Participation de Fairywen
Le choix
Damon se raidit. La Sylve le prenait totalement au dépourvu. Il recula d’un pas.
— Que veux-tu dire ?
Elle le regarda, railleuse.
— Oh, voyons, Ta Majesté… Mon royaume est cette forêt que tu as malmenée avec tes chasses à outrance et ton mépris des animaux. Je sais que ta condamnation porte sur bien d’autres points, mais celui-là me touche particulièrement. Peut-être n’ai-je pas envie que tu gagnes ta rédemption, même s’il semblerait que tu aies accepté ta punition ?
Le prince déchu hésita. En lui l’ombre le disputait à la lumière. Il était un prince faé, et comme tous les princes faés, son âme était double. L’ombre avait failli avoir raison de lui et le transformer en faé noir. Ce n’était que de justesse que la lumière l’avait emporté. S’il cédait à l’ombre aujourd’hui, il perdrait définitivement son statut et même sa liberté.
Stella ne le quittait pas des yeux, curieuse de voir quel chemin il allait choisir. Elle était prête à l’affronter s’il optait pour l’ombre. De longues minutes s’écoulèrent dans un silence tendu, puis les muscles de Damon se relâchèrent.
— D’accord, tu as gagné. Je t’aiderais.
— Ce n’est pas moi que tu vas aider, c’est le village.
— Le village si tu veux. C’est toi qui décides, non ?
— Toi, tu obéirais ?
— Je n’ai pas trop le choix.
— Mais tu n’aimes pas ça…
— Je suis un prince, je n’ai pas l’habitude d’obéir.
— Un prince qui a perdu son rang…
— Tu sais retourner un couteau dans une plaie, toi…
— Je t’ai dit que je ne te faciliterai pas la tâche. On y va ?
— Et on y va comment ? Au cas où, je te rappelle que la route est coupée.
— On passera par la forêt.
Tout en parlant, Stella nouait les lacets de ses chaussures de marche. Damon ouvrit de grands yeux devant leur couleur rouge vif. Il ne put s’empêcher de la commenter.
— C’est… original, comme teinte.
— Je n’aime pas passer inaperçue.
Ils effectuèrent le trajet en silence. Habitué à circuler en forêt, le faé suivait sa compagne sans le moindre problème. Ils ne tardèrent pas à déboucher à proximité du village… et Damon s’immobilisa, saisi de stupeur.
Devant lui s’étirait une large rue bordée d’immeubles trapus hauts de plusieurs étages.
— Qu’est-ce que… commença-t-il en se tournant vers sa compagne, dont les yeux pétillaient de malice.
— Détends-toi, ce n’est qu’un trompe-l’œil, fit-elle en éclatant de rire. Quand on arrive devant cette fresque selon un certain angle, on croit être dans une grande ville. Et puis tu te déplaces un peu, et tu découvres le village.
— Bien joué.
Tout en parlant, ils contournèrent la peinture et soudain toute envie de plaisanter s’envola.
— C’est pire que ce que je pensais, murmura Stella en promenant un regard navré sur les dégâts provoqués par la tempête.
— On n’a plus qu’à s’y mettre, alors. Toi, tu as un village à remettre sur pied et moi une rédemption à gagner. On forme une drôle d’équipe, mais à la guerre comme à la guerre.
La Sylve le regarda un long moment, songeuse, puis accepta la main qu’il lui tendait.