Ont amassé de la kryptonite
TOKYO ; JAK ; Laura ; Lecrilibriste ; Walrus ;
Kate ; Adrienne ; Vanina ; Joe Krapov ; joye ;
Les super nanas (Laura)
Une nana qu'un homme aime
Dorlote
Aide
Admire
C'est parce qu'elle le mérite
Car c'est juste
Une super nana[1]
Une super nana
Une super nana
Une super nana
Une nana qui a rencontré
Un homme tendre
Sexy
Travailleur
C'est parce qu'elle le mérite
Car c'est juste
Une super nana
Une super nana
Une super nana
Une super nana
Une nana qui a vécu
25 ans d'amour
Ce n'est pas une chanceuse
C'est juste qu'elle ne rêvait pas d'un prince charmant
C'est parce qu'elle le méritait
Car c'est juste
Une super nana
Une super nana
Une super nana
Une super nana
Une super nana
Une super nana
[1] http://www.lauravanel-coytte.com/archive/2021/08/22/super-nana-par-michel-jonasz-6333380.html
Clap de fin (Lecrilibriste)
Sous le cœur du tee-shirt imprimé
Ils ont le cœur en bandoulière
Et ce cœur là bat la chamade
Pour la dernière escapade
C’est la fin du lycée
Joie et nostalgie se chamaillent
Tous ont un peu mal cœur
Car une page s’est tournée
Il va falloir avancer
Il va falloir se séparer
clap de fin d’lycée sonné
Chacun va partir de son côté
Au boulot, en université
Apprenti ou à l’étranger
Ils seront tous disséminés
La pochette surprise de la vie
Les attend au tournant
à pas de fourmis ou à pas de géant
va falloir tenter l’aventure
et, à tout prix, devenir grand
Une ultime balade programmée
Et une orgie organisée
pour se souler tout en braillant
« on s’était dit rendez-vous dans dix ans »
et chasser ce cafard qui étreint bizarre
d’ avoir refermé le roman
où régnaient les grands manitous
sur leur insouciance d’enfant
Super ! (Walrus)
Ah, vous aussi vous l'avez remarqué !
Sur la photo de groupe des participant·e·s au congrès, les superwomen sont vachement plus nombreuses que les supermen !
C'est normal, Alicia Keys vous explique pourquoi :
Étape 9 : la France (Kate)
Les voyages formeraient la jeunesse, selon l'adage bien connu, et ce formidable roman, français, pas policier mais terriblement addictif, au titre si éloquent "Loin", permet d'ajouter que les voyages informent la jeunesse, ce qui revient, j'en conviens, à peu près au même !
Sans dévoiler l'intrigue que cette épopée, très documentée, qui m'a tenue en haleine du début à la fin et m'a plus envoûtée par la justesse des descriptions et des personnages que bien des reportages "caméra au poing" pourtant si saisissants de vérité.
Qui sont nos parents ? Nos grand-parents ? Qui sommes-nous ? Histoire et géographie s'enchevêtrent à merveille et j'aime ça.
Avant d'aller plus loin (géographie), d'ailleurs on s'arrête là, résumons-nous (histoire) :
Étape 1 : Lucerne, d'un monument historique au bord d'un lac, nous nous sommes projetés en Angleterre (étape 3) et en Finlande (étape 6) ;
Étape 2 : Chihuaha, un animal nous a menés tout droit au Mexique, non sans évoquer l'Asie (étape 4) ;
Étape 3 : La mer s'est imposée, celle qui borde le Suffolk notamment parce que je venais juste de lire un épisode passionnant de la vie de Patricia Highsmith narré très justement, par le biais d'une fiction, saisissante de réalisme, par une écrivaine anglaise passionnée par cette auteure. Synchronicité ou plutôt la piste du "No comment" ? ;
Étape 4 : Une vieille voiture m'a évoqué divers véhicules improbables (comme la Traban de "Loin") parcourant des contrées lointaines dangereuses et difficiles d'accès (comme la Traban de "Loin" aussi) mais surtout la Jeep au coeur du huis clos en plein air du roman "Traqué" ;
Étape 5 : Cette boutique d'accessoires culinaires, au nom humoristique, TOC, enfin pour ceux qui n'en ont pas (trop), m'a d'emblée projetée au Japon où les instruments sont au coeur d'un art culinaire très réglé, où chaque plat est comme une oeuvre d'art, où la palette des goûts (et des couleurs) dépassent de loin celle d'un occidental...
Étape 6 : La femme végétale (et non, pas chocolat), chef d'oeuvre d'art topiaire, m'a finalement plongée dans l'Est de la Finlande au coeur de l'été où poussent des champignons dont raffolent les Japonais (l'étape 5 n'est pas loin) ;
Étape 7 : La baraque à saucisse, pas n'importe laquelle, allemande, au Cap Saint-Vincent, n'a pas été sans m'évoquer le caractère maritime très affirmé du Portugal (trône à Lisbonne la statue d'Henri le Navigateur face à la mer)... et ses délices culinaires qu'on ne voit pas du tout sur cette photo, bien sûr (clin d'oeil !). La langue allemande m'a propulsée dans la région des Sudètes, plus connue sous le nom romantique de Bohême... par le biais de ce roman écrit par une journaliste et écrivaine finlandaise (l'étape 6 reste proche) !
Étape 8 : L'enfance maquillée pour la bonne cause : le Carnaval, bien sûr ! Mais au-delà de Venise et de la beauté du costume et du masque, ce sont les rapports entre certaines mères (américaines dans ce roman, mais pas seulement) qui enrôlent dès leur plus jeune âge leur fillette pour être des reines de beauté sans imaginer quelles conséquences peuvent s'ensuivre mais le roman "Florida" le fait...
Étape 9 : Des "supernanas" en Italie, en visite, en touristes... Le sémioticien Umberto Eco, ayant étudié les "super héros" a dû, en son temps, se pencher sur la signification de ce S serpenteque lové dans ce triangle mais l'Italie est terre de mystères et de merveilles !
Merci Walrus pour cette balade estivale en 9 photos (au lieu de 8, hasard du calendrier) ; l'été était donc plus long que prévu : que du bonus !
Je serais bien tentée par ceci :
ou cela :
mais retour en France où les affaires m'appellent !
Mauvaise conscience-fiction ? (Joe Krapov)
Ça n’existe pas, Superman ! Ou alors, ça ne vaut pas tripette !
Vous avez beau arborer son super-étendard, sa tenue moule-couilles et sa jolie cape rouge, vous n’avez aucun super-pouvoir, les mômes !
Du super-pouvoir, personne n’en a à part Supercon !
Cette tenue ridicule, c’est le même genre de super-uniforme bien repérable - bleu horizon, c’est ça, avec un pantalon rouge garance ? - que portaient nos arrière-grands-pères pour partir, la fleur au fusil, reprendre l’Alsace et la Lorraine aux Allemands au motif que des Serbes plus ou moins acerbes avaient zigouillé un archiduc austro-hongrois – hongrois rêver ! - et asséché les chaussettes de l’archiduchesse. Sarajevo pas grand-chose mais sarajefous la merde quand même ! C’était le 28 juin 1914.* Quatre ans de bourbier et 18,6 millions de morts inutiles s’ensuivirent.
Bon d’accord, Superman n’était pas né alors tandis que Supercon est là depuis le début de «l’humanité».
En Afghanistan, ces jours-ci, Supercon a battu Superman à plate couture. Les enturbannés mélophobes ont coupé le sifflet à Supergendarme du monde. Remballe ton rock’n’roll, man !
Plus ça va et plus on se dit que le monde est mal barré – on a dit ça aussi du Titanic – et qu’il n’avait peut-être pas tort dans le fond, le fameux Marcel Proust, de rester chez lui à écrire des conneries dans le fond de son lit.
Pendant qu’on fait ça, au moins, on n’emmerde pas ses voisin·e·s ! **
* Je ne sais vraiment pas pourquoi je n’ai aucun mal à retenir cette date !
** Oui, je sais, on emmerde ses lecteurs ! Mais il n'est pas encore interdit de refermer un livre auquel on ne prend pas de plaisir. Pas encore !
Vingt-quatre (Adrienne)
On avait choisi le bon timing en décidant de fêter notre bachelorette Cindy le dernier week-end d’août et c’était vraiment cool d’avoir pu réunir toute notre dream team. Un vrai challenge, surtout à cause du boss de Cindy, avec qui on avait dû faire le forcing pour qu’il la laisse faire un break. OK, c’était assez girly, même si on avait embarqué deux copains gay dont un venait de faire son coming out. On a pris un de ces vols low cost où le sandwich au bacon coûte le prix d’un steak wagyu mais ça n’a pas empêché que le voyage soit très fun ! On a briefé le steward, expliqué que Cindy se mariait dans huit jours, alors on a fait notre show pour tout le charter et Cindy a reçu une standing ovation. C’était top !
2021, L'Odyssée estivale se termine (joye)
Yep, c’est la fin
Parce que la fin de l’Odyssée estivale arrive, je dois terminer ce journal.
Hier, j’ai eu la notification pour mon Service Transplanétaire que tou·te·s les jeunes Estivalien·ne·s doivent effectuer.
Quand nous arrivons à l’âge de neuf semaines estivaliennes, on nous envoie faire notre Service Transplanétaire Universel [le STU] où nous partons tou·te·s à la rencontre de l’Univers.
Je viens d’apprendre que je serai envoyée à la Terre ! La décision a été prise à cause de ma thèse, 2021, L’Odyssée estivale, qui a eu Mention Hypersupérieure. Ça alors ! En lisant les commentaires du jury, je n’aurais jamais cru que je gagne le concours ! Ils étaient plutôt mixtes, je crois, et certains n’ont même pas répondu ! Ouille !
Tiens, maintenant que j’y pense, aller sur La Terre, c’est peut-être une punition…
Bon, tant pis, j’y irai. Mes parents me mettront dans une sorte de capsule qui ressemble à un oeuf. Une fois que je suis arrivée sur la planète, un gentil couple me retrouvera et m’adoptera. La dame ne me fera pas un costume de ma couverture, mais elle m’achètera l’uniforme TSJB : [t-shirt-jean-basket]. Ils reconnaîtront mes forces et m’encourageront de les utiliser pour améliorer la planète. Comme tant de jeunes Terrien·ne·s, j’ai déjà choisi les problèmes du climat.
Certes, je serai triste de quitter l’Estivale, et aussi de devoir échanger ma belle peau bleue contre une autre couleur plus terrienne, mais c’est un sacrifice que je saurai faire !
Aucosmos ! (c’est ainsi que nous disons “adieu” en estivalien)
Fin de transmission
Moi sur la photo (TOKYO)
J’étais encore au lycée à l’époque
A la lueur des lampadaires sous lesquels je passais
Je dessinais ma vie, aucune ambitions sociales, j’avais encore des sparadraps sur mes genoux à force de faire le mur du lycée.
Je ne prenais jamais rien d’une façon trop personnelle
Je voyais bien mes camarades qui avaient des gènes très spécifiques qui les prédisposaient à faire de l’argent, beaucoup d’argent.
Ce n’étaient pourtant pas des héritiers de grandes fortunes, mais je voyais bien qu’ils étaient génétiquement prêts à la richesse. je les sentais moléculairement liés au fric.
Par chance mon ADN avait échappée à ce funeste destin. je n’avais aucun chromosome endommagés , rien de défectueux.
J’aimais la poésie, Rimbaud Baudelaire, Verlaine.
J’entretenais avec la poésie ce qu’entretiennent les diabétiques avec l’insuline.
J’avais des réactions très allergiques devant un problème de math, ou de physique comme si mes globules blancs s’étaient mobilisés contre toute attaque du signe d’un dollars.
Je nageais insouciante dans le chenal des mots et ma rêverie d’adolescente m’a portée jusqu’à ce grand âge d’où je vous écris.
Quand je fais la biopsie de ce vieux monde, j y observe d’étranges tumeurs malignes qui témoignent du niveau d’endettement qu’il faut pour vivre .
Pourtant mon traitement est bien simple ouvrir un livre de poésie et cesser d’aller voir son banquier.
Allez c’est parti ! (JAK)
Me voici avec une bande d’ados, juvéniles en mode j’sais tout,
que je vais devoir encore piloter cette année.
Tiens celle-ci, une frileuse, elle a gardé sa veste de jogging,
je l’interpelle pour lui demander si elle craint aussi chaleur.
Et l’autre, en arrière, tout en noir, avec ses lunettes de soleil,
elle veut passer incognito ? encore une star qui s’ignore !
Mon troisième sens me fait pressentir dans mon dos une retardataire ?
Non elle prend une photo.
Peut-être une demeurée qui ignore l’existence des selfies,
Là au moins elle pourrait se voir avec son groupe.
Et plus loin, regardez-moi ces deux dilettantes.
On croirait qu’elles partent au sacrifice, pas pressées d’entrer dans le jeu .
Non loin de de moi, mon collègue s‘inquiète, un jeune stagiaire qui doit s’armer de courage
face à cette bande d’adolescents enthousiastes.
Il ne sait pas le pôvre ce qui l’attend !
Ce tantôt, dans la grimpette, vers les ruines de La Roccaccia ils vont s’essouffler !
Ils auront moins d’entrain et il lui faudra sans cesse les booster.
Je râle, je râle, parce que c’est dans ma nature,
Mais tout à l’heure dans le feu de l’action, je vais les adorer ces ados.
Me régaler de leurs initiatives, leurs blagues et leurs réparties !
Et puis restons pragmatique, il n’y a pas si longtemps j’étais encore dans leur catégorie !
De jeunes Héros par bongopinot
Et me voilà reparti de beau matin
Me ressourcer dans le Cotentin
Avant de rentrer dans ma cité
En quelques heures je suis arrivée
Des paysages à couper le souffle
Comme il fait frais je me camoufle
Et je me prends un bon bol d’air
Et je marche dans l’eau de mer
Au loin j’aperçois un groupe de jeunes
Tee-shirt bleu et un S rouge sur un écu jaune
Des supermans gantés muni de pinces et de seaux
Qui ramassent bouteilles plastique et mégots
Et de voir toute cette jeunesse donne de l’espoir
À chaque déchet ramassé c’est une petite victoire
Même si ça peut paraitre qu’une goutte d’eau
Je trouve qu’ils ont déjà l’étoffe des héros
Remonter le temps (Vanina)
Sur l’écran heureux de mes jeunes années se déroule un souvenir en technicolor. Nous sommes au début de l’année 1979, mercredi prochain sort en salles le film Superman avec Christopher Reeve. Une adaptation des aventures du super-héros de bandes dessinées.
C’est avec mon frère -qui était et est passionné de BD et de fiction-, que je découvre Les 4 fantastiques, Strange, l’univers Marvel et au-delà, l’univers des super- héros. Ce jour-là, il me propose de l’accompagner au cinéma. J’accepte bien sûr. Depuis mon plus jeune âge, j’ai l’habitude d’aller au cinéma avec mes frères et sœurs.
J’imagine que nous avions choisi un grand écran pour profiter pleinement du film. Je nous revois dans la salle obscure, prêts pour l’aventure. Tout le monde est assis dans le noir. Une terre colorée au héros improbable est projetée sur l’écran blanc.
Lorsque la lumière revient, le film terminé, mon frère me demande: «On se fait une deuxième séance?» Même si je suis étonnée par l’idée, je dis «Oui», sans hésiter! Nous sommes donc restés dans la salle pour remplir nos yeux et nos oreilles d’un deuxième visionnage. Et quand j’y pense, je me souviens avoir eu l’impression de resquiller en restant dans la salle entre les deux projections...
Il me reste, entre autres, parmi les images de ce film, le geste de Superman lorsqu’il vole: poing en avant, et le fait qu’il remonte le temps, en volant autour de la terre en contre-rotation.
Sous mes yeux, la photo de mon Superfrère, le poing levé; il me fait remonter le temps, et clavier sous les doigts, je partage ce tendre extrait de ma vie.
Se sont crus à Venise
Maryline18 ; Lecrilibriste ; tiniak ; Laura ; Kate ;
Joe Krapov ; joye ; Vanina ; bongopinot : Adrienne ;
La boule magique. (maryline18)
Pierre rentrait chez lui, déçu de son lot. Louis, assis sur le pas de sa porte, deux maisons plus loin, le héla :
-" Eh ! Bonjour Pierre ! Tu en fais une tête ! Pourquoi es-tu déjà de retour ? Tu devrais être en train de t'amuser à cette heure-ci !"
-"Ah, bonjour Monsieur Louis ! Oui... Je rentre. J'en ai assez. Je n'ai plus envie de jouer. J'ai dépenser tout mon argent de poche pour faire tomber les boites de conserves et regardez ! Je n'ai gagné rien d'autre que ça !"
-"Oh mais regardez moi cette jolie boule ! Je me demande quel peut bien être son secret à celle-là !"
-"Son secret ? Mais de quoi voulez-vous parler ? Ce n'est qu'une boule vidée de sa neige et remplie de paillètes de couleurs, rien d'autre !"
Le garçon, tout reniflant, profita de cette oreille attentive pour crier l'injustice qui le torturait :
-"Camille n'a abattu qu'une seule boite et Madame Hubert lui a donné le plus beau déguisement de carnaval que je n'ai jamais vu ! C'est normal, c'est la chouchoute de toutes les maîtresses !"
-"Mais Pierre, toutes les boules de ce genre renferment un secret voyons ! Celui-ci s'insinue en douce, en même temps que son nouveau contenu dans la sphère, et attend patiemment qu'un petit garçon l'emmène chez lui !"
Pierre essuya sa joue, un peu honteux de n'avoir pu retenir quelques larmes et tout en regardant son trophée d'un oeil tout neuf, prit place auprès du vieil homme qui connaîssait toutes les histoires qui consolent les enfants.
-"L'histoire que je vais te raconter se passait un jour de kermesse justement..."
-"Un jour de kermesse ? Un jour comme aujourd'hui alors ? Quelle coïncidence, vous ne trouvez pas, Monsieur Louis ?"
-"Oui, mon garçon, un jour comme aujourd'hui !"
Il sembla faire un effort de mémoire, le regard posé sur la ligne d'horizon, tout au bout du champ, les sourcils froncés et la main posée sur l'épaule tiède du gamin. Le soleil encore haut jetait de chauds rayons sur la boule de verre, devenue soudainement très mystérieuse. Pierre écoutait, assis sur la première marche de sa modeste maison.
"Ce jour de kermesse, donc, un paravent avait été installé dans un cagibi qui servait de loge aux petits danseurs . Tu comprends, les filles n'auraient pas aimé se déshabiller devant les garçons pour enfiler leurs tenues de scène !"
(Pierre étouffa un rire dans sa main...)
"Ce paravent ressemblait à un parterre de fleurs à s'y méprendre. Y étaient dessinées des fleurs si colorées, si belles, qu'un papillon, entré par l'une des portes du bout du long couloir, s'y cognait les ailes et s'essoufflait. Des enfants lui criaient : < viens, viens par là !> D'autres frappaient dans leurs mains, prêts à orienter sa fuite vers l'extérieur, mais rien n'y faisait. Il virevoltait de fleur en fleur, feignait d'en butiner le supposé nectar et puis remontait, redescendait, échappant ainsi aux mains qui essayaient en vain de s'en saisir pour le remettre dehors.
"Alors, que s'est-il passé ?"
"Et bien, la fête a suivi son cours, les enfants ont dansé, les parents étaient fiers, tu penses..."
"Et le papillon, Monsieur Louis ?"
Et bien, à la fin de la journée, il était toujours là, comme émanté à ce paravent. Je pense sincèrement qu'il avait fait son choix. Personne ne pouvait plus rien pour cette créature. Elle préférait mourir que de s'en éloigner. Les enfants se rabillèrent, un peu tristes bien sûr, et fermèrent, résignés, la porte de la salle. On raconte que le lendemain, quand la femme de ménage est venue tout nettoyer, un petit tas de pastilles aux couleurs du paravent reposait tout près de celui-ci. Elle trouva ces paillettes si jolies qu'elle alla dans la salle ou était rangé le matériel pour les travaux manuels choisir la plus belle boule de neige...
"Une boule de neige comme la mienne ?"
"Oui, petit Pierre, comme la tienne, exactement ! Elle l'ouvra, la vida et y déposa délicatement les pétales desséchés, ensuite elle la rempli d'eau distillée, ajouta la glycérine et recolla soigneusement le couvercle. Lorsqu'elle retourna la boule, les pastilles emplirent tout son espace ! Le spectacle était magnifique !
"Et après ?"
"Elle fut tellement captivée par sa beauté qu'en retournant à son ouvrage, elle se prit les pieds dans ses balais. La boule tomba et se brisa, mais, à sa grande surprise des centaines de papillons s'envolèrent, les uns plus beaux que les autres. Ils volèrent jusqu'à Noiremoutier, jusqu'à "l'île aux papillons" et...ils y sont peut-être encore, à l'heure où je te parle. "
"L'île aux papillons ? Est-ce que c'est loin ? Je voudrais y aller pour y casser ma boule ! Vous croyez qu'elle est magique elle aussi ?"
"Tu es encore bien trop jeune pour entreprendre un tel voyage Pierre, plus tard peut-être...Mais en attendant, garde précieusement ta boule !"
La petite arlequine (Lecrilibriste)
Engoncée dans sa fraise d’organdi
Ornée de sequins et de perles dorées
Elle n’ose plus bouger la petite arlequine
De belles arabesques, on lui a dessiné
sur les joues et jusqu’au bout du nez
du rouge, du blanc, du vert en volutes étudiées
Attention ! dit maman, Il ne faut pas toucher !
Mais ça gratte … ça gratte Maman !
Chérie, il faut souffrir pour être belle, tiens regarde !
Devant le miroir, elle n’en revient pas
Mais est-ce bien elle, cette petite fille, là ?
Cette petite fille magnifique dans ses atours ?
Y en a un qui va rester baba, c’est Lucas
Se dit-elle en pensant tout bas
Tout à l’heure, elle sera haut perchée
Sur le char de Miss Carnaval
Elle sera à côté de la Reine du défilé
Et l’on ne verra qu’elle, toute colorée
Dans son bel habit de Turquie
Il sera ébloui, Lucas, son ami
Il sera déguisé en Robin des Bois
C’est du moins ce qu’il lui a dit
Elle jettera plein de confettis
A la foule déchainée par le corso
Et à Lucas avec Pipo en laisse
quand elle les verra
Elle en a réservé un plein seau
Même s’il mange sa barbapapa
C’est sûr qu’Il y aura droit !
Et ce soir quand elle ira dormir
Son bel habit fripé par la journée
Sa frimousse toute barbouillée
Car elle aura oublié l’interdit de gratter
Elle rêvera au prochain Carnaval !
Et à la tenue royale de belle Marianne l
que sa maman saura bien inventer
Participation de TOKYO
Il y avait un problème. Dans ma tête , je m’appelais André et ma mère persistait à me déguiser comme une fille.
Je me suis frayée un passage dans la foule et je me suis enlevée cette robe ridicule pour enfiler un pantalon, une chemise à carreau et une large casquette de velours. Faut bien l’avouer à part ma mère tout le monde s’en foutait que je m’appelle ANDRE, Paul ou jacques.
Jetant un coup d’œil autour de moi, je suis frappée par la diversité des accoutrements . Les gens ne me montraient pas du doigt , certaines jeune filles me souriaient .je n’étais plus enfermé à clef dans la rêverie de ma mère j’étais moi de la tête aux pieds.
C’était donc aussi facile de naître à soi .
Paysage(s) de carnaval (Laura)
Mêmes si les annulations vont se succéder
Même si mes élèves ne savent plus ce que c'est
Même si les beignets sont vendus trop tôt
Je garde au fond de moi assez
De paysages de Carnaval
Qui vont masquer les relents des confinés
Il y a quelques années
Nous avons suivi les enfants
Des écoles de la ville grimés
Un monde fou au Carnaval de Dunkerque
Où les gens du Nord brûlent tous leurs vaisseaux
Et accueillent comme seuls, ils savent le faire
Je n'étais pas une femme mariée
Lorsque j'ai bu de la blanquette
Dans sa ville,Limoux, un jour de Carnaval
Même si le char du deuil a obscurci mon paysage d’âme
J’ose la couleur en pensant à nos paysages de carême
Qui ne touchaient pas nos faces
Même si je plains les familles des morts du virus,
Les malades, les soignants et ceux qui perdent de l’argent
Ou leur travail, je n’ai pas peur d’un confinement
Car la culture n’est pas que cinéma et autres paysages
Elle est dans mes livres et mon âme
Qui danse sur des musiques de carnaval
Étranges rêves de Marcel P. Chapitre 10, Centon vénitien (Joe Krapov)
A Venise, ville exquise, j’arrivai pour le carnaval, accompagné de mon ami Reynaldo H., de MAMAN et du livre de John Ruskin, «Pierres de Venise» dont j’espérais bien qu’il me servirait de guide touristique dans la cité des doges puisque Gaston Gallimard n’avait pas encore lancé les beaux objets bibliophiliques de sa collection «Découverte».
Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître puisque c’était en 1900, une année un peu folle où Bruxelles Bruxellait, où Venise Venisait et où le carnaval promettait d’être plus joyeux encore qu’à l’habitude car le tournant du siècle ne s’était pas accompagné de la fin du monde prédite par un grand couturier de Paris qui donc continuait de Pariser tandis que dans son coin Buda pestait… presque autant que moi.
- T’as voulu voir Venise et on a vu Venise ! me reprocha MAMAN toute l’année qui suivit ce voyage mais c’était bien à tort qu’elle s’en prenait à moi qui ne m’intéressais alors qu’à ce joli manteau sur le tableau de Carpaccio à la galerie de l’Accademia et qui n’avais même pas voulu l’accompagner à ce bal masqué sur la place Saint-Marc d’où elle et Reynaldo avaient ramené la petite fille, adorable au demeurant, dont ils avaient hérité là-bas.
Au bal masqué ohé ohé, il s’était déroulé un incident regrettable, une farandole tragique. L’Arlequin qui menait la sarabande avait enlevé, par jeu, à une famille française leur petite fille déguisée de la même façon que lui et l’avait intégrée à la chaîne humaine des danseurs allumés qui tournaient autour du campanile puis partaient vers la tour de l’horloge et c’était tout juste s’ils n’entraient pas dans la basilique pour profaner de leur transe vivaldienne le sol de mosaïque – heureusement, le bâtiment religieux avait été fermé – mais au moment où la musique s’est arrêtée Arlequin dans sa boutique chanstiquée a rendu la petite fille… à MAMAN !
- Laisse les gondoles à Venise ! La prochaine fois on ira voir le printemps sur la Tamise ou te chercher une promise à Vesoul ou Vierzon… ou Aurillac !
Ce fut là le leitmotiv de toute l’année 1900 car MAMAN m’en voulait énormément de cette mésaventure : on n’avait jamais retrouvé les parents de la gamine qui disait se prénommer Céleste «mais je sais pas mon nom de famille sauf que papa s’appelle Ginette et qu’on habite à Aurillac» et les carabinieri qui étaient tout sauf polyglottes haussaient les épaules, écartaient les bras et les laissaient retomber pour bien signifier qu’ils ne pouvaient rien faire de plus et que le mieux était de voir avec le consulat de France : «Franchement, depuis 1515 et même avant, vous ne faites rien qu’à nous embêter, vous, les Francese, que si ça continue vous allez nous rendre Venise invivable à force d’y venir si nombreux vous livrer à vos fredaines homosexuelles comme ce Georgio Sand et cet Alfred de Musset qui ont fait tant de scandale à l’hôtel Danieli…» mais on n’a pas entendu la suite de la diatribe parce que MAMAN excédée a fichu un coup de parapluie sur la tête du brigadier Tarchinini, ce qui n’avait en rien amélioré le climat – climax ? - de la discussion qui avait fini au poste et tout s’était terminé par un retour à quatre à Paris puisque on ne pouvait pas, décemment, laisser à la rue, dans une ville étrangère, notre jeune compatriote au si mignon minois.
***
- Tu me fais tourner la tête ! Mon manège à moi, c’est toi ! Je suis toujours à la fête quand je te prends dans mes bras ! ». Voilà comment je lui déclarais mon amour à Céleste ! Pendant cette année de ma vie au cours de laquelle j’ai fêté mes vingt-neuf ans, j’ai eu une petite sœur de neuf ans, une petite fille, une petite mère et c’est sans doute de cette gamine anodine qui apporta tant de bonheur dans mon existence que MAMAN est tombée gravement, maladivement et méchamment jalouse.
- Je suis malade ! Complètement malade de ce que nous coûte cette peste ! se plaignait-elle à tout bout de champ. Déjà ce voyage d’une semaine à Aurillac où elle dit qu’elle habite mais où personne ne l’a jamais vue et où elle-même ne reconnaît rien et maintenant ces bouquins de la Comtesse de Ségur, ces robes, ces tabliers de bonniche qu’on lui achète pour qu’elle aide en cuisine et serve à table mais va te faire lanlère, avec la gangrène socialiste qui s’annonce bientôt on ne pourra même plus faire travailler des enfants de cinq ans dans les mines ! Pourquoi pas leur offrir des congés payés tant qu’on y est ?
***
Aujourd’hui MAMAN est morte. MAMAN est morte de rire ! Nous somme le 24 janvier 1901. Elle a dit à papa qu’elle avait eu l’idée du siècle et qu’elle s’absenterait quelques jours en février mais que Céleste et Félicie aussi s’occuperaient de la maison en son absence. Papa a à peine levé les yeux de son journal et fait « Moui, si tu veux ». Moi je n’ai rien vu venir.
***
Que c’est triste Venise au temps des amours mortes ! De quelles trahisons ne sont-elles pas capables puis coupables, les femmes et les mères ? Rétrospectivement je crois que j’ai eu raison, lorsque j’avais vingt ans, de lui casser son beau vase de Sèvres le jour où elle m’a acheté des gants gris à la place des gants beurre frais que je lui avais demandés et où, après avoir pleuré et encaissé sa très déplaisante réflexion, j’étais quand même allé voir cette actrice de théâtre très ouverte dans l’espoir qu’elle me dépucèle et où j’étais tombé sur des huissiers en train d’emporter les meubles de son appartement, excusez-moi si je ne suis pas très clair mais je le sais aussi bien que vous qu’un jour mon amour des longues phrases me perdra et d’ailleurs, c’est fait, je suis perdu, trahi, blessé jusques au fond du cœur d’une atteinte imprévue aussi bien que mortelle : MAMAN est retournée à «Veueueunise», comme elle dit maintenant avec ironie, en emmenant Céleste avec le costume d’Arlequin qu’elle portait quand on l’a trouvée-recueillie-adoptée.
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- Derrière chez moi, savez-vous quoi qu’y gn’a ? chantait le campanile sur un air de tarentelle. Il y a la place Saint-Marc, le corso, le carnaval, la farandole et… Arlequin qui, toujours aussi con voire peut-être encore plus que l’année précédente, emmène la petite Céleste dans la ronde folle tandis que MAMAN, contente de son coup, s’éclipse comme la Lune, hilare, soulagée et ayant même peut-être la conscience tranquille en pensant que la famille de Céleste sera peut-être revenue ici elle aussi dans l’espoir de retrouver sa progéniture ou dans l’idée d’un pèlerinage annuel pour faire son deuil mais peut-on effacer tous ces temps de bonheurs perdus ? L’écriture permet-elle de les retrouver vraiment ? MAMAN s’en fout, MAMAN revient retrouver son FIFILS à elle toute seule mais quelque chose est cassé chez FIFILS qui n’aime plus sa vilaine MAMAN.
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Ce 20 mars 1913 à quinze heures, dès que Marcel P. se réveille et sort de ce cauchemar-là, une fois ingurgités son café noyé de lait chaud et son croissant, il décroche le téléphone et, comme il l’avait noté sur un des cartons à fumigation ce matin en se couchant, il appelle Odilon A., son chauffeur attitré à la compagnie de taxis Gessette-Koulé, pour le cuisiner. Le jeune homme lui a annoncé récemment son indisponibilité à venir pour cause de mariage : il s’en retourne dans la province pour épouser une jeune fille qu’il a connue en Lozère. Marcel a besoin de détails car il souhaite lui envoyer, le jour des noces, un télégramme de félicitations.
- Allô, écoute ! Pardon, écoutez ! Odilon, c’est Monsieur P. Est-ce que vous pouvez me dire où aura lieu la cérémonie de votre mariage le 27 mars prochain ?
- Bien sûr Monsieur Marcel ! Pas de problème ! C’est à Auxillac !
- Aurillac ?
- Non, Auxillac avec un x. C’est en Lozère. Aurillac c’est dans le Cantal.
- Et, dites-moi, Odilon… Serait-ce indiscret de vous demander le prénom de l’heureuse élue.
- Je n’ai pas de secrets pour vous, Monsieur P. Elle s’appelle Céleste. Céleste Gineste.
Bon sang, mais c’est bien sûr ! Marcel se souvient, d’un coup, de la phrase qui le faisait tant rire il y a douze ans : « Mon papa s’appelle Ginette ».
- Monsieur P. ? Vous êtes encore là ?
Odilon entend le déclic de l’appareil qu’on raccroche et il a l’impression bizarre que… le téléphone pleure !
Mais c’est peut-être de bonheur ?