Oh la vache ! (Yvanne)
Oh la vache !
Je vous ai parlé il y a quelque temps de l'ouverture d'une maison de retraite pour éléphants en Limousin. Ce qui étonne quand même un peu quand on sait qu'en matière d'animaux, il y a ici plus de bêtes à cornes que de bêtes à trompe. Revenons donc aujourd'hui à nos moutons ou plutôt à nos vaches. Parce que, c'est bien connu, nous sommes un pays d'élevage bovin et nos limousines (les vaches) sont réputées pour leur viande mais très peu pour leur lait (on ne sait pas ce que l'on perd ! Ce lait est peut être peu abondant mais tellement délicieux.)
Quoi qu'il en soit, figurez-vous que dans un village creusois les habitants, à la suite d'un repas festif, ont eu l'idée peu banale d'acheter une vache en commun. Mais pas n'importe quelle vache. Bien sûr, il y en a dans ce hameau . Mais pas des vaches à lait. Et non, ils n'ont pas choisi une bête rouge originaire de la région puisque, justement, ils voulaient avoir du lait. Beaucoup de lait. Ils ont opté pour une demoiselle de 3 ans de race normande de Jersey. Oasis – c'est son nom – a pour mission, outre de donner généreusement du lait, d' établir un lien entre les gens de la localité. Et c'est une réussite. Je ne vais pas faire ici l'éloge d'une payse. Tant pis mais c'est pour la bonne cause.
Oasis n'a pas eu de souci d'intégration. Elle broute tranquillement et même un peu de neige ne la rebute pas. Elle est belle dans sa robe fauve, sa tête fardée de noir. Elle est docile, caressante, se laissant traire sans bouger, sans mettre son pied...Mais je m'égare. Enfin, Oasis est une perle et fait la joie des petits et des grands. Elle fournit allégrement 15 litres de lait riche en protéines par jour et les amis se relaient matin et soir pour la récolte qui se transforme en fromages frais ou secs, beurre, crème onctueuse et savoureuse et yaourts. Il paraît même que tous les enfants ne veulent plus que des « laitages Oasis ».
Les coutumes changent avec les néo-ruraux qui s'installent de plus en plus dans les campagnes, surtout depuis la crise sanitaire que l'on connaît. Ils conservent souvent leur mode de vie urbain, s'intègrent peu, l'entre-soi restant la règle. Ils ne communiquent pratiquement pas avec les « autochtones ». Chacun reste dans son pré carré et l'on s'ignore. Pourtant, en Creuse cela n'a pas été le cas puisque des Parisiens, propriétaires de résidences secondaires ont mis la main au porte-monnaie pour aider à acquérir la petite vache. Ils peuvent se targuer de posséder « un bout de vache » quelque part dans la campagne limousine.
L'initiative des creusois mérite que l'on en parle. Elle induit un impact réel sur la vie de ce village puisque des liens d'amitié se sont crées à partir de cet achat partagé. Chacun bichonne « sa »vache. Elle est le pôle d'attraction et on parle même de la faire participer à tous les événements à venir. Mais le plus précieux, dans ces coins reculés de la campagne c'est la renaissance de la notion d'entraide qui s'est effritée ces dernières décennies. Mais oui, « le bonheur est dans le pré » et aussi dans l'assiette en Creuse grâce à Oasis.