Quand faut y aller... (Walrus)
Le matin, on nous avait embarqués dans nos GMC, ces camions américains dont on prétendait qu'il était interdit de les laver parce que c'était la boue qui les tenait ensemble (on racontait même que certains avaient fait le débarquement; il est vrai que nous portions sur le bras gauche l'insigne de la brigade Piron).
Nous avons quitté Spich pour nous rendre à Ossendorf, de l'autre côté de Cologne, pour participer à un défilé ou une parade ou une prise d'armes, bref, un machin où il nous fallait marcher au pas en groupe bien structuré etc...
Le RSM (Regiment Sergent Major) que nous appelions l'adjupette (bien qu'il ne portât pas de kilt) nous avait bien fait la leçon sur comment régler nos pas sur la musique : "Boum, c'est gauche !"
Par "Boum !" il entendait le temps fort de la marche jouée par la musique militaire, en l'occurrence "Le régiment de Sambre et Meuse". Ça nous faisait une belle jambe, surtout à Sterpin, un grand dégingandé qui avait bien du mal à distinguer son pied droit de son pied gauche.
Sambre et Meuse, c'était un des départements de nos régions au temps où nous étions Français, approximativement celui de l'actuelle Province de Namur.
Nous avons donc défilé au son de cette marche, célèbre s'il en est. Par bonheur, contrairement à vous, nous avons échappé aux paroles.
Tout ça démarrait sur un vigoureux "En avant, marche !" lancé par l'adjuchose en synchronisation avec la musique (synchro pour lui, nous, ça nous a pris un certain temps pour trouver le bon "Boum !").
À l'époque nous n'avions encore dans nos rangs en dehors des Belges de souche que des descendants d'Italiens, d'Espagnols, de Turcs et de Polonais.
Aujourd'hui, vu le pourcentage des gens d'origine maghrébine dans la population, il crierait peut-être "Yallah, marche !", mais on ne peut pas savoir, y a plus de service militaire...