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Le défi du samedi
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2 janvier 2010

ivres (d’amour ?) (Poupoune)

Aaaaaaaaah… Aaaaaaahaaaaaaaaaaah ! J’ai toujours l’impression de pisser plus que j’bois ! Hé hé !... Aaaaaaah… mais que tu la s’coues ou que tu la… quoi déjà ? Que tu l’astiques que tu… nan. Bref. La dernière goutte est pour le split, quoi. Ah non, tiens. Hé hé ! L’est pour la nunette ! Pis pas qu’la dernière ! Vache ! J’en ai mis d’dans quomême ?... Bon, un p’tit dernier avant d’aller m’piquer une ronflette… Vaaaala… Merde, j’y ai d’jà bourré l’cul ou non ? J’sais pu… ‘tends voir… j’bande ou pas ?... Ouuuuuh la ! Ben non, hein ! C’est qu’ça doit êt’ fait. Peux roupiller tranquille. Allez… Ah ben t’façon ça tombe bien, elle est pas là. Ben où qu’elle est encore ?... doit être chez sa mère. Elle est toujours chez sa mère. J’crois. Quoique… j’sais pu si elle est pas morte sa mère… pfffrrrrt !

 

***

 

Merde. Je l’ai déjà vu, lui. J’aurais dû aller à l’autre hôpital. Il me regarde bizarrement. Pourvu qu’il ne me pose pas de questions. Une fois j’ai failli craquer… mais je ne veux pas qu’on me l’arrête. Il n’a rien à faire en prison. Il faut juste qu’il se soigne… Il n’est plus vraiment lui dans ces moments-là… Je le sais bien. Dès qu’il arrêtera de boire… tout ça s’arrêtera aussi. Il est tellement… tellement… oh la la, je l’aime, quoi ! Comme une folle… Si je le perds je me perds. Alors je dois l’aider. Autant que je peux… à quel moment on sait qu’on ne peut plus ?... Je crois qu’il m’a recassé le poignet. Je devais être encore un peu fragile. Peut-être que cette fois il s’excusera. Et qu’il m’écoutera. Je sais bien qu’il m’aime aussi. Elle est belle notre histoire. Alors ça va finir par s’arranger. C’est sûr.

 

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26 décembre 2009

Détonant, non ? (Poupoune)

Plus le jour J approchait, plus le secret était dur à garder. Sa déception était presque palpable. Il essayait bien de me tirer les vers du nez, mais je ne lâchais rien, au point qu'en effet il pensait obligatoirement qu'il n'y aurait ni fête ni surprise pour son anniversaire. Je m'efforçais de rire sous cape et de rester de marbre lorsqu'il évoquait le sujet. J'avais évidemment tout préparé en catimini et j'étais à peu près sûre de mon effet : tout le monde serait là et la cerise sur le gâteau serait dans le gâteau... Une vieille blague entre nous, ce truc de femme à demi nue dans un gâteau, et j'étais sûre que me voir sortir de sous la chantilly lui ferait un souvenir impérissable !

Je suis allée me cacher dans le dessert en dessous affriolants avec une bouteille, parce que pour faire ça j'avais quand même besoin d'être pompette. En attendant l'heure de mon petit numéro, je tendais l'oreille pour surprendre les conversations et je me félicitais doublement pour mon idée : de fil en aiguille, j'ai appris des trucs pas croyables ! Je buvais du petit lait, mais pas seulement... si bien qu'à un moment j'ai fini par m'endormir et ça ne m'a pas réveillée quand ils ont bougé le gâteau.

Je sais pas si c'est moi qu'ai pas fait attention quand je me suis planquée ou si c'est les autres qu'ont déconné, n'empêche qu'ils ont mis le gâteau à cuire. Et même bourrée, le thermostat 7, ça brûle.

 

19 décembre 2009

attendre et pisser (Poupoune)

Sûr que l’patron avait toutes les raisons d’être un peu fâché. C’est vrai qu’la moutarde lui était drôlement montée au nez après c’t’histoire où j’avais malencontreusement dessoudé son rejeton, mais j’trouvais qu’il exagérait quand même un peu. Déjà, j’le soupçonnais sérieusement de pas être mécontent que quelqu’un l’ait débarrassé d’ce boulet et puis bon, la sanction était un peu sévère. D’une c’était un boulot d’débutant, de deux la planque était pourrie et mal équipée… et par-dessus l’marché Lucien me tenait évidemment pour responsable, ce qui achevait de rendre l’attente carrément pénible.
Moi je faisais d’mon mieux pour qu’ce soit pas trop désagréable, mais les deux autres, là… Lucien, c’est bien simple, à part compter les heures il faisait tout avec la pire des mauvaises volontés. Evidemment, coincés là tous les trois dans cette bicoque crasseuse, avec la môme qui boudait carrément alors que j’étais aux p’tits oignons avec elle, c’était pas une sinécure… mais avec un tout p’tit effort de leur part ça aurait très bien pu être vivable. Ou quasi.
Pas marrante, la p’tite… Avec ses cheveux tout courts et sa tunique safran, elle ressemblait à un bonze, mais il suffisait qu’elle ouvre la bouche pour que l’impression de zen disparaisse. Si y avait pas potentiellement un max d’oseille au bout, j’la foutrais dehors vite fait. Ça calmerait aussi Lucien parce qu’avec tout ça il avait l’air en souci. J’me faisais p’t’êt’ des idées, mais j’jurerais qu’ses cheveux avaient viré poivre et sel sur ces trois derniers jours.
N’empêche que c’boulot, c’était l’sésame pour retrouver les bonnes grâces du patron alors j’avais pas l’intention d’le foirer. L’était bien loin, l’temps où on pouvait s’reposer sur nos lauriers. Là, on était attendus au tournant. Et pour corser l’affaire, pimenter un peu plus la situation, il avait paumé l’adresse, Lucien. Fallait quand même pas avoir grand-chose dans l’citron ! Et vu comme il était vissé, au lieu d’faire amande honorable en remuant ciel et terre pour la r’trouver il restait là à suçoter ses bâtons d’réglisse en ronchonnant dans un coin. Et c’est moi qui me colletais la gamine en essayant d’la faire causer. Le problème c’est qu’le patron nous avait piqué nos flingues pour pas qu’on la tue par mégarde, alors pour lui faire peur, j’ai dû m’débrouiller avec c’qui traînait là… mais à part un presse-ail et un balai achiote, y avait rien qui soit susceptible de l’effrayer, la môme. Autant attendre épicé dans un violon.
Du coup, je sentais qu’ça allait durer une éternité, parce qu’on n’avait même pas encore envoyé la demande de rançon.

12 décembre 2009

ment, sue et tue 2 (Poupoune)

Je suis pas très porté sur les fêtes religieuses. Pas plus sur les fêtes de famille. Faut dire que d’famille j’en ai pas vraiment eu quant à la r’ligion, tout c’que j’en connais c’est les coups d’trique qu’on r’cevait chez les jésuites quand j’étais minot et à part dans l’dos ça m’a pas trop marqué. Mais Noël… j’sais pas. Noël c’est… j’sais pas. J’aime bien les décorations, les lumières partout, l’odeur des sapins… Habituellement, c’est sous une aut’ forme, que j’l’offre à mes clients, l’sapin. Mais à Noël, y m’vient des envies d’générosité et d’grandeur d’âme. J’sais pas pourquoi. En plus, là, la cliente, j’l’ai ramenée comme elle était en sortant du rade où elle bossait, avec sa robe verte, ses collants rouges et son bonnet à grelots. A chaque fois qu’elle bouge la tête, ça fait gling-gling et ça m’donne envie d’chanter « minuit chrétien ». J’sais même pas d’où j’la connais, cette chanson. En attendant, c’est son jour de chance à la donzelle.

-          C’est ton jour de chance.

Elle m’a r’gardé avec l’air de pas m’croire. J’y aurais p’t’êt’ pas cru non plus à sa place. Je m’suis levé et j’ai ouvert la porte de la bicoque. Rien que le noir de la forêt tout autour. Même pas de lune. Ouais… une sacrée chance, qu’elle avait.

-          Ouais, une sacrée chance, que t’as.

C’était l’premier cadeau d’Noël que j’faisais cette année. Rien que quelques mots. Mais un putain d’beau cadeau ! J’ai posé l’flingue, j’l’ai détachée.

-          File. J’te laisse 5 minutes d’avance.

Elle a même pas dit merci.

5 décembre 2009

le plus beau métier du monde (Poupoune)

la carrière que je souhaite embrasser un jour

a ton regard doux et surtout tes lèvres rondes

je suis sûre d’être absolument faite pour

et d’ailleurs à cet effet je ne suis pas blonde

 

je saurai me montrer inventive ou lascive

entreprenante, réservée ou bien fougueuse

je peux pour te plaire être tendre ou agressive

utile, agréable, très sérieuse ou joueuse

 

je sais aussi sans réserve m’amouracher

aimer avec passion en pleine déraison

m’offrir avec bonheur et n’être plus qu’à toi

 

d’amour et d’eau fraîche je peux me sustenter

faire à chaque collation le plein d’émotions

n’hésite donc pas l’affaire est sûre, prends-moi !


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28 novembre 2009

qui est Lulu ? (Poupoune)

- Lucette !
- Ludivine ?
- Nan…
- Lucie ?
- Non plus.
- Luce ?
- Nan…
- Ludovic !
- Ludovi… que ?
- Euh… ouais, s’tu veux.
- Non.
- Lucienne ?
- Eh ! C’est bon, c’est pas ma grand-mère non plus !
- Elle s’appelle Lucienne ta grand-mère ?
- Non pourquoi ?
- Ben j’sais pas, t’as dit…
- Lucifer !
- …
- Ben quoi ?
- Tu trouves que c’est un prénom d’fille, ça ?
- Parce qu’on cherche un prénom d’fille ?
- Putain Lucien t’es lourd !
Lucien, il était nouveau dans le coin. Il avait l’air de plus ou moins s’planquer suite à une sale affaire, mais il était pas très causant et moi j’évitais d’me montrer trop demandant, sinon c’était des coups à m’fourrer dans une histoire à la con, qui me ferait perdre du temps et pas gagner un kopek. N’empêche, tout nouveau qu’il était, il s’était très bien intégré chez Gégé et on aurait pu croire qu’il avait au moins autant de bouteille que Norbert comme pilier de bar. Sauf qu’il était lucide plus souvent. Et plus longtemps. Ce qui l’empêchait d’ailleurs pas d’être con : des plombes qu’on jouait à « c’est quoi en vrai son nom à Lulu » et lui qui nous sort du Ludovic et du Lucifer… Comme si pouvait y avoir matière à douter de la féminité de ma ludci… dluci… dulcinée. T’en foutrais du Lucifer !
- Ludmila !
- On a dit Lulu, pas Loulou…
- Merde… S’ça s’trouve, c’est un nom con comme la lune…
A c’moment-la, y a eu comme une lueur d’intelligence dans l’œil de Norbert, qu’on a tous bien cru qu’il allait même dire un truc, puis non. Il a replongé le nez dans son verre. Y a des fois tu peux pas lutter. Norbert, il avait perdu la bataille depuis belle lurette, mais de temps en temps, comme ça, il avait un geste ou un mot qui rappelait qu’il était pas encore tout-à-fait mort. Pour autant j’arrivais pas vraiment à avoir pitié. Après tout, il avait au moins les moyens de se torcher tous les jours copieusement et il avait toujours pas eu besoin de mettre au clou sa montre de luxe. En plus je savais de source sûre que Gégé lui faisait pas crédit, vu qu’il me l’avait dit, Gégé. Alors bon, je gardais ma pitié pour des vrais types pittoresques. Pitoyables, j’veux dire. Comme l’aut’con, là, par exemple. Celui qu’on appelait juste l’aut’con. Lui, ouais, ça, pour faire pitié, il faisait pitié. Il était convaincu qu’au lupanar on trouvait des podologues. C’qu’est pas forcément exclu, mais lui croyait qu’y avait que ça… c’était pas une lumière. En plus il était lunatique et un coup sur deux qu’y venait y supportait pas qu’on se moque et ça finissait en baston. Enfin… en empoignade de poivrots, quoi. Le pire qu’est arrivé un jour, c’est Norbert qui s’est luxé l’épaule, mais c’était en voulant refaire son lacet qui s’était défait pendant la bagarre alors je sais pas si ça compte.
- Lucille !
Ah ! Gégé… lui y perdait jamais l’fil… S’il avait pas cédé à cette lubie de sa Toinette qu’avait voulu un beau jour devenir barmaid, il aurait pu être au moins… euh… un truc où faut d’la suite dans les idées. Bon, en fait, y avait eu comme un genre de malentendu, vu qu’en vrai elle voulait devenir mermaid, la Toinette. Du coup on la voyait jamais trop par ici, sauf avec cet air lugubre et hautain qu’elle s’efforçait d’arborer sitôt qu’elle franchissait le seuil du bistrot. Mais l’Gégé, lui, il avait assumé la boulette jusqu’au bout. Pour le plus grand bonheur des ivrognes du quartier.
- Eeeeeet nan ! Allez, ressers-nous, va, on rejouera une autre fois !
- Ah ben non, allez, dis-nous : c’est quoi son nom à ta Lulu ?
- Ben j’sais pas !
- Hein ?
- Ben j’en sais rien ! Elle a jamais voulu m’le dire !
- Tu déconnes ?
- Même pas.
- Ben alors comment tu sais qu’c’est pas Lucille ?
- Parce que j’y ai déjà demandé.
- Et Lucifer, tu y as d’mandé, pour Lucifer ?
- Ta gueule Lucien !
- Nan mais sans rire… ça fait des lustres que t’es avec elle et elle t’a jamais dit son nom ?
- Ben non.
On a levé nos verres et trinqué, en hochant gravement la tête, aux grands mystères de la vie.

21 novembre 2009

psyché (Poupoune)

Je me regarde et ne te vois plus.

Mes yeux se sont éteints de ne plus s’accrocher aux tiens.
Ma peau s’est ternie de ne plus frémir sous tes caresses.
Mes lèvres ont fané de ne plus recevoir tes baisers.

Reviens-moi vite : tu me vas si bien au tain…

7 novembre 2009

un secret (trop) bien gardé (Poupoune)

L’endroit était comme sur les photos : une belle maison ancienne à flanc de coteau, un grand jardin ni trop sauvage ni trop propret, à l’écart de la route et assez loin de tout pour se croire seul au monde… Exactement ce qu’il me fallait pour ces vacances. Le vieux proprio n’en finissait plus de me donner des consignes et, quand il m’a enfin remis les clés, il a dit :

 

- Une dernière chose. N’ouvrez pas cette porte. Jamais. En aucune circonstance.

 

Je ne l’avais même pas remarquée : vieille, envahie de végétation, dans un coin du jardin que je n’aurais sans doute pas eu l’idée d’explorer. Je ne sais pas pourquoi il a fallu qu’il m’en parle. Pour m’interdire d’y aller en plus.

 

Sur le coup je n’y ai guère prêté attention, mais en me couchant je me suis aperçue que je ne pensais qu’à ça. Que pouvait-il bien y avoir derrière cette fichue porte ?

 

Evidemment, je me suis imaginé un tas de choses : une chambre de tortures, la planque diurne d’un vampire, un équipement complet de sex toys, une collection de cadavres, une geôle puante où le vieux aurait séquestré des jeunes-femmes, un repaire de généreuses harpies aux aboiements lubriques offrant leur cellulite et leurs nichons blafards à de quelconques fouines en robes synthétiques fendues jusqu’aux néons de leur croupe ovipare… les trucs classiques, quoi.

 

J’ai super mal dormi.

 

Le lendemain, j’ai collé mon oreille à la porte. Rien. Pas de hurlements de loup-garou ou d’enfants violentés, pas de grognements de chien à trois têtes, pas de pleurs de femme violée, aucun bruit louche, en somme. Pas d’odeur pestilentielle non plus trahissant l’éventuelle présence d’un ou plusieurs corps en putréfaction.

 

Ça m’agaçait. Pire : ça m’obsédait déjà. J’ai essayé de me convaincre que ce n’était qu’une cave à vin et que le vieux avait juste peur que je lui descende ses meilleures bouteilles, mais rien n’y faisait. J’avais besoin de savoir.

 

Le jour suivant, je suis allée frapper à la porte. Après tout, hein… Un vieil ermite oublié, un bâtard difforme caché… mais non. Non plus. Ou alors sourds. Ou asociaux. J’ai frappé assez fort et assez longtemps pour réveiller un mort et personne n’a ouvert.

 

Oh ! et puis après tout, qu’est-ce que ça pouvait bien foutre si je l’ouvrais, cette satanée porte ? C’est vrai, quoi, merde…

 

J’ai fouillé toute la maison en quête d’une clé, sans succès. Evidemment.

 

Le jour suivant je suis retournée devant la porte. J’ai essayé de l’ouvrir. Elle n’était pas verrouillée… Oui. J’aurais pu essayer ça avant de retourner la baraque. Bien sûr. Et la porte, LA porte, cette putain de saloperie de porte de mes deux qui m’avait déjà gâché mes premiers jours de vacances était donc ouverte. Des jours à me demander ce qu’il pouvait bien y avoir derrière et là… je n’osais pas entrer. Le vieux était peut-être un sorcier maléfique qui me jetterait un sort affreux si jamais je désobéissais ? Un truc du genre :

 

hasard ou blizzard

 

guide les pas du curieux

 

malheur en son cœur

 

Mouais. Ou un truc du genre formule de sorcier maléfique, quoi. J’ai jeté un œil alentour pour vérifier qu’il n’y avait personne. Personne. Alors comment le saurait-il, le vieux, si j’entrais ? Parce qu’il était sorcier. Oui. Bon…

 

Quelque chose – la mauvaise conscience ? – m’empêchait d’entrer malgré tout. J’ai dû rester pas loin d’une éternité devant cette porte entrouverte et d’un coup, je sais pas… j’ai flippé. Toutes les conneries que j’avais imaginées, là… alors je me suis précipitée dans la maison et j’ai sorti les clés de ma poche pour m’enfermer à l’intérieur. C’est là que je l’ai vue. Bêtement sur le trousseau que m’avait filé le vieux. Une belle grosse clé bien rouillée, exactement comme celle que j’espérais trouver. Alors j’ai pris mon courage à deux mains et je suis retournée devant la porte. J’ai essayé la clé et c’était bien la bonne. J’ai fermé cette foutue porte à double tour sur son putain de mystère et je suis retournée quant à moi m’enfermer dans la maison. A compter de ce jour je me suis mise à entendre des bruits étranges en provenance de la porte… Je n’y ai pas tenu : foutues pour foutues, j’ai passé la fin de mes vacances chez moi à me gaver d’antidépresseurs. Cette histoire m’avait rendue dingue.

 

A la fin de l’été, je suis juste retournée rendre ses clés au vieux, mais j’ai même pas voulu approcher de la maison. Quand il m’a demandé, avec un sourire en coin et un clin d’œil complice, si j’avais mis longtemps à l’ouvrir, la porte, j’ai juste fait « hin hin » et je me suis barrée loin de lui, de son trou et de cette histoire à la con qui n’en était même pas une.

 

 

 

Quand, quelques mois plus tard, on a retrouvé derrière cette porte les restes de mes amis et du buffet qu’ils avaient préparé pour me faire une surprise pour mon anniversaire, je me suis sentie con.

24 octobre 2009

à vau-l'origami (Poupoune)

à vau-l'origami

-          Chéri, t’as pas vu mon origami ?

-          Ton organigramme ?

-          Mon origami !

-          Hein ?

-          Mon bateau en papier…

-          Ah ! ben fallait l’dire…

-          Ça s’appelle un origami.

-          Quoi donc ?

-          Laisse tomber ! Tu l’as vu ?

-          Qui ?

-          Chéri…

-          Oui ?

-          Tu l’fais exprès ?

-         

-         

-          Je comprends rien de c’que tu m’racontes, mamour, là…

-          Je vois ça, ouais. Il est où Kévin ?

-          A la salle de bain.

-          Il se lave ?!

-          Non : il joue dans l’eau avec ton truc en papier, là, tu sais ?


17 octobre 2009

ça sophie comme ça ! (Poupoune)

Sophie la chipie se trouvait fort jolie.

Elle aimait les confiseries et faire des plaisanteries, la petite souris et écouter des poésies. De sa maman elle était la princesse chérie.

 

François le bêta se trouvait trop gras.

 

Il aimait le chocolat et les fraises tagada, la galette des rois et croquer du nougat. De son papa il était le petit bouddha.

 

Sophie la chipie, à l’école et le mercredi, aimait qu’on la trouve trop mimi, qu’on la gâte à l’infini et elle ne disait pas merci.

 

François le bêta, dans la cour et pendant le repas, aimait qu’on ne le voie pas, qu’on ne l’entende pas et que Sophie soit là.

 

Sophie n’aimait pas François, mais François aimait Sophie. Alors François le bêta lui donnait ses langues de chat, ses bonbons qui collent pas et faisait ses devoirs parfois. Sophie la chipie se moquait de lui, disait qu’il faisait pipi au lit et qu’il était bête comme un salsifis.

 

Un jour de crise de foie, à cause d’un gâteau aux noix offert par François, Sophie a vomi son repas de midi et elle s’est salie. Elle fit tout un plat, accusa François, qui soudain pleura et dit dans un cri « depuis tout petit je t’aime ma Sophie ». Sophie le moqua et François rougit.

 

La maîtresse gronda et elle expliqua qu’on ne moque pas les plus gros que soi. Sophie n’a rien dit, a été punie et elle a souri d’un sourire gentil. François le bêta s’est dit « cette fois elle m’aime je le vois ! ». Il lui proposa une sucette au choix et elle lui dit « tu es trop gentil ».

 

Puis elle raconta par-ci et par-là qu’il faisait caca la nuit dans ses draps.

3 octobre 2009

Mon amoureux (Poupoune)

La légèreté de ton pas, à celui du diplodocus pareil, m’arrache immanquablement à mes songes quand, enfin, au milieu de la nuit, tu vas te brosser les dents. Le bruit de ton urine directement dans le fond de la cuvette, que j’entends par la porte que tu laisses soigneusement ouverte - ce même bruit qui te fait dire « tu vois bien qu’c’est pas moi qu’en mets partout ! je vise direct au fond ! » - m’agace toujours au plus haut point. La porte de la chambre que tu n’as toujours pas réussi à fermer sans la faire claquer ne manque pas de me faire sursauter. Et pour finir cette façon que tu as, invariablement, de toussoter, te racler la gorge et te moucher sitôt que tu t’allonges près de moi achève de me tirer du sommeil dans lequel il m’est pourtant toujours tellement difficile de plonger.

Mais si tu pouvais seulement imaginer comme j’aime entendre ton souffle qui ralentit pour devenir ronflement… parce quand je l’entends, amour, ça veut dire que tu es là, tout près de moi, apaisé, enfin.

26 septembre 2009

Objets inanimés avez-vous donc une âme-sœur ? (Poupoune)

Assez paradoxalement, je ne me suis jamais senti plus utile que depuis que je suis ici, sur cette étagère poussiéreuse dans l’obscurité d’une cave humide.

 

Il faut dire qu’avant d’être arraché à mon milieu naturel et entreposé ainsi, j’étais affreusement seul. J’évoluais dans un environnement froid et sans surprise. Si la possibilité m’en avait été donnée, je n’aurais ressenti que douleur, regrets, remords et frustration. Mais même ça m’était interdit. J’étais ignoré, étouffé, relégué à un rôle très secondaire et purement mécanique.

 

Mais avec elle tout a changé. Avant même qu’elle ne s’empare enfin de moi, je sentais bien déjà qu’elle cherchait à toutes forces à me donner l’âme qu’il m’avait volée, la beauté qu’il m’interdisait, la place qui me revenait. Elle s’est confiée et offerte à moi bien avant de me posséder. C’était insupportable pour moi de ne pouvoir lui témoigner en retour ne serait-ce que ma gratitude, à défaut d’un amour égal au sien. Tout ça à cause de lui, qui restait désespérément incapable de me laisser m’exprimer et de m’entendre.

 

Jusqu’au jour où enfin elle m’a arraché à son emprise. Elle s’est alors occupée de moi avec soin, apaisée de pouvoir m’aimer comme elle l’entendait, sans avoir plus à se trouver confrontée à la froideur et l’incompréhension de mon ancien propriétaire.

 

Pour moi, ce fut une libération. D’autres m’ont rejoint sur cette étagère depuis et chaque nouvel arrivant est l’occasion de ce que j’appelle la cérémonie. Elle est toujours très agitée, troublée, nerveuse quand elle prépare le nouveau en silence. Une fois prêt, elle nous descend tous de l’étagère, qu’elle nettoie soigneusement. Elle lave ensuite un à un nos bocaux et c’est là qu’elle commence à se calmer en nous parlant. Elle se confie à mesure qu’elle nous repose sur nos rayons, propres, brillants et plus beaux de cet amour qu’elle nous donne.

 

Nous lui répondons, elle sait nous entendre et lorsque le dernier a trouvé sa place, elle semble enfin sereine et rassurée.

 

C’est beau une femme qui écoute son cœur. Elle, qui écoute non seulement le sien, mais aussi tous ceux qu’elle conserve précieusement ici, resplendit littéralement.

 

19 septembre 2009

Dura lex, le beurre moins (Poupoune)


 

Dans l’épisode précédent : Melle Aufray, l’intendante, a constaté la disparition troublante d’une plaquette de beurre doux du réfrigérateur de l’internat.

 

Aux cris stridents qu’elle entendit en provenance du dortoir, Mademoiselle Aufray se douta que son affaire de beurre disparu allait passer à la trappe.

Elle fonça vers le lieu où semblait se jouer un drame et découvrit Sœur Yvette, en robe de bure, hurlant et se signant, comme possédée, sous le regard perplexe des jeunes-filles de la chambrée. Réussissant non sans mal à calmer la sœur indignée, elle demanda des explications.

 

- C’est… c’est… balbutia la sœur.

- C’est rien, Mademoiselle…

- Rien ? Rien ? Comment osez-vous... ?

 

Je regardais tour à tour les filles et la sœur, les unes amusées l’autre rouge de colère. La sœur reprit :

 

- Alors dites-nous ce que vous faisiez avec ce beurre !

 

Ainsi donc mon beurre était retrouvé. Au moins un mystère résolu.

 

- C’est pour le vibro, ma sœur…

- Ah !... Seigneur Dieu !

 

La sœur au bord de l’apoplexie, j’intervins :

 

- Euh… Plaît-il ?

- Oui, ben elle a essayé la vase, Line, mais ça irrite, alors on a piqué du beurre.

 

 

 

Cet épisode des « Chroniques de l’internat du Foyer de La Miséricorde » vous a été proposé par Durex, pour faire durer le plaisir.

12 septembre 2009

de la relativité du temps (Poupoune)

Après des années d’heures trop longues et de temps qui s’étire, les minutes et les secondes semblent maintenant me filer entre les doigts.

Une heure.

Rien qu’une heure pour savourer ce repas que j’ai mis tellement de temps à choisir ; j’ai envie de laisser chaque bouchée fondre sans mâcher et imprégner mes papilles de ses parfums délicats, mais j’ai peur de ne pas avoir le temps de finir mon assiette si je m’en délecte trop lentement.

Une heure.

Je devrais sans doute m’attarder sur des considérations plus… profondes ? intelligentes ? symboliques ? Mais mon esprit tout entier est concentré sur l’explosion de saveurs dans ma bouche.

Et pour ce que ça changerait…

Ne pas gâcher ma dernière gorgée de vin à me perdre en réflexions fumeuses. Il est trop tard. Juste le temps de boire mon café avant d’y aller.

A quelques kilomètres près, j’aurais été jugé au Nouveau-Mexique et non au Texas.

La vie tient parfois à peu de choses.

 

5 septembre 2009

Sirène (Poupoune)

- Maman, Maman ! Regarde ! Je suis une sirène !

Elle nageait incroyablement bien pour son âge, ma pitchoune… et elle plongeait, tournait, plongeait encore…



- Maman ! Vite ! Les requins attaquent le royaume des sirènes ! Le roi sirin est prisonnier !

Et de retourner au fond du bassin… elle mimait des batailles, chaque enfant ou parent passant près d’elle se transformant en requin.



- Maman ! J’ai libéré le roi sirin ! Il va y avoir une fête dans le royaume des sirènes ! Tu viens avec moi à la fête ?

Ah ben oui, tôt ou tard ma petite sirène veut jouer avec moi. Et puis une fête au royaume des sirènes, hein, ça ne se refuse pas !



- Allez Maman, viens ! Vite ! La fête va commencer !

- Je viens chérie, je viens… va leur dire que j’arrive !

Et elle plonge, et elle tourne, et ses petites jambes dodues croisées en queue de sirène qui m’éclaboussent copieusement alors qu’elle s’en retourne au fond du bassin, prévenir le roi sirin et ses copines sirènes que j’arrive… Au moins comme ça je suis mouillée. Allez. Hop ! Sous l’eau…



Le royaume des sirènes… nous y voilà toutes les deux. Les sirènes virevoltent autour de nous gaiement, le roi sirin a l’air bonhomme, tout ici respire le bonheur, la paix, l’amour… Ma pitchoune tire sa main que je tiens dans la mienne. Je la regarde en souriant. Elle ne sourit pas. Elle semble vouloir me dire quelque chose, mais aucun son ici, que la paix… Avec les bulles qui s’échappent de sa bouche quand elle essaie de parler j’ai du mal à essayer de lire sur ses lèvres.

Elle ne regarde pas le royaume des sirènes. Elle me regarde moi. Elle tire encore sa main dans la mienne. Elle ouvre de grands yeux.

Le roi sirin me dit que pour remercier ma pitchoune de les avoir libérés des requins, il veut l’inviter à vivre en son royaume.

Je la regarde, heureuse de ce bonheur qui s’offre à elle. Elle ne semble pas avoir entendu le roi. Elle continue de me regarder moi. De me parler. Il y a moins de bulles qui s’échappent de sa bouche, je crois deviner « Arrête, Maman ».

Arrêter quoi, chérie ? Regarde un peu ce merveilleux endroit où tu vas pouvoir vivre ! Ce calme, cette paix… Elle ne tire plus sa main. Elle me regarde toujours, mais ne parle plus. Elle semble gagnée enfin elle aussi par la paix du lieu.



Au procès, ils n’ont pas cru que j’étais folle. Eh ! Bien sûr que je ne suis pas folle ! Quelle mère aimante et saine d’esprit aurait refusé à sa fille chérie la possibilité de vivre la vie dont toutes les petites filles rêvent ?

28 juillet 2009

C’te blague ! (Poupoune)

C’te blague !

-          C’est l’histoire d’un mec…

-          Ta gueule !

-          Ben attends, j’ai à peine commencé !

-          On la connaît ta putain d’blague !

-          Tu sais même pas laquelle c’est !

-          Tu racontes la même tous les jours…

-          Ouais, mais hier il était pas là, Dédé, il la connaît p’t’êt’ pas, lui.

-          Bien sûr qu’il était là, hier, Dédé, où tu voulais qu’y soit, sinon ?!

-          Il était là hier ? T’étais là hier, Dédé ?

-         

-         

-         

-          Ben y dort, on dirait. Quelle heure c’est ?

-          L’heure de l’apéro. Allez, à la tienne.

-          A la tienne… Et donc, le mec, y…

-          Ah non, merde ! Arrête, j’t’ai dit ! J’veux plus l’entendre ta blague pourrie ! Elle est même  pas drôle !

-          Ah là t’es vache ! Elle est vachement marrante… Moi la première fois j’ai tellement ri qu’j’me suis pissé d’ssus !

-          Tu t’pisses toujours dessus, Georges, et ça a rien à voir avec les blagues…

-         

-         

-         

-          Allez, fais pas la gueule… Tiens, bois un coup.

-         

-          Allez, bois, j’te dis, ça t’f’ra du bien.

-          Pourquoi tu m’laisses pas la raconter, ma blague ?

-          Oh merde, Georges, tu vas pas nous faire un fromage pour une connerie pareille ?

-          Ben c’est toi qui fais un fromage ! C’est qu’une p’tite blague, pas un discours de deux plombes… j’vois pas c’que ça fait que j’la raconte.

-          Ça fait qu’ça m’pète les couilles de t’entendre la rabâcher tous les jours ! J’en peux plus… tu comprends pas ça ?

-          Non…

-          Putain, Georges, t’es lourd…

-          Mais enfin merde, qu’est-ce ça fait si j’prends cinq minutes pour la raconter ?

-          Ça fait chier, Georges, ça fait chier…

-         

-          Si au moins tu connaissais la chute…

-         

-         

-          C’est l’histoire d’un mec, …

Echauffourée à la cour des miracles.

Deux SDF ont été retrouvés cette nuit, hilares, l’un baignant dans son sang et son urine, l’autre armé d’un tesson de bouteille. Il a été interrompu alors qu’il gravait sur le front de son acolyte ces mots mystérieux : « c’est l’histo ». Il n’a pas précisé ce qu’il comptait écrire. Un troisième homme, présent sur les lieux au moment des faits, semble n’avoir rien vu et rien entendu de la scène sanglante et n’a pas été capable d’aider la police. Aucun n’ayant porté plainte, les trois hommes ont été relâchés après une nuit en cellule dégrisement.

14 juillet 2009

Suite 69 (Poupoune)

Ah ! ce petit je…

Où vois-tu tes doigts 

quand tu rêves de moi 

embrasant nos sens 

en toute innocence ? 

 

Où vois-tu tes lèvres 

quand bientôt la fièvre 

réchauffe mon sein 

même d'aussi loin ? 

 

A ce petit jeu 

mon bel amoureux 

nous brûlons tous deux 

d'un drôle de feu 

 

A ce petit jeu 

mon fol amoureux 

nous nous perdrons mieux 

les yeux dans les yeux 

12 juillet 2009

ma vie (Poupoune)

Tes yeux

 

tes yeux au fond des miens qui sont cette promesse

que tu n’as nul besoin de dire pour que je laisse

mon regard et ma vie se perdre dans les tiens

mes rêves mes envies s’offrir à tes deux mains

 

Ta voix

 

ta voix douce à mon âme qui berce mes attentes

sa musique a le charme de ces amours ardentes

qui tant m’ont fait rêver qui aujourd’hui m’enflamment

tes mots sont le secret de mon cœur qui désarme

 

Tes lèvres

 

tes lèvres sur les miennes quand nos souffles s’unissent

nos lippes enfin reines de divines délices

en ce baiser ultime c’est ma vie dans la tienne

à dessein je m’abîme dans l’étreinte sereine

 

Ta peau

 

ta peau a la chaleur de mon rêve amoureux

sous ma main qui l’effleure quand tu reposes heureux

sur mon sein palpitant de récentes ardeurs

où s’arrête le temps pour nous à la bonne heure

6 juillet 2009

La clé déchante (Poupoune)

On pataugeait depuis un moment dans cette enquête. Trois cadavres. Trois jeunes femmes salement massacrées, un même mode opératoire, pas le moindre petit bout d'indice. Pour la plupart d'entre nous, c'était notre premier tueur en série et on craignait de voir débarquer les profileurs et autres criminologues spécialistes de ci ou ça si on trouvait pas vite fait quelque chose... Les gars commençaient à se décourager quand on a reçu l'appel du légiste.

La victime numéro 3 avait une clé dans l'estomac. Tout laissait supposer qu'elle l'avait avalée volontairement... pour nous laisser un indice ? Probable... De toute façon on n'avait rien de mieux à se mettre sous la dent, alors on a planché là-dessus... Une clé. Qu'avait-elle bien pu vouloir nous dire ?

- Peut-être que le tueur est nain ?
- Tu peux développer, Momo ?
- Ben... je sais pas, j'me disais... clé, gardien des clés, passe-partout, nain... Une idée comme ça, quoi...
- OK... quelqu'un d'autre ?
- Le tueur serait musicien...? proposa Michel.
- Hm... parce que...?
- Euh... ben... clé de sol, clé de fa, tout ça...
- Ah. C'est Momo qui te l'a soufflée celle-là ? Bon, sérieux les gars, qu'est-ce qu'elle aurait pu vouloir nous dire avec cette clé ?
- Un lutteur ! Clé de bras...
- Arrête Momo ! Allez, merde...
- Un serrurier ?
- ...
- Non ?
- Ben si. Tu vois Momo quand tu veux !

On tenait enfin quelque chose. On a monopolisé toute la brigade pour éplucher les casiers de tous les serruriers de la ville. Incroyable le nombre d'anciens cambrioleurs à qui on confie nos clés, d'ailleurs... Bref. Tous ceux qu'avaient un passé louche, on les a serrés pour une raison ou une autre. N'importe quoi du moment qu'on pouvait les avoir sous la main, les cuisiner et surtout les empêcher de nuire... Bon, y a bien eu un ou deux dérapages et quelques arrestations largement abusives, mais c'était pour la bonne cause. Les gars étaient remontés à bloc, notre serrurier sanguinaire allait pas nous échapper... Et puis y a eu cette fuite et la presse l'a surnommé le tueur en serrure...

C'est ce jour-là que les gars de la scientifique ont fini leurs analyses et nous ont confié la fameuse clé...

- Patron ?
- Momo ?
- Finalement je suis pas sûr pour cette histoire de serrurier...
- Mais si Momo, c'était une bonne idée !
- Oui mais bon... 'fin... Regardez.
- C'est quoi ça ?
- La clé.
- Tu veux dire LA clé ?
- Oui.
- Une clé de douze ?
- Hm...
- Et merde...

25 juin 2009

Le coût de la panne (Poupoune)

Lors d'une panne de courant ma mère, enceinte de sept mois, a chu dans les escaliers et a dévalé cul par-dessus tête soixante-douze marches et deux paliers. Après que trois chirurgiens et six infirmières se sont acharnés sur elles pendant treize heures, j'ai été sauvé mais elle non.

J'ai été placé en couveuse et sous respirateur, lequel a cessé de fonctionner pendant trente-sept minutes en raison d'une nouvelle panne de courant au terme de laquelle les médecins ont déclaré qu'ils ne seraient pas étonnés que j'en garde quelques séquelles.

Mon père, qui m'en a toujours un peu voulu pour le décès de ma mère, m'a néanmoins élevé quasiment de la même façon que mes cinq frères et soeurs, même si j'ai vite remarqué que j'étais de corvée de vaisselle cent-quatre-vingt-trois jours sur trois-cent-soixante-cinq alors que, si on compte bien, ç'aurait dû être beaucoup moins vu qu'on était six.

Un jour que, pour la huitième fois consécutive, c'était mon tour de débarrasser la table, j'ai été surpris par une coupure de courant alors que je m'acheminais, chargé d'une haute pile de quatorze assiettes, vers la cuisine. Le pied d'un de mes frères, à moins que ce ne fût celui de mon père, s'est malencontreusement glissé devant les miens, provoquant ma chute ainsi que celle de mes assiettes sales. Jouant de malchance, il a fallu que je les fasse tomber sur les douze verres posés sur la table et rien ne fut sauvé dans l'accident. Pas même mon oeil gauche.

J'avais espéré que cette nouvelle tare me vaudrait au moins un nouveau sobriquet, mais non. Toute la famille continua de m'appeler « tête d'ampoule » alors que, outre les circonstances amusantes dans lesquelles j'avais perdu une partie de mes facultés mentales, ce surnom me rappelait aussi douloureusement le décès de ma mère.

En revanche, l'incident me valut une nouvelle punition et je fus expédié en pension, à quatre-cent-cinquante kilomètres de la maison. Là, je suis vite devenu la tête de turc des cent-vingt-neuf autres pensionnaires, mais au moins ont-ils eu le bon sens de me surnommer « oeil de lynx ».

J'étais plutôt bien intégré, jusqu'au fameux jour de la boum. J'étais secrètement amoureux de la belle Margot, dont je m'amusais à compter les taches de rousseur en classe et, rien que sur le visage, elle en avait quatre-vingt-onze. A la boum, les copains m'ont dit qu'elle était d'accord pour que je l'embrasse alors, prenant mon courage à deux mains, je me suis dirigé vers elle, quand une panne de courant nous a plongés dans le noir. J'ai voulu profiter de l'obscurité pour mener à bien mon entreprise malgré ma gêne et mon embarras, mais, quand la lumière est revenue, je fus surpris tâtant les miches replètes de Madame Mongerin et je préfère ne pas évoquer l'endroit où ma langue s'agitait en quête d'un baiser de la jolie Margot.

On me surnomma alors « déviant sexuel juvénile » et je fus expédié dans un établissement spécialisé où, au terme de neuf séances avec un docteur, il fut décidé que je resterais enfermé pendant trente-six mois. Au cours du trente-quatrième survint une panne de courant pendant laquelle je voulus aider en brûlant quelques allumettes. Un mauvais courant d'air entraîna l'accident bête et l'ensemble du bâtiment brûla, ainsi qu'une poignée de pensionnaires et médecins, au nombre de vingt-trois. Il fut alors décidé que mon séjour serait prolongé jusqu'à ma majorité.

Il devait également m'être administré un nouveau traitement à base de chocs électriques dans mon cerveau, mais de nombreuses coupures de courant ont mis à mal cette tentative et pour finir je n'en ai bénéficié que seize fois au lieu des quarante-huit prévues initialement et je fus relâché, plus par dépit, je crois, que par bon sens.

A peine dehors je décidai de me prendre en main pour réussir ma vie et j'allai voir le travailleur social qui devait m'aider. Il m'offrit une boisson au distributeur et, alors qu'il attendait la sienne, une panne de courant stoppa net la machine. Désireux de bien faire j'essayai de lui obtenir néanmoins sa boisson et, alors que j'avais une main dans la machine et l'autre en appui sur son bras, le courant fut rétabli et je fus traversé d'une décharge qui ne me fit ni chaud ni froid mais le tua, lui, sur le coup.

J'ai été arrêté et jeté en prison. Mon procès dura vingt-deux jours au terme desquels je fus reconnu coupable à l'unanimité des douze jurés et condamné à mort. Le jour de mon exécution, alors que j'étais ficelé à la chaise électrique, une panne de courant me sauva la vie et j'obtins une grâce exceptionnelle.

Ce jour-là, j'ai décidé de mettre à profit la chance qui m'était donnée et d'apprendre le métier d'électricien.

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