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Le défi du samedi
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1 novembre 2008

La lettre (Papistache )

A cette époque,  Mamoune et moi habitions un appartement au huitième étage d’une tour qui en comptait neuf. Notre fille aînée se traînait à quatre  pattes sur la moquette du salon. La sonnette de la porte d’entrée avait retenti. J’étais allongé sur le tapis à chatouiller Audrey, celle que j’appelle Rosette dans mes papistacheries. Les samedis matins, les entrepôts Percherons étaient toujours fermés, je profitais des joies de la vie de famille. C’était le facteur. Il tenait une lettre à la main. Je devais acquitter une surtaxe pour affranchissement insuffisant. Un franc dix. J’avais payé.

Le facteur dansait d’un pied sur l’autre, ma lettre à la main.
— Elle est à moi, maintenant !
— Oui... c’est que...
Il a expliqué que la lettre avait dû rester coincée derrière un meuble... on avait dû la retrouver à l’occasion d’un réaménagement de bureau... la direction présentait ses excuses... pour le retard... enfin, voilà, le pli était arrivé à son destinataire.

Effectivement :

Monsieur Patrice Rachée,
3 rue Sully,
tour F, appartement 24,
284** N*g*nt-le-R*tr*u.

C’est mon état civil pour toute la planète. Papistache est un nom d’emprunt, en fait, on me surnommait déjà comme ça au collège. J’ai perpétué l’usage en pénétrant les blogs.

J’ai salué le facteur. Je me suis approché de la fenêtre, il pleuvait et l’appartement était assez sombre. Audrey avait saisi un Nouvel Obs et en tournait les pages. On aurait pu croire qu’elle se passionnait pour la politique.

J’ai appelé Françoise (c’est le prénom dans la vraie vie de Mamoune dite Épouse-Aux-Mille-Qualités).
Le cachet de la poste, presque illisible, semblait indiquer 17 août 1916. Le timbre, collé de travers était une Semeuse rouge à dix centimes. L’adresse paraissait libellée au crayon gris, comme passée par le temps, mais c’était bien la mienne.
— "C’est une blague qu’un de tes collèges te fait. Voyons, en 1916, le quartier n’était pas encore construit. Occupe-toi plutôt de la petite qui mange le programme télé. J’ai encore à faire et, cet après-midi, nous allons voir tes parents."

J’ai enfoui la lettre dans ma poche et ne l’ai ressortie que le soir, une fois la maison endormie. Une Semeuse camée sans sol, en usage de 1907 à 1920. Mon catalogue Yvert et Tellier était formel.  Rien n’empêche un collectionneur de coller le timbre que bon lui semble  sur une enveloppe fatiguée. Cependant, la supercherie était habile.

J’ai ouvert l’enveloppe. L’écriture du simple feuillet, arraché à un carnet, était la même que pour l’adresse. J’ai bataillé mais je suis parvenu à lire :

Mon cher Patrice,
Je ne te connais pas mais je doit (sic) te prévenire (sic) qu’on va venir te chercher, je ne sais pas quand, je ne sais pas qui,  mais je doit (sic) te dire de ne pas les suivre.
Je suis un lâche, je t’ai vendu, et je voudrais défaire ce que j’ai fait.
Je ne sais pas si tu me pardonneras, ne les suit (sic) pas !
Ton grand-père

 

Caporal Charles Rachée.

 


Mon grand-père était décédé d’un cancer des intestins, en 1972, sept ans avant que je ne reçoive ce courrier. C’était incompréhensible. Je n’ai rien dit à Françoise. Je suis allé me coucher.

J’ai relu la lettre des dizaines de fois pensant percer le mystère. Le cachet était trop effacé pour y lire le nom du bureau de départ. Des lettres manuscrites S & M se devinaient en haut à gauche, tracées à l’encre violette d’une main qu’on devinait rageuse et énergique, mais évanescentes.
Si Pierre ou Jean, mes collègues de l'entrepôt, avaient voulu me faire une blague, ils n’auraient pu résister longtemps sans vendre la mèche. Rien.

J’ai conservé la lettre dans mon portefeuille. Je l’avais reçue le 18 septembre 1979 et “ils” sont venus me chercher le 8 février 1980. Soudain, la température a baissé dans le bureau où je terminais un bilan comptable pour les entrepôts. Mon souffle se condensa au-dessus du cahier de comptes. Je me suis retourné. Un homme enveloppé dans un long manteau m’a montré la porte d’entrée, m’invitant du bras à sortir. Je n’ai pas eu la présence d’esprit de refuser. Je me suis retrouvé sur le palier du huitième étage sans me souvenir d’avoir tourné la clé dans la serrure de la porte. Un autre homme se tenait dans la pénombre. D’un geste lent, il m’a indiqué les escaliers.  A chaque palier, se tenait un nouvel homme rigoureusement identique au précédent. Je ne distinguais pas leurs traits.  Arrivé sur le parking de l’immeuble, un des hommes m’a tendu une lampe pigeon et m’a montré l’entrée d’un chemin creux dont j‘ignorais qu’elle se trouvait à deux pas de la porte de la tour F. Je me suis enfoncé dans la nuit. (à suivre*)

*Je ne voudrais pas abuser de votre temps, mon texte est trop long, nous avions pensé que le sort des textes longs serait d'être coupés et la suite reportée à plus tard dans la semaine, seules ceux ou celles qui auraient accroché à la lecture y seraient revenus. Je ne sais pas, ce soir, il est près de minuit et nous sommes le 31 octobre, combien de textes longs ont été mis en page ni le sort qui leur a été réservé. Je donnerai ma suite dimanche pour 9 h 00. Viendront ceux qui voudront !

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Commentaires
C
Le catalogue Yvert et Tellier m'a fait sourire : mon père est collectionneur de timbres !
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J
La suite, vite!
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T
Bien sûr que j'attends la suite... Vous êtes en train de vous faire enlever... pourtant, vous étiez prévenu! Vite demain!
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P
Une autre fois, Val, je prépublierai une fausse suite et à la dernière minute je posterai le bon texte.<br /> Mais, comme je fonctionne à flux tendu, il me faudrait écrire deux textes pour un et ça... ce n'est pas pour demain.<br /> <br /> Alors, vous me parlez encore, malgré ce que vous avez lu ?
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V
Je dois confesser, Papistache, que je n'ai pas su résister à prendre de l'avance pour demain. Je sais, c'est mal, mais, en même temps, faut bien qu'on ait quelques avantages, n'est-ce pas?<br /> <br /> Moi ça me rappelle un autre texte que celui auquel Tiphaine pense: une histoire de retour dans le passé et de rencontre entre vous et...vous!Ce texte m'avait coupé le souffle. <br /> <br /> J'aime beaucoup vos fictions qui ont pour base votre réalité, bien transformée certes, mais tout de même. <br /> <br /> A demain, alors.
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P
Palpitant, c'est bon signe, signe que le cœur vous bat encore, MAP.<br /> <br /> Pandora, c'est aussi que je ne voulais pas capter l'attention pour mes 10 000 caractères. Un peu pour tous.<br /> <br /> Aude, ce n'est même pas vingt-quatre de patience !<br /> <br /> A qui d'autre sinon aux fans, Joye ?<br /> <br /> Si, Joye, la fonction "A demain, si vous le voulez bien !"<br /> <br /> Vous croyez que j'en ai trop dit Walrus. Attendez de tout savoir. On verra si vous souhaitez toujours m'adresser la parole.<br /> <br /> Vous également, Tiphaine, savez entretenir le suspense.<br /> <br /> Là-dessus, effectivement, Joe Krapov, il vous serait difficile de soutenir le contraire.<br /> <br /> A tous : à demain 9 h 00, la nouvelle consigne 9 h 01.
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J
Les connaissances internautiques et les goûts musicaux de Joye m'étonneront toujours très agréablement : Alan Parsons Project ! La discothèque d'Iowagirl doit être composé à 80% avec les mêmes éléments que la mienne. J'avais totalement oublié ce disque que je possède. Mais comment diable la jeune et jolie blogueuse des Uhesses peut-elle avoir accumulé les mêmes galettes qu'un dinosaure pseudo-breton atteint du syndrome du patriarche ? Je ne vois qu'une explication : Joye est une sorcière de deux cent soixante ans ! ;-)))))
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J
Et comment qu'on sera là ! Les textes en deux parties à suivre, j'adore ! Et les entremêlages de temps, je ne vous dis pas !
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T
Je me souviens d'un texte que vous aviez écrit, un de mes préférés, une histoire de montre, de jardin, de temps et de lettres. Le début de celle-ci me plaît beaucoup, et c'est très agréable de savoir qu'il y aura une suite, très agréable.
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W
Bon ! Ben à demain, Papistache, enfin... Patrice.
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J
Mais oui, c'est magnifique, c'est de la torture de nous faire attendre ainsi !!!<br /> <br /> Entretemps, allons au ciné :<br /> <br /> http://www.youtube.com/watch?v=oNsEh1FkJCA
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U
Papistache, n'auriez-vous pas une fonction qui permettrait de montrer le premier morceau d'un texte et puis de cliquer sur le lien pour continuer à lire si l'on voulait bien ? Hmm ?<br /> <br /> Autrement, c'est trop cruel...<br /> <br /> "Keeping time, time, time, / In a sort of Runic rhyme, / To the tintinnabulation that so musically wells from the bells, bells, bells, bells, / Bells, bells, bells...."
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C
Nous faire ça à nous, vos fans ?!?<br /> <br /> OH !<br /> <br /> J'ai horreur des sériales, c'est meurtrier (comprenne qui pourra)!<br /> <br /> Alors, là, non, je bute, Fortunato ! Viens boire une goutte d'Amontillado chez moi, je saurai te rendre ce compliment !!! <br /> <br /> OH !
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A
Il me tarde de lire la suite.
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P
Moi ausi je reviendrai dans ce qui ressemble à une prise d'otage (et je parle des lecteurs captivés et captifs;-))
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M
A coup sûr, je viendrai !<br /> C'est palpitant !
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