Herman Hesse, (maryline18)
Je ne me lassais pas de t'écouter.
Je refaisais la visite pour la troisième fois. Ton beau regard calme et un rien amusé avait soutenu le mien à plusieurs reprises. Ta voix, posée et claire comme les chutes d'eau de Triberg, me devenait peu à peu familière. Je me laissais bercer par la mélodie de tes phrases. Je n'en saisissais plus le sens, puisque la visite que tu commençais alors, s'adressait, cette fois, aux Allemands.
Une force tranquille se dégageait de tes gestes et postures. Je te suivais dans les vastes pièces du château de Holenzollern. Tes yeux d'un beu si pur, semblaient contenir le Danube. Comme lui tu aurais pu m'emmener tranquillement visiter ces pays aux beautés insoupçonnées tels que l'Autriche, la Slovaquie, la Hongrie...la Modavie, l'Ukraine.
En quittant le château, tu m'avais embarquée dans une balade romantique sur le lac de Titisee...
Je te voulais et toi tu prononçais des mots comme : Wisigoths, et Ostrogoths. Ces mots étaient plaisants à entendre dans ta langue. La Forêt Noire et les peuples qui y vivaient jadis, semblaient passionner les touristes. Je me surprennais à être jalouse des sourires que tu adressais à ces jeunes femmes qui te comprenaient.
Perchée au sommet de la passerelle de bois en colimaçon, je regarde cette forêt de hêtres, d'épicéas, de sapins et l'envie me saisit brutalement de sauter pour m'écraser vingt mètres plus bas, pour tout effacer... Mon plus beau souvenir d'Allemagne, ce n'est pas le coucou sculpté à la main de Triberg, non, mais c'est le goût du Pinot noir, si parfumé sur tes lèvres si douces, qui est à jamais gravé dans ma mémoire.
Je me souviens de la photo pour laquelle tu avais pris la pause devant les maisons de style médiéval à colombages...
Je ferme les yeux, je titube, j'ai mal, j'ai froid, mes oreilles sifflent.
Comme ton homonyme, tu étais "l'homme qui voulait changer le monde"...Tu avais de grands projets, mais je n'en faisais pas partie.
Je prends place sur le toboggan et je me laisse glisser, comme ce jour où nous avions partagé une énorme part de forêt noire au café Schaefer.
Tu me manques...
Encore une halte à Baden-Baden et mon pélerinage arrivera à sa fin. Si seulement sa fontaine avait pu me rajeunir, tu serais peut-être à mes côtés...