Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le défi du samedi
Visiteurs
Depuis la création 1 050 486
Derniers commentaires
Archives
11 octobre 2008

Fin du défi de Thétis (Joe Krapov)

Il faisait chaud, une chaleur moite, désagréable. Charlie était étendu sur le trottoir depuis trois heures déjà, évanoui. Peu à peu il émergea du brouillard où se trouvait son esprit, le corps en sueur et la tête lourde. Que s’était-il donc passé ? Il ne comprenait rien…

Ce dimanche matin, il avait trouvé une lettre sans timbre dans sa boîte aux lettres, enfin, une lettre… disons plutôt un gribouillage informe qui alignait les mots suivants :

« Retrouvez-moi à 13h au 2 bd Jasmin derrière le muret en briques. J’ai besoin d’aide, vous êtes mon dernier recours.  Signé : Clémentine. » 

« Clémentine ? Clémentine ? Mais je ne connais pas de Clémentine », se dit-il. Il cherchait dans ses voisins, sa famille, ses amis, ses collègues… Rien… Et puis soudain, ce fut le flash. Clé-men-tine ! Une élève de troisième qui avait quitté progressivement le collège l’année passée en décrochant de tout l’univers scolaire.  Il ne voyait qu’elle. Mais c’était étonnant. Trois mois sans nouvelle et puis ce message venu de nulle part… Il avait été son prof de français pendant quelques mois et son professeur principal aussi, c’est vrai. Ils avaient discuté parfois de son avenir à elle, des discussions franches mais sans lendemain… Il en aurait le cœur net. Il irait, c’était décidé.

Et la matinée s’était déroulée lentement, très lentement, jusqu’à ce qu’il soit enfin temps de se rendre au lieu du rendez-vous. Enfin !… Charlie avait imaginé ce qu’il pourrait lui dire, les questions à lui poser, la réserve à arborer pour ne pas effrayer la jeune fille…Cela ne l’empêchait pas de sentir son ventre se nouer. Lui, le prof, ne pouvait plus se cacher derrière son estrade ou son bureau. Il avançait là, seul dans la rue, et tourna bientôt à l’angle de la rue Jasmin. Sa montre indiquait 13h pile.

A peine avait-il traversé la rue pour atteindre le n°2 qu’une silhouette apparut derrière le muret. Oui c’était bien elle. Mais comme elle semblait amaigrie, le regard triste et le cheveu gras. Charlie avait du mal à la reconnaître. En l’approchant, il essaya de cerner davantage l’état dans lequel elle se trouvait et réalisa alors que ses bras étaient couverts d’hématomes. La jeune fille était loin de l’image de l’élève rebelle refusant de se soumettre au règlement intérieur de son établissement scolaire. On aurait dit  un oisillon tombé de sa branche, dans toute l’étendue de sa fragilité.

«  Que se passe-t-il Clémentine ? Dans quel état es-tu ? Pourquoi m’as-tu contacté ?... »,  s’exclama Charlie. Il avait du mal à retenir le flot de ses questions mais les mouvements trébuchants des lèvres de son élève l’obligèrent à se taire. « Je… Je… J’ai besoin de vous, bredouilla-t-elle. Je ne savais plus à qui demander. Je suis désolée de vous embêter. Je me suis fourrée dans une m… Euh pardon… Je ne peux plus rentrer chez moi, mon père va me … Mon mec est fou… Ma mère, je n’en parle même pas, de toute façon, elle a ses problèmes… » Charlie écoutait attentivement tous ces mots qui se déversaient hors de sa bouche, sorte de soubresauts d’autodéfense qui, elle l’espérait apparemment, allaient lui apporter une réponse salvatrice. Mais de phrase en phrase, il comprenait de moins en moins ce qu’elle attendait de lui. Il était question de drogue, de trafic, d’erreur commise. Au final, il l’interrompit et tenta un résumé de la situation : « Clémentine, tu as aidé ton copain et les choses ont mal tourné ? C’est çà ? » Un hochement de tête le poussa à poursuivre. « Tu n’as pas transmis la drogue à la bonne personne, tu n’as pas récupéré l’argent attendu et il t’en veut maintenant, enfin ils t’en veulent, c’est çà ? » Même hochement de tête silencieux.

Charlie sentait Clémentine honteuse de ses révélations. Lui-même ne se sentait pas très à l’aise mais il ne pouvait plus reculer, elle comptait sur lui. « Mais qu’est-ce que je peux faire pour t’aider ? J’ai du mal à comprendre ce que moi je peux faire pour toi. - Mais, monsieur, je n’ai nulle part où aller. Ils vont me tuer. J’vous jure », articula-t-elle difficilement. Charlie n’en revenait pas. Comme la vie plongeait dans le sordide, qu’on était loin de sa vision du monde dans cette rue… Mais enfin ce n’était pas le moment de se laisser aller à une réflexion sur le monde, il fallait agir et prendre cet être blessé sous son aile. Elle s’était raccrochée à la dernière branche qui lui semblait exister, il ne pouvait pas la laisser tomber. « D’accord, suis-moi. Allons chez moi, on va essayer de régler le problèm… » Mais à peine avait-il fini sa phrase que Clémentine sursauta et fit virevolter ses regards tout autour d’elle. Un bruit l’avait alertée. Elle se mit à courir en pleine rue, affolée, et lui tenta de la suivre. Mais, le temps qu’il réagisse, quelqu’un s’était glissé derrière lui, il le sentait. Le dernier regard qu’il porta fut sur une pochette couleur châtaigne que Clémentine avait laissée tomber de sa poche en s’enfuyant ; elle dépassait à peine du caniveau.

***********************************************

La princesse de Clèves. 2 (suite du texte de Thetis par Joe Krapov)

Je regarde à nouveau ma montre. Il est réellement 16 h 15 ! Comment est-il possible que je sois resté étendu inconscient près de trois heures dans cette rue à deux pas de la dalle d’Argenteuil un dimanche après-midi ? J’entreprends de me redresser.

Ca va. Je n’ai rien de cassé et à part la bosse comme un oeuf de pigeon derrière le crâne, une douleur au bras droit et l’engourdissement général qui suit les sommeils profonds, ça va. Pour en avoir confirmation, je vais me planter devant la vitrine de l’épicier de nuit, juste en face du banc public au pied duquel j’étais allongé. L’Arabe à l’intérieur me regarde d’un air inquiet puis il retourne à sa clientèle.

Evidemment, la pochette couleur châtaigne que Clémentine avait laissé tomber a disparu. Je tâte mes poches : j’ai toujours mon portefeuille et mes clés. Il est plus que temps de rentrer à la maison. Mon épouse va finir par s’inquiéter. Et j’ai besoin d’un remontant pour réfléchir à la façon dont je vais sortir cette gamine de la mouise.

***

La douleur à l’intérieur du bras, c’est la trace d’une piqûre, protégée par un tampon ouaté et un sparadrap. Clothilde et moi frémissons d’horreur en découvrant ce truc. En plus de m’avoir assommé, ces salauds-là m’auraient-ils injecté de leur saloperie ? J’ai soudain un étourdissement. Je vais m’allonger et Clothilde appelle le docteur Olive.

***

J’ai dormi une heure et ça m’a fait du bien : j’ai trouvé un plan pour rebondir ! Quand le docteur arrive, nous ne lui parlons que de la bosse et d’un accident domestique. Il a l’air sceptique mais me met en arrêt pour deux jours. Dès qu’il a descendu l’escalier, je saute du lit, m’habille et sors.

***

Madame Josiane est l’intendante du Collège. Clés, comptabilité, monnaie pour la cantine, permanence du dimanche. Elle part en retraite bientôt et il est sûr qu’on la regrettera ici. Elle vient m’ouvrir la grille et m’emmène au service de scolarité. En farfouillant dans les fichiers, je finis par dégoter « Dupuis Clémentine ». De 2003 à 2007, ses parents ont habité au 15 de la rue Paul Vaillant-Couturier. Pourvu qu’ils y soient encore !

***

Sébastien Douillet est policier et c’est une baraque. Je l’ai connu à l’époque où il y avait encore une police de proximité et où on jouait au foot après la classe avec les élèves du bahut. Il veut bien m’accompagner chez les parents mais m’engueule parce que ça va lui faire rater « Le masque et la plume ». Je lui dis que c’est podcastable et urgent. Il bougonne et on se donne rendez-vous au 15 de la rue PVC à 20 h.

***

C’est une maison de brique. Je frappe à la porte, un peu angoissé, et m’attends à voir surgir un alcoolo hystérique armé d’un fusil à pompe et… pas du tout ! La petite dame nous fait entrer dans le séjour où elle et son mari, un petit bonhomme rondouillard à lunettes, regardent le journal télévisé. Ils ne comprennent rien à mon histoire d’agression et encore moins quand je parle de SOS femmes battues et d’un trafic de drogue auquel leur fille serait mêlée. Pire, ils me regardent comme si j’étais moi-même une espèce de junkie et seule la présence du balaise à l’air doux qui est à mes côtés les empêche de me prendre pour un taré. Sébastien est d’ailleurs le seul flic rassurant que je connaisse en ce bas monde.

- Notre fille est rangée des voitures, commente le père, et encore, elle ne nous a jamais vraiment causé de souci. Malgré ses problèmes en troisième elle a quand même eu son brevet et elle a trouvé du travail dans une troupe de théâtre. Et puis elle est stabilisée, elle est fiancée avec un médecin urgentiste plus vieux qu’elle mais tout ce qu’il y a de bien.

Je sors un peu confus mais avec ce que je souhaitais obtenir : l’adresse de la fille chez son copain à… Neuilly-sur-Seine ! Le toubib s’appelle Gilles Lepape-Carpentier. Sébastien maugrée pour sa soirée fichue.

- Tu vas pouvoir écouter un bout du Masque sur ton autoradio pendant qu’on roule ! »

***

Eux habitent un appartement dans une résidence de luxe et il faut que Sébastien montre sa carte barrée de tricolore pour que le gardien nous ouvre et nous laisse accéder au 3e étage. Je sonne. Je perçois un changement de luminosité au niveau du judas mais la personne derrière la porte n’ouvre pas.

- Clémentine ? C’est vous ? C’est Charlie. Je viens pour vous aider ! »

- Allez vous en ! Je n’ai plus besoin de vous. Mes problèmes sont résolus. Je ne vous ouvrirai pas. »

Ca énerve Sébastien qui sort du renfoncement dans lequel il était dissimulé.

- Police, mademoiselle. Ouvrez ! »

S’ensuit un grand silence. On imagine des bruits de pas à l’intérieur puis on entend celui des barres de sécurité qu’on déverrouille. Un jeune type en cravate nous fait face, très calme et sûr de lui.

- Vous avez un mandat de perquisition ? »

- Non, avoue Sébastien, mais… »

- Je veux bien recevoir monsieur, mais pas vous ! »

Sébastien m’interroge du regard et je lui fais signe que c’est bon, qu’il m’attende.

***

- Qu’est-ce que vous voulez monsieur Mence ? » me demande-t-il.

Avant de lui répondre, je contemple Clémentine. De sa robe à fleurs à manches courtes ressortent deux bras inquiets mais sur la peau desquels ne se remarque plus aucun hématome. Son visage, maquillé, est resplendissant et l’adolescente frondeuse que j’ai côtoyée jadis et qui avait repris son look de marginale ce midi s’avère être devenue une très jolie jeune femme.

Il faut s’attendre à tout de la part d’une comédienne !

- Vous allez bien monsieur Mence ? Est-ce que votre hématome se résorbe comme il faut ? »

Il se fout de ma gueule ou quoi ?

- Quand on vous a amené dans mon service cet après-midi, ça saignait pas mal. Le voyou qui vous a fait ça ne vous a pas raté. Nous vivons de bien tristes temps d’insécurité, voyez-vous ! Cette dalle d’Argenteuil, il aurait vraiment fallu la nettoyer. Au Kärcher, ça aurait été bien ! Mais pourquoi allez vous vous promener dans ces rues-là, monsieur William ? »

Il connaît Léo Ferré et il se paie ma tronche, ce petit con !

- On a dû vous faire une piqûre. A cause de votre délire sur la drogue, les Tangerine dreams, vos histoires de clémentines et de châtaignes. Une vraie pochette-surprise toute pleine d’incohérences, votre discours. Rassurez-vous, ce n’était qu’un sédatif. Bon, peut-être que la seringue avait déjà servi. On nous recommande tellement de faire des économies, à l’hôpital, alors… Bien sûr, il y a aussi des risques d’infection noscomiale et puis, avec tous ces drogués qui atterrissent dans nos couloirs et qui laissent traîner leurs seringues un peu partout, le risque de confusion n’est jamais écarté, n’est-ce pas ? »

J’ai envie de lui sauter à la gorge à ce salaud mais je me retiens. Je veux tout comprendre et je sens qu’il va tout me dire.

- Au fait, je suis désolé, mais on n’a pas pu vous garder bien lontemps. En ce moment on refuse du monde chez nous, le dimanche. On n’a même pas eu le temps de vous inscrire sur le registre des entrées-sorties, c’est dire ! Dommage, hein ?

- Bon, allez, je vais être beau joueur. Pourquoi moi ? Et pourquoi tout ce cinéma ?

- Ca devrait vous plaire, monsieur Mence, le cinéma. Vous ne vous occupiez pas du ciné-club au Lycée Romain Rolland autrefois avant d’être muté au collège Jean-Jacques Rousseau ?

- Si mais… Je ne vois pas…

- Ne cherchez pas par là. Pensez plutôt littérature. Vous êtes prof de français, non ? Vous n’êtes jamais venu à Neuilly ?

- Je n’ai pas souvenir…

Et puis si, ça me revient. Je lui hasarde :

- 2000 ? 2001 ? L’épreuve de français du baccalauréat ? »

- Bravo, mister Mence ! Vous m’avez donné 1 sur 20 après m’avoir interrogé sur la préciosité dans « La Princesse de Clèves ». Vous êtes sûr que vous n’étiez pas un peu sadique, vous, à l’époque ? »

- Je pourrais porter plainte pour coups et blessures et voire plus pour cet après-midi ! »

- Voyons, monsieur Mence ! A l’heure où vous avez été agressé, j’étais à la clinique. Et Clémentine au cinéma. Elle a eu grand soin de conserver son ticket. Je vous raccompagne, monsieur Mence. Croyez-en le corps médical, il n’y a pas de bobo, juste un œuf de pigeon qui va s’envoler comme par magie et quelques inquiétudes supplémentaires. Il y a plein de choses pires qui auraient pu vous arriver : vous réveiller attaché par une menotte à un cadavre d’homme roux. Ou ligoté tout nu sur une chaise avec une vipère endormie dans un carton sur vos genoux ! »

Je tourne mon regard vers Clémentine mais cette péronelle pouffe de rire dans son coin comme une ravissante idiote qu’elle a toujours été.

***

On est ressortis dans une nuit plus noire encore que celle que j’avais connue de 13 h à 16 h. J’avais vraiment le « Neuilly blues » de Gilbert Laffaille mais c’était beaucoup moins drôle. Je n’ai rien dit de tout cet échange à Sébastien. Je me suis excusé platement du dérangement et je l’ai invité à dîner samedi prochain. Je lui ai demandé de me déposer sur le lieu de l’agression.

***

L’épicier de nuit s’appelle Mohamed. Très sympa. Je lui ai acheté deux bouteilles de son Sidi Brahim plus une bouteille de cidre finistérien et il m’a confirmé qu’il avait bien tout vu de l’agression. C’est un infirmier en blouse blanche qui m’a filé un coup de gourdin sur le citron et un autre qui conduisait l’ambulance s’est pointé aussitôt après pour m’embarquer comme si j’avais juste fait un malaise dans la rue. Vers quatre heures, ils sont revenus me déposer sur le banc où je n’étais plus pour les rares passants qu’un S.D.F. comme un autre.

***

J’ai fait un test de dépistage du virus du VIH. A cause de ce con de Lepape, Clothilde et moi avons fait abstinence pendant tout le temps où j’attendais les résultats : elle n’aime pas les préservatifs.

***

Le test s’est révélé négatif, heureusement. Et maintenant je donne une note minimum de 10 à tout le monde quand je corrige une copie ou que je note des élèves.

- « Deux pigeons s’aimaient d’amour tendre », c’est de La Fontaine, pas de Mallarmé ! Vous auriez pu bosser un peu, quand même. Je mets dix pour le déplacement ! ».

Publicité
11 octobre 2008

Fin du défi de Joe Krapov (Tilleul)

- Six pages et demie ? Vous vous fichez de nous Joe Krapov ? On vous avait dit de faire court !

- Justement, je les ai publiées sur mon blog et je ne vais vous livrer que le résumé !

- Faites vite, alors ! On connaît votre goût pour les parenthèses ! Et votre « Odyssée résumée pour les nuls » contenait quand même 2009 chants !

- Ici, ça commence par un agenda. C’est celui de Francis Carcopino, l’homme d’affaires à propos duquel j’ai écrit la semaine dernière.

- Ainsi donc, le feuilleton continue ! C’est une manie, chez vous !

- Ne m’interrompez pas tout le temps, Papistache, je ne pourrai jamais faire court, sinon !

- D’accord ! D’accord ! Je me tais !

- Voilà le contenu de l’agenda :

Mercredi 24 septembre, la secrétaire du milliardaire collectionneur d’art, Martine Vingt-Trois ne vient pas bosser. Elle ne téléphone pas pour s’excuser de son absence.

Jeudi 25 septembre: le conservateur du Musée des Beaux-Arts de Rennes n’a pas répondu à son courrier. Carcopino va devoir racheter le tableau d’Isaure Chassériau qui lui avait été prêté et qui a été mystérieusement endommagé.

Vendredi 26 septembre : Martine 23 n’a toujours pas donné signe de vie et il se morfond car il ne peut pas aller « toucher à ses boîtes de cigares dans le bureau ovale » en son absence.

Lundi 29 septembre à 9 h : son équipe de foot a gagné son match, ça le met en joie mais en arrivant au boulot il apprend que sa boîte a été victime d’un casse. Visiblement, on n’a rien dérangé ni dérobé mais à 10 h il s’aperçoit qu’on a volé le tableau représentant Isaure dans le bureau de Martine 23. A 15 heures, en utilisant un faux nom, « Jmechov » et une identité de marchand de bois et charbon, il se rend chez un détective privé nommé Florent Fouillemerde. Quand celui-ci apprend qu’il s’agit de retrouver Isaure Chassériau, il refuse l’affaire malgré « le nombre considérable de zéros inscrit sur le chèque ».

Mardi 30 septembre à 9 heures du mat’ : il a l’impression d’être suivi par une Ami 6 Citroën depuis la veille. A 10 heures, il reçoit un coup de fil. Un mystérieux « Front de libération des Prairies Saint-Martin canal historique » lui réclame 700 milliards de dollars en échange d’Isaure Chassériau et réclame le droit pour un groupe de rock nommé « Les Galeries Lafaillite » de jouer l’année prochaine lors de la braderie du canal. Il refuse.

A 11 heures, un artiste qui veut lui vendre une installation à base d’un tableau antique et de trois cocottes-minutes lui donne rendez-vous dans la rue Saint-Louis à Rennes. Il se promet d’acquérir l’œuvre si elle n’est pas trop chère.

Fin de l’agenda. C’est cet après-midi là qu’on procède à son enlèvement dans la rue en question. Le principal témoin, placé en garde à vue, est interrogé par la police puis relâché. Il s’agit d’un détective privé nommé Florent Fouillemerde, qui se déplace en Ami 6 et qui nie avoir pris des photos dans cette rue, de même qu’il n’a pas reconnu, sous le pseudonyme de Jmechov, le célébrissime milliardaire Carcopino.

Quand il sort du commissariat, Fouillemerde examine les photos qu’il a prises dans la rue Saint-Louis et se demande s’il va se mettre en chasse du milliardaire pour toucher la prime promise.

- Et ?

- Et puis c’est tout. Voilà la photo ci-dessous. Et le détective a très bien vu trois femmes embarquer Jmechov dans la 4L à l’arrière de laquelle se trouvait un grand coffre en osier.

- Une histoire dans laquelle une secrétaire, un tableau, un milliardaire et un témoin disparaissent au bout d’une page…

- Six pages et demie, Papistache, c’est vous qui m’avez demandé de raccourcir.

- Ca reste quand même assez, comment dirai-je… ?

- Inextricable ?

- C’est celaaaa, oui !

- C’est ce qui était demandé, aussi !

- Eh bien merci Joe Krapov ! Bon amusement pour la personne qui vous a précédé et qui va devoir composer avec tout cela pour raconter la suite !

Quand Joe Krapov s’en va, Papistache s’interroge sur « Val et Cie » et sur la plaque d’immatriculation TTC 59. Pourquoi donc Mamoune serait-elle mêlée à tout cela ?

Monsieur le Commissaire,

Comme promis, je vous envoie le rapport de mes investigations. (Constatez-le par vous-même, vous avez bien fait de me relâcher…)

Appelé le lundi 29 septembre chez Monsieur Jmechov pour élucider le vol " d’une fille en rose, avec des couettes et l’air nunuche ", je crois qu’il s’agit de son épouse…, je refuse le contrat… nulle envie d’infiltrer la mafia russe. En 1999, déjà, j’avais reçu un sérieux avertissement.

Avec mon ami 6 (petite voiture bien pratique pour passer inaperçu), je le prends néanmoins en filature. J’apprends que ce monsieur est en fait, le milliardaire Francis Carcopino, collectionneur mais surtout big boss de l’équipe de football de Rennes…

Puisqu’il s’agit de recevoir une prime, je commence mon enquête.

     

  1. En fouillant dans ce milieu du sport, je découvre les tricheries, pot de   vin…

Carcopino pense qu’il peut tout acheter. Les autres clubs essaient de le coincer. Ils en ont assez de perdre les matches qui les opposent à Rennes.

    2.  De fil en aiguille, j’arrive dans les locaux de l’équipe de La Rochelle. C’est de là qu’a été

         lancée, l’idée d’enlèvement de ce magnat du foot. Val, la trésorière du club, aidée de

         deux copines (l’une résidant en Outre Manche et l’autre, barmaid à la rue saint Louis

         à Rennes), Val donc, est propriétaire d’une R4 (elle aurait craqué pour ce véhicule

         décoré nouveau style cool et fun…) et d’une grande malle en osier, reçue en juillet,

         lors de son mariage…

     

  1. Janeczka (puisqu’il s’agit bien d’elle), sa comparse, aurait préféré   s’installer au volant
  2.  

    (son permis de conduire est très récent…), mais en jouant sur son ukulélé,   elle était censée distraire le collectionneur…

     

  3. La barmaid, amie des deux autres, a attiré le futur otage avec un motif   bidon (la
  4.  

    vente d’un soi-disant tableau de trois cocottes…), et de son plus beau   sourire, l’a

     

    persuadé de grimper dans la malle… (La troisième du trio aurait pu être   Mamoune mais elle était occupée à cuire de bons spéculoos à distribuer à   l’issue d’un concert rock…)

     

  5. Le samedi 4 octobre, Janeczka (absente pour le défi du samedi), embarquait   avec

un " gros " bagage, pour une destination lointaine… peut-être une île au nord…

Sur son blog, un seul mot : " away for the weekend "

Voilà, Monsieur le Commissaire, l’explication de cette disparition.

Les temps sont durs. Je compte sur votre diligence pour m’envoyer la prime méritée.

Votre dévoué détective privé,

Florent Fouillemerde.

P.S. Pour élucider le reste de cette affaire, vous pouvez jeter un œil sur le document

ci-joint... Ne me demandez pas comment je me le suis procuré… secret professionnel !

 

 

Extraits du journal intime de Martine23 Duval.

Secrétaire " pas duraille en affaires ni fute-fute en quoi que ce fût… "

Mardi 22 juillet 19h30

J’ai bien attrapé mon patron (qui me considère comme une mijaurée ). Il aurait voulu que je choisisse un Picasso (son billet d’entrée lui donnant droit à une œuvre de son choix) et j’ai ramené le portrait d’Isaure Chassériau. Tableau de 1838, peint par mon aïeul, (élève d’Ingres), Eugène Amaury Duval. L’esprit de famille, c’est sacré !

Mercredi 23 juillet 18h30

Francis Carcopino (mon boss milliardaire, collectionneur d’œuvres d’art), n’apprécie pas la peinture de feu mon arrière arrière grand-père… " C’est un tableau qui parait relever du pire néo classicisme tendance mou du bulbe ! " dit-il… Il sursaute chaque fois qu’il sort de son bureau ovale et qu’il aperçoit le trésor suspendu dans l’antichambre où je travaille…

Maintenant, " au lieu d’une cruche, j’ai deux gourdes "… Ce sont ses propres mots !

Vendredi 25 juillet 7h10

J’ai retrouvé dans le fond du grenier, une croûte de Gene Séki (peintre moderne qui puise son inspiration dans les décors du dix-neuvième siècle). Une porte gris-ciel, des moulures, un rideau bleu… on jurerait le fond de la toile qui m’est chère.

Je vais jouer un tour à ce monsieur, collectionneur peut-être, mais pas connaisseur… Traiter un si beau tableau de " peinture figurative atone, monotone et autochtone "… !

Lundi 28 juillet 7h10

La tête qu’il va tirer, quand il va s’imaginer que le " radis rose " s’est fait la malle… Hier soir, j’ai échangé les tableaux… L’essai de Gene Seki est accroché à la place de l’autre…

Lundi 28 juillet 19h30

Il n’a rien remarqué ! Faut dire que je suis bonne comédienne ! Il s’imagine que la toile est hantée…

Vendredi 1° aout 19h30

Ma nièce, élève à l’Académie des Beaux Arts, (en repos chez moi avec une entorse à la cheville) a voulu " embellir " Isaure de Chassériau… Elle lui a peint un chapeau sur la tête et elle a même ajouté une étiquette " press ". Quel gâchis !

Tant pis ! Cette nuit, je vais de nouveaux échanger les tableaux… Et chaque samedi, la belle réapparaitra pour disparaitre chaque lundi. Il ne s’imagine pas de quoi est capable une demeurée… Ah ! Il n’aime pas qu’on se moque de lui, ce milliardaire…

Mercredi 24 septembre 10h

Je ne supporte plus les brimades, marmelades, engueulades, tocades de Carcopino… C’est décidé, j’arrête de travailler ! " La môme Chassériau, celle qui est en rose et qui a des couettes " restera chez moi… J’ai un bon plan qui va me faire gagner beaucoup d’argent !

Rira bien qui rira le dernier !

11 octobre 2008

Fin du défi de Aude (Poupoune)

Gerry Henrard, l’inspecteur le plus sexy de l’ouest et bien au-delà encore était bien ennuyé. Il lui avait été dérobé la sculpture qui trônait sur son bureau depuis de nombreuses années. Il aurait d’autant plus de mal à la retrouver que pour se concentrer il avait la réconfortante habitude de la contempler, voire la caresser distraitement. Et à chaque fois, ça ne manquait jamais, la solution de l’énigme s’imposait à lui, évidente. Il bouclait alors son enquête en quelques heures.

C’était une sculpture assez particulière que lui avait offerte un ami sculpteur : Philippe Mordevol. Elle représentait un sexe de femme. Tous ne s’en apercevaient pas au premier coup d’œil, mais parfois un regard un peu plus attentif se transformait en regard pour le moins surpris quand les personnes présentes dans le bureau de Gerry Henrard s’apercevaient de la forme originale voire originelle de la sculpture. Il était toutefois fort heureux que Gerry ne travaille pas à la brigade des mœurs. Le supérieur de Gerry, le commissaire Clandus ne s’était jamais aperçu de rien. Il croyait encore qu’il s’agissait d’un moulage raté réalisé pour la fête des pères par le fils de Gerry.

Gerry aurait pu demander à Moredevol de lui en vendre une autre mais il attribuait à sa sculpture des pouvoirs magiques.

Il n’avait aucun indice. Les personnes habituelles avaient eu accès à son bureau : ses collègues, son chef et la femme de ménage en qui il avait toute confiance.

 

***

Il faut retrouver la sculpture de Gerry Henrard !

.

Mais qui donc a bien pu voler à Gerry Henrard, l’inspecteur le plus sexy de l’ouest et bien au-delà encore, sa vaginale statuette, réalisée par son ami Philippe Mordevol et objet d’inspiration et de superstition auquel l’inspecteur attribue des vertus surréalistes mais pour le moins rassurantes ? 

Tout le monde la trouvait moche ou de mauvais goût, sa sculpture, voire les deux… alors ça ne pouvait être que pour lui nuire et nuire à son travail qu’on la lui avait volée… Mais qui ?

.

Parmi ses collègues, certes, les blagues allaient bon train : «  Alors Gerry, on suit la piste d’une chatte sous un doigt brûlant ? » ou encore : « Pour le jour et l’heure du décès, tu crois qu’on a le choix dans la date ? », mais tout ça était plutôt bon enfant, jamais vraiment méchant…

.

Et puis il aurait sans hésiter confié sa vie à chacun d’entre eux et tous avaient en lui une confiance tout aussi aveugle alors oui, vraiment, ses collègues étaient au-dessus de tout soupçon.

.

Le jour de la disparition de la sulfureuse statuette son chef, le commissaire Clandus, était tout affairé parce que sa femme et son fils venaient le chercher pour partir en vacances : il voulait à tout prix éviter que le gamin ne tombe nez à nez avec une racoleuse dénudée ou un dealer édenté… Alors il avait eu d’autres chats à fouetter… et de toute façon, c’était pas le genre du patron.

.

Quant à Elena, la femme de ménage… Pauvre Elena… Déjà rouge de colère et de honte mêlées quand elle crut que Monsieur l’inspecteur la soupçonnait, alors qu’il ne cherchait qu’à reconstituer les dernières vingt-quatre heures de sa sculpturale égérie, elle vira vite carrément cramoisie : chaque jour, méticuleusement, elle prenait, époussetait et soigneusement reposait l’anodine babiole, alors elle réagit à grands cris - « rézousse ! » « Maria ! » - en apprenant ce qu’était réellement l’objet dérobé… Elle se signa, quitta précipitamment le bureau et refusa de revenir y faire le ménage.

.

Gerry la soupçonnait néanmoins d’être revenue quand il trouva une chouette clouée sur sa porte… Mais il n’était pas beaucoup plus avancé.

Il chercha un palliatif et essaya de se concentrer sur son presse-papier boule à neige, en le frottant distraitement d’un doigt nerveux, mais l’inspiration ne vint pas et l’énigme de sa sensuelle statuette lui paraissait toujours aussi obscure et insoluble.

.

A moins que… Le voleur avait peut-être opéré pour un commanditaire ? Que ne ferait-on pas pour de l’argent… ? Bien sûr cette idée là ne lui plaisait guère, mais il lui fallait bien reconnaître qu’elle tenait la route : Mordevol.

.

La nature de ses œuvres et ses liens parfois nébuleux avec certaines affaires sordides lui valaient de tenir une bonne place dans les fichiers des mœurs… Certes il n’avait été suspecté dans aucune affaire dont s’était occupé Gerry Henrard et il n’était connu à la crim’ que pour son amitié avec l’inspecteur, mais c’était quand même dans le cadre d’une enquête conjointe avec les mœurs que les deux hommes s’étaient rencontrés…

.

Serait-il possible alors que le ténébreux artiste ait osé abuser l’inspecteur ? Lui aurait-il offert cette sculpture pour la soustraire à l’attention des enquêteurs dans le cadre d’une affaire l’incriminant ? S’agissait-il d’un élément à charge que Gerry aurait malgré lui caché aux autorités, évitant ainsi à son ami d’être inquiété ? Gerry Henrard, l’inspecteur le plus sexy de l’ouest et bien au-delà encore, aurait-il été, à son insu, le complice d’un crime ?

 

L’inspecteur désabusé en était là de ses laborieuses et poussives réflexions, en proie au doute et à la perplexité, quand son supérieur, de retour de vacances, passa la tête à sa porte et lança :

- Ah ! Henrard, faudra me faire penser à vous rendre votre machin, là. Il ressemblait à un truc qu’avait bricolé mon fils pour Noël : je lui avais dit que je l’avais pris pour décorer mon bureau et comme le gamin est passé l’autre jour, je vous ai piqué le vôtre pour qu’y sache pas que j’avais bazardé le sien…

- … ?

- D’ailleurs, c’est marrant, vous savez ce qu’il a dit ? « Papa, pourquoi t’as une zézette sur ton bureau ? » Sans rire ! Ah les mômes, j’vous jure ! 

.

11 octobre 2008

Fin du défi de Papistache (Val)

Les aventures d'Anthelme Poustabosse : Épisode 537 (Papistache)

Résumé du précédent épisode : Anthelme Poustabosse, après s’être rendu au repaire de l’ignoble Dugommoi, savant fou, est lâchement assommé alors qu’il s’apprêtait à mettre la main sur le maroquin du professeur.

 

Un feu d’enfer incendiait littéralement la cheminée. Dos au foyer, Anthelme Poustabosse, chroniqueur au Petit XXIe et présentement ligoté sur sa chaise, sentait arder les flammes qui menaçaient à tout moment de faire exploser la bouteille de gaz que son ennemi juré, le professeur  Dugommoi, avait trainée en face de l’âtre.

 

Nu sur son siège, exposé au feu des buches amoncelées et comprimé par les cordes qui le liaient au dossier et à l’assise, Anthelme frissonnait. Sur ses cuisses, reposait une vipère du Gabon encore engourdie, que le professeur avait sortie d’un bac réfrigéré dans lequel somnolait le venimeux animal. Cependant, Anthelme devinait, aux légères ondulations du reptile, que la chaleur commençait à tirer le serpent de sa torpeur. Quand la vipère aurait recouvré ses esprits, il savait qu’un simple tremblement de sa part provoquerait l’attaque mortelle. Il respirait à petites lampées. La vipère reposait sur son bas-ventre et l’ignoble Dugommoi n’avait pas omis de glisser un DVD pornographique dans la fente idoine du lecteur avant de s’éclipser. Anthleme, les yeux clos, luttait pour ne pas entendre les gémissements des protagonistes ni les bruits humides des corps affrontés. La plus petite érection de sa part exciterait le serpent et lui serait fatale.

 

Sa chaise, dont les pieds de devant  reposaient sur deux gros dictionnaires, menaçait à tout moment de basculer en arrière. Tourner la tête lui aurait été funeste, il aurait entrainé dans sa chute la vipère à la morsure irrémédiablement mortelle et, la corde de piano, nouée d’un bout autour de ses parties génitales  et de l’autre à un vicieux mécanisme installé au plafond, se serait tendue, le soulevant du sol, précipitant sa gorge à la rencontre d’une lourde lame en acier de Tolède, tranchante comme un rasoir.

 

Il avait vraiment contrarié Dugommoi.  D’ailleurs celui-ci, n’avait pu s’empêcher d’injecter un poison à effet retard dans les veines du jeune reporter. Si l’antidote n’était pas administré dans la demi-heure, le cœur d’Anthelme se serrait définitivement et Dugommoi, jamais pris à dépourvu, avait pris soin, au moyen d’un fil de coton, avant de quitter son antre, de coincer l’ampoule salvatrice sous la porte. Ainsi, le premier qui la pousserait écraserait le précieux flacon.

 

Entrer par la fenêtre exposerait notre aventureux ami à une mort certaine. A peine le volet, soigneusement clos, serait-il ouvert, qu’une corde tendue et reliée à la détente d’un fusil au canon scié enverrait une décharge de chevrotines en pleine poitrine du malheureux journaliste trop entreprenant.

 

La vipère ondulait imperceptiblement. Anthelme s’attendait à tout moment à l’explosion de la bouteille de gaz. Les jeunes gens, sur l’écran à plasma dont le son avait été poussé au maximum, s’agitaient à l’unisson. La vipère ne devait pas être provoquée, sinon sa réaction fulgurante abrègerait et la vie de notre héros et ce récit. La chaise, en équilibre précaire, menaçait de précipiter la gorge du pantelant jeune homme à la rencontre de la lame acérée et un poison mortel roulait dans ses veines. À ce moment précis, la gueule noire du fusil lui paraissait un bien futile péril.

 

Dugommoi avait certainement alerté la commissaire Suzy Laguibolle. Connaissant la gaucherie de celle qu’il avait maintes fois  croisée au cours de sa tumultueuse — mais courte — vie à la recherche de la vérité quant aux agissements du monstrueux savant fou, Anthelme ne pouvait s’empêcher d’imaginer le craquement de l’ampoule contenant l’antidote sous la semelle des escarpins de l’officier de police. Son bâillon, fermement noué, l’empêcherait de proférer le moindre avertissement et le bruit du téléviseur allait couvrir ses gémissements.

 

Dehors, les crissements des pneus d’un véhicule équipé d’une sirène polytonale se firent entendre. Des talons hauts et effilés claquèrent sur le perron...

 

La semaine prochaine.
Comment le reporter du Petit XXIe réussira-t-il à se sortir du guêpier dans lequel il s'est fourvoyé ? Vous le saurez, en lisant le cinq-cent-trente-huitième épisode des Aventures d'Anthelme Poustabosse, un feuilleton rocambolesque co-écrit par le Papistache du Défi du Samedi et son prédécesseur  pour la consigne #29 du 4 octobre 2008.

Les aventures d'Anthelme Poustabosse : Épisode 536

.

Résumé du précédent épisode :Anthelme Poustabosse, s’étant fourvoyé dans un sacré merdier, redoute sa mort imminente, qu’il imagine comme ayant le doux visage confus du commissaire Laguibolle.

.

Poustabosse fermait les yeux de toutes ses forces. Il ne voulait pas voir la porte s’ouvrir. Pourtant il savait que ce n’était plus qu’une question de secondes, et que l’apparition du commissaire Laguibolle tirerait un trait sur ses dernières chances de survie. Cette peur saisissante avait quand même pour avantage de lui avoir fait oublier les gémissements des deux athlètes. Son bas-ventre ne le démangeait plus du tout.

.

Contre toute attente, il entendit de nouveau les talons du commissaire Laguibolle claquer sur le perron. Il comprit que la belle était en train de faire demi tour. Certainement que les cris de jouissance des deux tourtereaux devaient s’entendre de l’extérieur, et que la naïve commissaire avait dû penser à une farce de la part de Dugommoi et qu’elle était en train de repartir en direction du commissariat.

.

Il était dans de beaux draps, à présent. Bien sûr, il gardait une infime chance de se voir administrer l’antidote, mais il était bien seul face à moult danger qui planait au dessus de lui. La vipère commençait à s’agiter. La chaleur semblait l’indisposer, mais bien moins encore que le sexe du reporter, qui commençait à se raidir. Il faut dire que l’idée que la gauche, mais non moins désirable Suzy ait pu s’émoustiller en croyant entendre deux amants s’en donner à cœur joie de l’autre coté de la porte y était pour beaucoup. La chaleur, si prés du feu, était suffocante. Les bouteilles de gaz se faisaient de plus en plus menaçantes, mais un peu moins que la lame acérée. Avec tout ça, l’immobilité de Poustabosse, malgré sa bonne volonté était de plus en plus précaire. Heureusement pour lui, il ne sentait pas encore les effets du poison qui coulait dans ses veines, et personne ne songerait non plus à ouvrir le volet.

.

C’était bien mal connaître la gauche Suzy ! Poustabosse eut le sang glacé quand il aperçut l’ombre du commissaire à travers le volet. La gueule noire du fusil braquée sur lui, qui était jusque là le moindre de ses soucis, devenait la menace la plus critique. Cette frayeur nouvelle eut tout de même pour effet de ramollir son sexe instantanément. D’ailleurs, la vipère, incommodée certainement par les divers mais non moins brutaux changements de température du corps de Poustabosse, ou alors sentant elle aussi que le fusils mettait sa vie en péril, se hissa lentement le long de la cuisse de notre héros pour prendre la fuite.

.

A une autre occasion, la retraite de la vipère aurait fait les affaires de Poustabosse, mais dans de telles circonstances il en était presque ennuyé. Quitte à périr percé par des chevrotines, autant qu’une balle perdue touche également l’animal.

.

La vipère était maintenant à terre et se dirigeait lentement vers la porte. L’ombre de Suzy restait immobile ou presque derrière le volet. Il semblait à Poustabosse que tantôt elle y collait la joue, tantôt le nez. Il se retenait de gémir pour éviter qu’alertée, elle n’ouvre le volet précipitamment.

.

Il imaginait la gauche, mais non moins grivoise Suzy, toute fiévreuse, tentant de picorer en vain quelques bribes de la scène qu’elle devait imaginer très libertine. Cette polissonne derrière le volet, en plus des images diffusées à l’écran, sur lequel l’homme avait maintenant pris sa partenaire par derrière, le faisaient bander comme un taureau. La vipère loin de son engin à présent, il ne retenait plus son érection. Quitte à mourir, il mourrait le membre raide, c'est-à-dire dignement.

.

Soudain, des bruits de pas lourds sur le perron vinrent troubler ses pensées cochonnes. Quelqu’un était derrière la porte, et ce n’était pas Suzy, dont l’ombre derrière le volet clos n’avait pas bougé d’un poil. Poustabosse se demanda alors s’il ne valait pas mieux que le commissaire ouvre le volet. Son corps nu serait moins hilarant à voir, percé de mille trous de chevrotines que ligoté sur cette chaise le sexe tendu. Il se remit donc à gémir de toutes ses forces, et se dit qu’au cas ou la gauche Suzy croirait toujours à une scène licencieuse, il se déhancherait de tout son saoul sur sa chaise en équilibre, préférant la froideur de la lame à l’humiliation. Qu’on le trouve ainsi nu, bâillonné, à l’agonie et bandant serait la pire mort qu’il puisse avoir.

.

Il resta comme paralysé quand la porte se fendit soudain en deux et qu’il vit un homme au gabarit d’un ours apparaître derrière les deux planches de bois, qu’il éjecta l’une après l’autre de grands coups de pieds.

La vue de la vipère qui en profitait pour prendre la fuite entre les jambes du malabar tatoué ne le consola qu’une demie seconde. Qu’il devait être ridicule en cette position plus qu’embarrassante !

Il hésita à bouger un court instant, mais il eut une lueur d’espoir quand il vit que la démolition de la porte n’avait pas endommagé le flacon contenant l’antidote. Cette expectative s’envola quand l’homme, fou de rage, probablement un voisin dérangé par les gémissements incessants, s’approcha de lui, semblant vouloir lui arracher les yeux.

.

Le gros balaise lui hurlait dessus, à présent. Poustabosse gémissait nerveusement, essayant de lui faire comprendre en vain la situation. L’homme ne voulut rien entendre et le traita de tous les noms d’oiseau, pensant avoir affaire à un détraqué qui se faisait du bien en se ligotant devant un film pornographique.

.

Alors que l’homme menaçait de lui donner un coup de poing, ce qui aurait eu pour effet de  faire basculer la chaise et de tendre la corde, c’est à dire le soulever du sol par les testicules et le précipiter vers la lame tranchante, le volet s’ouvrit brusquement.

.

L’ouverture du volet enclencha la détente du fusil au canon scié, et une décharge de chevrotines tomba en avalanche dans le dos du pauvre baraqué planté devant la chaise de notre ami. Celui-ci tomba sur le coté, au grand soulagement de Poustabosse. S’il lui été tombé dessus, c’était la mort assurée.

.

Le silence régnait dans la pièce à présent. Les protagonistes du film porno reprenaient un peu leurs esprits gentiment. Suzy apparut devant Poustabosse, et celui-ci fut satisfait que les gémissements aient cessé. Il aurait eu l’air malin, nu, le sexe tendu en sa direction. Mais c’était sans compter la corde qui était nouée à ses parties génitales.

.

Suzy, encore probablement un peu dévergondée par ce qu’elle avait cru entendre derrière le volet plus que par jugeote, prit le parti de lui libérer les parties en premier, ce qui eut son petit effet.

.

Elle ne lui en tint pas rigueur, et continua à le détacher. Elle-même avait semble-t-il des choses à se reprocher, ou du moins quelque gêne à expliquer ce qu’elle faisait là, plantée derrière la fenêtre, l’oreille collée au volet.

.

Poustabosse se leva, et prit les bouteilles de gaz brûlantes pour les déposer sur le perron, prenant bien soin de ne pas marcher sur le flacon de l’antidote au passage. Suzy voulut l’aider mais notre héros, connaissant par cœur gaucherie du commissaire, préféra décliner l’offre.

.

Il ramassa ensuite l’antidote et l’avala d’un trait, puis tous deux éteignirent le feu de la cheminée au moyens de couvertures ramassées ici et là.

.

Les gémissements reprirent soudain, d’abord mesurés, puis plus embrassants. Poustabosse, toujours nu, ne put retenir une dernière érection. Le commissaire, légèrement embarrassée, lui lança, un léger sourire aux lèvres : « Allez donc prendre une douche bien fraîche, Poustabosse. Vous avez dû avoir bien chaud. Moi je m’occupe du cadavre ».

.

La semaine prochaine.
Comment le reporter du Petit XXIe réussira-t-il à sortir la gauche, mais non moins belle, Suzy Laguibolle de la sordide maison de passe dans laquelle l’horrible Dugommoi l’a enfermée pour l’y faire travailler de force.

.

Et le perroquet violet sur la pointe de son pied ;) .

.

11 octobre 2008

Fin du défi de Jaqlin (MAP)

Intrigue (Jaqlin)

On était fin juin, la fête battait son plein au centre culturel. Dans l’ancienne ferme qui servait maintenant de cadre aux activités de la MJC, aux différents clubs de sport, aux ateliers musicaux et artistiques, chacun s’était vu attribuer un emplacement pour présenter au visiteur un échantillon de son travail de l’année.

 

Sous le chapiteau dressé dans l’ancien parc à moutons, évoluaient les adeptes de la danse, des quatre- cinq ans aux danseurs de salon d’un âge certain, en passant par les amoureux  du modern jazz. En vis à vis, sur un podium temporaire, les fans du hip-hop rivalisaient de figures toutes plus élaborées les unes que les autres, au son d’accords propres à mettre à mal les tympans les plus endurcis.

 

Un peu plus loin, les différentes disciplines musicales étalaient leurs savoir- faire : les plus jeunes saxophonistes offraient une panthère rose se déplaçant sur des coussinets moelleux pendant que les flûtes faisaient une balade avec Vivaldi, en automne. Juste à côté, les clarinettes accompagnaient le chat de Pierre…

 

Pendant ce temps, les plus jeunes suivaient avec attention les péripéties du "chat qui s’en va tout seul", relatées par une vieille conteuse.

 

Au cours de la promenade, il était possible de découvrir mosaïques, dentelles, différentes techniques picturales. L’assistance était nombreuse, insouciante, déambulant sous les premiers rayons du soleil. Même l’hôte habituel du domaine, Jacob, le paon, était de la fête.  Perché dans l’énorme cèdre qui ombrage pratiquement toute la cour, il suivait d’un air désabusé ce remue- ménage inhabituel. Discret jusqu’à ce que les choristes aient entonné leur premier chant, à partir de cet instant, dès que le registre montait d’un ton, il  y allait de son refrain : "Lé..on ! Lé..on ! », ce qui ne manqua pas de perturber la chef de chœur qui eut bien du mal à terminer sa prestation.

 

Vers dix-huit heures, alors que la fête touchait à son terme et que les organisateurs satisfaits du franc succès de leur journée s’apprêtaient à fêter ça comme il se doit autour du verre de l’amitié, il fallut bien se rendre à l’évidence : l’une des animatrices, la jeune et jolie Kathy avait disparu… Avant d’en arriver à cette inquiétante conclusion, on avait procédé à toutes les investigations possibles, elle n’avait pas quitté les lieux de son plein gré puisqu’elle avait encore confirmé à ses collègues moins d’une heure plus tôt qu’elle serait là. Son portable sur lequel plusieurs avaient essayé de la joindre affichait toujours le même message d’absence. La conteuse était apparemment la dernière à l’avoir vue, vers dix-sept heures cinquante ; elles avaient bavardé quelques minutes puis s’étaient donné rendez-vous pour le fameux pot de clôture. Juste avant de se séparer, Kathy avait pris la direction du chapiteau. Etant donné les quelques mètres qui séparaient celui-ci du lieu de rencontre et du fait de l’assistance nombreuse, on imaginait mal ce qui avait bien pu se passer.

****

 

Dans l’agitation générale personne n’avait remarqué une jeune fille inconnue, aussi blonde que Kathy était brune qui émergea de dessous le drap vert qui recouvrait jusqu’au sol la table des boissons située à côté du chapiteau et qui se mit elle aussi à chercher la disparue avec autant d’ardeur que les autres à un détail près : elle avait le sourire aux lèvres …

 

Kathy, car bien sûr c’était elle, se cherchait elle-même et cela l’amusait au plus haut point.

 

- J’ai réussi mon pari,  se réjouissait-elle ! Quel plaisir de les voir tous à l’oeuvre… J’avais promis une surprise pour clore la journée … C’est réussi, personne ne m’a reconnue, il faudra que je remercie Elena de m’avoir prêté sa perruque, la pauvre si elle avait su ce que je voulais en faire ! Ma cachette était bonne, j’ai pu rapidement changer de vêtements …

 

Un roulement de tambour interrompit ses pensées !

 

- Ah, ça y est, le chef de choeur va faire l’annonce … C’est bien, il ne faut pas non plus faire durer trop longtemps les choses !

 

- Mes chers amis …- la phrase fut coupée par un long sifflement du micro- mes chers amis, reprit la voix claire de baryton Martin, pas d’affolement …. Tout cela était prévu. Kathy nous avait promis une surprise … En fait elle n’a jamais disparu, elle est là, bien là, au milieu de vous, il y a un beau lot qui attend la personne qui l’identifiera …

 

Là-dessus Jacob se crut obligé d’émettre son commentaire habituel : « Lé…on, l é…on … » ce qui ne manqua pas de mettre tout le monde en joie !

 

La recherche reprit, mais cette fois-ci sur un mode ludique et bon enfant ! Les musiciens rythmaient le jeu avec de vieux standards de jazz.

 

Petits et grands se déplaçaient moitié dansant moitié se dévisageant pour tenter de démasquer cette coquine de Kathy qui leur avait quand même causé quelques frayeurs !

 

Cela durait depuis un bon moment mais personne n’avait encore réussi à démasquer la « disparue » …

 

Le chef de choeur reprit alors le micro qui avait apparemment rendu l’âme car il n’arrivait même plus à siffler.

 

Un deuxième roulement de tambour fut alors nécessaire pour obtenir le silence et passer le message suivant destiné à la jeune animatrice :

 

- Kathy, tu peux te montrer maintenant à la première personne qui est près de toi –c’est cette personne qui gagnera- Nous terminons ce jeu et nous allons tous prendre le verre de l’amitié, cela nous remettra de nos émotions !

 

-  ………………………………………………………………….

 

- Kathy ! Kathy, tu m’entends ? Montre-toi s‘il te plaît, le jeu est fini !

 

Mais rien ne se passa. Pas de réponse, pas de Kathy !

 

L’atmosphère redevint tendue, un frisson passa dans l’assemblée.

 

- Je crois savoir où elle se trouve reprit le chef de chœur, je vais vous dévoiler sa cachette !

 

Le jeune homme se dirigea vers la table des boissons, suivi par la foule qui reprenait espoir. Il souleva le drap vert, se pencha en criant bien fort : « Eh bien Kathy, ce n’est pas gentil de continuer à nous faire peur, montre-toi en vitesse !

 

Quand il se redressa son visage était blême, il avait en main quelques vêtements et une perruque blonde … 

 

  MAP

Publicité
11 octobre 2008

Fin du défi de Tiphaine (Rsylvie)

L'autre Augustin (Tiphaine)

Augustin Lehorla se tournait et se retournait dans son lit. Impossible de fermer les yeux. Il avait bien trop peur. Comme chaque nuit depuis huit nuits, à chaque fois qu’il plongeait enfin dans le sommeil, il se réveillait une minute plus tard en sueur et en panique. Un homme le regardait, juste derrière les rideaux de sa fenêtre. Augustin se levait, il allumait la lumière et il vérifiait avec minutie que personne ne se trouvait dans la pièce. Chaque recoin était inspecté méticuleusement. Ça lui rappelait son enfance, quand les cris de ses cauchemars incessants faisaient accourir sa mère et qu’elle prenait le temps de vérifier avec lui qu’aucun monstre ne s’était caché dans la petite chambre. Il la revoyait ouvrir la porte du placard en s’écriant joyeusement « tu vois Augustin, il n’y a personne dans ce placard ! ».

Comme il aurait été heureux de la voir débarquer à présent, mais de mère, il n’en avait plus, pas plus que de femme et encore moins d’amante…

Augustin Lehorla était un célibataire endurci, un homme sans cœur auraient sans doute dit ses collègues féminines. Il travaillait comme comptable dans un cabinet d’expert, sa vie était encore mieux réglée que du papier à musique, elle ne souffrait aucune improvisation.

Chaque matin, Augustin se levait à six heures trente précises, il n’avais pas besoin de réveil, son corps était programmé pour bondir hors du lit à cet instant précis. Il se douchait, se rasait, avalait un café accompagné d’une biscotte beurrée puis il prenait le temps de lire le journal qu’un livreur déposait derrière la porte de son appartement. A sept heures vingt-huit, il ouvrait cette dernière et se rendait à son travail à pieds. Invariablement, il s’enfermait dans son bureau, sortait de sa sacoche de cuir une calculatrice que Pascal lui-même aurait trouvée démodée et il alignait consciencieusement des chiffres jusqu’à ce que l’église voisine sonne les douze coups de midi. Il se levait alors et allait à la boulangerie la plus proche pour y acheter un sandwich jambon fromage, une tarte au citron et un Perrier. Il n’oubliait jamais la petite note qu’il rangeait méticuleusement dans la partie dépense du carnet qu’il avait toujours sur lui. La pause méridienne durait une heure, le temps de manger et de terminer la lecture de son journal sur un petit banc, toujours le même, du parc voisin. L’après-midi se déroulait de la même façon que la matinée. A dix-huit heures, Augustin nettoyait son bureau, rangeait ses affaires dans son petit cartable, déposait son journal en haut de la pile des journaux du mois, et saluait les éventuels retardataires. Dans les faits, cela ne se produisait jamais car Augustin était toujours le dernier à partir du cabinet de comptables, mais il y pensait, à chaque fois, juste avant de se rendre compte qu’une fois de plus il n’y avait plus personne à saluer.

La soirée d’Augustin obéissait elle aussi à des rituels immuables : les courses, la préparation du repas du soir qu’il prenait invariablement en regardant « questions pour un Champion » puis le classement et l’archivage des dépenses journalières ou en cours.

A vingt heures précises, Augustin éteignait la lumière de sa chambre.

A vingt heures une, il dormait.

Et, depuis maintenant sept jours, à vingt heures deux, il se réveillait en sursaut.

Augustin Lehorla se tournait et se retournait dans son lit. Impossible de fermer les yeux. L’autre était tapi dans l’ombre, il le savait… Il avait vu sa silhouette il y a quelques instants, ses mains blanches qui se détachaient dans la pénombre, ce costume rayé qui lui rappelait vaguement celui que portait son père sur sa photo de mariage… Augustin repensa au vieil album, il parcourut en souvenir la vie de ses parents et son enfance étalée en une dizaine de clichés jaunis. Il ferma les yeux, le sommeil était plus fort que sa raison… Une minute plus tard il les rouvrit en ayant la cruelle conviction que l’autre était à nouveau dans la pièce. D’un bond, il tira les rideaux et il poussa un cri d’effroi. L’étrange personnage qui se tenait debout devant ses yeux médusés n’était autre que lui-même…


 



-« bordel de dieu ! quelle idée d’avoir placé ce rideau devant la glace » ! s’écria –t-il .

 

Et l’ombre d’un instant, il se mit à maudire sa mère. Pourtant elle avait toujours veillé sur lui…. Regardé sous le lit, derrière la commode quand il fallait l’aider à chasser les fantômes qui venaient régulièrement hanter sa chambre. Depuis tout petit, elle l’avait accompagné sur le chemin de l’endormissement… guidant ses pas. Alors qu’en fait, aujourd’hui, il s’apercevait qu’elle n’avait rien fait d’autre que d’entretenir cette peur. De l’alimenter par son pouvoir de conviction.

 

Hors maintenant il n’arrivait plus à faire la part des choses ! Cela ne lui ressemblait pas ce langage, ni ce genre de sentiments. Lui d’ordinaire si calme et posé, s’entait bien que son univers familier était entrain de basculer. Il avait beau respecter les rituels inculqués depuis tant d’année où

 

Chaque recoin était inspecté méticuleusement, quand les cris de ses cauchemars incessants faisaient accourir sa mère et qu’elle prenait le temps de vérifier avec lui qu’aucun monstre ne s’était caché dans la petite chambre. Il la revoyait ouvrir la porte du placard en s’écriant joyeusement « tu vois Augustin, il n’y a personne dans ce placard !  Il n’arrivait plus à faire la part des choses entre son quotidien si bien rangé. L’organisation du matin qui commençait à 6h 30 précises, le petit déjeuner puis quitter l’appartement à 7h28 et s’engouffrer dans le quotidien de la vie.

 

Sa petite vie si bien rangée, si bien organisée, qu’il n’y avait de place pour personne d’autre que lui… et ses fantômes.

Dring, dring, dring !!!!!

-“le téléphone ….qui peut bien m’appeler à cette heure ?

 

N’ayant pas d’ami, cela était vraiment étrange….

Dans la panique il ne s’aperçut de rien, et mort de trouilles,

saisit le combiné tendu par une main blanche.

-« Allo ?

-«il est temps maintenant, de nous rencontrer. »

-« ha ! oui…. peut-être….quand »?

demain,

Parc des Grenadiers, à l’angle de la rue des Martyrs et celle du Cercle Rouge.

A 18h15. Pour une fois, tu partiras à l’heure » !

-« ……………. »

 

épisode 2

 

Augustin Léhorla resta longtemps dans le noir. Assis par terre… il ne vit pas la main blanche ramasser le combiné tombé à terre et le reposer délicatement, quand 20heures30 sonna au clocher de la vielle église. Impossible de se rendormir. Alors pour la première fois depuis plus d’une cinquantaine d’années, il ne retourna pas se coucher mais se dirigea vers la cuisine pour s’y servir un scotch. Trop de choses se bousculaient dans sa tête.

 

Tout d’abord il y avait eu sa mère… enfin maintenant qu’il avait compris son petit jeu….

 

Et puis il y avait cet appel téléphonique… c’était étrange comme cette voix, qui lui semblait si proche lui soit si familière. Pareil au doux sentiment d’une tendre complicité mélangé d’appréhension de l’interdit. Pourtant il n’avait pas peur… il était serin comme s’il avait attendu ce rendez-vous toute sa vie… peut-être à cause de l’emploie familier de TU ?

Il souriait intérieurement à la tête que ferait ses collègues s’ils savaient. Aucun ne se douterait jamais. Que lui, Augustin se rende comme ça, un soir, à un rendez-vous. De plus, au son de la voix, ce ne pouvait être une femme. Bien que l’idée ne lui soit pas désagréable, au contraire.  Mais alors quel mystère… un homme ? Peu lui importait le jugement des autres, il se sentait maintenant libre. Et puis cet appel, n’était-il pas une invitation comme « j’ai envi de te voir », « j’ai besoin de te rencontrer », « j’aimerais te…. » ?

 

 

La tête dans les nuages, il ne vit pas le temps passer et, c’est les yeux tirés, qu’il arriva le matin au bureau, habillé d’un pantalon aux rayures de même teinte que sa cravate. Sur son passage, les collègues médusés d’un tel changement, se retournaient l’air malicieux, en murmurant qu’Augustin avait un rendez-vous galant. Mais peu lui importait, il était tranquille. Etrangement bien, malgré les heures de sommeil en moins.

 

C’est ainsi qu’à A 18 heures, Augustin nettoya son bureau, rangea ses affaires dans son petit cartable, déposa son journal en haut de la pile des journaux du mois, et salua les éventuels retardataires qui n’en croyaient pas leurs yeux. A 18h15 précises, il était Parc des Grenadiers, à l’angle de la rue des Martyrs et celle du Cercle Rouge.

 

Episode 3

 

 

 Assis devant lui, sur un banc l’attendait un homme. Bien qu’il fut de dos, la corpulence ne permettait aucun doute. Il avait bien rendez-vous avec un garçon ! Que ceci était excitant. Non, par la tournure que pourrait prendre cette rencontre. Il n’avait aucun penchant pour le sexe masculin… il en savait quelque chose. Un jour, un client quelque peu provocateur, avait voulu l’emmener sur ce terrain. Et, vraiment non, il n’était pas attiré par les hommes. Mais là, il y avait quelque chose d’étrange, qui le faisait basculer entre la peur et le désir d’avancer… la haine et l’amour.

 

 

En quelque pas, il fut devant son interlocuteur téléphonique et là tout a vacillé.

 

D’abord lui, en raison de ses jambes qui se sont dérobées sous le choc, et l’ont laissé tomber brutalement sur le sol. Une nuée de pigeons, qui traînaient dans le parc à la recherche de miettes de pain laissées par quelques mamies, s’est envolée bruyamment. Des enfants qui hurlaient, apeurés. Les mères, affolées par les cris de leurs petits… bref un vrai capharnaUM. !

 

 

Devant lui était assis son double. L’œil pétillant de malice. Le sourire aux lèvres, comme heureux de son effet de surprise ! Car surprise il y avait. Puisqu’Augustin Lehorla était le fils unique de Louise et Charles Léhorla. Mais qui donc était-il ?

 

 

                -« Je suis ton frère Emberlificotons Léhorla ».

 

cela fait bien longtemps que je t’observe dans notre maison. Je dis notre, car maman n’a jamais su, lequel de nous deux elle voulait épargner. Alors je vivais dans les pièces du haut en attendant le verdict. Ainsi nous avons grandis chacun de notre coté. Et avec le temps, elle n’a jamais pu se résoudre à faire un choix. Toi, qu’elle voulait si semblable à papa et moi si pareille à notre mère. Et puis à force de nous faire jouer au chat et la souris, elle s’est prise à son propre piège. Lui n’étant plus là pour guider ses pas, elle s’est perdue dans le labyrinthe du temps. Ce qui, jusqu’à maintenant, n’avait pas rendu possible nos retrouvailles. Surtout que tu étais sous son emprise jusqu’à hier soir. Nuit, où tu as enfin, compris qu’elle t’avait toujours manipulé. Alors j’ai saisi ma chance et t’ai appelé…. »

 

 

Emberlificotons parlait, parlait, mais Augustin ne l’écoutait plus. Il était comme happé par le tourbillon d’une danse macabre où sa mère et son père virevoltaient d’une portée sur l’autre, d’une croche à l’autre, en jouant la partition avec mesure et retenue.. et puis soudain, un dièse, un bémol et la portée se colore en noire. La page se tourne et Emberlificotons apparaît, grand, beau et serein. Ses yeux de velours, bleutés comme la mer quand les dauphins viennent y jouer, sont semblables aux siens. Mais lui, n’a jamais vu la mer. Ses mains, grandes et fines, sont gracieuses comme l’est son visage, alors que celui d’Augustin est plus rustre d’apparence, les gestes plus gauches, le sourire moins charmeur….

 

toutes ces années où il s’était cru seul, solitaire qu’il rêvait à un double. Si abandonné qu’il aurait tout donné pour jouer la partition avec lui.. qu’il a fini par la croire quand elle parlait d’une autre main blanche.

 

 

Maintenant qu’il avait tout compris, il s’en veut d’avoir douté de son amour maternel. Il n’y a jamais eu de fantôme derrière le placard, seulement son double qu’elle voulait lui faire connaître, à son rythme, progressivement et non pas brutalement sur la table froide d’une clinique. leur mère voulait qu’ils aient chacun leur propre vie, et puissent briller autant que leur père, virtuose de renommée mondiale. Mais pour cela, il fallait qu’ils aient la possibilité de faire une vie séparément l’un de l’autre. Et non, vivre dans l’ombre l’un de l’autre.

 

 Seulement voilà, la partition ne s’est pas mise en place comme elle l’avait orchestrée… et maintenant c’était fini. Sur la portée, ils allaient écrire une nouvelle mesure. Plus de double croche, juste 2 notes harmonieusement posées l’une auprès de l’autre, pour jouer la mélodie jusqu’après demain et plus encore….

 

                                                                                                                               miss Marple

11 octobre 2008

Fin du defi de Joye (Thétis)

Je ne pouvais pas laisser Sally dans une si mauvaise passe… mais je ne pouvais pas non plus laisser le monde dominé par autant de violence ! Alors je me suis bien amusée ! Désolée Joye !  J J J

Diamond Sally se releva du plancher poussiéreux, les empreintes des doigts de Lefty LeTordu encore roses sur sa joue soyeuse. Vingt paires d’yeux l’examinaient, luisants de mépris. Depuis sept ans, Lily eut beau commander le respect total de toute la ville de Gulchwood et ses environs, ce serait aujourd’hui le jour de son jugement. Jamais plus une femme n’oserait s’établir régente d’une communauté dans ce coin perdu du territoire Cheyenne, quelque sûre que soit sa main délicate sur ses petits pistolets perlés, quelques belles que soient ses lèvres pulpeuses qui crachaient par moments un juron élégant ou un mot de tendresse convoitée. Ses alliés, Pete le petit barman, et Pancho le vieux Mexicain qui lui servait de confident, avaient été dépêchés au bout des cordes rugueuses, pendus par les sbires abrutis de Lefty. Leurs corps tournaient encore sous le soleil cruel de ce midi fatal.

Avalant le sang qui coulait de sa bouche de nouveau déchirée par la violence des hommes, Sally fit appel aux dernières forces qui bouillonnaient en elle…

***

… pour se redresser, phénix entêté, et se saisir de la chaise qui traînait près d’elle. D’un mouvement emprunt d’une colère démesurée, elle la fit tournoyer au-dessus de sa tête et l’envoya sur le groupe d’affreux imbibés qui la regardait, repus de son spectacle. Tel un jeu de cartes brinquebalant, ils s‘effondrèrent dans un fracas effrayant et leur jacassement féroce laissa place à des plaintes lascives. Elle se jeta sur chacun d’entre eux, l’un après l’autre, dans un tourment indescriptible qui ne permit d’apercevoir que les éclats de sang qui giclèrent dans tous les recoins du saloon ennemi.

 Alors que les blessures reçues commençaient à la faire trembler, elle aperçut Lily dans l’encoignure de la porte. Elle était ficelée sur une chaise et tentait en vain de se détacher. Lefty n’avait reculé devant rien pour prendre les rennes de Gulchwood. Quelle humiliation ! La ville entière avait cru à ses accusations mensongères de trahison. Pourtant la régente avait montré jusque-là sa très grande loyauté. Les hommes croyaient décidément ce qui les arrangeait, surtout lorsqu’il s’agissait de se débarrasser d’une femelle trop puissante. Il fallait rendre sa liberté à Lily et faire éclater la vérité ! Cet homme plein de cette soif de pouvoir insatiable devait disparaître.

Rassérénée par ses victoires improbables et son désir de faire triompher le bien, elle fit face à Lefty, plus impressionnante que jamais. Elle ne se laisserait pas piétiner par un tel scélérat. Puisque Pete et Pancho ne pouvaient plus lui venir en aide, il lui fallait sauver seule Lily du destin monstrueux qui la menaçait ? Eh bien, elle l’assumerait ! L’avenir de Gulchwood était entre ses mains.

Mais, alors qu’elle allait se jeter sur lui, au mépris du danger, elle reçut un terrible coup sur la tempe. Et sans l’arrivée miraculeuse de Lupita, la fille de Pancho, elle aurait sans doute eu là ses dernières pensées. Heureusement, celle-ci tint à distance à la force de son frêle fusil les olibrius insensibles qui cernaient Sally. La jeune fille avait été une des rares à ne pas se laisser berner. Et aujourd’hui, malgré la mort tragique de son père, elle rivalisait de pugnacité avec les hommes les plus violents de Lefty. La chef de file de la résistance put alors reprendre ses esprits et fondre d’un coup inattendu sur le chef inattentif qui injuriait ses sbires incompétents. Ils disparurent tous deux à terre dans un chevauchement des plus improbables et se lancèrent mutuellement des heurts impitoyables sans qu’aucun des deux n’avouât aucune douleur. Lupita laissa Sally seule au combat pour tenir tête aux autres hommes menaçants. Le saloon résonnait de la tension qui régnait. Mais le duel qui se déroulait sous les yeux de l’assemblée -sans respecter aucune règle communément admise- finit par les fasciner tous et suspendre l’explosion attendue.

Soudain, dans ce corps à corps prolongé, la longue chevelure rousse de Sally s’échappa de sous son chapeau et laissa sa féminité s’exprimer. Jamais personne ne l’avait vue ainsi dans toute sa splendeur. En un instant, Lefty reconnut alors la jeune femme que, six ans plus tôt, il avait croisée un doux soir d’hiver, lors de la dernière fête de Gulchwood. Depuis, les tiraillements incessants de la régente entre les intérêts de la ville et les comportements mesquins de ces concitoyens masculins avaient mis fin à de telles pratiques et annihilé toute chance d’idylle entre hommes et femmes. Mais là… là… l’évidence était telle qu’il s’arrêta net de frapper. Son désir de pouvoir et sa haine des femmes s’évanouirent aussitôt et libérèrent son esprit adouci… Interloquée, Sally leva la tête vers son adversaire et réalisa elle aussi que le regard de Lefty avait changé. Derrière son visage sali, elle aperçut à son tour ce qu’ils avaient oublié. Leur tête à tête silencieux de l’époque lui revint en mémoire tel une douce musique du passé et métamorphosa immédiatement ses perceptions. Dire que jamais elle n’avait eu l’idée de porter un regard attentif sur ce noir personnage. Et pourtant il résolut tout.

Ebahis, tous les imbéciles estropiés de Lefty le virent se redresser lentement tout en posant délicatement sa main droite sur le bras de Sally. Celle-ci suivit le même mouvement et se retrouva debout, à quelques centimètres du visage de son ancien ennemi. Leur attirance mutuelle envahit l’atmosphère et mit fin en une seconde à l’omnipotence de la violence.

Les cow-boys, enchevêtrés dans leurs armes et leurs blessures, s’éloignèrent, laissant passer le couple étrangement assorti. Les longs doigts effilés de la belle joignirent les mains rustres du hors-la-loi et ensemble ils se rendirent jusqu’au fond de la pièce. Ils semblèrent échanger quelques mots, Lefty prit un air contrit puis hocha la tête d’un air d’assentiment. Sally releva la tête, soulagée et contentée. Puis, ils ouvrirent la cellule et libérèrent Lily.

En sortant, les trois personnages se retrouvèrent face à une foule dense massée devant la porte et arrêtée dans une attente fébrile d’un dénouement rapide. Lefty lança quelques mots à cette populace docile qui ouvrit un chemin inattendu jusqu’au milieu de la voie principale. En plein milieu de la rue, il leva vers le ciel le bras de la femme destituée qui récupéra en un instant l’hégémonie dont elle bénéficiait par le passé. Lui, discret, emmena sa promise sur son fameux destrier, abandonnant la ville à un destin apaisé auquel ils ne participeraient plus, appelés dorénavant vers d’autres horizons.

« We’re two fighting  lovers ; We’ve long long way from Gulchwood… »

6 octobre 2008

Ont déjà achevé les textes de leurs camarades:

Joye, Joe Kaprov, Tilleul, Poupoune,Val, MAP, Rsylvie, Thétis, Martine27, Pandora, Jaqlin, Aude, Caro Carito, Tibo, Tiphaine, Papistache

5 octobre 2008

Additif à la consigne #30

Chers tous,

Si vous pouviez copier-coller le texte de votre partenaire de la semaine, en début de votre réponse, nous pensons que la lecture de votre défi en serait facilitée, évitant ainsi de fastidieuses allées et venues d'un demi-texte à l'autre.
Séparez les deux textes par un signe qui nous permette de les repérer rapidement, par exemple :

***


Si vous avez déjà envoyé votre texte, l'un de nous trois se chargera de le faire à votre place, idem pour ceux qui ne seraient pas familiers de la manipulation.

Bonne écriture et à samedi 9 heures.


Janeczka, Val et Papistache

5 octobre 2008

Défis #29 & #30

Voili, voilou,

nous avons pensé, pour ce début octobre, à un défi en deux temps :

1ère semaine :
Quelque chose comme ça :

Emberlificotons le  héros d'un récit policier ou d'aventures (pas de fantastique ni de science-fiction)  dans une situation, la plus inextricable possible, que nous nous garderons absolument de dénouer.
a/ Ne faisons pas trop long, mais donnons quand même un peu de grain à moudre à notre suivant. Car suivant il y aura !

b/ Évitons également les univers trop personnels dans lesquels notre suivant pourrait avoir du mal à se glisser.

2e semaine :

En effet, la semaine qui suivra, un autre participant du défi sera chargé de terminer notre défi et nous... par voie de conséquence, nous aurons à charge de parachever le texte d'un camarade de jeu.

a/ Il nous faudra tenter de préserver l'ambiance initiée par le premier auteur.

quifait_quoi
Comprendre que le titulaire du premier pseudo de chaque ligne

poursuit (achève) le texte du titulaire du second pseudo de la même ligne.

Samedis 4 et 11 octobre

samedidefi@hotmail.fr

4 octobre 2008

Faites des gosses (Pandora)

John a été très laconique au téléphone mais son ton était on ne peut plus clair : ça chauffe. Après plus de dix ans à bosser ensemble, John et moi formons presque un petit couple, nous comprenant à demi-mots. Attention hein, en tout bien tout honneur, j’ai une femme et trois gosses. Enfin j’étais marié, Gloria est partie depuis un paquet d’années, jalouse de mon boulot, et je l’ai remplacée progressivement par la bouteille. Bref, il semble que ça bouge dans l’enquête que nous menons suite au meurtre du professeur Atkinson. Une sale affaire : il a été retrouvé mort par sa femme de ménage, à moitié nu et l’autre moitié, celle du haut, emballée dans des vêtements de latex plutôt moulants qui ne ressemblent pas à la tenue que l’on attend d’un professeur de physique pressenti comme l’un des futurs prix Nobel. Aucune idée si ça se donne à titre posthume ce genre de chose, mais sinon c’est râpé pour lui. Et outre son habillage, le respectable professeur a été émasculé et personne n’a réussi à remettre la main sur ses bijoux de famille. Une affaire pour laquelle on nous attend au tournant, le téléphone n’arrêtant pas de sonner dans le bureau du commissaire. Nous marchons sur des œufs.

 Nous nous sommes partagés le travail et pendant que j’épluche les factures de téléphone, les relevés bancaires et tous les documents qui pourraient nous mettre sur une piste éventuelle, John furète du côté des bars à putes où il se pourrait que le professeur bien sous tous rapports, mais amateur de latex, aille défouler ses instincts particuliers de mâle insatisfait par sa bourgeoise et amateur de plaisirs très particuliers. Et pour avoir interrogé sa bourgeoise toute la matinée d’hier, je le comprends un peu d’aller voir ailleurs (par contre je suis allergique au latex, ça me donne des boutons). Et il semble donc que John soit tombé sur quelque chose d’intéressant.

Me voilà parti à toute blinde vers la gare heureusement proche où se croisent dans une ambiance interlope les voyageurs, les toxicos et les pervers  de notre chouette ville. Notre fond de commerce. Nous y trainons régulièrement et je connais donc le coin comme ma poche. John m’a dit de le rejoindre au « pink flamand », un bar plutôt mal famé situé à la frontière entre le quartier de la gare et celui du port. Je me gare au plus près comme je pouvais, sans me soucier des panneaux d’interdiction. Y a pas trop de satisfaction dans ce boulot à fréquenter les macchabées et les criminels, alors autant profiter des rares avantages. Je vérifie que mon pétard est fonctionnel, j’enfile par-dessus ma veste de complet râpé et j’entre dans le bar, roulant des mécaniques comme le cow boy que je ne suis pas mais auquel je veux donner l’impression de ressembler. Dans ce job, c’est 90% d’intox contre 10% de réels problèmes, la première permettant d’éviter les seconds. Je montre ma plaque au videur et m’avance dans le bar où des filles en petite tenue servent des boissons à des hommes qui pourraient pour la plupart être leur père. Des types qui n’ont absolument pas soif mais qui doivent exhiber leurs dollars avant de pouvoir sortir leur engin. L’une d’elle s’approche mais n’insiste pas quand elle me reconnait. Ces nanas sont un vrai radar à flics. La barmaid, que j’ai fait coffrer la semaine dernière, me fait un clin d’œil ironique et le directeur assis au bar m’apostrophe (La venue de la police n’est jamais bonne pour les affaires).

« J’espère que vous n’en avez plus pour longtemps avec Cindy, ça fait une plombe que votre collègue discute avec elle. Je vous signale qu’elle est sensée bosser et ramener un peu de fric pour justifier son salaire exorbitant ».

Je passe en faisant semblant de ne rien avoir entendu, ayant repéré John assis dans un des boxes privés du fond. Il parle à une pute d’un âge certain que l’épaisse couche de maquillage qui la recouvre rend incertain, Cindy probablement.

- Michael, te voilà enfin. Je te présente Cindy. Sais-tu que Cindy connaissait bien le professeur ?

- Ah bon ?

- Ouaip, c’était même un sacré numéro paraît-il, pas vrai Cindy ?

Je m’assois en face d’eux et regarde Cindy qui me fixe à son tour d’un regard bovin en mâchant son chewing gum.

- Un sacré cinglé plutôt, dans le genre bon à enfermer. J’vous dis pas c’qui m’demandait de lui faire. D’ailleurs souvent on faisait ça à deux, avec Jessica. Et vendredi soir, comme je n’étais pas dispo, c’est elle qui y est allée toute seule.

John me fait un clin d’œil de connivence, vendredi soir est le soir du meurtre. C’est effectivement du chaud brûlant qu’on tient là avec une première piste très sérieuse et peut-être même notre suspect. Suspecte en l’occurrence.

- D’ailleurs elle est là-bas. Jessica ramène toi voir par là…

Nous nous retournons de concert vers Jessica une jolie blonde au sourire qui se fige en me voyant, en même temps que je sens ce qui me reste de cheveux, c’est à dire vraiment pas grand-chose, se hérisser sur ma tête. John, qui a reconnu lui aussi ma fille se lève pour rattraper Emily qui essaie de s’enfuir en se précipitant vers la sortie tandis que je reste les fesses scotchées au fauteuil.

Ma fille Emily se prostitue dans un bar à pute et est le suspect numéro un dans cette sale affaire de meurtre. Je ne pense pas m’être jamais senti aussi seul qu’à cet instant. Faites des gosses qu’ils disaient.

Moi en tout cas je boirais bien un scotch. Double au moins.

4 octobre 2008

Au revoir, Sophie (Val)

 

 

Tout a commencé le jour ou j’ai promis à Sophie d’arrêter de boire et de fumer. Je m’en souviens très bien. Ce n’était pas une résolution du nouvel an. Là, c’était plutôt une réponse à sa mise en demeure. « T’arrêtes, ou je me tire ! ». En fait, je n’ai même pas vraiment promis. Je lui ai répondu « Ne pars pas ». Elle a pris ça pour une promesse. Toujours est-il que je savais ce qui m’attendais si je ne m’exécutais pas. J’aurais tout fait pour ne pas qu’elle parte…

.

Bien sûr, je n’ai pas réussi à arrêter de boire, et encore moins de fumer. Comme il n’y avait ni alcool ni cigarettes à la maison, j’ai dû ruser. Un mensonge de rien du tout, ça mange pas de pain. Chaque soir, après le travail, j’allais au bar du coin. J’achetais un paquet de clopes et je commandais une dizaine de demis. Et, chaque soir, je l’appelais, prétextant une réunion de dernière minute au travail. Et, pour les sous, j’avais ma combine. J’ai commencé à lui dire à quel point ma boite allait mal financièrement, et les difficultés que j’avais à me faire rembourser mes notes de frais. Au début, c’est passé comme une lettre à la poste, avec Sophie !

.

Et puis j’ai pris peur, le jour ou Sophie, en colère, a eu l’idée saugrenue d’appeler mon patron. Elle voulait lui réclamer toutes ces heures sup’ non rémunérées et aussi le remboursement des notes de frais. Alors, j’ai avoué à Sophie que j’avais menti…

.

Je lui ai expliqué que j’avais retrouvé un ancien copain devenu SDF, et que, chaque soir, je passais un moment avec lui sur son banc, que je lui achetais des vêtements, des cigarettes, de la bouffe, et que parfois je lui payais l’hôtel. Je lui ai dit que je n’avais pas osé le lui avouer, pensant qu’elle me gronderait.

Sophie ne m’a pas grondé. Et, pendant quelques jours, j’ai encore pu faire illusion et vivre ma double vie avec ma clope et mon verre de bière.

.

Seulement voilà, tout s’est compliqué lorsque Sophie m’a carrément dit d’emmener mon ami ici, qu’on pourrait le nourrir et le loger le temps qu’il retrouve un travail. J’étais dans l’impasse !

.

Alors, j’ai pleuré. Un soir, je me suis couché à ses pieds en sanglotant. J’ai imploré son pardon. Je lui ai tout raconté : que j’avais une maîtresse, que chaque soir je la retrouvais dans un hôtel miteux, que je lui offrais des bijoux, que je l’invitais au restaurant… J’étais prêt à tout pour éviter qu’elle découvre que je fumais et buvais encore en cachette et qu’à cause de cela elle ne me quitte.

.

Ça n’a pas fonctionné. Ce soir là, Sophie m’a dit, d’un ton sec et les yeux plein de haine : «  Je serai partie demain matin ».

.

J’étais dans l’impasse la plus totale. IL n’aurait servi à rien de rétablir la vérité. Elle me l’avait dit : « T’arrêtes ou j’me tire ! ». Tout lui avouer n’aurait rien changé.

.

4 octobre 2008

Les aventures d'Anthelme Poustabosse : Épisode 537 (Papistache)

Résumé du précédent épisode : Anthelme Poustabosse, après s’être rendu au repaire de l’ignoble Dugommoi, savant fou, est lâchement assommé alors qu’il s’apprêtait à mettre la main sur le maroquin du professeur.

 

Un feu d’enfer incendiait littéralement la cheminée. Dos au foyer, Anthelme Poustabosse, chroniqueur au Petit XXIe et présentement ligoté sur sa chaise, sentait arder les flammes qui menaçaient à tout moment de faire exploser la bouteille de gaz que son ennemi juré, le professeur  Dugommoi, avait trainée en face de l’âtre.

 

Nu sur son siège, exposé au feu des buches amoncelées et comprimé par les cordes qui le liaient au dossier et à l’assise, Anthelme frissonnait. Sur ses cuisses, reposait une vipère du Gabon encore engourdie, que le professeur avait sortie d’un bac réfrigéré dans lequel somnolait le venimeux animal. Cependant, Anthelme devinait, aux légères ondulations du reptile, que la chaleur commençait à tirer le serpent de sa torpeur. Quand la vipère aurait recouvré ses esprits, il savait qu’un simple tremblement de sa part provoquerait l’attaque mortelle. Il respirait à petites lampées. La vipère reposait sur son bas-ventre et l’ignoble Dugommoi n’avait pas omis de glisser un DVD pornographique dans la fente idoine du lecteur avant de s’éclipser. Anthleme, les yeux clos, luttait pour ne pas entendre les gémissements des protagonistes ni les bruits humides des corps affrontés. La plus petite érection de sa part exciterait le serpent et lui serait fatale.

 

Sa chaise, dont les pieds de devant  reposaient sur deux gros dictionnaires, menaçait à tout moment de basculer en arrière. Tourner la tête lui aurait été funeste, il aurait entrainé dans sa chute la vipère à la morsure irrémédiablement mortelle et, la corde de piano, nouée d’un bout autour de ses parties génitales  et de l’autre à un vicieux mécanisme installé au plafond, se serait tendue, le soulevant du sol, précipitant sa gorge à la rencontre d’une lourde lame en acier de Tolède, tranchante comme un rasoir.

 

Il avait vraiment contrarié Dugommoi.  D’ailleurs celui-ci, n’avait pu s’empêcher d’injecter un poison à effet retard dans les veines du jeune reporter. Si l’antidote n’était pas administré dans la demi-heure, le cœur d’Anthelme se serrait définitivement et Dugommoi, jamais pris à dépourvu, avait pris soin, au moyen d’un fil de coton, avant de quitter son antre, de coincer l’ampoule salvatrice sous la porte. Ainsi, le premier qui la pousserait écraserait le précieux flacon.

 

Entrer par la fenêtre exposerait notre aventureux ami à une mort certaine. A peine le volet, soigneusement clos, serait-il ouvert, qu’une corde tendue et reliée à la détente d’un fusil au canon scié enverrait une décharge de chevrotines en pleine poitrine du malheureux journaliste trop entreprenant.

 

La vipère ondulait imperceptiblement. Anthelme s’attendait à tout moment à l’explosion de la bouteille de gaz. Les jeunes gens, sur l’écran à plasma dont le son avait été poussé au maximum, s’agitaient à l’unisson. La vipère ne devait pas être provoquée, sinon sa réaction fulgurante abrègerait et la vie de notre héros et ce récit. La chaise, en équilibre précaire, menaçait de précipiter la gorge du pantelant jeune homme à la rencontre de la lame acérée et un poison mortel roulait dans ses veines. À ce moment précis, la gueule noire du fusil lui paraissait un bien futile péril.

 

Dugommoi avait certainement alerté la commissaire Suzy Laguibolle. Connaissant la gaucherie de celle qu’il avait maintes fois  croisée au cours de sa tumultueuse — mais courte — vie à la recherche de la vérité quant aux agissements du monstrueux savant fou, Anthelme ne pouvait s’empêcher d’imaginer le craquement de l’ampoule contenant l’antidote sous la semelle des escarpins de l’officier de police. Son bâillon, fermement noué, l’empêcherait de proférer le moindre avertissement et le bruit du téléviseur allait couvrir ses gémissements.

 

Dehors, les crissements des pneus d’un véhicule équipé d’une sirène polytonale se firent entendre. Des talons hauts et effilés claquèrent sur le perron...

 

La semaine prochaine.
Comment le reporter du Petit XXIe réussira-t-il à se sortir du guêpier dans lequel il s'est fourvoyé ? Vous le saurez, en lisant le cinq-cent-trente-huitième épisode des Aventures d'Anthelme Poustabosse, un feuilleton rocambolesque co-écrit par le Papistache du Défi du Samedi et son prédécesseur  pour la consigne #29 du 4 octobre 2008.

4 octobre 2008

Tibo

L'humeur de Tania était à l'image du temps ce matin, mélancolique. Une mélancolie douce. Une mélancolie qui vous réexpédie dans ces moments tristes que vous avez traversés.
Elle se remémorait, à cet instant, devant sa tasse translucide la dernière discussion qu'elle avait eue avec Barney et Julien.
- Non franchement, vous n'y pensez pas. Le faire disparaitre... Quelqu'un le découvrira, forcément !
- Eh bien sans doute, mais s'il doit être découvert, qu'il le soit loin d'ici, le plus loin possible et surtout pas par lui.
- Non, de toute façon, nous ne pouvons rien y faire maintenant, mais le déplacer, franchement, ça ne changera rien à sa réaction !
- Parce que le laisser là, dans cet état, c'est la solution selon toi ???!!! Franchement, Tania, arrête de dire n'importe quoi, va t'occuper de ton fils, il ne va surement pas tarder à se réveiller, on s'occupe du reste !

 

Le souvenir de cette discussion, ce n'était pas la première fois qu'il remontait en elle... Et chaque fois c'était la même chose, elle se débattait avec ces images. Une larme, puis deux se mettaient à couler le long de ses joues blanches. Ce matin, l'une d'elle tomba dans la tasse. Cette tasse qu'elle serrait fort de la paume de ses deux mains. Pour se réchauffer ? A cause de la contrariété ? Elle ne le savait pas elle même. Elle serrait.
A la pendule, il était quasiment 7h00. C'était à cette heure que tout était arrivé. Devant cette même tasse, avec ce même thé fumant, cette même odeur d'agrumes. Cette odeur qui, tous les jours d'octobre à mars, lorsque les petits matins sont frais, parfumait la cuisine de Tania.

 

Puis, soudain, sans savoir pourquoi, elle portait la tasse à ses lèvres, elle avalait une gorgé de ce liquide brulant. Elle se sentait vivante, cette sensation de chaleur, de brulure... elle se sentait vivre. C'est souvent ce moment que choisissait Damien, son fils, pour faire craquer les marches de l'escalier. Ce matin encore, il lui poserait des questions, ce matin encore, elle n'y répondrait pas, inventant une fois de plus une histoire. Combien de fois l'avait-elle fait depuis ce maudit matin ? Ça ne faisait pas encore 10 jours que tout était arrivé, il lui semblait qu'elle se débattait depuis des mois avec ce secret... Plusieurs fois, elle avait failli lui dire... Plusieurs fois, elle avait été sur le point de lui révéler la vérité. Mais son regard croisait le sien, et non, décidément non, elle ne trouvait pas la force de lui éteindre l'étincelle d'espoir qu'elle voyait au fond de ses yeux. Des yeux bleus, des yeux pétillants, des yeux d'espoir, des yeux d'enfant. Alors, ce matin encore, elle ferait comme si, comme s'il y avait une explication, comme si une fin heureuse était possible, comme s'il finirait par revenir.

4 octobre 2008

De la taille d’un œuf de pigeon (Caro Carito)


J’ouvre les yeux. A nouveau cette pénombre suffocante. Il me faut quelques minutes avant de distinguer un rai de lumière aussi mince qu’un fil. Je palpe le sol humide, une terre friable et collante. Des morceaux d’images se succèdent tandis que des douleurs lancinantes attaquent mon corps par vagues. Il me faut essayer de faire le vide. Fermer les yeux.

Ai-je dormi ? Je n’en sais rien. Je passe ma langue sur mes lèvres craquelées. Plus que la faim et la soif, un curieux sentiment de désespoir s’est emparé de moi. Des écorchures et une cheville attachée. Pas la moindre d’idée de l’endroit où je me trouve. Les questions se succèdent sans réponse. Je fais le tour de mes possessions, un vieux treillis, une chemise déchirée. D’épais souliers. Une barbe déjà bien fournie. Bon Dieu mais qu’est-ce que je fous ici ? Et pourquoi ?

Le temps passe et personne ne vient. Si seulement ma tête ne me faisait pas autant souffrir, j’arriverai peut-être à mettre bout à bout deux idées. Je prends ma tête dans mes mains. Elle est si lourde. Aïe ! Je sens sous mes doigts écorchés une bosse de la taille d’un œuf de pigeon.

Alors que mes forces diminuent, cette expression stupide se colle à mes pensées. Rester les yeux ouverts, ne pas sombrer dans le noir absolu. Je revois un groupe qui parcourt des forêts et gravit des montagnes. Le rire d’une femme. Le bruit des balles et une cellule, une autre à peine moins sombre. Une course à travers la jungle et… Comment vais-je m’en sortir ? Là, je n’en peux plus. Je sens des larmes amères sur mes lèvres et mon corps qui s’affaisse. Me laisser aller, c’est ça. Oublier.

J’ouvre une derrière fois les yeux et je la vois. Cette fleur, cette orchidée, de la taille d’un œuf de pigeon, rouge sang… Elle…

4 octobre 2008

Rififi au parc Igrec (Tilleul)

C'est l'été... Le soleil généreux darde ses rayons caniculaires...

Monsieur Pol Hisse, nouvellement élevé au grade d'adjudant, arrive, toutes sirènes hurlantes, sur les lieux de l'incident au volant de sa Peugeot de service. L'appel était clair : "grabuge naissant au parc Igrec, s'y rendre immédiatement!"

Garer sa voiture, ne sera pas un problème, pense-t-il... Avec le gyrophare, il peut s'arrêter au milieu de la chaussée... mais, plus il approche, moins il progresse... Une foule immense lui barre le passage... Il sort du véhicule. La marche n'est pas son sport favori, et avec cette chaleur ! La sueur perle déjà à son front.

A coups de sifflet stridents, il tente de se frayer un passage au milieu des badauds.

"Poussez-vous ! Police, laissez passer !" Rien n'y fait ! Il transpire à grosses gouttes...

Sa chemise fraichement repassée du matin, n'a plus aucune forme, elle lui colle à la peau.

"Laissez-moi passer ou je vous colle une amende !"

Entrainé par cette marée humaine, il recule plus qu'il n'avance...

"Savez-vous qui je suis? Je vais vous coller une châtaigne, moi si vous ne bougez pas !"

Bon sang ! Il faut qu'il arrive à se frayer un passage ! Si ça se trouve, l'adjudant-chef est déjà sur place...

4 octobre 2008

700 milliards en liquide-napping ! (Joe Krapov)


- Six pages et demie ? Vous vous fichez de nous Joe Krapov ? On vous avait dit de faire court !

- Justement, je les ai publiées sur mon blog et je ne vais vous livrer que le résumé !

- Faites vite, alors ! On connaît votre goût pour les parenthèses ! Et votre « Odyssée résumée pour les nuls » contenait quand même 2009 chants !

- Ici, ça commence par un agenda. C’est celui de Francis Carcopino, l’homme d’affaires à propos duquel j’ai écrit la semaine dernière.

- Ainsi donc, le feuilleton continue ! C’est une manie, chez vous !

- Ne m’interrompez pas tout le temps, Papistache, je ne pourrai jamais faire court, sinon !

- D’accord ! D’accord ! Je me tais !

- Voilà le contenu de l’agenda :

Mercredi 24 septembre, la secrétaire du milliardaire collectionneur d’art, Martine Vingt-Trois ne vient pas bosser. Elle ne téléphone pas pour s’excuser de son absence.

Jeudi 25 septembre: le conservateur du Musée des Beaux-Arts de Rennes n’a pas répondu à son courrier. Carcopino va devoir racheter le tableau d’Isaure Chassériau qui lui avait été prêté et qui a été mystérieusement endommagé.

Vendredi 26 septembre : Martine 23 n’a toujours pas donné signe de vie et il se morfond car il ne peut pas aller « toucher à ses boîtes de cigares dans le bureau ovale » en son absence.

Lundi 29 septembre à 9 h : son équipe de foot a gagné son match, ça le met en joie mais en arrivant au boulot il apprend que sa boîte a été victime d’un casse. Visiblement, on n’a rien dérangé ni dérobé mais à 10 h il s’aperçoit qu’on a volé le tableau représentant Isaure dans le bureau de Martine 23. A 15 heures, en utilisant un faux nom, « Jmechov » et une identité de marchand de bois et charbon, il se rend chez un détective privé nommé Florent Fouillemerde. Quand celui-ci apprend qu’il s’agit de retrouver Isaure Chassériau, il refuse l’affaire malgré « le nombre considérable de zéros inscrit sur le chèque ».

Mardi 30 septembre à 9 heures du mat’ : il a l’impression d’être suivi par une Ami 6 Citroën depuis la veille. A 10 heures, il reçoit un coup de fil. Un mystérieux « Front de libération des Prairies Saint-Martin canal historique » lui réclame 700 milliards de dollars en échange d’Isaure Chassériau et réclame le droit pour un groupe de rock nommé « Les Galeries Lafaillite » de jouer l’année prochaine lors de la braderie du canal. Il refuse.

A 11 heures, un artiste qui veut lui vendre une installation à base d’un tableau antique et de trois cocottes-minutes lui donne rendez-vous dans la rue Saint-Louis à Rennes. Il se promet d’acquérir l’œuvre si elle n’est pas trop chère.

Fin de l’agenda. C’est cet après-midi là qu’on procède à son enlèvement dans la rue en question. Le principal témoin, placé en garde à vue, est interrogé par la police puis relâché. Il s’agit d’un détective privé nommé Florent Fouillemerde, qui se déplace en Ami 6 et qui nie avoir pris des photos dans cette rue, de même qu’il n’a pas reconnu, sous le pseudonyme de Jmechov, le célébrissime milliardaire Carcopino.

Quand il sort du commissariat, Fouillemerde examine les photos qu’il a prises dans la rue Saint-Louis et se demande s’il va se mettre en chasse du milliardaire pour toucher la prime promise.

- Et ?

- Et puis c’est tout. Voilà la photo ci-dessous. Et le détective a très bien vu trois femmes embarquer Jmechov dans la 4L à l’arrière de laquelle se trouvait un grand coffre en osier.

- Une histoire dans laquelle une secrétaire, un tableau, un milliardaire et un témoin disparaissent au bout d’une page…

- Six pages et demie, Papistache, c’est vous qui m’avez demandé de raccourcir.

- Ca reste quand même assez, comment dirai-je… ?

- Inextricable ?

- C’est celaaaa, oui !

- C’est ce qui était demandé, aussi !

- Eh bien merci Joe Krapov ! Bon amusement pour la personne qui vous a précédé et qui va devoir composer avec tout cela pour raconter la suite !

Quand Joe Krapov s’en va, Papistache s’interroge sur « Val et Cie » et sur la plaque d’immatriculation TTC 59. Pourquoi donc Mamoune serait-elle mêlée à tout cela ?

080927_064bis

4 octobre 2008

Thétis

Il faisait chaud, une chaleur moite, désagréable. Charlie était étendu sur le trottoir depuis trois heures déjà, évanoui. Peu à peu il émergea du brouillard où se trouvait son esprit, le corps en sueur et la tête lourde. Que s’était-il donc passé ? Il ne comprenait rien…

 

Ce dimanche matin, il avait trouvé une lettre sans timbre dans sa boîte aux lettres, enfin, une lettre… disons plutôt un gribouillage informe qui alignait les mots suivants :

« Retrouvez-moi à 13h au 2 bd Jasmin derrière le muret en briques. J’ai besoin d’aide, vous êtes mon dernier recours.  Signé : Clémentine. » 

« Clémentine ? Clémentine ? Mais je ne connais pas de Clémentine », se dit-il. Il cherchait dans ses voisins, sa famille, ses amis, ses collègues… Rien… Et puis soudain, ce fut le flash. Clé-men-tine ! Une élève de troisième qui avait quitté progressivement le collège l’année passée en décrochant de tout l’univers scolaire.  Il ne voyait qu’elle. Mais c’était étonnant. Trois mois sans nouvelle et puis ce message venu de nulle part… Il avait été son prof de français pendant quelques mois et son professeur principal aussi, c’est vrai. Ils avaient discuté parfois de son avenir à elle, des discussions franches mais sans lendemain… Il en aurait le cœur net. Il irait, c’était décidé.

Et la matinée s’était déroulée lentement, très lentement, jusqu’à ce qu’il soit enfin temps de se rendre au lieu du rendez-vous. Enfin !… Charlie avait imaginé ce qu’il pourrait lui dire, les questions à lui poser, la réserve à arborer pour ne pas effrayer la jeune fille…Cela ne l’empêchait pas de sentir son ventre se nouer. Lui, le prof, ne pouvait plus se cacher derrière son estrade ou son bureau. Il avançait là, seul dans la rue, et tourna bientôt à l’angle de la rue Jasmin. Sa montre indiquait 13h pile.

A peine avait-il traversé la rue pour atteindre le n°2 qu’une silhouette apparut derrière le muret. Oui c’était bien elle. Mais comme elle semblait amaigrie, le regard triste et le cheveu gras. Charlie avait du mal à la reconnaître. En l’approchant, il essaya de cerner davantage l’état dans lequel elle se trouvait et réalisa alors que ses bras étaient couverts d’hématomes. La jeune fille était loin de l’image de l’élève rebelle refusant de se soumettre au règlement intérieur de son établissement scolaire. On aurait dit  un oisillon tombé de sa branche, dans toute l’étendue de sa fragilité.

«  Que se passe-t-il Clémentine ? Dans quel état es-tu ? Pourquoi m’as-tu contacté ?... »,  s’exclama Charlie. Il avait du mal à retenir le flot de ses questions mais les mouvements trébuchants des lèvres de son élève l’obligèrent à se taire. « Je… Je… J’ai besoin de vous, bredouilla-t-elle. Je ne savais plus à qui demander. Je suis désolée de vous embêter. Je me suis fourrée dans une m… Euh pardon… Je ne peux plus rentrer chez moi, mon père va me … Mon mec est fou… Ma mère, je n’en parle même pas, de toute façon, elle a ses problèmes… » Charlie écoutait attentivement tous ces mots qui se déversaient hors de sa bouche, sorte de soubresauts d’autodéfense qui, elle l’espérait apparemment, allaient lui apporter une réponse salvatrice. Mais de phrase en phrase, il comprenait de moins en moins ce qu’elle attendait de lui. Il était question de drogue, de trafic, d’erreur commise. Au final, il l’interrompit et tenta un résumé de la situation : « Clémentine, tu as aidé ton copain et les choses ont mal tourné ? C’est çà ? » Un hochement de tête le poussa à poursuivre. « Tu n’as pas transmis la drogue à la bonne personne, tu n’as pas récupéré l’argent attendu et il t’en veut maintenant, enfin ils t’en veulent, c’est çà ? » Même hochement de tête silencieux.

Charlie sentait Clémentine honteuse de ses révélations. Lui-même ne se sentait pas très à l’aise mais il ne pouvait plus reculer, elle comptait sur lui. « Mais qu’est-ce que je peux faire pour t’aider ? J’ai du mal à comprendre ce que moi je peux faire pour toi. - Mais, monsieur, je n’ai nulle part où aller. Ils vont me tuer. J’vous jure », articula-t-elle difficilement. Charlie n’en revenait pas. Comme la vie plongeait dans le sordide, qu’on était loin de sa vision du monde dans cette rue… Mais enfin ce n’était pas le moment de se laisser aller à une réflexion sur le monde, il fallait agir et prendre cet être blessé sous son aile. Elle s’était raccrochée à la dernière branche qui lui semblait exister, il ne pouvait pas la laisser tomber. « D’accord, suis-moi. Allons chez moi, on va essayer de régler le problèm… » Mais à peine avait-il fini sa phrase que Clémentine sursauta et fit virevolter ses regards tout autour d’elle. Un bruit l’avait alertée. Elle se mit à courir en pleine rue, affolée, et lui tenta de la suivre. Mais, le temps qu’il réagisse, quelqu’un s’était glissé derrière lui, il le sentait. Le dernier regard qu’il porta fut sur une pochette couleur châtaigne que Clémentine avait laissée tomber de sa poche en s’enfuyant ; elle dépassait à peine du caniveau.

 

 

4 octobre 2008

Défi de Joye

Diamond Sally se releva du plancher poussiéreux, les empreintes des doigts de Lefty LeTordu encore roses sur sa joue soyeuse. Vingt paires d’yeux l’examinaient, luisants de mépris. Depuis sept ans, Lily eut beau commander le respect total de toute la ville de Gulchwood et ses environs, ce serait aujourd’hui le jour de son jugement. Jamais plus une femme oserait s’établir régente d’une communauté dans ce coin perdu du territoire Cheyenne, quelque sûre que soit sa main délicate sur ses petits pistolets perlés, quelques belles que soient ses lèvres pulpeuses qui crachaient par moments un juron élégant ou un mot de tendresse convoitée. Ses alliés, Pete le petit barman, et Pancho le vieux Mexicain qui lui servait de confidant, avaient été dépêchés au bout des cordes rugueuses, pendus par les sbires abrutis de Lefty. Leurs corps tournaient encore sous le soleil cruel de ce midi fatal.

Avalant le sang qui coulait de sa bouche de nouveau déchirée par la violence des hommes, Sally fit appel aux dernières forces qui bouillonnaient en elle…

À suivre

4 octobre 2008

La partition inachevée (Rsylvie)

lacreme070200020

Emberlificotons, le  héros de notre aventure n’en était pourtant pas à sa première !

Et malgré cela, il s’était fait prendre comme un jeune débutant. Il était retombé une fois de plus dans ses filets. Mais quelle mouche l’avait piqué aussi, de répondre à cette fanfaronnade, lui qui a déjà bien du mal à se lever le matin. Alors un défi ! Vous parlez d’une histoire.


D’autant plus qu’Emberlificotons

devait commencer une partition

qui serait finie

par un autre… seulement voilà,

 après avait donné vie, accepter que ce soit un autre

qui finisse une si belle romance ?

C’était impossible…. Il connaissait la musique,

croches et doubles noires.

10061056

Tout cela sur une même portée

en ayant bien fait attention aux nombreux dièses

ou bémols en début de clé de sol. Mais peut-être était ce une clé de fa ?

Quoique les mélodies des frères Scot

des années sixties soient aussi mélodieuses à pianoter !

u19727738

Pianoter vous savez, jouer avec les doigts

d’une blanche vers une ronde,  sauter d’une branche à l’autre,

en visitant une noire ou deux au passage. Le tout sur un rythme soutenu,

pour ne pas tomber de l’arbre. Un accident est si vite arrivé.

On ne s’imagine pas combien cela peut glisser la mousse.

Surtout le matin, quand la rosée est encore fraîche et les feuilles

 inondées de gouttelettes d’eau de rose.

Emberlificotons aime écouter la pluie le matin.

Seulement voilà il n’est pas du matin. Alors relever un défi un dimanche matin… quel dilemme ?

Que même un orchestre au grand complet ne pourrait débrouiller. Et cela,

 Miss Marple l’avait compris aussitôt la première mesure jouée. 

C’est pourquoi déclara-t-elle, aussitôt après avoir pénétré dans la chambre du major, qui pendant l’hiver 1828 ou en 29 au moment de l’expédition du grand nord s’était pris les pieds dans une partition laissées traîner malencontreusement par Félix, un jeune journaliste amateur de petits rats….

Ce ne peut être lui » !

Et tous, de se regarder en murmurant,

mais alors, qui avait massacré la partition » ?

olejnik070300008




Publicité
<< < 1 2 3 4 5 > >>
Newsletter
Publicité
Le défi du samedi
Publicité