Au marché de Brive la Gaillarde (Yvanne)
Un samedi de décembre à Brive. Comme chaque semaine depuis des décennies la place de la Guierle et la halle Georges Brassens s'animent. Il n'est pas jour mais les producteurs se sont à peine couchés pour être à pied d'œuvre quand arrivera le chaland. Il ne tarde pas. Dès 7 heures le client « lève-tôt » arrive, le cabas au bras.
Aujourd'hui l'animation s'amplifie. Il y a de la frénésie dans l'air. Et pour cause ! Va se dérouler une foire grasse primée. L'ambiance est chaleureuse, bon enfant, bigarrée et odorante. Ici se mêlent toutes les catégories de la population briviste et des alentours. Pas de chichis. On s'interpelle. On plaisante. On est ravi de rencontrer les amis, les habitués.
Sur les étals, s'alignent oies et canards entiers, chapons et autres poulardes, foies gras frais, magrets.
Les acheteurs s'approchent, observent, discutent avec le commerçant toujours prêt à fournir des conseils de cuisson, une recette – vous m'en direz des nouvelles ! - On l'écoute religieusement. On promet d'essayer...
Depuis 8 heures 15, le marché aux truffes, très réglementé, est ouvert. Il y a déjà la queue. On patiente tranquillement. Chacun veut son diamant noir, même tout petit. C'est tellement cher. Mais pour les fêtes, allez, on ne compte pas. Le tubercule parfumera omelettes, pâtés, sauces... Certains gastronomes l'utilisent même en pâtisserie.
Pour ma part, je trouve que la truffe donne tout son arôme simplement finement râpée sur du pain de campagne à peine grillé et tartiné de beurre salé. Voilà ma gourmandise de Noël !
Comme d'habitude, les autres productions locales ne manquent pas. Sur les tables, dans des cagettes ou à même le sol, on trouve poulets, pigeons, lapins, pintades, pour certains vivants, d'autres prêts à mettre au four. Des paniers remplis d'œufs. Les légumes de saison colorent de vert, de blanc, de violet, d'orange chaque côté des allées. Il n'y a pas que les oignons rendus célèbres par Brassens dans sa chanson « Hécatombe ». On trouve aussi ail, persil, différentes plantes aromatiques. Si les gelées n'ont pas encore sévi il n'est pas rare de voir quelques cèpes.
Bouchers et charcutiers ont aussi leur place réservée et vendent du veau élevé sous la mère, du porc cul noir, du bœuf limousin. Les fromagers vantent leurs cabécous et autres fromages du cru que l'on nomme ici « caillades ». Les « boulangers du dimanche » ont chauffé leur four la veille pour cuire leur délicieux pain de campagne à l'ancienne.
Des fabrications plus élaborées font la renommée de ce marché bien achalandé : huile ou vin de noix, tourtous, moutarde violette, miel de bruyère, safran, conserves...
Les écrivains et tout ce petit (ou grand) monde qui gravite autour de la littérature ne s'y trompent. Ils ne repartent pas de Brive après la Foire du livre sans avoir rempli leurs valises des merveilles gustatives du terroir.
Et les fruits ? Oui bien sûr les fruits de saison abondent dans la halle : noix fraîches, châtaignes dans leur peau ou blanchies et des pommes, des pommes, des pommes. On voit de plus en plus réapparaître des espèces anciennes au goût inimitable. Le grand Jacques incitait son bon peuple à en manger. Et celles du Limousin naturellement, surtout de la Corrèze !
Depuis les années 60, un fruit plus exotique a fait son apparition sur le marché : le kiwi. Une famille des environs le cultive – ainsi que le kiwaï maintenant - dans ses vergers bio depuis trois générations. Il bénéficie ici d'une très bonne réputation et on en vend beaucoup, frais ou transformé en jus de fruit pur ou associé au jus de pomme. Vieilli en fut de chêne, le jus du kiwi devient vinaigre utilisé pour les marinades ou pour déglacer les viandes rouges ou la volaille. Cela vous dispense un goût...fabuleux !
Je vous ai fortement vanté mon beau marché de Brive où rien ne manque assurément. Vous pensez que j'exagère ? Que je suis chauvine ? Ce n'est pas faux mais venez donc voir par vous-même...