Croisières musicales (Walrus)
Calais - Douvres
Un vent soutenu sévit sur le Pas-de-Calais.
Comme annoncé sur le site de la météo des ports, il est à son maximum pour l'heure très matinale de la traversée et la hauteur des vagues dépasse largement les deux mètres, celle de la houle également (si vous êtes sages, je vous expliquerai la différence).
Avant que le ferry n'entre dans le port de Douvres, je tente un raid vers les toilettes (ben oui, le thé, c'est diurétique). Le parcours est ardu car c'est toujours au moment où je veux reposer un pied au sol que celui-ci se dérobe parce que le bateau roule. Quand je pénètre enfin dans les "lieux", je suis accueilli par une symphonie pour portes de djocs de ton mal défini : quand le bateau roule sur bâbord, toutes les portes des toilettes s'ouvrent dans un long gémissement de leurs charnières grippées et quand il repart sur tribord, elles se referment en un chapelet de claquements brutaux.
Je ne m'étendrai pas (m'étaler serait plus de circonstance) sur l'habileté qu'il faut déployer, n'étant muni que de deux mains, pour sauvegarder un équilibre menacé de toutes parts (car le raffiot roule et tangue tout à la fois), maintenir la braguette ouverte, l'élastique du slip baissé, et diriger le jet vers une cible en mouvement perpétuel (ou à la position incertaine, c'est comme vous préférez). Je comprends mieux pourquoi les marins portent des bottes !
Douvres - Calais
Sur le Dover Strait, c'est le calme plat.
Même si durant presque tout le trajet du Suffolk jusque Douvres, il a plu, une fois la traversée entamée, le soleil s'est mis de la partie, inondant de lumière une mer sans autres rides que les sillages des navires.
Sirotant un stout irlandais dans le salon arrière, nous constatons en observant ce fameux sillage que notre bâtiment ne semble pas traverser en ligne droite mais en une succession de courbes larges : bancs de sable, croisement de navires empruntant le détroit parallèlement à son axe ? Je n'en sais rien (voulez-vous que je me renseigne ?).
C'est quand j'ai pensé qu'avec une mer pareille je n'aurais pas droit à la symphonie du voyage aller que ça a démarré : une bande de gusses s'est mise à chanter ! J'ai d'abord pensé à des Gallois lesquels ont une propension bien connue à se rassembler en chorales, mais ceux-ci chantaient en anglais des histoires de marins loin de leur pays.
Le groupe chantait plutôt juste, ce qui exclut les Irlandais, et après un quart d'heure de prestation, les applaudissements du public (forcé) ne les ont pas incités à faire une collecte, ce qui élimine les Écossais. C'étaient donc bien des Anglais.