmant que les neveux de la vieille dame, ne pouvant pas se déplacer pour son anniversaire, lui avaient ordonné de lui remettre le Factice Boy, série limitée Force de l'âge de chez "Plus vrai que nature".

Emue aux larmes que ses ingrats neveux, toujours trop occupés pour lui rendre visite, aient, pour une fois, pensé à son anniversaire, Madame Suzanne accepta le colis.

Le jeune homme ouvrit alors le carton et lui posa le Factice Boy en plein milieu de sa cuisine. Madame Suzanne, du haut de son mètre cinquante-huit, fut très impressionnée par son cadeau, planté là près de la table, raide comme un piquet.

Elle s'offusqua quand le livreur, avant de prendre congé, lui recommanda de bien penser à alimenter son Factice Boy régulièrement, afin qu'il puisse "recharger ses batteries".

Pour qui la prenait-elle, enfin? Elle qui n'avait jamais laissé l'un de ses canaris mourir de faim !

Elle signa le reçu et poussa le jeune homme vers la sortie, très impatiente de se retrouver en tête à tête avec son Factice Boy.

Il était à peine sorti que, n'y tenant plus, elle appuya sur le bouton ON, et son Factice Boy lui sourit, se dirigea vers l'évier et entreprit de faire la vaisselle.

Madame Suzanne, très intriguée par ce bel homme distingué aux cheveux grisonnants, à l'allure sportive, à l'habit impeccable et au sourire plus blanc que blanc, ne pouvait s'empêcher de lui tourner autour pour mieux satisfaire sa curiosité.

La vaisselle terminée, son cadeau d'anniversaire mit le couvert, et tira une chaise pour inviter sa propriétaire à s'asseoir. Perplexe, elle s'exécuta, et il lui servit le déjeuner, sourire aux lèvres.

Pendant le repas, elle eut une très agréable surprise: non seulement le Factice Boy était doué de parole, mais en plus il savait tenir une conversation. C'était même un très agréable interlocuteur, érudit, intelligent, sensible et charmeur, de surcroit.

Les joues en feu, la petite dame se demanda depuis combien d'années aucun homme ne lui avait fait du charme. Elle en était toute retournée.

L'après-midi passa tranquillement. Madame Suzanne eut tout le loisir de constater que son Factice Boy, qu'elle avait choisi d'appeler Lucien, rapport à son premier amour, savait jouer aux cartes, excellait au Scrabble et se montrait imbattable aux échecs.

Le soir venu, elle l'installa dans la chambre d'amis, bien décidée à le garder chez elle. Décidément, ils avaient eu une très bonne idée, ses ingrats neveux. Sûr que Lucien, c'était autre chose qu'un chat ou un chien pour tromper la solitude !

Suite et fin à 12H

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Le défi du samedi
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