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Le défi du samedi
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21 septembre 2013

Le trésor (Célestine)

Je marcherais vers toi sur un trottoir mouillé de noirs et blancs pavés, jupe de satin doux et caraco turquoise. Les mèches de mes cheveux fous porteraient à leur bout des  perles de pluie fraîches, et mes lèvres entrouvertes attendraient, frémissantes et buvant l’air aigri de cet automne froid, que tu viennes vers moi. Et le flot des Pontiacs bruisserait sur l’asphalte,je ne verrais que toi dans mes yeux d’amour flou. Je courrais, je courrais, j’attraperais la mort à courir comme ça sous la pluie de novembre, mais je n’écouterais pas la voix de la raison, et je courrais encore.

Tu serais sur le port, fier et lointain paysage, et le regard perdu dans la brume étouffée. La main serrant le bastingage d’un quelconque café, ténébreux et sauvage, tu ne regarderais pas dans ma direction, mais vers un point cruel de l’horizon blafard qui ne serait pas moi.

J’arriverais fourbue, éperdue, et perdue noyant dans tes yeux clairs le chagrin de mes yeux, serrant mes poings de peur que tu ne me repousses, et pourtant, au milieu d’une foule inconsistante et fade ignorant les tourments qui agitent mon âme, tu placerais soudain tes bras comme un rempart, tout autour de mon corps telle une forteresse, la chaleur d’un  baiser allumerait en moi un incendie hagard.

Elle regarde sa montre et remonte son col. Il est tard, elle sort dans le soir ordinaire. La pluie a allumé le trottoir de diamants.

Elle est seule, elle a froid. Elle a encore rêvé d'un improbable amant au carrefour des songes. C’est sa seule richesse, rêver, c'est son trésor. La vie l’a oubliée une nuit de janvier où ses beaux yeux sont morts. 

 

cél

 illustration:Joël Guenoun ®

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Commentaires
D
merci, me suis laissé porter par tes mots, c'était bon..
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V
j'ai le sentiment d’arriver après la pluie de réaction! ne cessons pas de croire en notre capacité à aimer
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J
Très intéressant, un rêve narré au conditionnel. Autrement dit, la narratrice rêve de rêver car elle n'aura pas encore vécu son rêve et il lui manque une condition...un siquoi, comme hurlent les grammairiens (ou les grand-mères I.N.). A mon avis, narré au futur, cela voudrait dire qu'un jour, cela arriverait parce que la volonté y jouait. Oui, comme je dis, très intéressant, ce conditionnel - parce que, après tout, l'idéal est d'aimer...inconditionnellement. Ainsi termine mon dimanche philo, merci pour le sujet !
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V
Belle histoire Célestine et merci pour le lien !
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M
"C’est sa seule richesse, rêver, c'est son trésor." ... Bien choisis ces verbes au conditionnel, ce temps dévolu au rêve ... <br /> <br /> Une très belle écriture comme toujours chère Célestine !
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C
"Ses yeux sont morts", pourtant elle regarde sa montre...<br /> <br /> Parfois aussi, le trop plein de déceptions nous pousse à refuser de voir.<br /> <br /> sourire<br /> <br /> Vanina
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A
Il lui reste le regard de l'âme...
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S
Un texte très bon ! Le conditionnel qui se fait casser par le présent, dans ce triste retour à la réalité, c'est très fort. Même l'italique qui a un petit air jovial n'y fera rien...
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W
N'empêche, tu racontes merveilleusement !
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W
C'est Lisbonne ! Tu lis trop 12:18, j'ai reconnu les trottoirs pavés de blanc et noir et la pluie de novembre et la maison sur le port... C'est pas Henri, ton navigateur ?
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N
Ah les courses folles des jeunes amantes ébouriffées qui prévoyantes ont repris l'entrainement à la gym pour pouvoir assurer le sprint jusqu'à l'être adoré pas trop essoufflées (c'est-à-dire pas comme le Loup de Tex Avery qui, le pauvre, arrive en crachant ses poumons ce qui fait un effet fort peu érotique sur sa belle Marilyn)...Bien belle épopée, brûlante cavalcade de sentiments d'offrande pour un amant bien terne qui ne semble pas mériter tant d'attention ni qu'on lui consacrât tant des jolies tournures d'expression, lui qui n'en réserve pas même une pour sa belle...Grr, bien des hommes ne méritent pas leurs succès.
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P
Whaou quel rêve ! J en fais bien souvent des comme ça mais avec la chance d y voir encore ! Tu nous époustoufle ma Celestine, pour moi pas eu le temps cette semaine de fou ! Bisous de prudence
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H
J'ai trouvé ton texte vraiment très bien écrit, j'aime beaucoup ta façon d'utiliser les métaphores :) C'est plein d'émotions... D'ailleurs, on peut se poser des questions : dans son rêve, est ce que la narratrice regrette l'amour, ou bien les magnifiques visions qu'elle n'aura plus ?<br /> <br /> Bravo !
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J
Autant mon texte de cette semaine tourne autour d'Isabelle Huppert, autant on ressent bien ton attirance (ou celle du personnage) pour George Clooney "La main serrant le bastingage d’un quelconque café". Qui d'autre sinon ?<br /> <br /> <br /> <br /> Merci de cet aveu cinéphilique en parallèle ! ;-)
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A
Toi aussi célestine tu navigues entre rêve et réalité. Tu as bien fait de prendre le temps d'écrire plu qu'un acrostiche. Et qu'on ait ou non perdu la vue, tu décris à merveille la soif éperdue d'amour, exaltée et exaspérée par l'élément liquide environnant, qui ne l'étanche en rien et laisse l'être plus dépourvu à la fin, de voir son rêve non réalisé Magnifique.;
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K
oui cela arrive à beaucoup de gens en rêve et en réalité hélas!!<br /> <br /> tout le monde devrait avoir droit à l'amour du moins à la tendresse<br /> <br /> c'est la détresse que cette solitude peuplée de rêves <br /> <br /> très bien décrite par toi avec des mots choisis<br /> <br /> bisousssssssssss ♥♥♥
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