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Le défi du samedi

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13 février 2010

Haïti mon ami (Venise)

J’étais devenu une infirmité mortifiante, sous les gravats du monde.
Je n’arrivais plus à me représenter un oiseau, l’air marin de ma plage
Et le visage de ma mère.
Une mélancolie heureuse montait de la poussière de l’école qui s’était écrasée
Sous ma peau. L’heure était-elle matinale depuis le bruit assourdissant de la terre
De ma terre haïtienne qui tremblait encore sous mon corps gisant.
Je pensais que toutes les montagnes avaient douté de nous.
Je regardais dans cette obscurité mes pieds écrasés par les poutres du plafond de ma classe
Je soupirais à fendre l’âme, quand une MAIN effleura mes cheveux.
Je n’existais plus et soudain cette main m’appelait à la vie.
Je luttais contre une terrible envie de dormir, mais je saisis cette main gravée dans ma rétine. Voilà, pensais-je, à quoi mènent les études à être enterré vivant jusqu’à ce qu’une main grosse comme la silhouette d’un moineau vous tire d’affaire.

Cette main d’une pompier étrangère faisait le pont entre deux mondes.
Une main libre et fourbue et la mienne rongée par le désespoir au cœur d’un monde qui m’appelait à vivre et qui me criait courage.

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13 février 2010

J'aime pas les nuits noires (Vegas sur Sarthe)

Je me disais bien qu'à force de se pencher sur l'horizon la nuit finirait par tomber... et elle tomba, brutalement, dans un silence assourdissant. Non pas une nuit câline, nuit d'amour comme chantaient mes vieux mais plutôt une nuit d'encre de Chine qui vous poisse les yeux et les doigts comme au cours de dessin de monsieur Mangin.
J'aurais dû comprendre qu'on était entrés dans le tunnel, moi et mon engin si j'avais eu le temps de déchiffrer le panneau "Bout du tunnel: 300 mètres", mais j'étais bien trop occupé à maîtriser le bolide, une trottinette BMX flambant neuve que j'avais trouvée au paravent ou plutôt au pied du sapin de Noël et que je venais tout juste de dompter après moultes ruades intempestives et quelques cabrioles sanglantes.
J'étais pourtant debout sur le frein et l'impression qu'on allait bientôt atterrir me confirma que le tunnel était en pente et que le bout du tunnel était bien plus bas que le haut... enfin les trottineurs me comprendront.
Je maudissais mes vieux d'avoir fait l'économie d'un frein à tambour et d'un éclairage quand j'abordai sèchement, la semelle collée au bitume, ce qui ressemblait bigrement à un virage; je dis cela à cause des gerbes d'étincelles jaillies sur mon aile gauche et de cette sensation d'avoir le cul plus haut que les oreilles!
C'est à cet instant que je l'ai senti sur ma main droite, cet étau glacial qui me clouait fermement au guidon et nous faisait zigzaguer de tous côtés. Horrifié je sentais dans mon cou le souffle rauque et baveux du monstre qui allait soudain m'engloutir dans les ténèbres et qui enfonçait ses griffes acérées en ricanant.
A quoi bon lutter contre cette poigne brutale et soudaine qui menaçait un équilibre déjà trop précaire?
J'allais m'abandonner à mon triste sort quand je reconnus ce ricanement... je l'aurais reconnu entre mille: c'était celui du grand Mangin, le fils du prof de dessin mais surtout l'amoureux de Juliette à qui j'avais volé un baiser le matin même à la récré.
"Tu vas le regretter" hurla t'il en arrachant le guidon de la trottinette, et comme je tombais avec lui en croquant au hasard un morceau d'oreille à ma portée, il y eut comme un éclair fulgurant suivi d'un grand trou noir.

J'avais dans la bouche quelque chose d'humide et sucré, plus proche d'une esgourde ennemie que d'un baiser volé et je comptai dans le noir mes abattis avant de me relever; à part un genou couronné et une trottinette bonne pour la ferraille, je m'en sortais pas mal. J'en serais quitte pour un bon savon et une compresse "qui pique", moi qui ne goûtais ni l'un ni l'autre. Mon rival semblait avoir disparu autant que je pus en juger car la nuit de Chine était plus noire que l'intérieur du tunnel.
Je crus pourtant percevoir un grognement d'ours mal léché derrière moi, ce qui eut pour effet de me redonner des ailes et, devinant au loin les lumières des premières maisons, je mis le cap clopin-clopant vers un monde plus civilisé... 
Demain, Juliette saurait tout et elle devrait choisir !   

8 février 2010

Ont déjà pris contact avec la main inconnue :

MainJoye ; Vegas sur Sarthe ; Venise ; Pivoine ; Pierreline ; rsylvie ; Caro_Carito ; MAP ; Papistache ; Val ; Flamm Du ; Poupoune ; Sebarjo ; Anthom ; Zigmund ; Jaqlin ; Stipe ; Virgibri ; Joe Krapov ; Kloelle ; Tiniak ;

6 février 2010

Le défi #93

Caro_carito et tiniak se sont prêtés au jeu de l'écriture d'un défi. Tiphaine a promis. Les semaines qui vont venir verront éclore ces défis amis.

Cette semaine c'est Caro_carito qui nous jette le gant :

sombre

adresse

6 février 2010

Les compagnons de l'Arbre-Amiral (Papistache)

mondefi92album

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6 février 2010

Surveillance (Zigmund)

zigmund


Monsieur Prince Sans Rire surveille la forêt et ce n’est pas un rigolo… si tu jettes un papier gras, tu risques une amende.

Teste tes dons d’observation( et la vision de près de ton papi ou de ta mamie )et trouve le seul qui rit…

Si tu as trouvé c’est bien, mais ce n’est pas une raison pour salir la nature !

6 février 2010

L'homme tronc‏ (Jaqlin)

jaqlintronc

6 février 2010

Tête-en-bois (MAP)

Coucou, bien le bonjour à toi
On me surnomme  Tête-en-bois !
Si tu me suis
par monts, par bois
tu apprendras
à chaque page
de ce très grand livre d’images
des mots nouveaux
des mots tout beaux !
Il te suffit de me chercher
dans les coins
où je suis caché !
Allez en route,
en avant toute !

T_te_cach_e_1

Je suis caché
dans un tronc d’arbre !

T_te_de_bois_2

Je supporte

ce tas de bois !

T_te_en_bois_3

au coeur d'un ancien heurtoir ...

T_te_en_arbre_4

... en décor d'un mur de cabane ...

T_te_en_arbre_6

glissé sous une palissade ...

********

A suivre dans le deuxième album de la série :

"J'apprends le vocabulaire avec Tête-en-bois !"

Aux éditions DUCHÊNE

6 février 2010

L'oseraie (Walrus)

Il y a bien des lustres de cela, à l'écart d'un petit village perdu, vivait un sabotier doublé d'un satyre. Vous en conclurez que l'homme était vieux, avez-vous jamais vu un autre adjectif que "vieux" associé à "satyre"?

Son grand plaisir était de lorgner vers les gamines du village lorsqu'elles s'ébattaient dans les prairies jouxtant les fermes.

L'ennui, c'est que connu comme il l'était, il n'avait guère l'occasion de le faire de près, à la moindre tentative d'approche, il se trouvait comme par hasard un adulte pour surgir d'on ne sait où.

Jusqu'au jour où une idée lui vint : les fossés de drainage séparant les prairies étaient bordés de saules têtards servant à produire l'osier.

Une nuit, ayant chargé sur une charrette à bras une lanterne sourde, une scie de bûcheron, quelques coins de fer, un palan, des cordes et une hache, il se rendit dans un endroit écarté, s'arrêta près d'un saule et se mit à l'ouvrage.

Il scia l'arbre à quelques centimètres du sol. Il le fit à grand peine : la scie était normalement manipulée par deux hommes sur un tronc abattu. Les coins lui furent bien utiles pour soulager la lame du poids de l'arbre.

Il culbuta le saule sur le plancher de la charrette dressée vers le ciel puis redressa cette dernière en tirant sur la tête de l'arbre au moyen du palan. Tout étant solidement arrimé, il ramena son butin chez lui, tirant l'attelage comme un âne et suant comme un bœuf.

Il rangea tout dans un appentis adossé à sa demeure.

Les jours qui suivirent, il se mit à évider le tronc : ce n'étaient pas les tarières, gouges et autres cuillers qui lui manquaient ! Il réduisit à quelques centimètres l'épaisseur des parois, creusa une petite lucarne pour son visage et fixa un harnais de cuir à l'intérieur du fût.

Le saule était devenu suffisamment léger pour qu'il puisse s'y glisser et le soulever à la manière des porteurs de ces géants chers au folklore des régions du nord.

Une nuit, il alla se poster dans son arbre au bout d'une rangée de saules.

Il attendit longtemps et commençait à s'engourdir dans sa cachette avant qu'il n'entendît dans l'après-midi les voix chantantes et les rires de quelques fillettes. Son cœur battait à tout rompre : elles approchaient !

 Les gamines en effet effectuaient en sautillant une sorte de slalom autour des troncs de sa rangée de saules. Elles approchaient !

 Il allait réussir ! Il les dévorait des yeux, agité de pensées lubriques.

"Dès qu'elles sont à portée, je rejette cette carcasse et hop ! je leur tombe dessus" se disait-il.

Elles approchent, elles sont là !

Il tire violemment sur ses bras pour se libérer du saule... rien !

Il panique, bande ses muscles, tire de toutes ses forces... rien, l'arbre ne bouge pas d'un poil.

Alors, la lumière se fit : c'était le jour de la Sainte Catherine où tout bois prend racine !

D'ailleurs, ne sentait-il pas comme un frémissement dans les fibres du saule ? Oui, la paroi de bois se rapprochait lentement, mais sûrement, il était perdu !

Entre temps, ces saletés de gamines avaient entamé une ronde autour du dernier saule et, mais oui, elles lui tiraient la langue quand elles passaient devant son visage !

Le bois commençait à l'étreindre, à l'étouffer.

Il devint cramoisi.

Le supplice allait être long...

6 février 2010

L'arbre magique (Sebarjo)

Il était environ vingt heures quinze lorsque je finis de racler le fond ferrailleux de ma boîte de crème Mont-blanc au chocolat. C'était l'heure à laquelle, emmitouflé dans son lit, mon fils m'attendait impatiemment, mais bien sagement pelotonné contre son nounours beanesque. Il se calait contre le cocon cotonneux que forme son édredon moelleux, les doigts de pieds en éventail.

 

Enfin, j'entrais dans sa chambre plongée dans une semi-pénombre. Seule une lampe magique faisant tournoyer jusqu'au plafond des formes polychromes improbables éclairait son antre secrète. Il me tendit tout de suite un livre :

 

-Dis papa, tu me la racontes ?

J'examinais son choix avec une grimace que je m'efforçais de masquer.

 

-Oh non mon chéri, écoute plutôt celle-ci, c'est une histoire tellement amusante ! Tu vas voir, ouvre grand tes o...

-Oh non !!! Y'en a assez de tes histoires soi-disant drôles !!! Tes blagues nulles !!! tes jeux de mots débiles !!! Nous, on veut une vraie histoire !!!

-Ah... et c'est quoi une Vraie histoire ?

-Une histoire qui fait peur !!! Avec un loup ou un ogre ou plein de méchantes sorcières !!!

-Oui et des vampires et tout plein de monstres... Désolé, fiston, mais je ne cultive pas l'horreur. Je ne suis ni Jack ni Fritz qui nont pas leur Lang dans leur poche ! Je n'ai pas leur éloquence pour te narrer ce genre de...billevesées ! Je vais donc te souhaiter une bonne nuit et on se passera de l'histoire pour ce soir. Allez ! dors bien ! Et vite ! Bon sang de bois !!!

 

Et je sortis, un peu fâché et surtout énormément vexé !!!

 

Mon fils se retrouva un peu abasourdi, seul avec son nounours, lorsqu'il entendit une voix qui sortait de son lit !!!

 

-Moi j'ai une histoire à te raconter.

 

Il se pencha et vit que c'était son lit tout en bois qui lui adressait la parole ainsi.

 

-Mais... Tu parles ???

-Eh oui qu'est-ce que tu crois !!! J'étais un arbre auparavant !!! Un beau chêne majestueux !!! Et même les hêtres de piètre condition n'ignorent pas que nous, les chênes, avons le privi-liège de discourir !!! Tu n'entends certainement que des grincements lorsque je m'exprime, car les humains, tout comme les glands, n'ont pas le pouvoir de comprendre notre langage.

-Ca alors !!!

-Il suffit de savoir écouter. Ce que tu viens certainement de faire, car ton père a su te montrer de quel bois il pouvait se chauffer !!! (Rires en chêne..) Hum... Bon si tu veux, moi, je peux te raconter une histoire... Qu'en dis-tu ???

-D'accord.

-Eh bien voilà, il était une fois... Moâ ! Le roi des chênes - celui qu'aucun de mes semblables ne zappait - qui vivait et trônait majestueusement au milieu d'une immense et joyeuse forêt. J'avais un de ces sourires !!! Tu aurais vu ma bouille... Un tronc joyeux et ouvert, bien loin de ceux qui larmoient dans les cathédrales !!!

J'avais plein d'amis et on m'adulait. Insectes, rongeurs et passereaux, tous me faisaient fête ! J'accueillis en mon sein plusieurs couples de geais, piverts, écureuils qui avaient élu domicile sur mes plus hautes branches. J'admirais les saisons qui défilaient, humant le vent de l'hiver en chantant avec les sapins verts ; me chauffant les bourgeons le lundi au doux soleil de printemps ; tapissant le sol pour l'égayer de mes écritures folles, ô mes feuilles mortes, à l'automne venu ; me dénudant dès l'été caniculaire pour bronzer un peu. Ainsi, je vécus heureux plusieurs siècles qui me paraissent des minutes depuis ce jour où je fus réduit en un ridicule lit... Car vois-tu, un beau matin, des hommes casqués envahirent notre forêt et je fus de ceux qui furent décimés par ces chevaliers massacreurs à la tronçonneuse... On me coupa, on me trancha. On me démembra. Puis, mes restes valides furent emportées dans un immense camion, étouffant sous la charge de mes congénères et furent déposés dans une scierie. C'était un endroit aux stères !!! Une horrible et gigantesque guillotine qui me révoltait !!! Quelle bûche de devoir finir ainsi !!!

Et l'on finit par me transformer en misérable couche pour humain !!! Voilà comment j'ai atterri par malchance ici, dans ce coin pourri !!! Dans cet endroit terriblement ennuyeux !!!

-Hein ???

-Eh oui mon pauvre petit ... On ne peut pas dire que tu sois particulièrement gai !!!

-Mais...

-Tu ne ris jamais ici !!! Tu ne viens que pour dormir ou faire tes devoirs !!! Ta joie, tu la réserves seulement à ce maudit écran qui encombre le salon !!! Ma seule distraction était d'entendre avec plaisir les histoires loufoques de ton père !!! La seule chose qui me retenait. Mais Môssieur veut du thriller et boude le gag !!! Que tu ailles au diable et tu en auras pour ton argent !!! Moi je m'en vais !!! Et j'emmène ta table de chevet avec moi car jadis ce fut une partie de moi-même !

 

 

Librement inspiré d'un merveilleux album pour enfants de Philippe Corentin

 

 

6 février 2010

Conjugaison forestière (Joe Krapov)

La faim fait sortir le loup hors du bois.

dds92_loup

La foi fera sortir Monseigneur Dupanloup hors du bain.

dds92_dupanloup

L’odeur du cigare de George Sand faisait sortir Aurore Dupin des landes du Berry.


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Le vent de l’aventure fit tomber Alexandre du mât.


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Le péril à bord du navire fait sortir la famille du raton.


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La tarte à la crème sur son habit vert avait fait sortir de ses gonds Jean Dutourd.


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Il est possible que l’absorption du cassoulet de Chevallier ait fait sortir le vent du boulet Laspalès.


dds92_Laspal_s_Chevallier

S’il n’avait pas été malvoyant, le rugueux Homère n’aurait peut-être pas fait  sortir de son imagination les aventure d’Ulysse.


dds92_homere


Se peut-il que la vue du gendarme fasse sortir la main de ma sœur de la culotte du zouave ?


dds92_zouave

A cause de son caractère hitchcokien, la battue des chasseurs aura fait sortir l’oiseau Daphné du mûrier.


dds92_Oiseaux_

Après que le poinçonneur des Lilas eut fait sortir un confetti du ticket de métro de Serge Gainsbourg, celui-ci eut une inspiration soudaine. Le soir même il composa « la Javanaise ».


dds_gainsbourg

Lire les aventures du "Club des cinq" a rendu Françoise hardie.


dds92_club_des_cinq

Mais qui fera sortir Jacques du tronc ?


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6 février 2010

Contes et légendes de nos contrées (rsylvie)

 

Contes et légendes de nos contrées

             

syl1

               

Collection « premières lectures »

 

   

Il était une fois une petite fille appelée Joyeuse, qui aimait à se promener

dans la forêt lointaine, on entend le hibou.

Du haut de son grand chêne qui répond au coucou… »

syl2syl3Une petite fille si rayonnante, qu’elle faisait le bonheur de tout ceux qui l’approchait.

Une fois par semaine elle se rendait chez sa mère grand

dans la forêt lointaine, on entend le coucou.

Du haut de son grand chêne qui répond au hibou… »

Et cette petite fille qui n’avait peur de rien, ni du loup ni du vilain serpent…

 pst sylvie… tu t’égares encore ! »

Joyeuse est guillerette,

 

elle butine de fleurs en fleurs, de buissons en buissons

syl4quand soudain comme une plainte.

-« houlaLA, comme je m’ennuie »

Intriguée la petite cherche vainement dans la direction de la voix, mais ne voit rien.

-«  Et puis j’ai les membres tout engourdis. Que j’aimerais pourvoir m’agiter un peu….. Pas le moindre courant d’air. Rien qui me permette de secouer mon feuillage. Si ça continue mes branches vont devenir de pierre.

HoulaLA comme j’ai mal »

Joyeuse a enfin trouvé d’où venait la voix. Seulement elle n’ose s’approcher du vieil arbre. On a beau être la plus brave des petites filles. Un arbre qui parle, c’est quand même un peu effrayant. Alors elle reste à quelques mètres de lui, et le regarde curieusement.

tiens de la visite ! dit la voix qui essaie de se faire plus douce.

approches petite je ne vais pas te manger » !

 

-« me manger ? non, je ne pense pas,

s5répond la fillette qui n’en était pas à son premier conte magique.

mais, me retenir prisonnière tu pourrais le faire, avec tes branches tentaculaires. »

comprenant qu’il ne réussirait pas à attraper l’enfant de la sorte,

Arbre décide de changer de stratégie. Et se remet à geindre :

-« comme je souffre d’être parmi tous ces sapins. Pas un regard pour moi, surtout quand arrive l’hiver. Tout le monde rêve de trouver le plus beau des sapins. Et moi je reste là, seul abandonné, sans l’espoir qu’une guirlande illumine mes yeux si fatigués de pleurer ».

…. Arbre est bon comédien, des larmes

se mettent à couler le long de son tronc jauni pas les années.

Joyeuse est très émue par les perles cristallines qui coulent des yeux de son nouvel ami. elle n’a plus peur d’Arbre. Elle a bien compris que sous l’écorce bat le cœur d’un brave bonhomme qui s’ennuie et ne demande qu’à se faire des amis.

 

Heureuse de pouvoir lui faire plaisir, elle lui prend une branche et la serre fort contre elle pour le réconforter. Mais en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, la voilà prisonnière des toutes les branches d’Arbre qui hurle de joie du bon tour qu’il vient de jouer à sa nouvelle prisonnière.

-« Ha Ha que je suis diabolique …

 

ha ha que c’est bon… » hurle –t-il de joie.

A l’intérieur du tronc Joyeuse ne comprend pas ce qui vient de lui arriver, et appelle au secours. Mais personne ne l’entend.

 

s6 SI Si, Personne l’entend, lui !

 

(ben oui, c’est un conte magique, alors je fais comme je veux et hop !)

caché derrière un arbre, lutin Personne a tout vu.

Oui, a tout vu

 

pst,,,, y en a pas un parmi vous, qui voudrait bien dire

« ha bon, mais pourquoi l’a tout vu » ?

s7

PERSONNE  ne répond ?

….

ok, je le fais moi même (pst faut vraiment tout faire dans ce bas monde !

bon je vous la laisse dire (et oui, on ne peut compter sur PERSONNE !!)

lutin Personne a tout vu, puisqu’il est toujours là pour veiller sur Joyeuse.

C’est son protecteur. Mais sur ce coup là, il n’a pas été vraiment efficace.

(juste entre nous, je le crois un petit peu amoureux, ce qui pourrait expliquer cela mais surtout pas un mot, c’est un secret)

 

Grand père Merlin va sur’ment le réprimander une fois de plus. Mais l’urgence pour le moment est de délivrer l’enfant. Alors n’écoutant que son courage, il court le plus vite qu’il peut, pour prévenir les habitants du village.

 

Très attentifs aux explications de Personne, les villageois font bloc autour de lui. Pas un ne met en doute la parole de Personne. Depuis la nuit des temps, il y a toujours eu des disparitions plus qu’étranges dans la forêt. Alors maintenant qu’ils en connaissent le coupable, ce dernier allait payer s8pour tous les autres !

 

 

Les uns armés de scies ou brandissant une haches, les autres prêts à mesurer l’envergure d’Arbre afin de répartir équitablement les rondelles qui seraient découpées et rapportées comme trophée de guerre, tous marchent d’un pas alerte vers la forêt.

Arbre est abattu puis taillé en de multiples bûchettes équitablement réparties dans chaque foyers du village.

s9Joyeuse qui s’était perchée sur la plus haute branche retombe comme par magie dans les bras de Personne, qui pour une fois, n’avait pas failli à sa tâche.

c’est pourquoi

depuis cette sombre histoire,

les petites filles sages ne s’aventurent jamais seule dans les bois.

 

Publication aux éditions "feuilles d'automne"

du même auteur, à venir :

s10-"j'ai pas d'chat mais j'ai un chien"

-"je chante faux, mais j'suis gentille "

-"papa, je voudrais pas d'p'tite soeur"

6 février 2010

Paul Le Mariol (Poupoune)

Paul Le Mariol était de l’école l’enfant le plus énervant.

Il faisait le malin du soir au matin et voulait impressionner ses copains par tous les moyens.

Un jour qu’il faisait beau, les enfants faisaient du vélo et des jeux rigolos. Arriva Paul Le Mariol, qui fit sa crâne sur sa bécane et dit « moi la forêt épaisse, à fond la caisse, je peux la traverser, les doigts dans le nez ! »

Il pédala à fond, zigzagua entre les troncs et se vautra comme un étron.

Il fut retrouvé blanc comme marbre encastré dans un arbre. On le retira avec force et son visage resta gravé dans l’écorce. A partir de ce jour Paul Le Mariol devint Paulo L’Idiot et son sourire mauvais devint sourire benêt. Dans les bois il ne fait plus de vélo, mais souvent on l’y voit parler aux oiseaux.

On dit qu’encore aujourd’hui, quand ses promenades l’emmènent jusqu’à l’arbre qui lui fit la cervelle en panade, son visage de bois verse une larme en le voyant.

6 février 2010

Petit Loup Fantasque (Flamm Du)

 

Quatre jours.

Il ne lui reste que quatre jour avant que cette lune-là ne meure. Sinon, tout ce qu’il a entrepris depuis la mort de la dernière lune ne servira à rien. Il ne sera pas digne de devenir un Manicouagan et devra encore rester, pour une année, un enfant. Et ça il ne le veut à aucun prix ! Ce serait la honte pour lui et ses parents.

Petit Loup Fantasque vient d’avoir douze ans et, comme tous les autres enfants de son âge dans la tribu Manicouagan, il a du partir, s’éloigner des siens, prouver qu’il était capable de survivre seul, sans dévoiler sa présence, en harmonie avec la Nature, et accomplir un exploit pendant la durée de vie d’une lune, celle des mûrissements.

 

D’abord, suivant les conseils de son grand-père Ours Sage, il s’est appliqué à s’éloigner le plus possible du territoire de la tribu sans laisser aucune trace. Il a marché deux jours, pour franchir la montagne, puis il a cherché comment franchir la rivière, un barrage de castors, plus loin en amont, lui a grandement facilité la tâche. Il a encore marché toute une journée pour atteindre l’orée de la forêt qui se dessinait au loin. Le soir du quatrième jour, assis près d’un ruisseau, il a contemplé le ciel étoilé et longuement écouté la Nature.

Et il a compris.

Bien gravées au fond de sa mémoire, les paroles de son grand-père, lui sont revenues, comme murmurées par le souffle du vent et le chant de l’eau : « C’est au jour où mourra la lune du temps des mûrissements qu’un jeune loup fou conduira la tribu à l’Homme-Arbre. »

Trouver l’Homme-Arbre, pour y conduire Ours Sage et Faucon Nerveux, voilà son exploit !

Il a si souvent entendu Ours Sage lui conter cette légende, comme le faisait déjà son grand-père. Personne, dans la tribu des Manicouagan, ne sait vraiment qui est cet Homme-Arbre. Mais depuis des années, chaque garçon, espère secrètement, être celui qui réussira à le découvrir. Hélas, pour l’instant personne n’y est arrivé, et cela reste simplement une légende qui fait rêver les plus jeunes.

C’est décidé, demain il partira à sa recherche. Il passe une bonne partie de la nuit à se demander comment y arriver. Au matin, il se mit en route, attentif au moindre signe.

Ce fut d’abord une plume de geai bleu qui le fit changer de direction, plus tard, trois aigles dans le ciel et il suivit leur direction. La rencontre avec un ours brun, puis des cygnes s’éloignant sur la rivière le firent encore bifurquer. Tant et si bien qu’il se retrouva bientôt, à son point de départ, devant la même plume de geai bleu.

Il avait tourné en rond pendant tout ce temps. Comment était-ce possible ?

Il ne peut pas s’être trompé.

Il y a une raison, à lui de réfléchir, de comprendre.

Un peu découragé, il se laisse glisser au pied d’un arbre. Adossé au tronc, il regarde devant lui, cette plume et brusquement, pfft, une seconde et voilà un écureuil qui vient de filer avec, vers un bosquet.

Un autre signe ?

Il reste quelques secondes interloqué avant de se bondir sur ses pieds.

Il vient de comprendre. Il n’a pas tourné en rond.

Il a délimité une petite partie de cette immense forêt. La zone qui contient sûrement l’Homme-Arbre. Il le sait, il est sûr qu’il est là, pas très loin, il le sent. Il ne lui reste plus qu’à parcourir toute cette zone pour le découvrir.

Et il le parcourut, de fond en comble. Il y eut de nombreux moments de fatigue, de lassitude, comme les soirs où il n’a rien mangé, ayant épuisé ses réserves et oublié de les reconstituer, ou celui où il n’a pas trouvé de source pour se désaltérer, trop fatigué pour en chercher une autre plus loin. Un grand moment de découragement aussi, hier soir, quand il a réalisé que les jours qui restaient avant la mort de la lune, se comptaient maintenant, sur les doigts d’une seule main.

Mais surtout, il y a eu ce moment extraordinaire, tout à l’heure, quand, fatigué et désespéré par des jours et des jours de vaines recherches, il l’a aperçu, dans les rayons du soleil couchant, à quelques mètres de lui.

L’Homme-Arbre, étrangeté de la nature qui a dessiné sur le tronc de cet arbre une tête d’homme. L’Homme-Arbre, qui, selon la légende, apportera la prospérité aux Manicouagan.

 

Il est heureux et épuisé, mais rien n’est fini. Encore une dernière chose à faire, pour être digne de devenir un Manicouagan, il lui faut retourner dans la tribu. Il regarde la lune, elle va bientôt mourir, son croissant est de plus en plus mince. Il ne reste que quatre jours. Aura-t-il le temps nécessaire ? Il avait mis quatre journées de marche pour atteindre cette forêt. Et là, il est au cœur de la forêt, il devra sans doute courir presque tout le long du chemin pour rentrer. En aura-t-il le courage ? Dire que ces quatre jours furent pénibles, serait très en-dessous de la vérité, mais qui a dit qu’un exploit était facile ? Il fut le dernier à regagner la tribu, juste avant que le dernier rayon du soleil ne s’éteigne pour laisser place à la nuit sans lune.

Depuis Petit Loup Fantasque, devenu un Manicouagan respecté par tous, a reçu son nom d’adulte, Loup Avisé.

6 février 2010

heyoka‏ (Tiniak)

soyeuse comme un sexe
la prairie indienne en sous-main
propre et pure

le trop plein de sang bleu
d'où viendra l'aigle sioux
lui prête sa verdure

un homme se tient là
comme l'arbre
aussi vieux et sans pieds

il chante, il dit :

wasichu, pauvre fou
mes pieds sont dans le ciel
c'est ma tête que tu vois
c'est ma tête plantée là

écoute wasichu
elle chante pour toi

elle chante, elle dit :

nu sur le Rocher Mère
j'ai vu l'Oiseau-Tonnerre
et je n'ai fait qu'un pas
et j'ai quitté la terre
et je suis heyoka

j'ai pleuré pour ce rêve
quatre nuits
quatre jours
dans l'âge de Tunka

la vérité m'achève
quatre nuits
quatre jours
pour n'en revenir pas

sans la vision trop brêve
de Wakinyan-Tanka

je suis son heyoka
je chatouille la peur
ainsi la peur s'en va
qu'elle aille faire ailleurs
ce qui ne m'atteint pas

écoute, wasichu
si je suis le chaud-froid
c'est toi le fou du roi :

tu ne vois pas mes jambes
tu as peur et tu trembles
quand je t'ouvre les bras

ouvre-les, wasichu
ouvre tes bras en croix
tu auras les mains pleines

tu auras les mains pleines
de la prairie indienne
soyeuse comme un sexe

propre et pur

le sang bleu du rocher
où se tient l'aigle sioux
lui prête sa verdure

lave-t-en, wasichu

6 février 2010

Portrait (Brigou)

Au milieu d’une clairière
Sur un vieux tronc
Un visage apparaît.

Sculpté, dessiné
Le sourire effacé
Des larmes coulent.

L’arbre lui a donné vie.
Sa sève coule dans ses veines.
Son souffle rythme son cœur.

Pleure-t-il
Sur l’absence ?
Sur le manque ?

Personne autour de lui
Mais tant de monde en lui.
Il est seul
Il est unique.

6 février 2010

Jarod et les bestioles (Moon)

Jarod était un ogre terrible qui sévissait dans notre région depuis au moins soixante ans. Il dévorait, dévorait comme tout ogre qui se respecte.  Mais croyez-vous que c'était un enfant rôti son plat préféré ? Non !  Un papa à la broche alors ?  Pas plus ! Une maman en vinaigrette ? Toujours pas !

Jarod adorait les bestioles !

Mille-pattes, cafards, fourmis, coccinelles, punaises, mouches, abeilles, gendarmes,  libellules, au petit déjeuner, craquants sur une énorme tartine.
Grillons, termites, papillons, moustiques, pince-oreilles, chrysomèles, sauterelles, araignées au déjeuner, en de bons gratins fumants qu'il se faisait cuire dans un creux de sa grotte.
Blattes, fourmilions, cétoines, guêpes, taons, phasmes, cigales, puces, taupins, leptures au diner, en soupe épaisse ou en simple sandwich.

Au début, on avait été plutôt ravi de le voir engouffrer des quantités phénoménales de ces bêtes que chacun craignait ou au mieux ignorait. Mais maintenant, c'était un véritable fléau.
Plus un bruit dans la nature, pas la plus petite vibration, pas la moindre stridulation.
Les oiseaux, ne trouvant plus rien à manger, avaient déserté la région.
Les fleurs et les fruits eux-mêmes étaient tentés de disparaitre car seul le vent acceptait encore de transporter le pollen.
Inutile de dire que les hommes avaient oublié le goût suave du miel, que seuls les grands-parents pouvaient encore décrire.

Pourtant personne n'agissait dans ce silence étouffant. Les humains calculaient combien de temps restait à vivre à Jarod, priant secrètement que quelques espèces lui survivraient.
Les mammifères ne voyaient pas encore ce qui les menaçait, les oiseaux n'étaient plus là pour prendre la parole.
Un grand conciliabule des ultimes bestioles eut lieu un soir de pleine lune dans la forêt de Fléchère où de grands arbres offraient encore quelques cachettes. Il fut décidé d'agir et l'on fomenta un complot contre le monstre dévoreur.
La dernière fourmilière eut pour mission de l'attirer dans la forêt en formant une longue chaine. Les termites creusèrent un arbre très soigneusement sans abimer ni l'écorce, ni les branches. Les abeilles, au prix d'efforts prodigieux, battirent un essaim au sommet de l'arbre, les épeires tissèrent à qui mieux mieux de belles toiles au bout des branches, enroulées et solidement fixées. Tous les autres bourdonnant, zinzinant, craquetant, se massèrent aux abords de l'arbre ou sur son tronc.
On savait que si le plan échouait, il en serait fini des derniers représentants.
Mais tout fonctionna à merveille : Jarod  ne croyant pas ses yeux à la vue de la colonne de fourmis, avança à quatre pattes vers la forêt, léchant le sol comme s'il se fut agi d'une trainée de caramel. Il arriva donc au pied du grand arbre où un concert se fit entendre dans les hauteurs. Jarod était comme fou, il y avait si longtemps qu'un tel menu, varié et abondant ne s'était offert à lui ! Ne résistant pas à la tentation, il grimpa dans l'arbre pour saisir tout ce qui volait. Arrivé à la dernière portion du fût, là où les branches se séparaient, il subit une attaque en règle de tout ce qui piquait. Sa peau tannée lui permit de tenir un instant mais bientôt les démangeaisons et brulures devinrent trop étalées et trop fortes : Jarod se mit à gigoter frénétiquement.
Les araignées tirèrent leurs toiles et couvrirent l'ogre qui, étouffé, tomba dans le tronc évidé de l'arbre. Une petite blessure du tronc retint son visage et, par cette fenêtre étroite, Jarod vit disparaitre son festin.
A jamais prisonnier, Jarod pleure à chaque printemps.

6 février 2010

Vive les monstres (enfolie)

Urgence !! Une promenade dans les bois est urgente ! Je n’en peux plus, mes trois gaillards sont déchaînés, courent partout dans la maison, se disputent pour des idioties de leurs âges… Je deviens folle ! Pas moyen d’être deux minutes au téléphone, de mettre un peu d’ordre dans le ménage, ou même, un peu rêveuse, de faire une douce sieste. Vive ce minuscule appartement, je te jure !

 

 Les gaillards, les monstres,  les schtroumpfs bruyants !!! Je siffle, je claque des mains et hurle au secours ! Tous les trois au galop : «  à vos ordres capitaines ! »  Laissez-moi rêver un peu.

 

Je leur ordonne de mettre leurs grosses bottines et leurs gros manteaux bien chauds. Dehors !!! Tout le monde dehors !! Allez où vous voulez mais je ne peux plus vous voir ! J’exige que vous soyez de retour pour 15h15 pile !

 

Ils pestent, chuchotent entre eux,  s’habillent en silence  en tirant une tête jusque parterre.  Basta ! La porte claque et me voilà, soufflant un bon coup d’exaspération… Ouf, le calme existe.

 

Vous pensez bien, l’angoisse de la petite maman poule est de retour après un quart d’heure… être mère, je vous jure ! Quel stresse ! Et si une voiture roule trop vite et les écrase ? Et si une tempête arrive à l’improviste et envoie un éclair sur un arbre qui tombe pile poil sur un des trois ? Et si un taré les kidnappait pour me réclamer trois fois un gros fric ? Voilà, je délire… appeler les urgences ? Les ambulances au plus vite ?

 

J’enfile mon gros pull, ma grosse écharpe et me voilà dehors, sur la route, sans savoir où aller. J’interroge les voisins, j’arrête les voitures… suis déjà en larme d’angoisse. Réfléchis, réfléchis, réfléchis !!

 

J’aurais leur âge, je serais partie dans les bois d’en face. Propriété privée, bien entendu, mais les petits mecs de leur âge raffolent de faire l’interdit, non ? Me voilà, les pieds dans la boue, dans une forêt qui me parait si géante.  A gauche, à droite ? Je tremble de froid. La rivière pleine de crasse est presque profonde. Je crie après eux. De plus en plus fort ! Merde, pourquoi je ne leur ai pas encore offert un Gsm ? Au moins au plus âgé….  8 ans… Pourtant je déteste cette modernité. Comme quoi, hein….

 

Ca y’est ! J’entends un hurlement !!! Un cri de désespoir…. Maman ! Maman ! On est là ! Viens ! Je cours, j’en vois un à quelques mètres de moi qui me fait des grands signes. Viens voir, maman, allez, cours ! Il en reste un qui crie… sans que les autres semblent être paniqués. 

 

Plouf ! Mes pieds dans cette rivière glaciale, sur les cailloux qui m’empêchent de me grouiller. « Aidez-le à sortir de l’eau ! ». Non mais je rêve où quoi ? Ils ne bougent pas. Ils rient aux éclats. Je vois Antoine en entier dans cette eau glacée, sans son manteau, sans ses bottines. Le voilà en t-shirt  sa tête plongée dans cette répugnante rivière. Je frigorifie pour lui. Il saute les bras en l’air en criant : « youpiiiiie !! Je l’ai retrouvé ! » Ses frères l’applaudissent et chantent comme des zozos ! Mais qu’a-t-il bien pu retrouver ? Il sort de l’eau avec un énorme morceau de bois dans ses bras…. Ils semblent tous les trois si fières d’avoir trouvé ce truc. Je les regarde bouche baie en espérant que ces trois asticots ne tomberont pas malades avec ces fringues gelées. « On l’adopte ! ? Hein maman ? » Me dit ce petit schtroumpf de Marc. A 5 ans, je peux le comprendre…. Mais adopter qui ? Il me retourne ce morceau de bois…. Étrangement, ce bois est beau, sombre mais touchant. Un personnage semble en sortir avec un drôle de regard. Est-ce la nature qui nous offre un visage si réel ? Est-ce un artiste qui l’a peint avec ce regard profond, interrogateur, inquiet ? Pourquoi l’a-t-on jeté à l’eau ? Qui a pu vouloir s’en séparer ? Je suis avec de petites larmes aux yeux. Marc me saute au cou, Antoine trempé grelotte avec un grand sourire et Olivier me regarde avec la trouille de me voir éclater en colère. 

 

On court tous les 4 avec vigueur vers l’appartement. Olivier aide Marc à porter ce bois. Ils décident tous les trois de le sécher et de l’admirer. Ils cherchent un bel endroit pour le poser et semblent tellement heureux de l’avoir trouvé.

 

Tous les trois voient en lui un véritable trésor. Me voilà, moi, devant ces trois petits monstres avec une grande émotion de bonheur.  Elle est pas belle la vie ?

 

:-)

6 février 2010

Page 23 (Phil)

J’ai peur.

Peur de moi-même, en fait.

C’est à cause de l’image, cette fois.

 

On dirait un totem.

 

Nous avons cherché partout. Les gosses m’ont aidé.

Des livres, il y en a partout, dans cette maison. Il y a des livres dans toutes les pièces. Nous croulons sous les livres.

 

Vouloir trouver un livre en particulier, c’est une gageure. Alors quand on ne sait même pas ce qu’on cherche…

 

C’est Camille qui l’a trouvée. L’image.

Où as-tu trouvé ça ? Ai-je demandé. Elle a montré le coffre où je range les bouteilles de scotch. C’était dessous, a-t-elle dit.

 

Pourquoi est-ce que je pense à un totem ? Un totem évoque un animal. Ou une plante, parfois. Mais pas un homme. Sur l’image, c’est une tête d’homme.

 

Nous avons cherché partout.

Nicolas et Camille m’ont aidé. Ce sont mes enfants. Pour en avoir le cœur net, j’ai encore cherché après qu’ils sont repartis chez leur mère.

J’ai cherché partout.

Il y a des livres partout.

Nicolas a dix ans. Camille en a sept. Il lui manque quelques dents sur le devant.

Camille s’appelle Camille parce que nous n’avons pas osé Camomille (à la place de Pimprenelle).

 

L’image. C’est une page arrachée d’un livre, en fait. Une page 23. Mais duquel ?

Ça se voit à la trace du brochage, sur le côté gauche.

J’ai demandé aux enfants de quel livre venait cette page 23. Ils n’en savaient rien. Ils affirmaient n’avoir jamais vu l’image. C’est un de vous qui l’a perdue, alors. Ça vient d’un livre qui est chez votre mère. Non, ont-ils répliqué.

Alors nous avons entrepris de chercher le livre. Celui d’où vient l’image. Partout.

 

C’est une photo. L’image. Imprimée sur la page arrachée d’un livre pour enfants. Quel livre ?

 

J’ai peur. A cause de l’image. Quand je la regarde, j’ai l’impression qu’elle s’anime. Le visage de l’homme du totem semble vouloir m’hypnotiser. Je ne veux pas sortir de moi.

 

Après que les enfants sont sortis jouer dehors, j’ai recommencé à chercher.

Je dois bien pouvoir trouver un livre pour enfants, d’assez petit format, auquel il manque la page 23.

Il faut un début à tout. La logique me commande de débuter par leurs chambres. C’est dans ces pièces-ci qu’on trouve le plus de livres pour enfants. Méthodiquement j’examine le contenu de chacune des étagères. Je regarde dans les armoires. Je regarde sous les lits. Je défais les lits. J’ouvre les boîtes à secret. Rien.

Je cherche dans les toilettes : il y a une étagère avec des livres de poche pour enfants. Mais je n’y trouve aucun ouvrage du format idoine, auquel il manquerait la page 23, et qui parlerait peu ou prou de totems à têtes humaines.

 

Je regarde l’image. La tête d’homme me sourit. Comment une figure sculptée à même le tronc d’un chêne et reproduite sur du papier glacé peut-elle sourire ? Je veux dire, ce n’est pas l’image d’une tête souriante, l’image sourit lorsque je la regarde. J’ai peur.

Il y a de grandes étagères peintes en orangé, sur le palier. De nombreux livres de toutes catégories y gisent dans un certain désordre. À l’origine, c’était rangé. Mais les enfants y sont passés. Je fouille de fond en comble. Je ne trouve rien. À part de la poussière. J’éternue.

Je détaille la pile de romans qui encombre ma table de chevet. En vain. Je trouve une carte postale humoristique que je n’ai envoyée à personne. Mais pas de livre pour enfants.

 

Je ne suis plus sûr de rien. Je regarde la page 23. Je la tiens à la main. Elle est bien réelle. La tête sculptée dans le tronc du chêne me sourit encore. J’ai peur.

J’ai confusément l’impression d’avoir vu cette figure quelque part, mais je ne sais pas où.

 

Au rez-de-chaussée, je retourne méthodiquement tout ce que contiennent les meubles et les étagères. Rien de significatif n’attire mon regard.

Dans la cuisine, les livres de recette sont muets.

Dans la salle de bain, il n’y a pas de livre. Je regarde quand même dans le placard aux serviettes.

 

La page 23 est seule. Son livre est introuvable. Sur cette page de papier glacé apparaît la photo du tronc d’un chêne, dont on a ôté l’écorce, et qu’on a sculpté d’une tête d’homme. On dirait la photo d’un totem humain. Qui sourit lorsqu’on le regarde.

 

On entend souvent parler de paranoïa, de schizophrénie, de ce genre de choses. Voit-on des images sourire, par exemple, lorsqu’on est atteint d’une telle maladie ? J’ai peur.

 

Papa, on va se promener ? Demande Nicolas.

Oh oui. Mon papa ! Insiste Camille à travers ses dents manquantes.

 

Ils ont raison. Dehors il fait beau. Allons-nous promener. Cessons de nous monter le bourrichon à propos des pages détachées de livres égarés.

Je les emmène au château de Délaies. Ils adorent ce château. Moi je le trouve bizarre. À l’origine c’est un château fort. Il est tout en brique, comme presque toutes les constructions de la région. De loin, on dirait qu’il est rouge. C’est un château rouge.

Ce château est bizarre, parce qu’il a été volontairement modifié à une époque ancienne, afin de ne plus avoir de fonction défensive. Ou agressive. Je ne sais plus. Combative, disons. Ces modifications sont visibles, ça lui confère un aspect, comment dire, décoratif, futile. Voilà, c’est le mot : ce château est futile. Il abrite néanmoins, entre autres collections, tout un florilège de soldats de plomb et de poupées anciennes à tête de porcelaine. Voici pourquoi le château de Délaies plait aux enfants.

Je consens à une énième visite des étages aux parquets encaustiqués et grinçants. Je ris aux éternelles anecdotes du guide. Je hausse les épaules en entendant toujours les mêmes questions saugrenues posées par les visiteurs.

 

Le château de Délaies se niche au creux d’un vaste parc boisé, longé au sud par le cours sinueux d’un ruisseau.

Je consens à une énième promenade dans le parc, le temps que les enfants avalent leur goûter.

Amusé, je les regarde courir en riant sur une allée jonchée de glands et de feuilles jaunies.

Et c’est alors que je l’aperçois.

La tête.

Sur le tronc d’un chêne.

C’est un arbre plusieurs fois centenaire, à mon avis. Un morceau d’écorce a été enlevé, à peu près à un mètre vingt du sol. À cet emplacement, on a sculpté la figure d’un homme, assez grossièrement. Et cette figure se met à me sourire, dès que je la regarde. Je veux dire, elle n’est pas souriante tout le temps, elle se met à sourire si je la regarde.

J’appelle les enfants.

Vous voyez cet arbre ? Leur demandé-je. Celui où on a gravé la tête. Et je leur désigne le chêne le plus majestueux du parc, à quelques mètres de nous. Il est impossible de ne pas le remarquer. Vous la reconnaissez ? C’est la tête de la page 23. C’est la tête de l’image que Camille a trouvé sous le coffre à whisky. Vous la voyez sourire ? Là, sur le tronc du grand chêne.

Ils me regardent.

Intrigués.

Quelle tête ? Disent-ils en chœur.

6 février 2010

Défi #92‏ (Vegas sur sarthe)

"Mais qu'est ce qu'y fabrique? Ce gosse me rendra folle!"
Pour confirmer l'évènement la grosse horloge comtoise ponctua la phrase d'un coup de gong sonore et exaspéré.
Dans ces cas-là, la mère trépignait devant son fourneau comme un boxeur impatient d'en découdre, mais l'adversaire en culotte courte ne venait pas.
"Donne moi donc la soupe, la mère... ça l'fera venir".
La nuit tombait vite en cette saison mais la lampe-tempête manquait au clou et le vieux fut rassuré.
"Tu peux pas l'renier celui-là! Toujours un coup à faire, toujours dans les nuages quand y a tant d'travail ici..."
Le vieux n'écoutait plus et derrière le brouillard de sa soupe brûlante on aurait pu le voir sourire.
Le gamin avait emporté le trépied, celui qui servait autrefois pour traire la vache... et puis la petite boussole cerclée de cuivre qu'on avait gagné l'an dernier à la foire de Charolles.
La mère terminait son troisième round devant la fenêtre où elle jetait à la fois des coups d'oeil inquiets et des coups de torchon destinés à quelque insecte imaginaire.
"Mais qu'est ce qu'y fiche à c't'heure..."
Le vieux trancha la sempiternelle question et la grosse miche de campagne: "Redonne moi d'la soupe, la mère... y tardera pas".
Une grosse louche de légumes odorants, sortie du fond de la marmite amerrit dans un grand splash.
"C'est pas bon pour mon coeur tous ces tracas" souffla t elle sur la louche vide.
Le vieux gardait son étrange sourire, il était dans sa forêt, celle qu'il avait exploitée durant tant d'années qu'il aurait pu nommer chaque arbre et chaque bosquet.
Le gosse avait emporté sa boîte de couleurs, celle qu'on avait achetée pour l'école avec son couvercle décoré et les gouaches alignées comme des soldats multicolores...
Pourquoi emporter des couleurs? Il avait sans doute ses raisons, et puis Marcel ne le quittait jamais et il n'y avait pas meilleur chien dans tout le canton.
Le vieux s'attaquait à une demi patate naufragée dans l'océan fumant de sa soupe quand il eut un large sourire.
"C'est tout c'que tu trouves à dire, le père?"
Oui les couleurs... c'était pour l'homme-tronc, la figure sculptée qu'il avait trouvée ce fameux jour où il poursuivait le loup-garou avec son lance-pierres... 

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Le défi du samedi
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