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Le défi du samedi
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21 février 2015

Eclats de paradis… (Fairywen)

Défi 338 du samedi 14 février 2015

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14 février 2015

La Théorie du Chaos (Fairywen)

La Théorie du Chaos.

Le Tisseur se raidit en regardant l’image qui se dessinait sur sa toile. C’était impossible, juste impossible… Il ne pouvait y avoir deux choses aussi contradictoires dans la même toile… D’un côté, un paysan derrière son cheval, en train de labourer son champ. À côté de lui, un soldat de l’Empire Galactique, et dans le ciel, des vaisseaux spatiaux ! C’était du grand n’importe quoi. Les Mondes ne devaient pas se mélanger. C’était interdit. Dangereux.

Comment cela avait-il pu se produire ? Il était un Tisseur expérimenté, qui créait des Mondes depuis des décennies. Oh, bien sûr, au début, il avait fait quelques petites erreurs, comme tout le monde. Rien de dramatique. Il avait toujours réussi à les rattraper. Mais là… Mélanger des Mondes, même un débutant ne le faisait pas ! Alors un Tisseur de son niveau…

Furieux, le Tisseur s’approcha de la toile et l’examina attentivement durant de longues minutes. Et il finit par voir. Un tout tout petit minuscule accroc, fait par l’aile d’un papillon qui passait par là… Un accroc qui avait mélangé deux Mondes en création, un petit rien qui pouvait aboutir à une destruction apocalyptique.

Le Tisseur s’empressa de saisir ses instruments pour réparer la déchirure. Le laboureur continua à labourer tranquillement son champ. Le soldat et les vaisseaux retournèrent livrer leur guerre impériale. Le Tisseur contempla un instant ses œuvres, satisfait du travail accompli. Puis il saisit doucement le papillon entre ses mains et le relâcha par la fenêtre, qu’il referma ensuite soigneusement. Certes il faisait beau dehors et l’air printanier transportait des fragrances délicieuses, mais pas au point de risquer la mort d’un Monde, tant il est vrai que le battement d’une aile de papillon dans un point de l’Univers peut déclencher l’apocalypse à l’autre bout des Mondes…

Illustration défi 337 du samedi 7 février 2015

7 février 2015

la clé (Fairywen)

 

La clé.

Chaque année, en fin d’année, le même cérémonial se reproduisait au quartier général des Forces Spéciales Intergalactiques. Une tradition à la fois attendue et redoutée, car il ne s’agissait rien moins que de décerner le titre de meilleure recrue de l’année. Quoique, depuis un certain nombre d’années, la place de champion ne passionnait plus grand monde, tant l’identité du gagnant était certaine. Les paris s’ouvraient plutôt sur la place du second.

Car nul ne doutait que le premier serait encore et toujours le Chasseur. Il était le meilleur depuis son arrivée. Même après avoir été interné plusieurs mois en camp disciplinaire, il avait réussi à rafler le trophée. Bien sûr, ses succès lui valaient beaucoup de jalousies.

Il s’en moquait. Royalement.

 

Et pour la première fois, il se moquait aussi d’avoir gagné. Il s’en moquait même complètement. Car au fond de son cœur, il estimait avoir subi le plus cuisant des échecs. L’Ombre lui avait échappé. Encore et encore. Il l’avait traquée de planète en planète, l’avait approchée à maintes reprises, mais toujours elle s’était enfuie. Il savait bien que dans son dos, on se moquait de ses mésaventures. Car non contente de lui échapper, l’Ombre l’avait souvent ridiculisé. Comme cette fois où il s’était retrouvé attaché et littéralement emballé par un gros nœud rouge… Oh, l’Ombre avait bien tenu sa promesse, elle avait effectivement appelé les forces de l’ordre du coin pour venir le libérer. Mais elle avait pris soin d’appeler une équipe de femmes, et pendant des mois, il avait dû endurer les sourires entendus de ses collègues masculins.

Jusqu’à ce que ses poings finissent par ramener tout le monde à la raison…

 

Morose, le Chasseur avala d’un trait son énième verre de whisky. Il s’était éclipsé dès qu’il avait pu, et noyait ses déconvenues dans l’alcool. Il jeta un regard désabusé à la médaille qu’il arborait. Elle lui importait si peu qu’il avait pensé la refuser, mais la tradition était la tradition, et il avait supporté sans broncher des félicitations qu’il n’estimait pas mériter.

« On ne t’a jamais dit que l’alcool était mauvais pour la santé ? susurra une voix derrière lui, non, ne te retourne pas. Il y a une arme plantée dans tes reins. »

Le Chasseur s’était raidi en reconnaissant la voix de l’Ombre. Comment osait-elle entrer dans un bar empli de flics ? C’était… insensé, suicidaire… et digne d’elle.

« Tu sais qu'il suffit que je dise un mot pour que tout le bar te tombe dessus ? répliqua-t-il sur le même ton.

— Mais ce mot, tu ne le diras pas, Chasseur. Je suis armée, dangereuse, et je ferais beaucoup de dégâts dans un espace aussi restreint. Et surtout, tu ne supporterais jamais qu’in autre que toi m’arrête.

— Qu’est-ce que tu veux ?

— T’offrir un cadeau, bien sûr. Ce n’est pas une tradition, d’offrir un cadeau au gagnant ? »

Une main passa à côté de lui, une main fine, mais qu’il savait forte, et déposa une clé sur le bar.

« Chambre 7, au Paradise. Garde tes médailles, j’adore ça. »

Elle s’évanouit aussi silencieusement qu’elle était venue. Il ne se retourna pas, il savait que c’était inutile. Mais il ramassa la clé et la mit dans sa poche. Il s’en voulait de ne pas pouvoir résister. Elle avait à peine posé la clé qu’il savait qu’il la rejoindrait dans la chambre 7 du Paradise.

Ça aussi, c’était une tradition. Ennemis, amants, ils se combattaient et s’aimaient tout à la fois. Il ne savait pas lui résister, et cette fois encore, il irait la retrouver.

Pour l’aimer jusqu’au bout de la nuit…

Retrouvez l'Ombre et le Chasseur ici.

Défi 336 du samedi 31 janvier 2015

 

31 janvier 2015

L'arbre (Fairywen)

 

L’Arbre.

 

Aujourd’hui je vais vous raconter une histoire vraie. Une histoire que j’ai vécue quand j’étais une petite fille. Pas avec mon langage de petite fille, certes, mais en retrouvant les sentiments que j’avais éprouvés à l’époque.

Je venais de traverser le petit pont de bois pour aller lire perchée dans mon arbre préféré lorsque, par un caprice qu’aujourd’hui encore je ne saurais expliquer, j’ai décidé de changer d’endroit et d’aller vers la clairière, pour y lire au pied d’un chêne où venaient souvent marauder des écureuils. Dans le secret de mon cœur, je me disais que, si je ne faisais pas de bruit, ils viendraient peut-être jouer autour de moi. J‘avançais sur le chemin au rythme de la chanson que je fredonnais dans ma tête, et ne tardais pas à arriver à destination.

Et c’est alors que je vis la chose la plus extraordinaire qui soit… Devant moi, le tronc d’un arbre était ouvert en deux. Un immense espace séparait les deux moitiés du tronc, et dans cet espace brillaient toutes sortes de couleurs de bleus. Je me suis approchée avec un frisson, en prenant garde à ne pas déchirer ma robe sur les ronces.

Le spectacle était tout simplement magnifique… Des poissons nageaient dans l’eau claire entre les deux morceaux du tronc de l’arbre, allant et venant au-dessus d’un paysage sous-marin d’une rare beauté. Parfois la nageoire de l’un d’eux crevait la surface liquide en suspension, et quelques gouttes salées m’éclaboussaient. Je n’ai jamais su combien de temps j’étais restée là, à regarder le merveilleux spectacle. Et puis, tout doucement, le tronc s’est refermé et je suis allée m’asseoir sous mon chêne.

Je n’ai pas lu, ce jour-là, mais j’ai rêvé. Et comme je ne bougeais pas du tout, les écureuils sont venus.

 

Improbable, mon histoire ? Vous en êtes sûr, jeune homme ? Regardez donc là-bas, sur mon étagère… Oui, là-bas ! Vous voyez ce coquillage ? Je l’ai ramassé ce jour-là dans la forêt, au pied de l’arbre magique. Et ne me regardez pas avec cet air indulgent, je vous prie. Je suis peut-être une vieille dame, mais j’ai encore toute ma tête, et je sais bien ce que j’ai vu ce jour-là dans la forêt.

 

Pensif, le jeune homme sortit de la chambre de la vieille dame. Bien sûr, il ne croyait pas un mot de son histoire, bien qu’elle soit très jolie. Il ne remarqua pas qu’à son tour il traversait le petit pont de bois et suivait le chemin vers la clairière. Ce ne fut que lorsqu’il arriva devant l’Arbre qu’il se demanda quel caprice du destin l’avait conduit là, au moment précis où le tronc s’ouvrait devant lui.

Ce qu’il vit ? Nul ne le sut jamais, sauf peut-être les écureuils, qui confièrent au vent qu’il était entré dans l’espace entre les deux moitiés du tronc et n’en était jamais ressorti. Le vent, à son tour, rapporta l’histoire à la vieille dame, qui sourit en silence et reprit son livre.

 

Improbable, mon histoire ? Vous êtes sûrs… ?Auriez-vous le courage de franchir le petit pont de bois et d’aller jusqu’à la clairière où se trouve l’Arbre… ?

Défi 335 du samedi 24 janvier 2015

24 janvier 2015

ne pas oublier (Fairywen)

Défi 334 du samedi 17 janvier 2015

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17 janvier 2015

bourgeon de vie (Fairywen)

Bourgeon de vie.

De l’extérieur, on ne voit rien. Rien que des écailles bien fermées qui composent un petit bourgeon accroché à la branche d’un arbre. Donnera-t-il une feuille, une fleur ou un chaton ? Pour l’instant, on ne peut rien dire. C’est l’hiver, le petit bourgeon dort sous la neige. Les scientifiques parlent de dormance, d’hormones végétales et autres balivernes, mais comme souvent, ils sont loin, bien loin de la réalité.

Car si les petits bourgeons dorment en hiver, c’est pour protéger la petite fée qui leur donnera vie le printemps venu. Le voilà, le secret des bourgeons. Chacun d’eux abrite une petite fée qui l’a construit patiemment à la fin de l’été, avant de se nicher en son cœur et de s’endormir au chaud pour se reposer. C'est pourquoi les bourgeons sont si bien fermés : pour protéger leur petite fée.

Mais voici que le printemps arrive. Les jours rallongent, il fait plus doux. Les petites fées s’éveillent doucement, s’étirent, et commencent à dorloter leur petit bourgeon. Elles le font tout beau, tout frais, tout pimpant, et lorsqu’elles jugent le moment venu, elles ouvrent délicatement les écailles protectrices.

Alors on voit sortir une feuille, un chaton, un pétale de fleur… Lorsque le bourgeon est complètement ouvert, la petite fée s’envole dans les cieux et va jouer avec ses amis durant tout le printemps et tout l’été. Mais lorsque l’automne s’annonce, elle revient vers son arbre pour commencer à construire un autre petit bourgeon dans lequel elle passera l’hiver.

 

Alors si vous voyez un bourgeon fermé, n’y touchez pas, laissez-le dormir avec sa petite fée. Car si chaque fois qu’un enfant dit “je ne crois pas aux fées”  il y a quelque part une petite fée une meurt, les petites fées meurent aussi lorsqu’on détruit leur maison…

Illustration défi 333 du samedi 10 janvier 2015

10 janvier 2015

miroir, mon beau miroir… (Fairywen)

 

Miroir, mon beau miroir…

Miroir, miroir,

Mon beau miroir,

Reflet de tes yeux,

Mémoire des jours heureux…

 

Miroir, miroir,

Mon beau miroir,

Reflet de l’onde pure,

Parfum d’aventures…

 

Miroir, miroir,

Mon beau miroir,

Témoin de ma vie,

Jeunesse qui s’enfuit,

Vieillesse qui mûrit…

 

Miroir, miroir,

Mon beau miroir,

Gardien de mes secrets,

Complice de toutes ses années

Par les yeux de mon amant

Qui me voit toujours comme il y a vingt ans,

J’ai appris à aimer

Tout ce que tu m’as montré

Illustration défi 332 du samedi 3 janvier 2015

3 janvier 2015

je me souviens… (Fairywen)

 

Je me souviens…

Je me souviens… De quoi ? De tant de choses… Fidèle à moi-même, les tristes, je ne vous en parlerai pas. Seulement des tendres et des belles.

Je me souviens du goût des abricots que ma mère me donnait toujours à goûter lorsque nous étions en vacances au bord de la mer, l’été, et que je sortais de l’eau.

Je me souviens de l’odeur de foin et d’animaux du clapier de mon grand-père.

Je me souviens du grenier de ma grand-mère où je passais des heures avec mon cousin préféré.

Je me souviens de jardin de mon grand-père, où j’allais “voler” les fraises, les carottes (pour moi et pour les lapins) et les tomates.

Je me souviens de Lancelot, ce grand cheval noir teigneux avec tout le monde sauf avec moi.

Je me souviens de Julie, Voyou et Réglisse, mes premiers chats. Et bien sûr de Mystic, mon bébé parti trop tôt.

Je me souviens des goûters de noix, pain et sucre dans le verger de mon grand-père, des cerises noires et juteuses que j’allais cueillir sur l’arbre.

Je me souviens des bouquets de coucou que je faisais chez ma grand-mère, où le printemps était toujours en avance de 15 jours par rapport à chez nous.

Je me souviens de la neige, l’hiver, des parties de luge avec les copains, et du chocolat chaud de ma mère quand je rentrais.

Je me souviens de mon 1er parcours de CSO[1] avec mon cheval, où nous avons fini à la deuxième place. Et de mon premier sans fautes avec ma jument.

Je me souviens de ma première balade avec lui, enfin libres tous les deux.

 

Et surtout, je me souviens de cette torride nuit d’été en Espagne où j’ai rencontré celui qui allait devenir mon mari, puis de la naissance de la plus belle des petites filles, de ses premiers pas, de ses premiers mots.

Oui, je me souviens, et surtout, j’espère que je me souviendrai encore longtemps de tout ça…

 



[1] Concours de Sauts d’Obstacles

 

Défi 331 du samedi 27 décembre 2014

27 décembre 2014

Orage de Noël (Fairywen)

 

Orage de Noël.

 

Il n’avait jamais aimé Noël. Noël, ça ne signifiait rien pour ceux qui comme lui avaient grandi dans la rue. Falko n’avait pas seulement le look d’un voyou, il en était un. Dans la rue, on le respectait. On le craignait, aussi. Il tapait fort, il tapait vite, et il posait les questions après. Parfois.

Enfant, il serrait les dents pour ne pas pleurer lorsque venait Noël. À l’école, il entendait les autres parler du sapin, des décorations, des cadeaux, des repas en famille… Lui n’avait rien d’autre que les murs froids de l’orphelinat. Un orphelinat dont il avait fini par s’enfuir, se trouvant mieux dans la rue. Non, Falko n’avait jamais aimé Noël.

 

Et pourtant aujourd’hui il se retrouvait dans un magasin, en train de choisir un cadeau. Un cadeau de Noël. Car le voyou amer et cynique avait un jour rencontré une jeune femme qui avait bouleversé sa vie, une jeune femme aux yeux rieurs, qui lui avait proposé des charmes et des sortilèges pour se sécher le jour où il était entré par hasard dans sa boutique de magie pour s’abriter d’un violent orage d’été. En fait de charmes et sortilèges, il avait eu droit à une serviette, une tasse de café et un jogging pendant que ses vêtements trempés finissaient au sèche-linge. Lui qui ne croyait pas en la magie était revenu, encore et encore, jusqu’à ne plus repartir, et un jour, il avait découvert qu’il vivait avec une vraie magicienne, qui savait faire naître des étoiles avec ses doigts et créer une bulle de calme au milieu des éléments déchaînés.

Alors ce soir, pour la première fois de sa vie, il achetait un cadeau de Noël, une fine chaîne d’argent avec un cœur d’émeraude en pendentif. Il eut un sourire en coin avec quelle attention les vendeurs le surveillaient. Il aurait pu parier que l’un d’eux au moins avait la main posée sur le bouton de l’alarme. Le patron était même descendu dans la boutique et ne le quittait pas des yeux. C’est vrai qu’il dénotait un peu dans cette boutique chic, avec son jean déchiré et son blouson de cuir noir, mais il était et resterait toujours Falko, le caïd des rues.

Lorsqu’il sortit son portefeuille pour payer, il crut un instant que l’alerte rouge allait être déclenchée, mais lorsque les billets s’étalèrent sur le comptoir, l’atmosphère se détendit nettement et des sourires apparurent sur les visages. Lui ne changea pas d’expression. Simplement, au moment de sortir, il se retourna un bref instant, lança d’une voix moqueuse :

« Jamais se fier aux apparences, vous voyez… Pendant que vous étiez tous en train de me surveiller, le type sapé à quatre épingles, là-bas… Il vous a piqué au moins trois bagues. »

Falko riait encore à la pensée du branle-bas de combat qu’avait déclenché sa déclaration lorsqu’il poussa la porte du magasin animalier pour y acheter une douzaine de balles brillantes avec des grelots. Il ne s’agissait pas d’oublier les chatons-fées qui partageaient leur vie, et qui, s’ils avaient des pouvoirs magiques, étaient avant tout et pour toujours des chatons…

 

Il offrit son cadeau à sa belle Ysaline le soir du 24 décembre, trop impatient pour attendre davantage. Ils étaient assis tous les deux devant la cheminée, ainsi qu’ils aimaient à le faire durant les soirées d’hiver. Les chatons couraient partout, à la poursuite des balles multicolores, qui s’envolaient régulièrement dans les airs lorsqu’ils faisaient usage de leurs pouvoirs. Il attendit qu’elle ouvre la petite boîte, le cœur battant, et lorsque ses yeux s’illuminèrent en découvrant le délicat bijou, il sourit tendrement :

« Joyeux Noël, ma princesse. »

Sans qu’il le dise, elle sut qu’il n’avait prononcé ces mots pour personne. Elle accrocha la chaîne autour de son cou et lui sourit avant de le prendre par la main :

« Viens. Ton cadeau est dehors.

— Mon… cadeau ?

— Bien sûr. Tu ne croyais quand même pas que j’allais t’oublier ? »

Là aussi elle devina qu’il n’avait jamais eu de cadeau à Noël. Elle le prit par la main et ils sortirent dans la nuit. Toujours curieux, les chatons s’étaient nichés dans la chemise de Falko. Ysaline leva la main vers le ciel et lui dit :

« Regarde… »

Là-haut, devant la lune, il vit passer un traîneau tiré par des rennes, un traîneau qui descendait doucement vers eux pour se poser sur la neige blanche.

« C’est pas vrai…, lâcha Falko dans un souffle.

— Bien sûr que si, c’est vrai. La magie existe, Nessie existe, le Père Noël existe. »

Abasourdi, Falko vit le célèbre vieillard à la houppelande rouge et à la barbe blanche descendre de son véhicule et venir vers eux, ses yeux bleus pétillants de malice.

« Ainsi donc, c’est toi, Falko, fit-il en le détaillant des pieds à la tête.

— Vous… vous me connaissez ?

— Bien sûr que je te connais. Je connais tout le monde. Tu fais partie de ceux que je cherche à atteindre depuis longtemps, jeune homme, mais il n’y a jamais eu moyen de te faire croire en moi, et sans croyance, la magie ne peut rien. Mais tu as rencontré ma fille, et elle a réussi là où j’ai échoué.

— Votre… fille ?

— Eh oui, ma fille ! Je ne suis pas aussi vieux que j’en ai l’air, tu sais. Ce n’est qu’un déguisement que nous empruntons lorsque vient le soir de Noël.

— Em… empruntons ?

— Bien sûr. Le Père Noël n’est pas immortel, on le fait croire, c’est tout. Allez, mes enfants, je dois vous laisser, la nuit sera longue, pour moi, mais demain, je viendrai partager avec vous le repas de Noël. Bonne nuit, mes petits ! »

Le traîneau s’envola dans le tintinnabulement des cloches des rennes. Falko le suivit longtemps des yeux, tandis qu’un baume apaisant descendait sur son cœur si longtemps meurtri.

« Rentrons, murmura doucement Ysaline lorsque la tempête se leva. »

Cette nuit-là, alors que le vent hurlait dehors, la nuit fut douce dans le chalet perdu dans la montagne. Les chatons s’endormirent sur l’épais tapis devant la cheminée lorsqu’ils furent fatigués de jouer. Falko et Ysaline restèrent auprès d’eux, sans rien dire, dans les bras l’un de l’autre, juste heureux d’être ensemble.

 

C’était la nuit de Noël, la nuit de toutes les magies, la nuit où un voyou rencontra le Père Noël et sut qu’un jour quelqu’un, quelque part, l’avait considéré comme un enfant comme les autres…

 

La saga de Falko et Ysaline peut se lire ici.

Défi 330 du samedi 20 décembre 2014

20 décembre 2014

J’ai cru que j’étais chez moi (Fairywen)

 

J’ai cru que j’étais chez moi…

 

Il y a dix-huit ans et quelques mois de cela, j’ai acheté une maison. Une jolie maison, pas bien grande, mais dans laquelle je me suis sentie bien à la seconde où j’en ai franchi le seuil. Mon mari et moi l’avons aménagée à notre goût, avec des papiers peints de couleur, une jolie petite fille devenue grande depuis, des sourires, des baisers, des larmes parfois et surtout, beaucoup d’amour. Un vrai petit paradis, quoi.

Et puis il y a maintenant bientôt quatre ans, nous avons laissé entrer deux SDF dans cette jolie maison. Insidieusement, les choses ont changé… Ils ont commencé par s’approprier le salon, en particulier le canapé. Bien entendu, la cuisine et le frigo sont devenus leur royaume. Petit à petit, ils sont venus dans notre lit pour y prendre toute la place, sans se préoccuper de nous. Et lorsque l’un d’eux nous a quittés suite à une longue maladie, un autre est venu, puis un autre, et un autre encore. Ils sont quatre, à présent. Quatre à prendre leurs aises dans ma jolie maison, que ça nous plaise ou non. Et impossible de les mettre dehors ou de leur faire entendre raison ! Non, ils sont là, ils y restent, squattent les endroits les plus confortables, s’étalent sur le lit la nuit, exigent des repas à heures fixes, brefs, se comportent comme des rois !

 

C’est là que j’ai compris que les papiers mentaient, et que ma maison n’était plus à moi depuis le jour où les premiers de ces SDF l’avaient investie, tellement il est vrai que lorsqu’on fait entrer un chat chez soi, on vit en invité dans ce qui est devenu son chez lui…

Défi 329 du samedi 13 décembre 2014

13 décembre 2014

L'œil (Fairywen)

 

L’œil.

Dans mon dos un œil s’est ouvert.

Je le sais, je le sens.

Il me suit sous la lumière,

Fixe et inquiétant.

Il ne cille pas,

Ne se détourne pas.

Il me suit

Sans me lâcher,

Sans se détourner,

Cet œil qui luit

Sur mon dos fixé.

Que veut-il de moi 

Cet œil qui ne me quitte pas ?

 

C’est l’œil de mon chat,

Et c’est l’heure de son repas…

Défi 328 du samedi 6 décembre 2014

6 décembre 2014

Procrastiner ou ne pas procrastiner ? Telle est la question (Fairywen)

 

Procrastiner ou ne pas procrastiner ? Telle est la question…

 

Suis-je sujet à la procrastination… ? Intéressante question… Il y a certes des choses que je remets à plus tard, comme par exemple aller dehors quand il fait un froid de canard. Dans ces cas-là, je préfère me prélasser sur mon canapé, au coin du feu. Faire les courses, aussi. Il y a bien quelqu’un qui les fera à ma place, après tout. Bon, là, d’accord, je procrastine…

Mais ne croyez pas que je le fasse tout le temps ! Que nenni ! À l’heure du repas, par exemple, je ne procrastine pas. Jamais. L’heure, c’est l’heure, et gare s’il y a du retard ! C’est comme la sieste… On ne procrastine pas l’heure de la sieste, non môssieur ! Quand me vient l’envie de siester un peu, je sieste, et tant pis pour les esprits chagrins qui prétendent que je perds mon temps ! La sieste, c’est immédiat, ça ne se reporte pas, non môssieur !

D’ailleurs, je la sens qui m’appelle, là… Pas question de procrastiner, j’y vais de suite ! Allez, hop, on dégage de mon canapé, on me laisser mon oreiller ! Dehors, tout le monde, je sieste !

Signé : le chat.

29 novembre 2014

de l’évolution de mon espèce (courte allocution de Sir Pillow) (Fairywen)

 

De l’évolution de mon espèce

(courte allocution de Sir Pillow[1])

 

J’existe depuis longtemps. Très longtemps, même. J’ai d’abord été fait de feuilles, de mousse, de fougères, de fourrure ou de tout autre matériau naturel. Puis, comme tout un chacun, j’ai évolué. En Egypte Antique, par exemple, j’étais fait d’un morceau de bois qui maintenait la nuque. J’ai été sac rempli de paille. Mais je suis aussi devenu coussin moelleux, fait de douces plumes.

On me trempe de larmes, on me fait des confidences qui font trembler des empires et précipitent leur chute –enfin, pas à moi exactement, mais c’est tout comme…-, on me serre contre soi quand on est triste. Je sers aussi à de joyeuses batailles qui s’achèvent parfois dans de grandes envolées de plumes et sont toujours le prétexte de fous rires mémorables.

Mais surtout, je suis le complice de vos nuits, celui sur lequel le soir vous posez vos têtes fatiguées avant de fermer les yeux et de partir au pays des rêves…



[1] Pillow = oreiller en anglais

22 novembre 2014

mes cahiers (Fairywen)

 

Mes cahiers.

Je ne me souviens pas de mon premier cahier. Mais je me souviens de l’odeur de l’encre, de celle du papier, et du crissement de la plume Sergent Major… Car oui, j’ai appris à écrire à la plume, la vraie, celle qu’il faut tremper dans l’encrier, celle dont l’encre violette tache les doigts et parfois les habits.

Depuis, j’ai rempli d’innombrables cahiers. Des grands, des petits, des gros, des fins… Des cahiers d’école, bien sûr, mais aussi des cahiers de vie et des cahiers de rêve. Des cahiers de ma période “journal intime”, que j’ai brûlés depuis. Des cahiers avec des histoires inventées, des histoires qui se finissent toujours bien, des histoires qui m’ont aidée à traverser des périodes sombres de ma vie.

De la plume Sergent Major, je suis passée au stylo à encre, puis au Bic, et peu à peu, le cahier a été remplacé par un ordinateur. Mais toujours en moi est restée la nostalgie du cahier d’écolier, et lorsqu’il y a une dizaine d’années nous avons visité en famille un musée de l’école, c’est avec beaucoup d’émotion que je me suis assise sur un vieux banc d’école, que j’ai pris la main de ma fille qui n’était alors qu’une enfant, et que je l’ai guidée pour tracer à la plume Sergent Major des mots sur un vieux cahier d’écolier…

15 novembre 2014

le vol nummulitique (Fairywen)

 

« Je vous jure, monsieur le policier, je l’ai vu comme je vous vois ! J’étais là, tranquille, en train de courtauder entre les rayons, et je l’ai vu ! »

Les deux agents échangèrent un regard dubitatif, puis le plus âgé prit sa levantine et sa freloche pour continuer d’enregistrer la déposition du témoin du vol. Enfin, “vol”, c’était lui qui le disait, parce qu’il était bien le seul à dire qu’il y avait eu vol… Et quel vol ! Un vol nummulitique, rien que ça… Ils étouffèrent un soupir avant de reprendre patiemment :

« Très bien, monsieur, continuez votre puchoir. Donc vous étiez dans le rayon des travouls lorsque le vol a eu lieu ?

-Oui, tout à fait. J’étais là, tranquille, en train de mutir, lorsque tout à coup il est passé. Là, tout près, juste à côté de moi ! Vous pensez si j’ai eu un choc… C’est qu’il était costaud, le bougre ! Et ce vol… Ah, ce vol … De toute beauté, je vous le dis ! Un vrai vol nummulitique, un qu’on ne voit qu’une seule fois dans toute une vie, et encore, si on a de la chance !

-Mais il n’a laissé aucune trace, risqua le plus jeunes des agents, d’habitude, ce genre de vol laisse des traces…

-Jeune homme, riposta le témoin en le fusillant du regard, vous saurez qu’un vol nummulitique, un vrai, ne laisse pas de traces. Aucune trace. Tout le monde n’est pas capable d’effectuer un vol nummulitique, quoique vous en pensiez. C’est un évènement rare, unique, un évènement d’une portée immense ! Des tas de gens n’en voit jamais !

-Mais dans un grand magasin…, tenta son collègue.

-Un vol nummulitique peut avoir lieu n’importe où, asséna le témoin, même dans un grand magasin. Oh, regardez, le revoilà ! »

Les policiers levèrent la tête en même temps que le témoin et leurs yeux s’arrondirent de stupéfaction.

 

Là-haut, sous le toit du grand magasin, un immense dragon bleu étendait gracieusement ses ailes scintillantes et s’élançait pour un vol nummulitique au-dessus du rayon des travouls…

8 novembre 2014

Corolle de nuit (Fairywen)

 

Corolle de nuit.

Soleil de minuit

Papillon de nuit

Qui vole paresseusement

Tout autour d'un champ

De fleurs rempli

Leurs corolles dans le vent.

1 novembre 2014

merci à qui ? (Fairywen)

 

Merci à qui ?

 

Dire merci ?

Merci à qui ?

Merci à quoi ?

Il y en a trop

Qui comptent pour moi

Des gens, des animaux,

Dans mon cœur au chaud,

Alors je dis

Merci la vie !!

25 octobre 2014

Le monde (Fairywen)

 

Le monde.

 

Comme c’est grand, le monde… Je n’en reviens pas ! Et comme c’est amusant… Il y a des tas de petites choses qui courent et qui volent, et d’autres qui ne bougent pas, mais ça fait quand même des tas de jouets partout. Et c’est doux, cette chose verte qui bouge avec le vent. Oh oui, vraiment, c’est amusant, le monde !! Je suis bien content d’avoir réussi à me glisser dehors, il y a tellement de choses à faire, dans ce monde si étonnant…

 

Oh mais pourquoi est-ce que tout à coup il fait gris ? Où est parti le soleil ? Et le vent, pourquoi est-ce qu’il devient méchant et froid ? Et qu’est-ce qui me mouille, comme ça ? J’ai froid, je veux rentrer ! Maman ! Maman, où es-tu ? Maman !

 

Je suis perdu, il est trop grand, ce monde, et moi je suis tout petit… J’ai froid, j’ai faim, je suis mouillé. Je pleure, j’appelle Maman, mais elle ne m’entend pas… Maman, où es-tu ? Maman… ! Je suis tout seul, j’ai peur… Maman !

 

Et ça, qu’est-ce que c’est ? C’est immense, ça vient vers moi… Je crache pour impressionner la chose, mais je suis si petit, et j’ai si froid… La chose se penche vers moi, elle va me faire du mal, j’ai peur, je tremble… Elle me prend, je ferme les yeux, je vais mourir sans revoir ma Maman…

La chose me ramène contre elle, et tout d’un coup, je sens l’odeur de Maman. Oui, là, sur la chose, l’odeur de Maman… Et l’odeur de la chose, je la connais aussi… Maman la porte sur elle, c’est celle de l’humaine qui la caresse et lui donne à manger… Je me mets à ronronner et me serre contre la fourrure toute douce avec l’odeur de Maman. On m’enveloppe doucement dans quelque chose qui sent Maman, je me réchauffe, je suis bien, et mes petites pattes se mettent à piétiner ce nid si doux. Je me sens emporté, mais je n’ai pas peur. Je sais que je vais retourner chez moi, maintenant.

 

Et tout à coup, ça y est, on est dedans, à l’abri du monde. Je reconnais les odeurs, c’est ma maison. Et j’entends Maman, elle me cherche. L’humaine s’assoit par terre, Maman saute sur ses genoux et commence à me lécher à grands coups de langue. Puis elle s’installe et moi je me mets contre elle et commence à téter. On est bien, là, avec Maman, à l’abri chez nos humains, au coin du feu. Je m’endors doucement, bercé par les ronronnements de Maman et les douces caresses de notre humaine.

 

Je n’ai pas besoin du monde.

18 octobre 2014

L’autre (Fairywen)

 

L’autre.

 

Il la haïssait. Elle était tout ce qu’il ne supportait pas chez une femme. Elle était indépendante, têtue, se fichait comme d’une guigne de tout ce qui était régime et assumait ses rondeurs, ne suivait pas la mode, ne se maquillait pas, n’hésitait pas à dire ce qu’elle pensait –il était d’ailleurs difficile d’avoir le dernier mot avec elle-, et surtout, surtout, elle ne se pâmait pas d’admiration devant lui. Combien de fois avait-il cherché à la prendre en défaut… ? Il ne savait plus. Il savait juste qu’il avait échoué, toujours. Elle était efficace et douée dans son travail, et ça le faisait bouillir de rage.

Et puis un jour il crut avoir enfin trouvé une faille. Elle n’était pas venue ce matin-là, elle ne vint pas le suivant, ni celui d’après. Jubilant d’avance, il alla voir le chef du personnel pour signaler une absence injustifiée, ravi de pouvoir enfin causer des ennuis à celle à qui il ne cessait de penser. Son vis-à-vis le laissa achever sa diatribe avant de lui jeter un regard où se mêlaient la pitié et le mépris :

« Vous ne savez donc pas… ?

-Savoir quoi ?

-Vous êtes bien le seul, alors… Elle a été renversée par une voiture, elle est à l’hôpital, dans le coma, et son état est critique. »

Ce fut comme s’il recevait un coup de poing. Il blêmit, recula d’un pas, refusant la réalité de ce qu’il venait d’entendre et soudain, il tourna les talons et sortit en courant, bousculant sans ménagement tous ceux qui avaient le malheur de se trouver sur son passage. Il n’y avait qu’un seul hôpital dans la ville, il s’y rendit sans ralentir, et débita sans respirer le mensonge qu’il avait forgé : c’était sa fiancée, il était en déplacement lorsque l’accident était arrivé, il n’avait pas pu être là plus tôt… Touchées par l’évident désespoir de ce beau jeune homme, par son air égaré et échevelé, les infirmières le laissèrent entrer dans la chambre.

Lorsqu’il la vit sur ce lit d’hôpital, si pâle, branchée à tous ses tuyaux, il crut que son propre cœur allait s’arrêter. Il s’approcha lentement et s’agenouilla à côté du lit. Doucement, il prit sa main dans la sienne et y posa ses lèvres en murmurant :

« Ne me laisse pas… »

 

Jour après jour il revint, pour lui parler, lui lire des livres, lui dire qu’il l’attendait. Au début, la famille de la jeune femme s’était étonnée de sa présence. Il avait usé de son charme naturel pour les séduire, et bientôt plus personne ne se rappela qu’elle ne leur avait jamais parlé d’un quelconque fiancé. Il lui parlait de lui, de son enfance, de ce qu’il aimait. Il lui disait qu’il l’emmènerait faire le tour du monde, qu’il l’aimerait comme elle n’avait jamais été aimée. Il la suppliait de revenir.

Et puis un jour où il s’était endormi à son chevet, épuisé, le miracle eut lieu. Il sentit une caresse sur sa joue mal rasée, une caresse légère, hésitante. Il releva brusquement la tête et croisa son regard, un regard à la fois doux et perplexe.

« Tu es revenue…, lâcha-t-il dans un souffle.

-Je voulais partir. La douleur était trop forte. Et puis j’ai entendu une voix m’appeler, une voix qui avait mal, alors je suis restée.

-Je suis venu dès que j’ai su. Sans toi, la vie ne vaut pas la peine d’être vécue. Ne t’en va pas, mon amour. Je t’aime. »

Elle sourit. Elle n’était pas étonnée. Durant toutes ces semaines, dans le brouillard dans lequel elle flottait, elle s’était raccrochée à sa voix, à ces mots qui lui disaient tout ce qu’il s’était caché à lui-même, cette attirance immédiate qu’il avait ressenti pour elle qui ne correspondait pas le moins du monde à ce qu’il recherchait chez une femme et qu’il avait caché sous cette agressivité débordante. Alors qu’elle était inconsciente, il l’avait touchée, séduite, elle avait appris à le connaître pendant qu’il lui ouvrait son cœur, ce cœur si bien cadenassé que personne n’en avait jamais trouvé la clé.

« Me pardonneras-tu ? murmura-t-il en effleurant ses doigts de ses lèvres.

-Sais-tu seulement combien de fois tu m’as demandé pardon ?

-Tu m’as donc entendu ?

-J’étais dans un monde étrange. Je pouvais voir, entendre, mais pas répondre. Je t’ai entendu, oui. J’ai attendu tes visites, aussi. J’avais toujours peur que tu ne viennes plus.

-Alors si tu le veux bien, je vais m’enchaîner à toi, pour la vie. »

Pour la première fois, elle lui rendit son baiser lorsqu’il posa ses lèvres sur les siennes.

 

Elle était encore en fauteuil roulant lorsqu’ils se marièrent. Un mariage qui en surprit plus d’un, mais il supporta avec bonne humeur les commentaires gentiment railleurs dont il fut la cible, tandis qu’elle riait doucement. Et lorsqu’il vit la magnifique photo scotchée sur la porte de son bureau, qui représentait un chien et un chat se faisant face, poils hérissés et regard peu amène, il comprit qu’il en avait encore pour quelque temps à supporter les railleries de ses collègues.

 

Mais à vrai dire, il s’en moquait…

11 octobre 2014

Le corbeau (Fairywen)

Le corbeau.

 

Il enrageait. Des jours maintenant qu’il avait envoyé sa lettre, des jours qu’il attendait, épiait, des jours qu’il guettait derrière les rideaux telle une vilaine araignée tapie dans un coin sombre. Mais rien, toujours rien… Le couple en face était toujours là, toujours heureux… Pas une dispute, pas un nuage dans leur histoire d’amour. Ils continuaient à rire de tout et de rien, à s’embrasser à perdre haleine, à rester dehors la nuit pour regarder les étoiles, serrés l’un contre l’autre. En bref, ils continuaient à être heureux.

Pourtant il l’avait bien préparée, sa lettre… Les insinuations mensongères qu’elle contenait étaient suffisamment vagues pour ne pas être vérifiables, et suffisamment précises pour faire naître le poison du doute dans leur couple si parfait, et finir par tuer leur amour, dans les cris et les larmes. Il les détestait tellement, eux qui osaient s’afficher comme ça devant lui…

Et rien, rien, toujours rien… C’était pourtant impossible qu’il ne fasse pas mouche… ! Des décennies maintenant qu’il rédigeait ce genre de courrier, des décennies qu’il empoisonnait la vie des gens, par pure méchanceté, pour le plaisir de faire le mal. Son premier échec se profilait-il… ? Il n’en mangeait plus, n’en dormait plus, et la nuit où, à l’aide de son télescope, il les surprit en train de faire l’amour dans leur chambre, c’en fut trop. Il ne put supporter leurs gestes de tendresse, leurs baisers, leurs caresses, leurs soupirs de plaisir et leurs mots d’amour qu’il devinait… Son cœur noir s’arrêta d’un coup, et il s’effondra sur le sol, une grimace de douleur figeant son visage.

 

Lorsque le corps fut évacué, le couple d’en face le regarda s’en aller sans émotion apparente. On ne pouvait pas dire que l’homme les avait bien accueillis lorsqu’ils étaient venus s’installer dans cette petite maison à la campagne, et à vrai dire, ils étaient soulagés d’être débarrassés de sa présence malfaisante. Brendan passa un bras autour de la taille d’Anthony et posa un baiser sur le coin des lèvres de son compagnon :

« Ça te dit, une petite promenade dans les bois ?

-Avec toi, toujours. »

Ils fermèrent leur porte et s’engagèrent sans hâte sur le chemin. Inconsciemment, ils sentaient qu’ils avaient échappé à une catastrophe, et éprouvaient le besoin de se rapprocher l’un de l’autre.

 

Trop occupés l’un par l’autre, ils ne prirent pas garde au nid de pie sous lequel ils passèrent en entrant dans la forêt, et ne virent pas l’oiseau noir et blanc à l’œil vif et malicieux qui déchiquetait soigneusement une lettre pour en tapisser le fond de son logis.

 

La lettre du corbeau avait fini par être retrouvée…

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