Anamnèse (Ilonat)
Anamnèse ?
Il aimait bien ce mot ce mot mystérieux
Cet effort de mémoire pour essayer de concevoir
Comment il en était arrivé là dans ce trou noir
Sans espoir d’en sortir puisqu’il était devenu vieux
« C’est bien la pire peine de ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine mon cœur a tant de peine »
Une autre résonance qui l’habitait parfois
Sans qu’il en partageât la juvénile antienne
« Mon mal vient de plus loin » se disait il aussi
Bien sûr, l’âge venant l’on n’a plus d’énergie
Tout devient difficile et tout devient plus gris
On voudrait bien savoir pourquoi l’on reste en vie
Et ce matin encore se regardant dans le miroir
Il a pris vraiment peur de ce triste regard
Où se lisait sa honte d’en être arrivé là
A vouloir en finir, ne plus aller plus bas
« Finir ce peu de soupe » disait souvent son père
Lorsqu’il n’en pouvait plus avec tous ces tracas
Nourrir cette famille affronter la misère
Ces jours sans horizon qui n’en finissent pas
« Mon mal vient de plus loin » se disait-il encore
En pensant à sa mère à son regard chagrin
Après qu’elle ait vécu ces tragédies sans fin
Ces drames quotidiens malgré tous ses efforts
Il aurait pu parler aussi de ce frère jumeau
Parti sans qu’il lui dise à quel point il l’aimait
Lui demander pardon de l’avoir humilié
Quand ce souvenir là pèse comme un fardeau
Il lui aurait encore fallu chercher plus loin
Dans le fouillis obscur de sa mémoire
D’autres défaites et d’autres ombres qu’il ne voulait pas voir
Mais dont il ressentait le poids chaque matin
Il en venait à se haïr de sa désespérance
Lui qui avait vécu tant de vies insouciantes
Connu quelques instants de grâce souriante
Pour se retrouver seul devant cette béance
Tout cela lui pesait cette réminiscence
De ceux qui n’étaient plus mais qui vivaient en lui
Qui lui parlaient encore dans ce profond silence
Cette présence absence d’hier et d’aujourd’hui
Il lui faudra pourtant sortir de cette impasse
Retrouver quelque espoir quelque envie d’entreprendre
Ou bien en terminer sans même quelques traces
Tirer un trait ! Adieu ! Quand il faudra se rendre.
« Coucou papa c’est moi »
C’est le message que j’ai reçu hier au soir de ma fille adoptive, la petite Nini que j’ai laissée là bas à l’Ile aux Nattes.
Allons, il faut sortir de ce brouillard….écrire peut être d’autres choses, plus apaisées