Participation de Venise
Cette horloge est une hutte pour mon âme qui n’a jamais tout à fait quitté l’enfance.
Cette horloge c’est une mangeoire prés de laquelle je fais une pause de temps en temps quand le temps s’accélère.
TIT TAP, combien il me réjouit ce bruit qui m’arrache à mon sommeil.
Elle est à ce jour deux fois centenaire et elle s’est mêlée à toutes les conversations de mes ancêtres.
Les amis chers se sont succédé et toujours cet entêtement des aiguilles avec la fidélité du tictac.
Elle a empêché par son rythme cardiaque énergique la mort de rentrer ici.
Dans son ventre un grand cornet à double soufflet rivalise avec Dieu lui-même.
Ma patience horlogère je la dois à sa présence dans ce salon où ronflent les années passées.
Elle palpite l’hiver et retient dans son cadran la faible lumière des malles d’osier d’un soleil couchant.
Elle a fait confiance ,elle nous a aimés, et maintenant elle dort comme les anges.
Elle m’a sortie de plusieurs sommeils
On raconte que le jour où elle a pénétré dans la maison dans un gros cartonnage blanc plâtre marbré de bleu mon bisaïeul n’avait que six ans.
C’était comme si le prix Nobel avait franchi le seuil de cette porte.
Elle a paraît-il encanaillé toute la famille traversée d’une joie toute païenne.
Mon bisaïeul s’est caché à l’intérieur toute une journée certain d’y découvrir un trésor.
Dans le sacre de ses cent ans ma grand-mère s’est adossée sur son flanc pour glisser doucement jusqu’au sol ondit que l’horloge pour elle a fait durer cet instant une journée de plus rien que pour elle.
Quand quelqu’un était hospitalisé en urgence on raconte qu’elle prenait un air grave et plus profond que la bible et que son TIC TAC pleurait dans le couloir.
Ces milliers de minutes vagabondes elle les a égrenées avec tant de générosité
Qu’elle m’a aidée à repousser souvent les graviers de la mélancolie.
J’apprends souvent la mort d’un geai ou d’un moineau en écoutant son battement de balancier . Son petit TIC TAC odorant monte léger comme un parfum d’acacia dans le ciel léger.
Un jour elle s’en ira dans une brocante au milieu de vieux objets qui ont bien travaillé.