Participation de JAK
Notre maison était nichée sur les hauteurs d’un mamelon. L’école située juste en bas de la côte.
Pour éviter un détour -risqué pour nos âmes tendres-, chaque matin, nous empruntions avec ma sœur un escalier qui traversait le jardin pentu, il accédait par une porte dérobée directement face à notre école.
Ce jardin, tout en degrés, était bordé d’un mur vieillot à l’apparence détériorée, qui intriguait fort l’enfant de 8 ans que j’étais.
Un Tamaris rassurant, qui donnait de l'œil par-dessus, semblait cependant nous souhaiter chaque jour une joyeuse journée d’écolières.
Je ne pouvais pas voir ce qui se passait derrière, mais je m’imaginais un jardin féerique. À coup sûr des fées devaient y régner. Je me représentais parfois, des petits lutins joyeux voulant jouer avec nous.
D’autres jours selon les lectures j’envisageais au dessus de ce jardin enchanté Mary Poppins qui indubitablement allait apparaitre avec son parapluie, flottant et nous faisant coucou
Un jeudi, où nous étions inoccupées, les leçons apprises par cœur, les calculs effectués avec justesse, nous avons décidé d'emprunter l'échelle qui était cachée dans la remise de notre père.
Moi… la plus courageuse, je tenais l'échelle… tandis que ma sœur, sous mon injonction, sans peur ni reproche, tel le chevalier Bayard, s’aventurait sur les barreaux plus ou moins branlants et pas très sûrs.
Soudain un cri de surprise : elle avait découvert Le Paradis de l'autre côté!
Bravant mon courage, devenue alors impatiente de grimper, je la sommais de descendre pour éventer à mon tour ce mystère.
Elle ne voulait pas obtempérer, semblait émerveillée du spectacle, aussi j’impliquais un petit mouvement à l'échelle pour lui ficher la trouille et l'inciter à revenir sur terre prestement.
C'est là ce qu'elle fit, of course, ses mains la guidant pour une descente rapide hors de barreaux.
Elle tomba à mes pieds, mais les siens n'avaient pas résisté et c'est une cheville foulée qui interrompit cette escapade au pays du merveilleux.
Cela lui valut un long mois d’isolation et j ai dû moi aussi patienter. En téméraire velléitaire que j'étais, je n'ai pas tenté de reprendre seule, l'échelle pour la suite de la découverte.
Il a fallu que le vieux mur un jour s'écroule en partie, pour qu'enfin je sache ce qu'il y avait de l'autre côté.
Mis à part le tamaris qui étalait ses grandes branches poudrées de rose je ne vis rien d’extraordinaire. Seulement un jardin aux allées bien alignées remplies de choux, de carottes et de salades et un vieux jardinier qui le dos courbé demeurait pour entretenir son jardin.
En fait de lutin ce vieux maraîcher avait une grande barbe et un bonnet tricolore, et pour Mary Poppins, restait seul un vieux parapluie qui servait d’ombrage au persil
Je fus bien déçue. J’ai alors soupçonné ma sœur d’avoir joué la surprise pour se venger de l’avoir envoyée en éclaireur, mais longtemps j'ai gardé le remords de l’avoir handicapée par ma couardise.
Ce souvenir est très lointain, mais pour les grands échevelés tamaris mon affection perdure.
Et l’affection immensément plus grande, celle pour ma sœur, octogénaire tout comme moi ; malgré la distance nous nous voyons tous les jours, car nous skypons journellement à qui mieux mieux.
Il suffit d'une échelle pour aller voir ce qu'il y a derrière un mur…..