Ont piétiné le parquet
Cavalier ; Vegas sur sarthe ; Laura ; TOKYO ; Kate ;
joye ; petitmoulin ; Walrus ; Yvanne ; Joe Krapov ;
Quadrille (TOKYO)
Où est passé notre quadrille ma mie ?
Et ton joli jupon brodé, et tes petits pieds
Contre les miens. Quelque chose t’étonne ma mie,
Quelque chose qui s’en est allé ?
Prends donc mon bras ma mie que les forces te reviennent et la joie avec elles.
Nos souffles portés pas plus léger que nous te souviens -tu ?
La flûte de baptiste, cette innocente musique, il faut du temps pour que ce printemps revienne .
Pour que tes mains si calmes se posent comme une hirondelle sur mon épaule il faut du temps tu sais.
Je regarde amusé ces jeunes gens se tortiller, c’est peut-être par nécessité qu’ils ne se rapprochent plus.
Nous avions moins peur qu’eux. Allons ma mie faire du bruit comme notre quadrille, égarons nous dans les ruelles et d’un pas de paysan comme si nous étions chez nous partout le reste est sans importance ma mie .
Légère panique à l'X
Légère panique à l'X
J'y étais
Pour de vrai
Belle comme un trophée
Là-bas
Au bras
De mon cavalier
Rêvé
Xavier
De la Gambille
En place pour le quadrille
Que nous avions répété
Et tant dansé
Avec les quinze autres couples
Parmi les plus souples
Port altier
Sourire léger
Maquillage appuyé
Souliers cirés
Grande soirée
Nos familles assemblées
Mon père Félix
Anxieux pour son Alix
Ma mère Elena
Si heureuse d'être là
Les parents de Xavier
Qu'on n'avait pas rencontrés
Mais en coulisses
Xavier dérape
Et glisse
Un cri s'échappe :
"Ma cheville !"
Vite de la glace
Plus de quadrille
Je te remplace
S'écrie François
J'ai la même taille que toi
Vite il s'habille
Et prévient Alix :
"En place pour le quadrille
Du bal de l'X !"
Allez François
Les dés sont jetés
C'est toi et moi
Tenons-nous prêts
Sa main
Serre la mienne
Et soudain
Transportée à Vienne
Plus rien ne me sert
De croire être amoureuse
De Xavier
Je suis trop heureuse
Même si je tentais de l'en dissuader
Il voulait se déclarer
Ce soir à sa mère Consuelo
Directrice de Sup de Co
À son père Angelo
Responsable de Sciences Po
J'aurais été obligée
De tergiverser...
Mais François
Surgi du bois
Comme ça
Ce gars
Trouvé trop bien pour moi
Qui nous avait récité
Avec facilité
La tirade de Pantagruel
Qui questionne
Sur mariage
Et cocufiage
Et auquel
Ne lui répond personne
Il nous avait transportés
De rire
Et je ne peux m'empêcher
Encore d'en sourire
(extrait de
Chère Marquise (Yvanne)
Oserais-je m'entretenir avec vous comme avec une amie ? J'ai trop de respect pour votre personne pour avoir cette audace. J'aimerais simplement que ma lettre vous soit un mince divertissement dans l'ailleurs où vous êtes aujourd'hui. Ailleurs où, je présume vous étourdissez les anges par votre esprit et votre talent.
Je n'affûterai pas ma plus belle plume d'oie pour vous écrire. Me croirez vous ? Ces volatiles ne sont plus plumés par de diligentes mains et de plume d'oie il n'y a point. Des machines barbares dépouillent ces volailles en un rien de temps. Ah ! Je vous devine : vous étouffez un petit rire discret derrière votre main joliment gantée de blanc. Je ne vous ferai cependant pas l'offense d'utiliser ce moyen moderne que l'on nomme informatique pour m'adresser à vous. Il reste encore, fort heureusement un peu d'encre au fond de mon encrier, non à vrai dire, de mon stylo.
Madame, si vous voyez le monde depuis le Paradis où vraisemblablement Dieu vous garde près de lui, vous ne cessez sans doute d'être étonnée. Horrifiée même certainement tant notre planète va à vau-l'eau. Mais quand vous tournez votre regard pour ne plus voir ce qui se passe ici bas, comment occupez vous votre temps ?
Vous écrivez encore et encore à votre fille et à tous vos amis, épistoliers fervents tout comme vous. Je vous imagine, penchée sur votre écritoire, tantôt sereine, tantôt triste ou amusée laissant « trotter votre plume la bride sur le cou » pour narrer avec spiritualité et impertinence les potins du jour.
Avez vous retrouvé votre livre du carrousel que vous aviez prêté ? Il me semble que vous l'avez finalement reçu. Il y figurait, je crois la quadrille que votre fille Madame de Grignan destinait à son frère Charles. Je comprends l'importance de cette brochure pour vous. Ne détaillait-elle pas les divers participants présentés par des madrigaux qui commentaient les devises choisies. On y retraçait n'est-ce pas la composition des diverses quadrilles commandées par le Roi avec leurs emblèmes. Ceci pour la fête grandiose, le Grand Carrousel, donnée dans la cour des Tuileries les 5 et 6 juin en l'honneur de la naissance du Dauphin Louis.
Vous dirais-je Madame que « quadrille » - enfin le mot - s'est masculinisé ? Il ne désigne plus un tournoi ou autre spectacle équestre comme vous aviez l'habitude de les vivre. Il est devenu plus tard une danse de salon avec quatre couples formant un carré. Aujourd'hui on parle de quadrille plutôt pour une danse folklorique. Mais je suis sûre que vous poufferiez encore comme alors quand vous contempliez les bourrées paysannes en vous exclamant : « ce sont des postures à pâmer de rire ». Je n'ose concevoir ce que vous penseriez des sauteries d'aujourd'hui !
Mais brisons là Madame. D'aucuns comme Monsieur Proust se moquerait en clamant que j'ai assez « fait ma Sévigné. » Ah ! Une dernière chose cependant. Voyez vous, malgré nos technologies modernes et sophistiquées nous n'avons pas encore réussi à communiquer avec l'au-delà. Et cela me chagrine quelque peu. Je n'ai pas peur de mourir, non, mais j'aimerais savoir ce qui se passe là haut et surtout comment l'on s'y distrait et s'amuse. Un petit billet de votre plume serait le bienvenu. Je vous laisse le soin de choisir votre messager.
Adieu donc, Marquise.
Soudain dans sa vie il fit moche. 5 (Joe Krapov)
- Waoouh ! Ce quadrille des homards m’a tuer ! déclara Alice en se rasseyant.
Et puis, tout étourdie encore par la cavalcade, elle s’aperçut que le voisin à chapeau qui lui avait galamment proposer de gardé son sac pendant la danse n’était plus là.
Son sac non plus du reste. Comment allait-elle faire pour rentré au pays des merveilles sans sa clef ?
Ce petit dessin colorié à l'encre est signé d'Ilarion Pavlovitch Krapov.
Un quarteron d'amoureux en goguette (Cavalier)
« Galer n’est pas jouer ! … Ha, souvenirs, souvenirs : Mi souviens bien, com' ça l'est loin. »
Cinq années de mariage déjà, et un couple d’amis. Avec une grande attirance réciproque pour deux d’entre nous quatre. Du "pourquoi pas si ça leur fait plaisir ...", pour les deux autres, une beauté des îles et un nantais si terne. Samedi soir, un dîner arrosé puis une partie de tarot ennuyeuse.
Cette nuit, nous sauterons le pas - la première fois pour nous. Hugo reste chez moi avec mon épouse. Et moi, le petit nantais un peu anxieux, je m’éclipse vers leur appartement au bras de Suzie, son ange inaccessible, belle comme une vahiné, jolie comme un cœur. Bientôt, nous dansons nus tous les deux. Elle rit à chaque fois qu’elle se regarde au fond de mes yeux.
Elle m’offre ses lèvres. Je résiste. Timidité ? Désir de contrôler la situation ? Peur de me lancer ? Soudain je pense à nos tendres moitiés qui ne lisent pas Victor Hugo. Alors, je la jette sur le divan. "Prends-moi, dis-moi des mots sauvages ! " Avec cet accent-là ces mots-ci rendent fou. Or au fond de moi pointe un petit problème, et plus j’y pense moins ça s’ébranle.
Alors on s’essaye à tout. En vain. Résignés, nous nous endormons enlacés. Soudain, je sens un baiser suave comme un letchi bien mûr, pimenté comme un rougail de mangue. Je me dégourdis à brûle-pourpoint.
À ce moment, un cliquetis bafouille dans sa serrure. Puis alors on se fait grave agonir : "Mais bon sang, qu’est-ce que vous faisiez pendant tout ce temps ! Des galipettes ! Hé ! Faut pas vous gêner non plus ! ..."
Et les cartes tombent, tombent aux sons envoûtants des ségas, tard, tard jusqu’au petit matin.
...
Paroles :
Graeme Allwright - P'tite fleur fanée
P'tite fleur fanée Lyrics: Vi souviens Nénère adorée / Le p'tit bouquet que vous la donne à moin / Na longtemps que li l'est fané / Vi souviens bien, com' ça l'est loin / Vi souviens Nénère adorée / Le p'tit ...
Quand du Quadrille Créole naquit le Séga :
Chassé-croisé (Vegas sur sarthe)
Elle avait pour nom Pétronille
et chaussait du quarante six
me susurrant non sans malice
« Ne t'en fais pas, c'est un quadrille »
L'autre se prénommait Camille
et pesait bien quelques quintaux
me claironnant allegretto
« Patiente un peu, c'est un quadrille »
J'ignorais tout de cette fille
elle me dit « Moi c'est Lucien »
c'était un chiropraticien
les touchers c'est pas du quadrille !
Le hasard s'appelait Germaine
rompue aux danses de salon
et m'affirma avec aplomb
« Vois-tu où le quadrille nous mène ? »
Quadrille (Laura)
Ce mot m’a tout de suite fait penser à Constantin Guys et à Baudelaire, même si je n’ai pas trouvé d’œuvre ressemblant à un quadrille de cet artiste mais je remercie le défi du samedi de me replonger dans cet univers moderne de tableaux parisiens. Quand je me remets dans « Les fleurs du mal », Nerval arrive avec son monde de théâtre et c’est là que surgit Eugène Lami qui fut (entre autres) décorateur et a dessiné le quadrille de Marie Stuart. Lami a aussi dessiné « La nuit de mai » que j’ai sans doute vue au Château de Malmaison. De mot en nom et de nom en lieu, je vous emmène à Pantin sur les pas de Nerval qui y avait vu des « quadrilles joyeux. »
Quadrille (petitmoulin)
Des mots bien lavés
Dansent un quadrille
Au seuil de la pensée
Ceux figés
Dans le carcan
De leur habit
Du dimanche
Ceux qui lèvent à peine
Leur jupon
Et laissent au mystère
Son mystère
Des mots inconnus
Les pieds liés
Aux racines
D'une autre danse
Tremblent au bord des lèvres
Et loin
Très loin
Des mots enfouis
Dans leur nudité
Avancent pas à pas
Et entrent par surprise
Des mots
Qui se taisent
Et sommeillent
Sur la magie
Du silence
Sonnez le boute-selle ! (Walrus)
Initialement, j'avais choisi "Quadrige". Vous connaissez : cet attelage de char à quatre chevaux (non pas Renault !) de front.
Mais je vous ai vus venir : immanquablement vous alliez me ramener Ben Hur et sa course de chars et je déteste Charlton Heston.
Donc, j'ai opté pour une sonorité voisine : "Quadrille" !
De toute manière, le "Quadrille des Lanciers" étant le seul qui me soit connu, on reste dans la cavalerie, d'où le boute-selle.
Pourquoi je connais le quadrille des Lanciers ? Parce que dans mon patelin (Charleroi) de l'immédiat après-(dernière)guerre, on le dansait encore régulièrement. Aujourd'hui, je crains qu'en dehors du gala annuel de l'école polytechnique de Paris (l'X pour les connaisseurs), on ne le danse plus guère avec ses cinq figures : 1. les tiroirs, 2. les lignes, 3. les saluts, 4. les visites, 5. les lanciers.
Si vous creusez un peu, vous apprendrez qu'il a été imaginé à Dublin au début du 19ème siècle et qu'importé en France, il faisait fureur (mais non pas Führer) à la cour impériale de Napoléon III (le Petit, si j'en crois Hugo).
Quoi ? À quoi ressemblait un lancier de l'époque ? Facile, y a qu'à demander :
Comment ? Il n'a pas de lance ? Et alors, est-ce que les pompiers portent une pompe ? Non, sérieusement : normal, lui, c'est le chef, il porte un sabre, les lances, c'est pour le petit personnel tout flou au fond de l'image.
Ce qui est étrange, c'est qu'à l'époque de cette enfance que j'évoquais plus haut, deux autres danses, bien moins compassées que le quadrille, faisaient elles aussi un malheur : la danse atomique , sans doute en souvenir d'Hiroshima et la danse du Spirou. Deux trucs assez remuants. Remuants au point que dans certaines communes on avait fini par les interdire (c'étaient toujours les danseuses qu'on projetait vigoureusement qui se ramassaient sur le "dancing floor" comme on dit aujourd'hui).
Bon, c'est pas tout ça, faut que je vous laisse, j'ai un tiroir à ranger !
Info
Depuis samedi, Canalblog n'envoie plus de message de notification lors de la parution de commentaires à ceux qui en ont fait la demande. Le problème a été signalé (par deux fois). Nous espérons que ça va s'arranger rapidement.
Ont eu le feu vert
Laura ; TOKYO ; Lecrilibriste ; Cavalier ; Kate ;
Vegas sur sarthe ; Joe Krapov ; Walrus ; Yvanne ;
petitmoulin ; joye ;
À ma Grand-Mère (TOKYO)
Une fois par mois, ma grand-mère et moi allions-nous asseoir sur la terrasse du glacier.
Elle ne commandait que des glaces à la pistache, elle était comme ça, elle avait ses habitudes. Elle portait souvent du bleu , et le foulard offert par mon grand-père recouvrait ses frêles épaules. .
Elle fuyait la cruauté du soleil sous un grand chapeau de paille, orné d’un ruban blanc qui s’envolait à chaque coup de vent .
Elle le retenait avec sa main gantée qui laissait entrevoir un bras jauni par son grand âge.
Elle ressemblait à un sablier qui a fait son dernier tour et qui laisse passer les grains de sable sous nos yeux. Je rapprochais la coupe à glace du bord de la table pour que sa petite main tremble moins.
Jamais ,elle n'a exploré un autre parfum , comme si sa recherche, s’était enfin arrêtée là autour d’une pistache .Son monde avait tellement rétréci qu’elle avait l’air d’une lueur qui s’était assoupie sous un brin de muguet .
Dans ce crépuscule je m’acclimatais à sa voix douce et calme et il m’arrivait de finir sa coupe à glace à la pistache. Cela l’amusait beaucoup de voir ma gourmandise et son sourire illuminait ma journée.
Aujourd’hui je suis venue sans elle, je trouve une douceur nouvelle à savoir que nous avons été là à déguster une glace. Grâce à elle je m’inscris dans la grande horloge du temps.
Elle m’a appris cette retenue à goûter les heures dans une chaude après-midi d’été.
Printemps (Yvanne)
Pâquerettes aux corolles nacrées
Iris d'eau au cœur de velours
Scille aux clochettes bleues étoilées
Trèfle champêtre rouge incarnat
Aubépine symphonie en rose et blanc
Campanule mauve ou bleu de nuit
Hellébore vénéneuse aimée des poètes
Eglantine timide rose des fossés,
modestes fleurs sauvages, discrètes et fragiles, vous parsemez les haies, les prés, les sous bois, vous courez le long des chemins creux pour égayer tous les verts du printemps. Ce printemps de toutes les promesses qui m'entraîne dans son sillage sur les sentes parfumées. Bonheur !
Ne me demandez pas pourquoi (Lecrilibriste)
Ne me demandez pas pourquoi
Le noyer échevelé
Las de sa nudité d’hiver
Sortira de sa nuit
Pour se vêtir d’anis
ou peut-être bien de pistache
pour taquiner ses noix
Et les jonquilles à ses pieds
S’étireront jusqu’à n’en plus pouvoir
Simplement pour voir
barboter les canards
dans l’eau de l’étang vert
autour des nénuphars
Ne me demandez pas pourquoi
Les mots s’échappent
quand je veux les attraper
ils restent sur le bout de la langue
Et jouent à se cacher
Quand je cherche pistache,
Il m’arrive moustache
mais je n’arrive pas à trouver
l’exactitude qui se cache
Et de guerre lasse
Quand je cesse de les chercher
Les voilà qui caracolent
Alors que je les ai remplacés
Ne me demandez pas pourquoi
Les hommes se font la guerre
Epuisés, l’espérance au bout du fusil
Ils traquent, Ils tirent, ils tuent
ils tombent par milliers
Et mordent la poussière
Etreignant dans un dernier sursaut
Leur espoir de victoire et leur mère patrie
Morts, perdus, mais sortis de l’enfer
par-delà la mitraille Ils s’en vont dans les nues
soulagés de n’entendre plus
les bombes qui explosent
Et les cris de misère
Sous la pistache d'argent (Cavalier)
Dans le bruissement des feuilles flétries,
Frigorifiée sous ton châle chatoyant,
Griffant l'air de tes ongles vernis verts,
Tu suis l’ondulation lente des blés d’or.
Sous le halo de la parcelle fumante,
Tu l’as cachée, la pistache d’argent,
Celle semée au prélude des sources …
Mais soudain, la courbe de sa coque fait craquer
Et disloque la vallée aux empreintes des cours d’eau :
C'est un nœud sur ta tresse céladon qui se fissure.
Et il s’écarte comme une plume
Tout au long de son calame de mystère,
Comme une imprévisible romance
Cachée à l’ombre de troncs belliqueux
...
En piste, à la tâche ! (Kate)
En piste, à la tâche !
- Salut Vincent !
- Salut Didier ! Un café...
- Double et un verre d'eau, etc.
- Super !
- Tiens. Ça va ce matin ?
- Oui, un peu de boulot mais pour mon bouquin...
- Ah ? Les églises ?
- Les saints, les paysages, etc.
- Eh ! Ton téléphone !
- Merci !
Qui c'est encore ?
- Allô Vincent ?
- Hein ?
- Vin-cent !
- Oui, Jean-Mi ! C'est vendredi...
- Juste un truc, s'il...
- Je suis en congé, non...
- Allez, Vince !
- J'peux pas j'ai piscine !
- C'est urgent...
- C'est quoi ? Pas les fruits encore, hein ?
- Oh, juste P comme pistache.
- C'est-à-dire ?
- Quelques lignes...
- Non !
- Comme elles te viennent, ce que tu veux !
- Mais là, je suis sur tout autre chose, alors non, désolé.
- Vin-cent !
- Bon, j'ai compris. C'est pour quand ? Avant-hier ?
- Ce soir, seize heures.
- Seize heures trente alors. Je raccroche et je vais aller pister des pistaches après avoir coursé les quetsches...
- Merci ! Écris ce que tu veux.
- Sur la pistache ?
- Tu m'as bien entendu, salut l'artiste, en piste !
Je suis abasourdi : "En piste !", il se fiche de moi, le Jean-Mi... À la tâche, plutôt !
- Ton café ? Je te le réchauffe ?
- Non, merci, ça va Didier. Tu as des glaces ?
- Quel parfum ?
- Pistache !
- Non, je ne fais plus...
- Pourquoi ?
- Parce que ce colorant vert est trop chimique et j'ai eu des réflexions comme quoi les "vraies" glaces à la pistache seraient plutôt blanches et n'auraient pas le goût d'amande mais celui de la pistache et nanani et nanana... J'ai chocolat, café, vanille et rhum-raisin, du classique. Tu veux quoi ?
- Juste un autre café, un petit.
Alors adieu la glace à la pistache bien verte de mon enfance ! Reste le goût des pistaches ramenées d'Iran par mes voisins, il y a bien longtemps...
Pistache : en piste, à la tâche ! Je fais du sur place, là. Alors en vrac : "pistache" me fait penser à Eustache. Forcément puisque je suis dans mon dossier sur les églises, leurs noms, pourquoi, comment et où, etc.
Eustache, mais qui es-tu avec ton nom de petit homme vert ? Ah ! Un grec dénommé Placidas au départ et renommé Eustache par la suite pour récompense... Tiens, il pleut... Et les gens arrivent pour l'apéro, c'est déjà l'heure, zut !
- Tu veux manger, Vincent ?
- Oui, comme d'hab' !
- J'ai bavette, frites, salade.
- OK, à point.
- Un verre de Minervois ?
- Il est bon ?
- Super !
- Et j'ai terrine de lièvre aux pistaches, ça te dit ?
- Non, non, merci...
"Pistache" et "Eustache"... avec ça, je vais pas aller loin... Et si j'allais voir dans la galerie photos ? Je ferme le dossier "églises" et j'ouvre le dossier "vacances".
Ah, Sète en avril, c'était super, même si le temps n'était pas toujours au top, je m'y revois encore escaladant le Mont Saint-Clar : l'ascension, la vue, les parfums de végétation le matin, la lumière, la fraîcheur, le surplomb et la chapelle... Et puis les parents qui voulaient absolument que je passe les voir au Cap d'Agde. J'ai fait le détour pour découvrir ce lieu où la pluie et la grisaille avaient pris le dessus, ça arrive.
Pas question d'aller jusqu'au Mont Saint-Benoît et juste au loin apercevoir le quartier Saint Martin. Zut pour les photos que j'avais prévu de faire...Mes parents parlaient tout le temps et les quelques photos que j'ai réussies sont celles de la boulangerie Saint-Benoît, à côté du parking et, quand on était attablés à la pizzeria sous la bâche, au son de la pluie, le glacier Saint Martin..
Un peu Rimbaud ce jour-là, un peu illuminé, un peu ailleurs, surtout, ne rêvant que de tendre des fils de clocher à clocher... Mais rien que les couleurs criardes des glaces pour touristes, qu'une boulangerie faisant ostensiblement un clin d'oeil au patrimoine... Quelle ironie !
- Vincent, t'as fini d'écrire ?
- Oui, j'arrête, c'est bon, merci pour le plat !
- Je te prépare une glace ?
- Non, merci, je vais à la pistoche !
- Cool !
(*) extrait du livre