Ont ressorti leur ENIGMA de la cave
JAK ; Fairywen ; Venise ; Vegas sur sarthe ;
Walrus ; Emma ; joye ; Joe Krapov ; bongopinot ;
Lilou ;
Participation de Fairywen
Un jour une carte…
Le jeune homme se renversa sur sa chaise en soupirant. Cette carte n’avait décidément aucun sens… Les terres dessinées ne ressemblaient à rien de connu, les indications fantaisistes ne correspondaient à aucune des mesures utilisées en Avalon. Pourtant il devinait que la solution était là, à portée de main. Il ne lui manquait sans doute pas grand-chose pour élucider le mystère qui le narguait.
Mais il trouverait. Il trouvait toujours, car il n’abandonnait jamais. Bien sûr, pour cela, il lui faudrait prendre quelques risques. Oh, trois fois rien, vraiment. Il devrait juste s’introduire dans le palais de la souveraine d’Avalon pour y « emprunter » un ou deux documents, et pour cela, contourner un nombre appréciable de sorts mortels. Une promenade de routine, en somme. Ah, évidemment, le fait que l’amant de la Dame du Lac soit présent avec les siens allait peut-être un peu compliquer la donne… Il n’était pas exactement réputé pour être sa clémence. De plus, ils n’étaient pas en très bons termes, tous les deux. Là encore, rien de grave, le prince consort avait simplement juré de lui faire la peau la prochaine fois qu’il le verrait. Simple détail…
Le pirate rassembla ses cartes avec un sourire et grimpa sur le pont pour lancer ses ordres à son équipage. Les voiles furent hissées et claquèrent dans le vent tandis que le navire prenait de la vitesse.
Le sort en était jeté. Une fois de plus, il irait défier les lois d’Avalon.
Le début de l’histoire est à lire ici.
Le décryptage pour les Nuls (Vegas sur sarthe)
Enigma - c'est son nom crypté alors que son vrai nom est gamine - fut inventée par un allemand pour les allemands ce qui est parfaitement compréhensible... sauf quand c'est crypté.
Son mécanisme à base de rotors brouilleurs qui brouillent, de cliquets qui cliquettent, d'anneaux métalliques, de réflecteur, d'entonnoir, de bande velpo qui velpotte, de décapsuleur, de dérailleur, de tableau de connexion et de câblage sophistiqué - appelé fil à retordre - est si complexe que même son inventeur en perdit les pédales.
Il conçut alors Enigma2 pour décrypter la notice d'utilisation de son Enigma1.
On dit que son clavier était si dur qu'il donnait des ampoules au bout d'un moment, ce qui permettait du coup d'éclairer le clavier pour les frappes de nuit.
La gamine a été conçue dans une boîte en bois flotté qui permet de la récupérer en cas de naufrage.
La boîte de la gamine était fermée au moyen d'une clef de cryptage - ou clé de chasteté - qu'on changeait chaque jour par sécurité jusqu'à ce qu'on finisse par mettre la clef sous la porte.
Réputée inviolable, portable, incroyable, inoxydable, insubmersable et plein d'autres trucs en able, cette machine à crypter et décrypter les messages fit les “beaux jours” de la Seconde Guerre Mondiale puisqu'elle occupa à plein temps 12 000 des meilleurs scientifiques, cruciverbistes, joueurs d'échecs et mathématiciens anglais, polonais et français pour percer le secret de la gamine.
C'est pourquoi on appella cette période l'occupation.
Le secret bien gardé de la gamine résidait entre autres dans des rotors gravés en chiffre romains pour tromper l'ennemi; qui aurait pu imaginer que V veut dire 5, à part les romains ?
“Et pourtant ils tournent” aurait dit à propos des rotors brouilleurs un certain Galileo devenu célèbre.
Chaque caractère tapé est remplacé par un autre - au point que l'on dira que son inventeur avait mauvais caractère - ainsi même les redoutables sous-marins allemands (les fameux U-Boot) en firent les frais, un message “Videz les ballasts” ayant été traduit par “Ouvrez les hublots” décima la flotte allemande en quelques heures.
Le dernier message chiffré fut trouvé en Norvège, il disait “Il ne court plus, le furet du bois Mesdames” ce qui veut dire en clair “Le Führer est mort. Rangez vos gamines, Mesdames”.
On doit au célèbre mathématicien anglais, Alan Turing d'avoir brisé le codage de la gamine, défloré son secret si bien gardé et sauvé la vie de centaines de milliers de personnes.
La gamine fait aujourd'hui le bonheur des collectionneurs qui se l'arrachent chez Sotheby pour la bagatelle de 200 000 euros!
La bande velpo qui velpotte et le dérailleur qui déraille sont à ce prix.
A venir : La tapette à souris électronique pour les Nuls
La Femme pressée : Tales from the Cryptogramme (par joye)
NJ CWKY XBVJ,
NJ CWKY XMWDJ,
LK'JYS-TJ LKJ CWKY
CWKFJA JUTWDJ ?
Au même instant mais sans doute pas à la même heure (Joe Krapov)
MARCHAND DE CAILLOUX
Aujourd’hui, Alexandre a son voyage ! Ca fait des années qu’il travaille d’arrache-poil dans cette boîte de marde, à faire toutes sortes de choses, utiles ou pas, pour que de grands niaiseux puissent se retrouver benaises dans des beaux bureaux tout en verre après avoir décroché leur diploume. Il faut croire que la dernière année est toujours l’année de trop ! En tout cas, tout en babounant et bouboussant, il se dit qu’il ne va pas faire patate le jour qu’il accrochera ses patins, si jamais sa patronne lui organise une party de départ. Si on veut aller au bout du monde, c’est sûr qu’il faut voyager léger. Ca va lui faire du bien, ce jour-là, de vider son sac !
Ce soir Marion va déloger. Elle va faire le chat. Plus que ça même ! Elle va quitter pour toujours le domicile conjugal, larguer ce péteux qui enchaîne à-fond sur à-fond et bat le beurre ensuite. Fini de faire fristouiller pour ce type les petits plats dans la cuisine, de faire blinquer l’argenterie. Elle va dire adieu à sa baraque à frites, aux plus belles années de sa vie qu’elle a gâchées avec lui. Elle a ramassé toute la dringuelle qui traînait ici et là. Elle a posé son sac sur le siège arrière, est montée dans la voiture, a claqué la porte, démarré. Les pneus ont crissé et fait voler quelques grenailles. Elle a mis un CD de rock et a pris la route d’Ostende.
LA PETITE TONKINOISE
Le 4x4 s’est arrêté devant la maison près du baobab. C’est un cul-vert et c’est Philippe qui le conduit. Léna l’attend calmement, tranquillement dans l’ombre du géant. Elle est comme toujours terriblement excitante dans son mon mari sort je sors. Quel golo, que ce mari-là ! Léna est le plus beau deuxième bureau de tout le Congo mais l’autre ne s’est jamais rendu compte qu’il possédait un trésor dans sa case. A croire qu’il lui en manquait une ! Il paraît même qu’il a de son côté une liaison avec un pamplemousse. Il a suffi à Philippe d’arriver habillé comme un jaguar, d’emmener Léna au maquis une ou deux fois et elle a été à lui vite fait bien fait. Le plus dur sera de lui faire avaler, à la fin de cette nuit-ci, qu’il retourne mardi en Europe pour être affecté dans une nouvelle ambassade quelque part dans le monde ; partout ailleurs sauf ici, c’est son choix. Les climats tropicaux et les femmes trop piquantes, on s’en lasse, à la longue.
VEUVE NOIRE
Eva a beau frotter, frotter avec la vadrouille, rien n’y fait, la tache de sang ne disparaît pas. Elle a bien ramassé les morceaux du cadavre avec la pelle à chenit, les a glissés un par un dans les grands sacs poubelles bleus mais elle bute sur ce dernier écueil d’une tache débile, indélébile, obnubilante au point qu’elle se fait de la bile. Elle a trouvé vite fait la cachemaille du vieux qui quéqueillait avant qu’elle ne le zigouille et ne se rhabille, elle n’a rien fait à la précipitée, elle a empoché le pactole mais elle ne pouvait décemment pas partir en laissant la maison dans cet état. Ca aurait fait rêver aux ours dans les chalets des environs. On est Suisse ou on ne l’est pas. Chez nous, les gens, même à la tronçonneuse, on les tue proprement.
BA MOIN A TI BO
- Faut qu’on arrête de cocagner, a lancé Amédée à Rachel. Tous ces gens qui travaillent dans la zoreillerie et nous qu’on est là à fouiller patate en buvant des ti punchs, faut vraiment qu’on se resaissise. Rachel qui lavandait dans la buanderie lui a répondu :
- Parle pour toi, fainéant ! T’es encore rond comme une boule carrée, à cette heure, pour tenir de tels propos !
- Mais non, mais non, plaisante Amédé, je ne suis pas marti boire, je suis Martiniquais. D’ailleurs, en parlant de ça… Viens donc ici que je te doucine, ma Doudou !
Las ! Comme une diarrhée, en voulant s’extirper du hamac, il s’est viandé. Ca a fait "ploc", ça a fait "ouille", ça a fait "dring dring", ça a fait "pin pon pin pon". Bref ça a été assez bruyant finalement le jour ou Amédée, attisé, affaissé, a fait son AVC !
LE BLUES DU DENTISTE
- Bonne arrivée ! a déclaré Margareth en ouvrant la porte du cabinet médical.
C’est la première fois qu’Antoine vient charlater ici et il se dit qu’il a bien fait de prendre son bain annuel dans le fleuve Niger. Déjà qu’en temps ordinaire il camembère un max ! S’il avait su que le docteur serait une doctoresse, blanche de surcroît, il aurait fait trempette un peu plus longtemps et aurait même demandé à Boris le pluvian de lui nettoyer les molaires comme il fait au croco et à ses frères.
- Que puis-je pour vous ? demande Margareth. Votre mal est-il profond ?
Qu’est-ce qu’elle à, la toubibe, à pratiquer la gromologie ?
- Eh bien voilà, répond Antoine. Je suis un peu gêné pour vous dire… C’est rapport à mes organes de base !
- Qu’est-ce que vous appelez comme ça ?
- Le mieux est peut-être que je vous montre ?
Il se lève et baisse pantalon et slip.
- Tudieu ! La grosseur des testicules ! s’écrie Margareth. Comment ça vous est arrivé ?.
- Eh bien voilà, répond Antoine, je pense que c’est samedi dernier. Je suis allé voir les femmes qui font boutique mon cul.
Le médecin reste silencieux un temps assez long puis elle déclare solennellement.
- Je pense que vous n’y couperez pas : il va falloir couteauner dans tout ça !
Et moi je pense qu’il va falloir que je me creuse vraiment le ciboulot pour établir un lien entre tous ces personnages si je veux écrire avec ça une histoire qui tienne debout. Et déjà, pour que ce soit compréhensible, il faudrait que je me-vous procure le « Petit dictionnaire insolite des mots de la francophonie » de loïc Depecker afin qu’on puisse décrypter ce schmilblick international !
P.S. Les photos ont été empruntées aux généreux donateurs du net. Merci à eux !
Un secret par bongopinot
Sur un document aux pages écornées
Des points des carrés et des lettres arrondies
Mais quel secret s'est donc endormi
Derrière ces symboles et lettres si bien alignés
Comprendre ces caractères pour mieux les décoder
Et bien à l'abri de jolis murs sans oreille
Aidé évidemment de machines et d'appareils
C'est ce mystère qu'il nous faut élucider
Et c'est entre les lignes d’une page
Bien cachée dans la doublure d'un silence
Aplatie dans l'ourlet d'un pli complice
Que se dévoile doucement son camouflage
Pour nous révéler enfin toute sa magie
Et y découvrir la signification de ce code
A chaque page un message comme un épisode
Forme gentiment tranquillement tout un récit
Ce décryptage réussi nous donne tout son trésor
Et son emplacement est très facile à trouver
Cherchez en vous tout doit y être archivé
Sous des sourires qui ne demandent qu'à éclore
Participation de Lilou
Quoi de plus secret qu’un secret
Qu’il soit de polichinelle, bancaire
Judiciaire, de fabrication ou de la vie
Un secret c’est un secret et ce n’est pas un secret
Que de trahir un secret c’est le divulguer.
Alors, il faut être mis au secret pour ne pas l’arracher
Et c’est sous le sceau du secret
Que je vous révèle ce secret
Avant que je ne l’emporte dans la tombe,
Le secret des secrets
N’est jamais vraiment secret.
Tout se sait un jour
Alors inutile de garder un secret.
Participation de JAK
Ma Grand-mère avait raison
Je sors de chez mon psy, sonnée, déconcertée
Lui qui est peu bavard, me laissant d’habitude dans mon déballage logorrhéique, m’a posé à brûle pourpoint la question ;
Sauriez-vous décrypter un secret ???
Interloquée, m’attendant à ce qu’il me révèle quelques confidences croustillantes je lui ai répondu :
J’ai pour principe d’appliquer la sagesse des 3 singes je vois, j’entends, mais je ne dis rien.
Pour ne pas changer je n’avais rien compris (j’avais flashé sur le mot secret et mon cerveau avait interprété à sa manière)
Il m’a rétorqué sèchement (ayant dû décoder ma curiosité malsaine)
-Qu’il voulait simplement que je l’aide à résoudre un problème de code secret qu’il devait d’urgence dénouer.
Alors là !, lui ai-je répondu,
Au prix ou vous me faites payer les consultations, vous êtes un peu gonflé de me demander des conseils gratuitement !
Furax, (je l’avais habitué à plus de soumission=, il m’a désigné la porte, en me disant de ne plus revenir, que les séances étaient finies !
Stupéfaite, je n’ai pas saisi le pourquoi du comment. Tant mieux, mon budget en sera allégé, et me voici trottant dans la rue, me sentant de plus en plus légère, je vais mieux, beaucoup mieux.
Finalement ma grand-mère avait raison, un secret n’est plus un secret si il est révélé, et ne comptez pas sur moi pour que je laisse filtrer négligemment quelques indices, en vous décryptant quoi que ce soit : je resterais muette comme une carpe
Participation de Venise
Je suis entrain de vivre une aventure géopolitique palpitante.
J’ai reçu sur mon I phone un message crypté.
Qu’est ce que je suis sensée répondre ?
J’ai examiné ce charabia de près.
Maintenant je pense que je n’aurais jamais dû me lancer dans la traduction de ce message.
Une heure après l’avoir décrypté je recevais un second message
Ressaisissez-vous ou on entame une procédure de licenciement et tu rembourseras chaque boulette de viande que tu bouffes.
Mais qu’est ce que j’avais bien pu traduire pour que ça tourne au vinaigre
C’est là que ma vie a pris soudain une autre tournure.
Mon I phone s’est mis à clignoter comme un sapin de Noël.
Je me suis assise sur la chaise mon I phone tout chaud dans ma main, je me suis penchée à la fenêtre et là j’ai remarqué une ambulance dont le gyrophare tournoyait en silence.
Ce qui signifiait qu’on venait me chercher.
Je suis restée ainsi immobile à fixer le vide de ma nullité, un agneau qui arrive à l’abattoir doit être dans cet état d’esprit.
J’ai écrit quelques mots yiddish de ma grand mère en guise d’ultime tentative de traduction du message crypté , mon cœur montait aux bord de mes lèvres quand les ambulanciers grimpaient simultanément les escaliers de mon immeuble.
j’ai attendu, attendu ils ne sont jamais venus jusqu’à moi.
Je n’ai pas eu droit à la fouille au corps aux perquisitions à la fouille de mes données personnelles. J’ai cru que si je ne sautais pas j’allais payer comptant.
Il fallut quelques instants pour arriver à comprendre ce qui m’arrivait. La queue levée de l’hélicoptère son nez baissé en vue de mon exécution se dirigeait sur mon balcon.
Un soudain accès de peur existentielle me fit sombrer dans un profond désarroi.
Je n’avais plus qu’une seconde pour décoder le message crypté. Avant ma mise à mort.
Soudain les lettres se mirent dans le bon ordre , c’était la pire combinaison possible,puis je me suis mise à genoux et j’ai pleuré .
Mon esprit était tourmenté par une angoisse juive maladive.
L’armada d’hélicoptères a pris la direction du nord.
J’ai renoncé à poursuivre ce cruel voyage parallèle dans l’impossible et à croire à une vie d’espion et j’ai repris ma vie routinière et mon air désinvolte.
HA j’avais oublié la traduction du message crypté :
Je jure j’ai travaillé comme une folle , Walrus a dû se tromper de sujet je rends copie blanche ! Je suis passée de l’exaltation à l’abattement et puis je ne veux pas d’histoire avec le KGB et le FBI !!!!
‘;
Ah, ne me parlez plus de décryptage ! (Walrus)
Ont coiffé leur casquette
Venise ; Fairywen ; Vegas sur sarthe ; Pascal ;
Électre ; bongopinot ; Emma ; Walrus ; JAK ;
Joe Krapov ; joye ;
Participation de Fairywen
Renaissance
Cela avait commencé de façon très insidieuse. Un passage rapide, un peu de poussière brillante qui accrochait les rayons du soleil, quelques trottinements de petits pieds sur les vieux planchers, des rires étouffés. Puis plus rien, le silence, la vieille maison rendue à ses habitants à ailes et à pattes, qui se demandaient qui avait bien pu venir leur rendre visite ainsi.
Cela avait commencé de façon très insidieuse. Une étoffe drapée ici, un coussin posé là, un endroit qui soudain restait propre. Et toujours des rires, de la poussière brillante et des petits pieds rapides et légers. Intrigués, les habitants à ailes et à plumes observaient ces menus changements, cherchant à en identifier les auteurs.
Cela avait commencé de façon très insidieuse. Des guirlandes de fleurs accrochées au lierre. Une odeur de forêt dans les pièces abandonnées. De la lumière qui se glissait dans les recoins. Des rires plus fréquents, des petits pieds plus nombreux. Les habitants à ailes et à plumes s’interrogeaient : qui donc venait ainsi envahir leur domicile ?
Cela avait commencé de façon très insidieuse. Une petite silhouette ailée suivie d’une autre, et d’une autre encore. Des silhouettes qui virevoltaient, accrochant des voilages d’étoiles devant les fenêtres soudain réparées, semant des coussins brillants sur les sols propres et fleurant bon les bois. D’autres silhouettes affairées, qui rangeaient des sacs de provisions dans des garde-mangers tout neufs et des ustensiles de cuisine à proximité de solides foyers. Et toujours des rires, de la joie et des petits pieds qui couraient. Toujours curieux, les chatons furent les premiers à aller voir de près ce qui se passait.
Cela avait commencé par un premier face-à-face étonné : chatons surpris face aux fées et aux lutins qui investissaient doucement la maison abandonnée.
Cela avait continué par des jeux endiablés, des courses et des cavalcades, des bagarres pour rire et des siestes pour se reposer.
Et cela ne s’était jamais terminé. Les sortilèges tissés par les fées et les lutins avaient fait de la maison abandonnée un palais merveilleux, tout de tendresse et de chaleur, bien protégé des hommes et des éléments, un endroit où les animaux venaient se réfugier, pour jouer, dormir ou être à l’abri des intempéries, un endroit où l’oiseau jouait avec le chat et le chat avec le renard. Un endroit où, lorsque la neige tombait et que le blizzard soufflait dehors, les fées et les lutins se blottissaient sous les plumes ou dans les fourrures pour avoir chaud.
Finalement, la vieille maison ne regrettait pas d’avoir été abandonnée par les hommes…
Le fil d'Ariane (Vegas sur sarthe)
L'autre jour je décide d'aller visiter les Catacombes dont l'entrée était signalée par un panneau “Visite guidée”, le dépliant promettait un voyage hors du temps et justement j'en avais à revendre.
J'avise un préposé - légitimement le cul préposé sur un tabouret - et lui demande où se trouve le guide.
Il me répond “Cest moi”.
Je lui demande à quelle heure est la prochaine visite et il me répond “C'est commencé”.
Je m'excuse de l'interrompre, je lui demande s'il compte faire la visite assis et il me répond: “Je reste assis parce que j'ai été formé au Père Lachaise... mais vous pouvez utiliser un audioguide”.
Je lui demande ce qu'est un audioguide, il me montre un truc en disant “Voilà c'est ça, c'est un baladeur”.
Je lui répond que je ne veux pas me balader mais vraiment visiter, il me tend malgré tout le baladeur et ajoute: “Surtout, mettez bien le casque!”
Je réalise que les plafonds doivent être très bas et lui demande s'ils sont assurés en cas d'accident, il se contente de me tendre une carte.
Je lui demande si c'est l'attestation d'assurance, il me répond: “Non, c'est une carte de visite attestant que je fais des visites”.
En effet, sur la carte de visite il est écrit : Eugène Duroutard, guide-conférencier, spécialiste outre-tombe.
Ainsi c'est lui, le fameux guide Duroutard?
Je m'équipe du baladeur et du casque mais rien ne se passe, ce que je fais remarquer à celui que j'appellerai Eugène - les Catacombes créent une étonnante intimité - et il me répond: “Il faut vous brancher sur un fil”
En effet, de longs fils relient les baladeurs de mes voisins qui s'éloignent dans la galerie comme une toile d'araignée géante...
Incrédule je branche le mien, Eugène me dit, goguenard:”Vous connaissez le fil d'Ariane? Et ben c'est pareil, vous êtes filoguidé. Personne ne se perd si personne ne perd le fil de la visite”
J'hésite à demander si le fil est assez long mais voilà que ça cause dans mon casque... en italien!
Je signale à Eugène que je ne connais guère que è pericoloso sporgersi et O sole mio, il me répond:”Ca ne va pas vous aider ici, faites donc la visite radioguidée... sans fil”
Je ne demande pas mieux pourvu que ça parle français. On est quand même chez Louis XVI!
Il me présente l'engin et dit, très fier:” C'est le dernier cri... celui qui est équipé d'un GPS”
L'expression “dernier cri” ne me rassure pas, surtout dans ce lieu macabre mais j'applaudis à l'idée d'être géolocalisable par GPS.
Il me répond:”Le GPS c'est pour Guide Person Search, ça permet juste au visiteur de localiser le guide”
Je lui fais remarquer que je sais parfaitement que le guide est sur un tabouret et qu'il n'en bougera pas mais il répond que j'aurai un autre discours quand je serai perdu au fond d'un boyau.
Je lui rend son machin dernier cri et lui demande à tout hasard s'il y a quelque chose de mieux que le radioguidage.
Eugène a un sourire radieux et me désigne une sorte d'engin volant qui stationne au-dessus de nos têtes :”Ca c'est le dronoguide, la visite guidée par drone!”
Je demande si c'est fiable et il me répond, indigné:”Si ça a marché au Kosovo, pourquoi ça ne marcherait pas ici?” et il ajoute “à cent euros la demi-heure, y a pas mieux”.
J'ai visité les Catacombes sur le site officiel de la Ville de Paris, j'ai parcouru les deux kilomètres en trois minutes et deux clics de souris... et j'ai oublié le guide, s'il vous plait!
Le Musée de la Chaussure (Pascal)
« Entrez, entrez, mesdames et messieurs ! Merci d’essuyer vos pieds !... Venez visiter le musée de la Chaussure de Romans ! Venez découvrir les ustensiles d’antan, les parfums de peausserie, les formes, les plans ! Dans nos rivières, la Martinette, la Savasse, sans relâche, on tannait le cuir pour alimenter nos grandes usines de godasses !
Mesdames et messieurs, je suis la bonne pointure pour vous guider dans ce glorieux passé et, de moi, vous ne pourrez plus vous lasser !... De la semelle jusqu’aux œillets, de l’empeigne jusqu’au talon, de la trépointe jusqu’aux coutures, vous saurez tout de nos chaussures ! Hé oui, madame ; tel que vous me voyez, j’ai passé quarante ans comme ouvrier chez Jourdan. Si j’avais porté toutes les chaussures qui sont passées entre mes mains… Devant nos établis, on languissait tous la fin de la semelle, non… la fin de la semaine. Excusez, déformation professionnelle…
Mesdames et messieurs, admirez les outils ! Les alênes, les cardes, les marteaux à battre ! Appréciez cet assortiment de brosses à reluire ainsi que sa palette de boîtes de cirage ! Ici, nous avons les sabots d’Hélène, encore tout crottés ; on dit qu’elle est passée par la Lorraine. Là, regardez sur cette étagère ! Une paire de bottes de sept lieues commandée par Charles Perrault lui-même ! Ici, des escarpins jusqu’aux souliers vernis : c’est la commande d’un cul de jatte qui nous est restée sur les bras. A la grande époque, nous avons même chaussé tous les enfants des colonies de vacances de la région ! Encore aujourd’hui, si vous passez par Sainte-Eulalie, les échos des grands goulets du Vercors vous raconteront joyeusement leurs : « Un kilomètre à pied, ça use, ça use, un kilomètre à pied, ça use nos souliers… Deux kilomètres à pied… » C’était nos petits essayeurs !...
Ne vous bousculez pas ! Tout le monde trouvera chaussure à son pied ! Ici, nous avons toute une collection de trous dans les chaussures et, de ce côté, c’est la symphonie des semelles en bois ! Vous pouvez admirer, pêle-mêle, la mule du pape Pie VI, une chaussure de verre, les baskets de Noah quand il a gagné Rolland Garros, les Moon boots de Killy, les sandales de l’Abbé Pierre, les chaussures à crampons de Jean-Pierre Rives, les talons aiguilles de Marilyn quand elle a chanté : « Happy Birthday, my président » à Kennedy. Le musée de Westminster nous a prêté la paire de chaussures du prince Charles, celle d’apparat, quand il reçoit en grande pompe. Là, nous avons des chaussons de Brad Pitt, des souliers bicolores signés Coco Chanel, une ballerine de danseur étoile, oui, Noureev. Ici, tout un stock de semelles qu’on pensait ne pas mettre à l’étalage, des Converse concaves, des Clark convexes, les santiags de Clint Eastwood, les terriblement usagées chaussures de sport de Forrest Gump, les espadrilles en couleur de BB quand elle a joué : « Et Dieu créa la femme ». Et là, voyez les babouches d’Aladin, les tongs du Dalaï Lama, les claquettes de Fred Astaire, les mocassins du dernier des Mohicans, les galoches de Gavroche, les spartiates de Ben-Hur, les John Lobb de James Bond !...
Ici, nous avons des souliers de héros, des groles de pénitent, des brodequins de soldat, des chaussures à bascule, des petits souliers de timide, des squelettes de plage, des croquenots de croque-notes, des ribouis de bandit. Là, des chaussures d’enterrement ; on les appelle aussi des pompes funèbres… Ho, mais aux gargouillis de vos ventres, je sens que vous avez l’estomac dans les talons ! Allez donc déjeuner, en face, chez l’Ami Tatane ! Sa femme est charentaise ! Je vous recommande ses pâtes au gaz, ses pieds paquets et ses chaussons aux pommes ! Bon appétit !...
Participation d'Électre
- Un guide pour la visite ? Oui, c'est bien ici... Vous voulez le poste ? Dites-moi quelles sont vos compétences. Sérieux - oui, enfin, non, est-ce vraiment une qualité ? Vous voyez, pour une visite de ce genre, ce n'est pas sûr que... enfin nous verrons bien, je note, continuez. ... Vous parlez ? Oui, nous l'espérons, encore que... Bien ? C'est encore mieux, mais qu'entendez-vous par bien ? Ah, je vois... oui, c'est une vision des choses... poursuivons, si vous le voulez bien, nous verrons. ... Vous mettez les gens à l'aise. Oui, pourquoi pas. Mais vous savez, étant donné le genre de visite... ce n'est pas nécessaire de... enfin, pas trop, un peu naturellement, mais pas excessivement, c'est comme le sérieux, point trop n'en faut... vous avez des références, dites-vous ? Oui, c'est intéressant... ah, c'est original... dites-donc, on voit que vous avez de l'expérience... mais l'expérience n'est pas, enfin, voyez-vous, pas ce que nous recherchons en priorité, même si naturellement... point trop n'en faut... naturellement si vous étiez sans aucune expérience... encore que... la fraîcheur, parfois... trop d'expérience, surtout si vous me dites que vous êtes sérieux... oui, j'entends, pas sérieux-sérieux, mais enfin sérieux tout de même... oui... vous viendriez étudier le bâtiment toute une semaine ? Vous savez, nous avons de la documentation, on ne vous demande pas de... vous ne voudriez tout de même pas... non, je n'insinue rien, mais voyez-vous... non, je n'ai pas peur que vous veniez, mais c'est-à-dire, vous ne pourriez pas non plus... mais si vous y tenez, et à condition que cela soit fait en dehors de vos heures de travail... oui, nous avons un historien, votre rôle à vous serait un peu différent, voyez-vous... une semaine, de toute façon, ça ne sera pas possible, nous avons besoin d'un guide avant... écoutez, je ne pense pas que vous fassiez l'affaire... mais si vous insistez, venez demain pour un essai... comment ? comme vous le seriez le jour dit. Si, c'est important, ils ne sont pas aveugles tout de même ! Non, vous ne serez pas le seul... nous choisirons la personne qui nous convaincra lors de l'essai... à demain. L'employé raccrocha le téléphone et soupira à destination de son collègue du bureau d'à côté: - Mais pourquoi ne lisent-ils jamais l'annonce jusqu'au bout ? - Peut-être que c'est écrit trop petit ? - Oui, je sais, mais ça me permet de vérifier qu'en plus ils ne soient pas aveugles... et puis, au moins, ils téléphonent... - Tu es sûr que tu n'aurais pas des réponses plus pertinentes s'ils le savaient déjà ? - C'est que je n'ose pas... je ne voudrais pas que mes collègues se moquent... - Oui mais ça t'éviterait les coups de téléphones de ce genre, comme la scoute de l'autre jour... - Guide, pas scoute, guide, c'est le féminin. - Oui, enfin tu me comprends: on a quand même besoin de quelqu'un pour dimanche... tu sais bien que tôt ou tard la fille va le laisser s'enfuir, s'il n'est plus là, que fait-on ? C'est qu'il faudra attendre au moins une semaine ou deux qu'il en rentre un autre... - On devrait peut-être changer la fille ? - Tu rigoles, c'est la fille du patron ! Tu penses s'il serait d'accord ! - C'est quand même tous les mois pareil... le bourreau ne sait plus quoi faire de ses cordes, il en avait commandé pour toute l'année et la petite lui sape le boulot... - Eh, qu'est-ce que tu veux, son père lui passe tout... et puis ils promettent, tous, alors le père se dit qu'il y en a un qui finira par revenir... elle s'attache si facilement... elle ne veut entendre parler de personne d'autre... et son père, que veux-tu, il voudrait faire son bonheur, c'est bien normal après tout... - Y a bien le Jeannot qui soupire après... - On dit qu'il va finir par se faire attraper rien que pour qu'elle le regarde... mais c'est qu'il faut quand même faire quelque chose de gros, alors ça pèse sur la conscience... - Oh, de gros, voler des pommes ou du pain ça suffit presque, tout dépend de l'entregent du commerçant... si le Jeannot s'arrangeait avec le père... - Oui, mais c'est risqué, s'il ne lui plaît pas ? J'aimerais pas trop laisser mon cou entre les cordes à Jojo, surtout qu'il chôme depuis un moment que ça doit lui démanger... - Enfin, c'est encore pas celui-là qui conviendra. Drôle de job quand même, hein ? Mais depuis que les bâtiments nationaux doivent proposer des visites ludiques pour le grand public adaptées aux handicapés... - Eh, que veux-tu, c'est bien normal, non ? - Oui, je sais, mais on aurait pu faire plusieurs visites différentes, plutôt que de tout regrouper en une seule... - Ah ça, le patron... Les deux employés se replongèrent dans leurs dossiers. Sur le bureau du premier on pouvait lire le papillon de l'annonce, qui comportait en grosses lettres la mention
RECHERCHE GUIDE
suivie de la précision
S'ADRESSER AU BUREAU DE LA PRISON DE NANTES
en plissant les yeux, on pouvait lire tout en bas de la feuille, en caractères assez petits
VISITE TRAGI-COMIQUE DANSÉE À DESTINATION DES SOURDS-MUETS
Participation de JAK
Curriculum vitæ
de
Jak Jarjille
Rue des égarées
st Jean de Kukulle
http://melimelojarjille.canalblog.com/
Objectifs
En dire plus qu’il n’en faut sur ce que vous ne devez surtout pas savoir
Cursus
Parcours du combattant autodidacte
Tellement de choses que vous en seriez époustouflés inénarrables sur le net
Expérience
Presque nulle, surtout rêveuse et procrastinée
Compétences
Plein en surabondance j’ai fait le plein de la plénitude
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Ma lettre de motivation
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St jean de Kukule 18 9 2015
à
Mossieur le dirlo Walrus
De chez sam’défi
Je vous adresse ma candidature pour le poste que vous recherchez, car je pense que je vous deviendrai vite indispensable.
J’ai mis ci-dessus tout ce qui me concerne, et je tiens à vous signaler que j’ai en sus une belle casquette, cela vous évitera des frais supplémentaires pour fournitures à votre personnel.
J’ose espérer que vous me lirez avec toute l’attention bienveillante qui vous est coutumière, et que vous aurez l’aimable amabilité de me prendre à l’essai.
Votre future dévouée guide de la visite
J@k
Quand c'est flou c'est qu'il y a un loup (Joe Krapov)
Je ne suis pas carrée d’épaules,
Ni Nord, ni Sud, ni magnétiques
Mais je n’ai cure des boussoles
Dans les mondes labyrinthiques.
Je ne suis pas comme la marquise
Chez qui tout brille, tout étincelle,
Qui sort de chez elle à cinq heures
Ni comme le petit Marcel.
Ca me laisse comme la banquise
Qu’ il se couche ou pas de bonne heure.
A l’insomnie seul dans sa turne,
Aux sympathies pour le dais vil
Dont je ne suis que peu friande
Je préfère la vie nocturne,
Le dédale des rues des villes
La marche des guides gourmandes.
Rennes a été mon territoire
Et d’avoir été la première
A explorer ses décalages
Ne me rend pas pour ça plus fière ;
Cela n’a rien de méritoire :
J’ai toujours aimé les voyages.
Si je ne suis pas Parisienne
Est-ce que cela gêne ? Ou peine ?
Car j’ai au Louvre deux conseurs
- Nous sommes, en vérité, cousines,
Chère Adèle et très douce Aline ! -
Et j’ai travaillé des années
Dans un musée dont je connais
Les coins et les recoins par cœur.
Il faut une tenue spéciale ?
Je n’ suis pas la femme aux bijoux
Mais j’aime assez à en porter.
J’adore le camée ovale,
Le rose est un atout en tout
Et j'apprécie fort l’églantier.
J’ai même voyagé dans le Temps,
Traversé des siècles d’histoire
Quand j’étais universitaire
Pour aller…
***
- Je vous arrête tout de suite, Mademoiselle Chassériau. J’ai l’impression que nous avons un malentendu sur le sens du mot « visite ».
- Vous ne cherchez pas une guide touristique ?
- Pas vraiment. Il s’agit en fait de faire une livraison de galettes et de pots de beurre à une dame qui habite une maison abandonnée à l’autre bout de la forêt. Une ancienne fée en fauteuil roulant. Si cette situation vous intéresse, il faudra que vous endossiez le costume rouge de notre compagnie. Le job consiste à rendre visite à une mère-grand.
Isaure Chassériau a été tellement estomaquée par ce quiproquo qu’elle est retournée vivre dans son tableau d’où, peut-être, elle n’aurait jamais dû sortir.