Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le défi du samedi
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 1 054 262
Derniers commentaires
Archives
15 juillet 2023

Au temps des sépultures (TOKYO)

 

J’habite, un grand cimetière. Je suis une tombe qui date de 1810, entourée d’un grand jardin et de majestueux peupliers.

Certainement, l’une des plus belles tombes, que la commune a en son sein.

 Les propriétaires tous défunts à ce jour n’ont pas lésiné à la dépense. Une grosse gargouille sur le fronton , le marbre noir, venu tout droit du sud de l’Italie, recouvre la dalle centrale.

Au-dessus de l’édifice, trône, un chapeau ornementé de volutes. Cette mise en scène est, je crois, le geste le plus savoureux de cette famille. Il met en relief mon esprit souverain face à toutes ses petites morts, et ces destins invisibles. Cela peut sembler prétentieux, mais étant la tombe la plus haute, chapeautant toutes les autres, je revendique cette

Prédominance intellectuelle. Outre cette position élevée et cette autorité naturelle, je

Suis aussi la mémoire du lieu de par les nombreux objets entreposés au fil des ans sur ma tombe.

Certaines tombes dans mon dos murmurent que j’ai fait mon temps et que la Révolution française étant passée par là je devrai avoir moins d’arrogance.

Elles ne supportent pas ces vas et viens, ces commémorations et ses couronnes de fleurs qui devraient leur être destinées et qui atterrissent toujours sur la mienne.

Inutile de s’attarder sur ces mesquineries, je préfère me concentrer sur la réunion de ce soir.

J’ai en effet convoqué en urgence tous les esprits du cimetière, y compris les plus insignifiants, comme ceux des basses extractions.

Leur basse fonction, leur quotidien honteux, le bruit et les odeurs subies tout au long de leur vie ne leur ont jamais permis de prendre la moindre hauteur dans un débat, mais bon, comme la démocratie prévaut chez nous, il est donc normal qu’ils soient de la réunion. J’entends que l’on frappe à ma trappe d’accès, les esprits sont donc là.

Un à un, ils prennent place et comme à leur habitude les mauvais esprits des tombes oubliées ne peuvent s’empêcher de cancaner, médire et ricaner sottement.

Leur centre d’intérêt s’élève rarement au-dessus de la ceinture, et les petites habitudes

Sexuelles des visiteurs du soir restent leur grand sujet de conversation. J’apprends.

Que certains viennent se tripoter tous les soirs sur leur tombe. Ce qui fait glousser d’un rire

Crétin la tombe du préfet. Je finis par demander le silence, heureusement aidée par

 Une sépulture d’une vieille dame inconnue qui déteste le brouhaha, et préfère les conversations censées et si possible de bon ton.

 

— Bien, je vous ai réuni pour vous annoncer un événement aussi décisif que le

Jour où notre maison est passée des lampes à pétrole à l’électricité, du charbon au

Gaz et j’en passe. Un événement d'importance va chambouler notre quotidien.

 Après un bref silence qui scotche leur attention, je leur annonce que   le cimetière va être déplacé et qu’il faut s’attendre à un grand chamboulement et qu’il va falloir se mettre d’accord sur ceux qui acceptent cette deuxième mort, , s’ils veulent faire acte de candidature, ou s’y opposer avec radicalité.

 

Leur surprise est totale et j’ai un mal fou à mettre un peu d’ordre dans la rumeur qui s’ensuit.

 — Alors, il s’agit d’une destruction dit la tombe de la famille Vidal. Mais cela va être affreux, cela va détruire toute l’harmonie du cimetière.

 — C’est en effet une transformation totale. Mais à quel endroit doit-on aller, crient certaines.

 Les intéressés restent bouche bée. Après deux siècles de tranquillités et de cohabitation !

C’est une fantaisie de ces nouveaux riches qui disent certaines. Mais enfin crie l’une d’elles, les gens aimaient se retrouver ici, y  bavarder . Ce changement va nous faire bien du tort.

 Une petite tombe ne semble pas concernée et a un fou rire qui tombe mal. Elle rit et dit enfin quoi ? ne me dites pas que vous avez peur d’un déclassement !! . Ignorez-vous que vous êtes quelconques. Parle pour toi dit la tombe art déco qui cherche à rivaliser avec moi depuis le début de la réunion. Devant tant de parti pris, j’essaye de faire diversion en interpellant, les tombes qui regardent la mer. Je sais qu’elles ont tout à perdre dans cette réurbanisation. Les vivants n’ont qu’à prendre leur responsabilité, disent-elles d’une seule voix. D’ailleurs nous n’y croyons pas une seconde et elles se défilent dans un silence de tombe contrariée comme à leur habitude.

 C’est désolant ce côté prout prout dit la tombe du maréchal ferrant déjà de leurs vivants c’était des dissidentes. Jamais concernées. Certaines rient aux larmes. Ces fous rires sont déplacés et tombent mal, dis-je. Je ressens un malaise face à la tombe de Monsieur le Curé. Je me rappelle très bien le jour où sa tombe déclara toute en dédain, réjouie qu’elle était quelque part notre inconscient et qu’il ne faudrait pas trop la chatouiller.

Alors pour qu’elle ne déballe sur les uns et les autres quelques révélations bien croustillantes je ne lui donne pas la parole. Du coup d’une voix doucereuse, je propose qu’on puisse s’entendre sur un accord pour échapper à cette aberration.

On dirait que cette proposition d’alliance les tétanise. Je ne comprends pas cette hostilité. Tes raisons sont faciles à deviner, dit une vieille tombe ; Tu vas avoir une deuxième chance quant à moi je peux dire adieu à ma présence parmi vous. Tu te trompes petite tombe, notre union fera la

Force. Il nous sera facile de nous opposer à ces travaux. C’est scandaleux, crient certaines veux-tu que nous devenions un cimetière hanté ? Jamais je ne m’associerai à cette secte crie la tombe du préfet.

À ce moment-là personne ne sait encore qu’elles viennent de signer leur arrêt de mort.

 Notre désaccord nous a perdus. Nous avons été destituées par le conseil municipal. Nous ne sommes plus dans la ville, le cerveau et la mémoire des vivants. L’incinération a suppléé nos insuffisances à nous rassembler. J’ai été abasourdie, j’ai longtemps balbutié que ce n’était pas dans l’ordre des choses. Même morts les hommes sont seuls et n’en rajoutez pas vous lecteurs vos fous rires tomberaient mal aujourd’hui. Notre cimetière a disparu.

 

Publicité
15 juillet 2023

Pas encore tout à fait amnésique. 2, Les Mascarons de Beaumarchais (Joe Krapov)

DSC_0082Les Mascarons de Beaumarchais ! Je ne sais pas qui l'a inventé ce jeu de mots stupide mais il ne me fait pas rire. Il faut dire aussi qu'en matière de farce théâtrale, nous autres, les mascaranaons, on nous a joué un sacré tour de cochon !

Autant que vous en soyez averti(e)s : le paradis est un club privé ; n'y entre pas qui veut. Il y a une sacrée crise du logement, faut croire, chez les anges sans quéquette ! Et le restaurant-grill du père Lucifer, lui aussi, refuse du monde.

Alors ces Messieurs ont trouvé la solution : ils nous ont condamnés à l'immortalité et, partant, à l'immobilité. Dès lors que nous avons une représentation sur terre, photographie, sculpture, tableaux, nos âmes s'y retrouvent attachées à jamais et nous devenons des anaons. Voilà pourquoi certaines peuplades primitives ont toujours refusé de se laisser photographier. Le repos éternel est certainement plus doux dans les prairies sacrées du grand Wakonda que dans une boîte de clichés pris par Hugues Krafft, gastronome-voyageur rémois dont il faut visiter le musée Le Vergeur, place du Forum à Reims. On ne peut guère faire autrement vu que tous les autres établissements culturels de la ville sont fermés ou emballés pour travaux de réfection. C'est mon "hôte" qui m'a dit ça.

Je peux avoir l’air de me plaindre comme ça au nom d'un collectif de mascaronistes mécontents mais en fait, nous, ici, à La Flèche, ville du Sud de la Sarthe où siègent un prytanée militaire et l'imprimerie Brodart et Taupin, qui réalisa longtemps les fameux livres de poche, nous les mascarons de pierre, nous sommes depuis trente ans d'horribles privilégiés.

Depuis trente années maintenant on nous a affranchis. Libérés de la condamnation à notre purgatoire ! Mais pour deux jours dans l’année seulement. Ce n'est certes pas beaucoup mais c'est la rareté qui fait le prix des choses, pas vrai ?

DSC_0173

Deux jours dans l’année, en juillet, quand a lieu le festival de théâtre de rue des Affranchis, nous redevenons vivants. De la même façon que les tiques se laissent tomber de l'arbre et pénètrent la peau d'un animal à sang chaud, pansu ou non, nos âmes se glissent dans les corps de touristes en goguette qui viennent festoyer sur la place Henri IV, à l'îlot aux moutons, dans la cour de l'école Descartes ou dans celle de l’école Pape-Carpentier, à l'hôtel Huger ou au parc des Carmes. Cette année dans le corps de mon nouvel hôte, j'ai encore découvert plein de nouveaux spectacles très amusants. J’ai aimé surtout Jacqueline et Marcel qui ont fait le pari de nous lire les 175 lettres des "Liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos. En vérité, la lecture ne commence pour ainsi dire jamais tant les comédiens ont pondu de préambule digressifs et de dialogues drôles avec les otages du public pour se faire offrir bière ou vin blanc – ils y parviennent ! - ou pour le draguer effrontément, Jacqueline avouant qu’elle occupe la Chambre 7 de l'hôtel Henri IV pour ceux que ça intéresserait.

Le lendemain pour le spectacle musical de Jean-Luc Lagarce, par les mêmes, elle a annoncé qu’elle ne portait pas de culotte ! Elle nous a raconté ses démêlés avec les régisseurs de divers théâtres en vue d’obtenir un tabouret sur lequel elle puisse pivoter. Et là c’est Marcel – quel prénom, vraiment ! - qui est allé draguer un bonhomme dans le public ! Vous comprenez maintenant pourquoi ce festival s’appelle les Affranchis ? Cette introduction du graveleux et du trivial dans l'interprétation de pièces littéraires, quelle joie collective cela procure !
- Jean-Luc Lagarce est le dramaturge français le plus joué en France, fait remarquer Marcel.
Mais il n'y avait qu'une quinzaine de personnes ce soir-là à avouer le connaître.
- Tu vois, Jacqueline, nous sommes plus connus que Jean-Luc Lagarce maintenant !
Le fait est et ils le valent bien.

Il faisait très chaud le samedi. Mon hote et sa compagne sont allés boire une bière au café “L’Entracte”. 363 jours que je n'avais pas éprouvé cette sensation de désaltération ! Un mascaron, ça reçoit l'eau du ciel sur la gueule quand il pleut, le soleil dans les yeux quand il daigne briller et quelquefois hélas aussi le guano des oiseaux s’ils viennent à nicher dans un recoin du toit par-dessus le pignon où nous sommes sculptés.

DSC_0137

Mon couple de touristes rennais a éprouvé ensuite beaucoup d’émotion dans ses retrouvailles avec Madame Raymonde, une chanteuse de la Compagnie du Tapis Franc. C’est elle, avec Philippe Bilheur, Geneviève Delanné et plein d’autres gens dont elle a cité les noms qui a créé le festival il y a trente ans et en est devenue la mascotte. Ce samedi lis ont chanté “La Java” “Les Amis de monsieur”, “Le Pinard (c’est de la vinasse)”, du Bernard Dimey et une chanson que Jean Ferrat a écrite pour Zizi Jeanmaire et qui fait un peu pendant à “Ma môme”.

Sur le coup de 19 heures mes touristes sont allés manger des chinoiseries au parc des Carmes mais il y avait trop de monde à faire la queue pour des bières alors ils sont revenus dans ce même troquet de la place Henri IV et lui a bu, plutôt qu’une Grimbergen, une Pelforth alors qu’elle à choisi une Blanche hermine à la place d’un Perrier rondelle.

DSC_0217

Après, tout s’est mélangé pour moi. Plus l’habitude de boire, trop de kilomètres sans avoir mis le podomètre, le souvenir d’avoir trop ri à "Zaï Zaï Zaï", très drôle, de Fabcaro, d’avoir apprécié l’acrobate muet qui fait monter son mât de cocagne par le public, d’avoir boudé une pièce-concert de rap anti-boomers, d’avoir vu le montage et l’envol d’une montgolfière déjantée - parce que belge peut-être ? – au stade Montréal.

Et si la tête ne m’avait pas tourné autant j'aurais pu enregistrer la scène de ménage des voisins au camping. Où c'est la femme qui est rentrée complètement saoule toquer à la porte du camping-car à 01h30 du matin. Mam Goudig à l'envers !

DSC_0337Maintenant, il faut que je vous raconte l’essentiel, mon choc émotionnel à moi que ça me concerne personnellement. Le dimanche à midi, mon couple de Rennais s'est retrouvé au restaurant “L’Etoile du Maroc” avec des blogamis. J'ignore ce que signifie ce terme mais j'ai appris que Joe, c'est le prénom de mon hôte et le docteur Z avaient autrefois l'habitude de se lancer des défis d'écriture le samedi ou quelque chose comme ça.

J'ai écouté d'une oreille distraite les récits de voyages et les projets de publication d'archives familiales du docteur parce que l'autre, j’étais tout occupé de la conversation entre Marina B. et la belle Gabrielle, la compagne du docteur.

Outre que son élégance et sa beauté relâchée en séduiraient plus d'un, cette jolie dame s'est lancée dans un cours d'histoire des croisades puis a parlé de ses cultures de plantes exotiques. Les dames d'aujourd'hui ont toutes les pouces verts, semble-t-il. Et puis elle a parlé du jeu d'échecs auquel elle joue régulièrement.

Et à un moment, elle a lâché LE morceau : il existerait selon elle une chatière à la porte du paradis ! Et là, malgré l'effet du kir à la mûre que j'avais pris en apéritif, malgré l'enchaînement des verres de Boulaouane par-dessus le couscous Merguez, j'ai compris que nous étions bel et bien quatre anaons autour du thé à la menthe clôturant le repas annuel des blogamis.

Alors évidemment, nous l'avons interrogée, la belle Gabrielle. D’après elle, ça se passerait à l'heure où nous quittons les dépouilles vivantes de nos hôtes. Il suffirait de se remémorer puis de réciter la suite des coups gagnants de la variante avec 4. e3 du Contre-gambit Albin pour nous retrouver avec juste nos têtes de mascarons devant la chatière. Et là, comme un vulgaire matou domestique, il n’y aurait plus qu’à rouler pour entrer discrètement dans le domaine de Saint Pierre.

Sur mon programme du festival j'ai noté la suite de coups magique. Je me la suis répétée tout l'après-midi en regardant d'autres spectacles dont une excellente version de “L’Ours” de Tchekhov, du cirque et deux fanfares spectaculaires.

Et le soir au camping, au moment de quitter les deux pseudo-intellos rennais, j'ai commencé la litanie des coups. Mais les voisins du camping-car d'à côté ont fait à nouveau un barouf d'enfer : elle a mis du rap à fond en cuisinant des courgettes. Le mec, un ex-taulard sans doute, a téléphoné à quelqu'un pour lui raconter sa dernière entrevue avec les flics.

Résultat, j'ai raté la chatière ! La preuve : je suis de retour avec mes huit potes sur le mur latéral de l'Église de La Flèche.

Et en apercevant mon reflet dans la vitre d'en face, je peux bien vous le dire : j'ai une sacrée gueule de bois ! C’en est au point que je me demande si je n'ai pas rêvé tout cela !

8 juillet 2023

Défi#776

 

776

8 juillet 2023

Ont donné de la tête dans le panneau

pas cons

P1050879

(Oui, c'est la sœur de l'originale)

Walrus ; joye ; Kate ; Lecrilibriste ; TOKYO ;

Joe Krapov ; Adrienne ;

 

8 juillet 2023

Polysémie (Walrus)


(...Faudra que je le replace, celui-là) 

Déjà avec un mot, on n'est pas à l'abri de la polysémie, ce ne sont pas les exemples qui manquent (vous n'avez qu'à chercher, je vais quand même pas tout faire à votre place).

Mais avec une image, c'est l'embrouille garantie, le grand n'importe quoi à portée de clavier sous vos doigts agiles !

Reprenons celle du jour :

P1050880

Ouille ! C'est pas la même, mais c'est tout comme : même endroit, même personnage, un an plus tard et avec des lunettes, à condition d'oublier le bras qui gâche un peu le gag visuel.

À partir d'elle, on peut s'orienter dans des tas de directions, imitant mais avec moins de style, celui de Kate !

  • Évoquer la langoureuse et provocante danse des sept voiles exécutée (c'était prémonitoire) par Salomé pour se faire servir la tête de Jean-Baptiste (non pas Poquelin, Jean le Baptiste !) sur un plateau.
  • Disserter sur les effets d'optique et jeux de miroirs destinés à tromper le public des pseudo-magiciens du monde du spectacle et lui faire prendre des vessies pour des lanternes ou de frais minois pour de la tête de veau.
  • Repérer sur l'affichette le nom de "Technopolis" et nous embarquer pour un voyage à Malines (Mechelen en langage du cru).
  • Aviser le papier peint et vous rappeler la pub Vénilia. (En dat in a kas, Marcel !)
  • Prodiguer des conseils sur les conditions de cadrage, d'éclairage et réglages de l'appareil pour produire une bonne photo.
  • Évoquer le slogan vantant le consommation quotidienne de cinq fruits et légumes.
  • Bénir la chute sur la pomme d'Adam d'Isaac Newton du fruit de l'arbre de la connaissance soumis à la gravitation universelle (dura lex sed lex) ce qui éveilla son esprit et nous vaut aujourd'hui de nous adonner, ô joie, aux charmes du calcul infinitésimal (petite cause, grands effets). Un travailleur, cet Isaac dont le nom sert aujourd'hui à nommer l'unité de force en mécanique.
  • Dans un registre plus personnel, chanter (faux bien sûr) ce refrain de Maurice Chevalier.
  • Se rappeler le Clockwork Orange (que j'ai personnellement trouvé très drôle) de Stanley Kubrick.
  • Chanter à tue tête et se trémousser sur le "Banana Split" de ma semi-compatriote Lio (l'autre moitié est portugaise)
  • Ou, même, et nous en resterons là, se vêtir uniquement de bananes comme l'inénarrable hôte du Panthéon : Joséphine !

    joséphine

Post Scriptum :
Oui, je sais, j'aurais encore pu allonger la sauce comme semble y invter la présence de la saucière, mais ça ira comme ça pour aujourd'hui, faut en tenir un peu pour la semaine prochaine...

Publicité
8 juillet 2023

Pas encore tout à fait amnésique. 1, Pomme pomme pomme pomme (Joe Krapov)

 Défi du samedi n° 775

- Je mets ma tête à couper qu’il y a un truc ! proclama Holopherne.

Cela faisait trois fois que Judith battait les cartes, qu’elle demandait à quelqu’un dans l’assistance d’en choisir une et à chaque fois elle devinait que la personne avait dans les mains la dame de coeur.

- Essaie toi-même ! dit elle au tyran.

Holopherne battit le jeu, tira une carte. C’était encore la dame de coeur. Judith le devina, l’annonça et lui trancha la tête.

Judith et Holopherne 1

***

La magie est une invention humaine qui sert à embrouiller l’esprit afin qu’il ne distingue plus le faux du vrai ni le vice du Versailles. La photo du début qui représente une de mes petites-cousines pourrait laisser ainsi penser qu’elle a subi le même sort qu’Holopherne. Mais les personnes de sexe féminin ne perdent pas la tête aussi facilement qu’on ne le croit. Et moi non plus. Je me souviens très bien que le tableau sanguinolent du début de ce texte est signé du Caravage. Ce sujet mythologique mi-biblique a été repris également par Dame Artemisia Gentileschi.

Judith et Holopherne 2

Ce récit de vengeance a fait l’objet d’un oratorio de Vivaldi, "Juditha triumphans", qui commence par une ouverture tambourinante et trompettante et se poursuit avec des airs d’une très grande beauté. Ce double disque vinyle que je possède encore a été importé directement de Hongrie par mon grand-père maternel. Je l’ai tellement écouté que je sais encore comment on dit le mot « face » en hongrois : « lemezoldal » !

Parfois, comme pour les représentations de Saint-Michel et Saint-Georges combattant un dragon, il arrive, tout concon, qu’on confonde Judith et Holopherne avec Salomé et Saint-Jean-Baptiste.

Salomé 3

Sur le tableau du Caravage on voit jaillir du « raisiné » (du sang, en argot ou argomuche) mais on représente rarement, sur un tableau et sur un plateau, une tête coupée entourée de fruits. Il y a bien, d’un côté, un tableau d’Arcimboldo qui représente une tête non coupée constituée de fruits empilés et de l’autre des fruits sans tête qui s’entêtent à sentir tandis que monsieur Chardin, celui qui s’attelle à l’art pour pas un liard, les peint sur sa toile.

arcimboldo

Ces fruits ou ces légumes appétissants dont les médecins nous disent qu’il faut en manger cinq par jours pour rester bien vivant s’appellent alors des natures mortes.

pears-walnuts-and-glass-of-wine

Avant de terminer avec un rappel de René Magritte, peintre surréaliste belge * dont la chanson préférée était « Allons à Lessines pêcher la sardine » je voudrais évoquer le cinéma avec cette image extraite de « Frankenstein junior » de Mel Brooks, un film qui m’avait fait beaucoup rire lors de sa sortie en salle en 1974. Je me souviens encore du nom de l’acteur qui interprétait Igor, le valet bossu : Marty Feldman. Et le docteur « Frankonstine » était joué par Gene Wilder.

Igor

bca319_7b2d6e39c3e5426d9b6ae87a1aa5db1f_mv2_d_1298_1966_s_2magritteLa peinture de René Magritte associe très souvent la tête et la pomme, sans faire pour autant référence à la chanson « Ma pomme » de Maurice Chevalier ni à une quelconque mythologie à base de premier homme, de première femme et d’arbre de la connaissance. René avait-il seulement lu, du reste, la nouvelle de William Irish qui s’intitule « Crains la femme avant le serpent ! » ?

Sa peinture associe également la tête humaine avec le melon mais là nous parlons d’un chapeau. Un chapeau que nous lui tirons en même temps que ma révérence car toutes ces représentations artistiques et magiques constituent le sel de notre existence.

Rene-magritte-the-pilgrim

P.S. Bien sûr que dans le tour de cartes de Judith il n’y avait pas de truc. Il fallait juste ne pas considérer un ensemble composé de 32 dames de coeur comme un jeu de cartes normal !

* "surréaliste belge", si ça n’est pas un pléonasme, je veux bien être transformé en reine rouge dans « Alice au pays des merveilles ». Vous savez, celle qui dit tout le temps « Qu’on lui coupe la tête ! » ?

Reine rouge

8 juillet 2023

De Venise à Cerise (Kate)

De Venise à Cerise

Elle voulait qu'on l'appelle Venise

Quelle drôle d'idée

Hein ?

Mais je ne m'appelle pas Julien !

Et si je n'ai pas cédé

À cette bêtise

Notre fille n'a pas non plus

Été prénommée Vanille

Comme aurait voulu

Tante Camille

Et aussi ma femme Valérie

Qui trouvait cette initiale

Des plus originales...

Elle s'est donc appelée Cerise

Et s'est faite reine de gourmandise

Pour qui tout fruit est friandise

Alors j'ai, un jour d'été

Eu la mauvaise idée

D'insérer

Sa bouille réjouie

Sur une photo de fin de repas

Où quelques fruits trônaient encore là

Et quand j'ai montré

Le résultat

Que voilà

À ma chérie

Oui toujours Valérie

Elle n'a pas ri

Ni même souri

- Mais qu'est-ce que c'est que ça !

Cerise dans les pommes ?

Enfin, pourquoi pas

En somme...

Et cette saucière

Si grossière

Qu'est-ce qu'elle fait là ?

Tu n'aurais pas pu l'effacer celle-là

Cher Nicéphore ?"

Ce n'est pas mon prénom

(Moi, c'est juste Simon)

Mais j'adore,

Surtout venant de Valérie

Sainte de Limoges céphalophore !

- Enfin, chérie...

J'ai fait un autre essai

J'espère plus réussi

unnamed

Voici la corbeille de fruits

La saucière est partie !

unnamed-3

unnamed-1

Et pour la bouille de Cerise

Je prendrai celle de "L'enfant aux cerises"...

- Le pauvre petit Alexandre de Manet ?

Tu veux l'insérer ?

- Je l'ai vu dans le livre que tu lis... (*)

- Non, oublie !

Son histoire est trop triste

Suis une autre piste !

- Allez, je vais réfléchir

Et peut-être partir

Histoire de retrouver

Un peu de créativité ?

(*) tableau extrait du livre :

unnamed-2

 

 

8 juillet 2023

Alors Alice a dit Oh ! (Lecrilibriste)


Des pommes, des poires et des scoubidous bidous ?  Oh !
Mais quel est ce drôle de scoubidou dans le plateau
Qui ouvre une bouche affolée  en « O »
attendant le verdict du bourreau ?

On lui a coupé la tête, on lui a coupé la tête !
Crient  la Chenille et le chat du Cheshire
Quand « Lapin blanc » son hérault
A soufflé dans sa trompette

Et elle ne dit plus qu’un mot : Oh !
Ça lui a coupé la sifflette tout de go

Alors Le Roi rouge a vu rouge
Il a tué le Chapelier Fou avec son grand couteau
Ou peut-être bien ses ciseaux
Mais c’est Bonnet Blanc et Blanc Bonnet
Un couteau ou des ciseaux
Maintenant la tête est bien sur le plateau

Tout ça pour un paquet de croquets
Qui sont aux trois quarts bouffés
Sans laisser un croquet au héros

8 juillet 2023

Gabrielle (TOKYO)

8 juillet 2023

L'été en poésie : l'acrostiche (joye)

​​L’acrostiche est un texte poétique dont les premières lettres de chaque vers forment un mot lorsqu’on les lit à la verticale. Ce mot peut être le sujet du poème, le nom de l’auteur ou encore de la personne à laquelle il est destiné. L’acrostiche peut aussi être utilisé si l’on veut cacher un message dans un poème.

 I.

Taquinons le phénomène d'illusion
Et surtout, faut pas qu’on s’inquiète :
Tranchée comme ça
Et comment ! ça va
Sans souci aucun, ce beau tête-à-tête.

Sourire pour sourire,
Une princesse pour rire,
Rassurer et chérir.

Taquinons ce joli tête-à-tête.
Allons comme ça,
Baissant les bras.
L’art de faire qu’on s’inquiète
Est le phénomène d’illusion.

fillette graffiti

1 juillet 2023

Défi #775

 

Comme chaque été, et cette année pendant neuf semaines,
le sujet sera une image.

 

P1110500

1 juillet 2023

Ont trouvé l'arbre à came(s)

1 juillet 2023

Ma grand-mère (TOKYO)

 

’Ma grand-mère était tout sauf une grand-mère, comme on peut voir dans les publicités.

Elle ne faisait pas de confitures, et ses cheveux violines qui viraient orange acide en disaient long sur cette manière de se décentrer de l’inéluctable.

Sa mort avait été une surprise, elle qui travaillait à son immortalité. Quand le notaire m’a tendue sa lettre   du haut de mes quatorze ans je fus sidérée, fébrile je revois la scène.

Qu'est-ce qu'elle m'a laissé ? Elle ne m’aimait pas pourtant, je ne comprends pas, y a que moi qui ai quelque chose. Un morceau de papier jaillit, se dévide en ribambelle, prend la porte de sortie. Je cours derrière, dévale la pente, trébuche, pique du nez. Mes narines explosent, mes épaules s’éraflent, mes genoux se pèlent, finissent leur course dans un buisson de ronces et d’orties. Je m’essuie le tarin ensanglanté, d’un revers de main, me tourne, découvre, inscrit sur cette langue de grand -mère géante, un message : « Tu t’attendais à quoi ? »

v1

1 juillet 2023

Un peu de ressort voyons ! (Walrus)

 
"Excentrique" aujourd'hui !

Pourquoi pas "Culbuteur" tant qu'il y est...

Oui, culbuteur ne débute pas par e.

C'était façon de dire que pour nous faire plonger les mains dans le cambouis jusqu'au coude, il a le chic.

Les cames sur leur arbre ont une excroissance excentrée, elles peuvent par leur rotation induire un mouvement aux soupapes via leur queue, comme ceci :

w7741

Bon, me direz-vous, va pour l'effet excentrique, mais (sans arrière-pensée libidineuse) qu'est-ce que les culbuteurs peuvent bien venir foutre là-dedans ?

Facile ! On ne m'attrape pas avec un piège aussi simple : ils permettent de situer l'arbre à cames ailleurs qu'en tête du bloc-moteur pour toute raison possible, comme l'encombrement dans l'espace de la motorisation, c'est un simple transfert de mouvement d'un endroit à un autre :

w7742

Waah, je vous sens culbutés d'admiration, là !

Comment ?

De consternation ?

Bah, l'important c'est de ressentir quelque-chose, n'est-il pas ?

1 juillet 2023

Excentrique éloge de Saint-Flour (Kate)

Excentrique éloge de Saint Flour

Excellent thème

Épatant même

Étrange quand même

Exactement fait pour mon

Esprit vagabond

Éclectique (ah bon ?)

Épique

Estival

Envie de changer d'air

Et d'aller en Lozère

Et pour ce faire

Envisager la traversée du Cantal

0 2

Élévation

Expédition

Et pause déjeuner

En cette cité

0-3 2

Exotiques tenues

Exposées dans la rue

0-6 2

0-8 2

Extraordinaire numérotation

Évidente superposition

Entre passé et présent

En lien avec ce qui a été

En quête du maintenant

0-1 2

0-2 2

Excentrique vase

Élégante fleur sur sa base

0-5 2

Hasard ?

Galerie d'art !

Été

Escompté

Estivales photos

Êtes-vous là bientôt ?

 

1 juillet 2023

Toudis in route ! (Joe Krapov)

Nous autres, par ici, au Défi du samedi, nous constituons, l’air de rien, une belle bande d’excentriques.

Lorsqu’il y a une bavure policière, par exemple, nous n’allons pas, pour protester, mettre le feu à une médiathèque.

Plutôt que d’aller répandre de la haine et des insultes sur le site de l’oiseau bleu, nous tâchons, chaque semaine, de poser les pièces d’un puzzle écrit qui constituent, l’air de rien, une œuvre littéraire.

Portrait chinois de Rimbaud

Comme on dit maintenant, « C’est pas n’importe qui qui fait ça ! ». Je me demande même quelquefois si cette excentricité ne confine pas au snobisme !

Mais je ne suis pas ici pour raconter ma vie ni la vôtre. C’est pourquoi j’ai choisi d’évoquer à nouveau, en chanson, le plus grand excentrique de la poésie française.

Voilà un garçon qui avait toutes les qualités pour entrer dans le moule de la société absolument moderne du XIXe siècle occidental et qui a préféré s’excentrer totalement pour faire toutes les conneries possibles aux quatre coins du monde. Si tant est que le monde a des coins.

Sacré Rimbaud ! On n’est vraiment pas sérieux quand on a dix-sept ans ! Et encore moins après !

 

1 juillet 2023

L'excentrique pour les Nuls (Vegas sur sarthe)


Comment reconnaît-on l'excentrique parmi les rigides, les coincés, les ordinaires ?
Et bien chez l'excentrique tout ne tourne pas rond, à commencer par son habitat :
L'excentrique est un être qui vit exclusivement dans les arbres à cames.
Les premiers arbres à cames remontent au IIIème siècle avant JC ; on les trouve dans certains automates d'Héron d'Alexandrie.
L'excentrique Héron naquit à Alexandrie (Alexandra) où l'amour danse avec la nuit et où on a plus d'appétit qu'un barracuda.
Héron était un ingénieur mathématicien excentrique connu pour sa méthode d'extraction de la racine carrée.
Notons que seule la racine des arbres à cames est carrée.
Héron était aussi hétérocentrique, ce qui est plutôt extravagant pour un grec.
Il inventera un distributeur d'eau automatique payant qui n'eut aucun succès ainsi qu'une machine à rendre les oracles qui n'en eut guère plus après quoi il s'éteignit.

Incinéré, on grava sur son urne « Ici repose L'excentrique Héron cendré »

 

1 juillet 2023

cqfd (joye)

CQFD

1 juillet 2023

Dans la forêt lointaine... (Yvanne)


Certains jours il me prend – et c'est souvent – l'envie d'aller baguenauder dans les bois. J'adore ces promenades, seule, dans la Nature. Je laisse mon esprit vagabonder et mes sens se repaître de sons, de couleurs, d'odeurs... Ce fut le cas dimanche dernier.

Alors que je traversais le chemin pour m'approcher de la rivière j'entendis tout à coup le chant caractéristique du coucou. « Tiens, tu es encore ici toi, le voleur, le pilleur de nid ? » Comme une gamine je lui répondis et une sorte de gargouillement moqueur arriva en écho. Au même moment j'eus – comment dire – une illumination. « Eh bien voilà je le tiens mon excentrique ! «

Ce n'est pas de sa faute me direz-vous si le coucou agit – mal - comme il le fait avec ses congénères. La Nature a ses raisons que la raison humaine ne connaît pas. Comme singulier oiseau on ne peut mieux cependant. Déjà son nom : cuculus canorus qu'il doit à son chant particulier. Et ses mœurs que notre Marcelle (Delpastre) ne manque pas d'associer malicieusement aux sobriquets – cocu, cornard -  que l'on donne aux hommes – ou aux femmes – dont le conjoint est aussi volage que le coucou  mâle ou femelle  changeant de partenaire plusieurs fois durant la nidification. Nous n'avons pas inventé l'union libre. Encore une fois la Nature nous a devancés.

Les parents coucou ne s'encombrent pas de la construction d'un nid. Pas le temps. Et puis comme la femelle pond parfois une dizaine d'œufs ils ne pourraient pas nourrir toute leur progéniture. C'est tellement plus commode d'aller pondre dans un nid d'alouette ou de rouge gorge ! Futée, Madame coucou attend que le nid convoité soit libre de tout parent, se débarrasse d'un des œufs qui s'y trouve en l'évacuant, laisse choir le sien, un seul à la fois et le travail est terminé pour elle. Même manège autant de fois qu'il y a d'œufs à placer. On se demande pourquoi les parents grugés ne se rendent compte de rien. Mais est-ce le cas vraiment ? Mieux : ils nourrissent consciencieusement le bébé coucou comme l'un des leurs. Ce bébé a de qui tenir d'ailleurs : il s'y connaît en imposture ! A peine né, il passe par dessus bord les autres locataires. Pourquoi se gêner ?

Le coucou, malgré ses défauts n'en demeure pas moins un messager du printemps. Il n'est pas le seul bien sûr mais son chant particulier et sonore annonce plus que tout autre l'arrivée des beaux jours. Bien des coutumes sont liées à sa première manifestation. L'une d'elles assure que si l'on a quelque monnaie dans sa poche au moment précis où on l'entend il faut les faire tintinnabuler pour avoir  une promesse de fortune. Chez moi on dit souvent d'une dernière neige d'avril qu'elle est la neige du coucou. Pourquoi dit-on « maigre comme un coucou » ? Il paraît que ce dernier se nourrit de peu. Autre expression que Maman employait souvent en occitan pour se moquer quand une personne trouvait une ressemblance entre ma sœur et moi : « che sembla coma la jaça et le cocut » (elles se ressemblent comme la pie et le coucou.) Une autre légende qui nous ramène au sacré veut que le coucou aille tremper sa queue dans un bénitier le jour des Rameaux pour ensuite bénir champs, prés, vergers, enfin tous les biens de la Terre pour qu'elle soit féconde. Il a donc son importance dans l'ordonnance du vivant.

Le coucou est un oiseau fascinant de par son excentricité comportementale. Il nous montre l'extravagance et la cruauté de la Nature qui tolére les mœurs de cet oiseau au dépens de ses congénères. Au fait y a t-il une différence entre excentrique et extravagant ? Je crois que oui...

 

Publicité
<< < 1 2
Newsletter
Publicité
Le défi du samedi
Publicité