Mes hallucinations (Prudence Petitpas)
Dessin que j’ai fait à 12 ans, sans doute pour apprivoiser les premiers personnages de mes hallucinations…
Je ne sais pas vous, mais lorsque je ferme les yeux, tout un monde magique apparait entre mes pupilles et mes paupières…Ce sont plutôt des visages qui prennent forme et se succèdent sans forcément d’ordre. Parfois j’en retiens un, comme une image, elle fait le tour de mon cerveau, et me revient à chaque fois transformée, avec un chapeau en plus, ou un sourire de travers, souvent avec une grimace qui du coup m’effraie et je la chasse de ma tête. Aussitôt remplacée par une autre, et encore une autre… Toutes ces images sortent de mon imaginaire, je ne reconnais jamais quelqu’un que j’ai croisé dans ma vraie vie, ou alors je ne me rappelle plus vraiment de lui. J’appelle cela mes hallucinations et j’en joue le soir lorsque je cherche le sommeil. On pourrait croire que ce jeu est puéril, oui, il est vrai que depuis toute petite, je vois des formes partout… dans les nuages, dans les tapisseries aux traits bizarres qui s’entrelacent jusqu’à ce que mes yeux y trouvent l’aspect qui m’attire et me laisse partir dans mes délires. Délires qui durent encore maintenant, mais je n’en parle à personne, j’ai peur qu’on me prenne pour une folle. Je suppose que les hôpitaux psychiatriques sont remplis de ces gens qui voient toutes sortes de choses étranges et qui le disent tout haut. Non, cela reste mon secret, cela reste mon terrain de jeu imaginaire et j’y suis parfois si bien que le sommeil tarde à venir. Avec le temps, j’ai même réussi à contrôler le jeu, je le commence et l’arrête quand je veux, je fais circuler les silhouettes derrière mes paupières à l’allure qui me plait. Parfois rapide, parfois lentement, cela me permet de les détailler, de les rhabiller, de les colorer… La seule difficulté serait de les attraper pour qu’elles restent plus longtemps ou de les faire revenir. Non, ça rien à faire, elles changent constamment d’allures et me narguent parfois tranquillement, d’autres fois plus sournoisement, particulièrement lorsque je suis malade. La fièvre les fait apparaitre sans plus aucun contrôle, des milliers de visages me tombent dessus, comme de gros coussins qui dégringolent sur ma tête. Ce jeu là, ne m’amuse plus du tout et je crains devenir vraiment folle, là, il faut que ça s’arrête. Heureusement, je reste le plus souvent en bonne santé et peut continuer à loisir de faire aller et venir derrière mes yeux fermés, ce petit monde qui envahit mon esprit… A vous je vous en parle, mais ne le dites à personne…. Est-ce grave docteur ?