Persistance rétinienne (Célestine)
-Comment cela se manifestait-il en vous ?
-Il fallait me rendre à l’évidence : j’étais constamment éblouie comme la première fois où il m’avait été donné de l’apercevoir
Un soir de juin aux arènes de Nîmes,
Pauvre ver de terre, vous savez bien, amoureux de l’étoile…
-Oui mais là, vous étiez l’étoile quand même !
-Peut-être…mais ma rétine avait été impressionnée au sens propre par son charisme et sa fiévreuse beauté…
-Ah, d’accord ! au sens propre…
-Et partout le monde s’était mis à scintiller comme ces moires des anciens vitraux quand le soleil traverse fugitivement leurs prismes chatoyants.
-Vous voulez dire une sorte de diffraction de la lumière ?
-Exactement. Mes pupilles ne savaient plus voir les choses, j’assistais impuissante à la concaténation des images renvoyées par mon cerveau…Comme si chaque photon devenait à lui seul le monde…
Tenais, j’entrais dans une pièce où il était, au demeurant rien de bien surnaturel…
Eh bien se mettaient soudain à danser autour de moi des milliers de particules lumineuses
Sans que mon esprit ne pût s’en défendre. Les yeux surpris…un peu hagards.
-Une sorte d’hallucination, certainement…
-Mais non…une manifestation de cet étrange phénomène alchimique que l’on nomme … Amour, passion…
-Ah, d'accord! l'amour...Et comment vous êtes-vous aperçue de sa disparition ?
-Un beau matin, le monde m’apparut dans sa plate nudité. Il ne brillait plus.
-Plus de diffraction ?
-Rien que des filaments monocordes au lieu des rutilances polychromes auxquelles j’étais habituée…
Le maelström s’était éteint, j’étais…guérie.
-Triste histoire!
- Non, j’avais frôlé la cécité.
-Ah, d'accord...