Vladimir (Célestine)
Vladimir Kostorikov s’exprimait dans un russe très pur. Il vivait seul, ne mangeait que de l’esturgeon et ne détestait pas aller voir, une fois par semaine, les petits rats du Bolchoï agiter leur gambettes sous leur tutus de parme et d’or.
Vladimir Kostorikov n’était pas heureux. Pour autant, il n’était pas malheureux non plus.
Il n’était ni gros, ni maigre. Ni vieux, ni jeune. D’humeur égale, aucune pensée ne l’agitait jamais. D’aussi loin qu’il se souvenait, il n’avait jamais éprouvé aucun de ces sentiments turbides qui étreignent les hommes, comme la jalousie, la cupidité ou l’amour.
Peu à peu, son visage sans expression s’était figé, à force de ne rien exprimer.
Il ne se souvenait même plus avoir eu quelque chose d’humain, il y a très longtemps.