Participation de TOKYO
le rayon vert du laser de la discothèque éclaire le visage noir de l’homme qui danse depuis un moment tout près de moi les yeux fermés, je me dis qu’il est temps –qu’il est temps de parler, quitte à prendre le risque de mettre fin à la magie silencieuse de nos corps qui depuis un moment se parlent sans paroles dans ce vacarme assourdissant
Comme si depuis toujours on se connaissait–
Et s’il ne parlait pas français ?
Et si le son de sa voix était strident – ou inaudible, dans le brouhaha de la musique et des cris...
Dans ce trou noir cosmique façonné par la main des hommes, je scrute ce visage
Mélancolique aux yeux toujours clos qui jure avec la vitalité joyeuse de son corps piloté
par la volonté impérieuse de la musique –
Il ouvre les yeux, je prends mon courage à deux mains –
Il sourit – je m’’élance.
– Comment tu t’appelles ?
– Issa.
– Isa !?
Il s’approche de moi , toujours en dansant au son de la musique, parle plus fort.
– Non, Issa, et toi ?
– Moi c’est Isabelle ! Mes amis m’appellent Isa... J’ai cru qu’on avait le même
nom ! Issa... Tu viens souvent ici ?
– Ça m’arrive...
Il a une belle voix douce – la tristesse des vieilles âmes dans le regard – et ne semble pas
gêné par la situation, ni en demande ni en refus du lien qui semble se nouer –
Ou peut-être n’y a-t-il aucun lien – peut-être ne suis-je pour lui qu’une petite blanche de
plus en mal d’exotisme comme la plupart des bourgeois branchés qui s’aventurent dans
cette sombre discothèque de banlieue pour s’encanailler à peu de frais le samedi soir dans
le seul lieu de la capitale où les noirs ne sont pas accueillis par l’éternel Je crois que ça
va pas être possible...
Dans les ténèbres de ce non-lieu sans contours je cherche des yeux une amie .
C’est qui se zigoto demande ma mére ?
ISSA.
ce sapeur congolais en pattes d’eph et coupe afro à cote de toi c’est ton futur époux ?