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19 janvier 2019

Le grand bal des Rêves Revenus (Pascal)


J’ai rêvé de toi, ce matin, cela faisait si longtemps. J’étais malheureux au quotidien ; je croyais que mes pensées oniriques t’avaient remisée dans un coin de ma pauvre cervelle, qu’elles s’étaient évaporées, faute de réminiscences émues ; pire : qu’elles t’avaient oubliée !... Bon an, mal an, je me faisais une raison…  

Avec tout ce temps passant, ma réclusion, ici, dans l’ascétisme le plus rigoureux, l’indépendance pénible et la solitude sévère, comme un prisonnier dans sa geôle, je vis de mes seuls rêves pour m’évader du quotidien. D’habitude, ils m’emportent dans des contrées inhospitalières, des confins inexplicables, des déserts arides, où je deviens spectateur des avatars qui m’infligent des réveils comateux, des yeux ronds, une gorge sèche et une irrépressible pépie de mort de soif. D’habitude, je converse avec mes disparus, ces êtres chers que je n’ai pas su retenir au banquet des vivants ; mes fantômes préférés m’attirent, je les repousse ; je les réclame, ils m’ignorent ; c’est sans fin…

Princesse évanescente, tu étais en chair et en couleur ! Nous avons parlé ! J’aimais bien ta voix, elle me rassurait et elle m’encourageait à entretenir nos joutes verbales ! En réponse, tu me souriais avec un de ces petits sourires que j’aimais traduire à la seule volonté de cette exaltation chimérique ! J’avais des arguments de chevalier servant, un blason à tes armoiries, ton mouchoir immaculé au bout de ma lance…  
Dès que tu regardais ailleurs, comme un petit voyeur, à la dérobée, je te détaillais avec toutes mes sensations aux abois ! Tu n’as rien perdu de tous tes attraits, tu as même gagné en charme. Je me souviens si bien de ton profil agréable, de ta façon de le maquiller avec les clairs-obscurs des paysages incertains que nous traversions. Etait-ce dans les brûlures de l’enfer ou dans les délices d’un paradis ? De toute façon, n’importe quel endroit du ciel ou de la terre, tant que je suis avec toi, c’est forcément idyllique…
Tous tes silences, je les remplissais avec mes illusions ! C’est facile dans un rêve ! Elles débordaient comme d’une pochette surprise remplie de cotillons multicolores !
Quand tu me regardais, je perdais tous mes moyens, je baissais les yeux ; j’étais comme un gamin qui ne sait plus quoi faire de ses mains ! Tu étais belle, belle et séductrice, comme le souvenir de notre dernière rencontre ; d’ailleurs, tu es définitivement belle ; aveugle quand je t’admire, mes yeux ne verront jamais l’imperfection.
 
J’aimais bien notre promiscuité de jeunes adultes, notre rapprochement presque charnel ; tous les deux, nous étions de connivence. Aux ingrédients de la Passion et de l’impatience, un peu comme deux amants qui vont se déclarer avec un premier baiser d’essai, je te respirais, je t’admirais, je voulais te caresser, te goûter, pour donner de la consistance à mon rêve !...  
J’essayais désespérément de le faire durer ! Je voulais t’emporter dans une aventure abracadabrante ! Je voulais peindre mon rêve, l’envoyer dans une dimension plus érotique mais, toi, tu ne le voulais pas ; alors, je n’ai pas insisté, je ne voulais pas te perdre. Pourtant, tu as disparu avec le premier rayon de lumière dans les volets…

Toute la journée, je vais t’emmener avec moi ; bien sûr, tu seras mon secret et, dès que je le pourrai, je retournerai dans mon rêve. Je vais nous trouver des belles finitions, comme des guirlandes de Noël, je vais t’habiller avec des falbalas d’or et d’argent, je vais apprendre à danser pour t’emmener toutes les nuits au grand bal des Rêves Revenus, je vais réviser des belles tournures de phrases que je te réciterai dans notre prochaine entrevue. Ce soir, je vais me raser, je vais me faire tout beau, comme ça, peut-être que tu me reviendras ; on partagera notre rêve…

Souvent, je m’endors en pensant à toi. Mais que fait-elle à cette heure ?... Travaille t-elle demain ?... S’occupera t-elle de ses enfants ?... Est-elle heureuse dans sa belle maison ?... C’est ton image que je veux emporter dans mon sommeil ; je n’en vois pas d’autre qui puisse égayer le noir de la chambre et réchauffer ses draps glacés…

Et toi, de l’autre côté de la terre, rêves-tu parfois de moi ?... Pas beaucoup, non, juste un petit peu, le temps de nous retrouver ensemble dans cette quatrième dimension aux mille sensations illuminées ! C’est peut-être toi qui m’as appelé dans ton rêve lointain et j’ai accouru avec les miens comme seuls bagages envisageables !...  

Ce soir, j’irai me coucher plus tôt ; il ne faudrait pas que je rate un de nos futurs rendez-vous imaginaires. Si tu me donnes bien la main, on ira se balader sur la cime des pyramides ; si tu as envie de rire, on ira voir s’agiter les clowns à Pinder ; si tu veux patiner sur la neige, tous les deux, on descendra les pentes du Kilimandjaro ; on glissera sur le dos de l’arc-en-ciel. Je te réciterai des vers de Rimbaud, ceux qui parlent le mieux de l’Amour ; je te raconterai des histoires d’amants qui finissent bien. Parce que dans les rêves les plus enflammés, on peut tout se permettre, on caressera les oursons de dame Grande Ourse, la crinière des lions sauvages, on ouvrira les cages de tous les zoos !...
Du haut de leurs cratères, on lancera quelques pierres dans la lave des volcans ; on tentera des ricochets sur l’océan des Tempêtes ; on jettera les autres dans tous les puits aux Enchantements !...  
On ira saluer Poséidon et ses sirènes ; je connais des mers si profondes, je t’emmènerai cueillir leurs plus beaux coquillages ; on goûtera les vins les plus millésimés de Mars et de Pluton ; on ira faire les soldes des magasins, dans toute la Voie Lactée !... Et parce que je n’ai jamais su les mettre dans tes yeux, je mettrai des étoiles dans tes cheveux ; je sais où cueillir les plus belles, j’en ai vu dans d’autres rêves de ciel ; je ne les réserve que pour toi…  

Et quand nous serons repus de toutes les beautés de l’univers et, de la turquoise jusqu’au saphir, quand nous aurons décliné tous les bleus des Océans et des Mers, et quand nous aurons laissé nos empreintes sur toutes les plages de toutes les îles désertes et, avant les premières lueurs de l’aube derrière les volets, si tu m’encourages, tout doucement, pour ne pas que tu t’enfuies, j’irai poser mes lèvres sur les tiennes.
T’embrasser, belle chimère, et apprendre le goût du rêve, tel sera mon sacrifice pour te garder et te perdre encore… jusqu’à notre prochain rendez-vous…

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Commentaires
B
C'est de toute beauté cher poète <br /> <br /> Bravo Pascal et Merci pour ce si doux moment de lecture
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V
l'amour , l'amour toujours guide tes pas
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J
On a retrouvé le vagabond des limbes ! Et aussi l'enfant-roi d'Onyrodine !
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J
Là on reconnait bien le navigateur ☺
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L
Magnifique pochette surprise de rêves à rêver !....
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W
Quelle maîtrise du texte (et du rêve, ce qui est encore plus difficile).
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M
Un nuage gonflé de douceur... j'ai soufflé doucement pour l'emmener jusqu'à la fin sans qu'il ne perde une goutte de magie ...
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N
Perso quand je me réveille c'est surtout une irrépressible envie de pipie (avec le "e" car je parle avec l'accent !)
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J
Si le Petit Prince avait grandi…<br /> <br /> <br /> <br /> Une belle fantaisie de regrets doux pour les moments jamais nés mais qui vivent encore dans les rêves du narrateur.
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