Capodastre (TOKYO)
C’était au temps où la paille jonchait le sol de la chambre étable.
Le souffle chaud de l’âne se mêlait aux doux ronflements des vaches.
La chambre est basse, noire de fumée et les murs sentent la chaux.
Les poutres servent de ciel et un vieux capodastre les enserre dans sa mâchoire d’acier.
On dirait qu’elles chantent comme des cordes la naissance qui vient.
Une vielle lampe à l’huile brille comme une âme.
Mystère , mystère que cette naissance.
Marie ne dit rien du père, qui est donc ce fils, un vaurien, alors que dehors l’aube est encore noire, on sait déjà la nouvelle partout.
Une clochette de vache rumine dans sa barbe de lait et s’accorde à dire c’est le christ qui nait.
Jésus nait dans un cri d’oiseau contenu dans un capodastre d’étoiles.
Les Rois mages sont en chemin, à l’arrière-plan vaste soupirs maternels de marie qui sourit à l’enfant.
Quelle est douce la souffrance des mères.
On apporte un grand saladier de vin chaud tout fleuri de citrons. La sagefemme soulève l’enfant nu à bout de bras et désigne au centre de son corps le rire des anges.
Le christ dort, l’osier du berceau lui tresse une auréole d’or et ce bout de matelas est un épais nuage.
Une odeur de ventre monte dans l’étable un mélange de chair fraiche de lait et d’aubépine.
Ses yeux sont hermétiquement clos, , la qualité de ses cils défit toutes les finesses, sa petite narine, sa narinette de nacre se recroqueville dans sa perfection .
Un peu de poussière d’étoiles au creux des fossettes trace que l’enfant arrive du lointain.
Jésus dort dans les bras de sa mère, et tous les capodastres du monde s’accordent à manger le soleil pour qu’il n’ait pas trop chaud dans l’étable.