Les trois Grâces (Venise)
On aurait dit qu’elles avaient pris la pose de ces comédiennes de Roman photo comme le faisait un temps le cinéma muet.
Mais elles perdirent vite de leurs rigidités gagnèrent en cordialité dés qu’elles me virent dans l’allée.
Ho Venise toi ici !!Nous voulons disputer un match de football dans le parc ce soir
Pourrais-tu arbitrer ?
Nous ne nous sommes pas adonnées à des sports de plein air depuis des décennies.
Notre silhouette en souffre !!
Elles chuchotèrent : »nous allons dilapider nos quatre saisons si nous continuons dans notre sédentarité partout autour de nous on bouge on court « .
A notre tour ce soir !!je ne me donnai pas la peine de rectifier pressentant que pour elles j’appartenais au Nouveau Monde. L’une d’elles dit à sa voisine : »je n’ai pas bougé ce bras depuis plus de trois mois » .
Allez Venise lance-nous le ballon !!Elles continuaient à parler tout bas toutes deux de profil et la troisième de dos riant en chœur de ce rire en éclat qu’on doit trouver dans les tombes des jeunes filles. Elles étaient un peu ivres, on le devinait à la façon dont elles inclinaient brusquement la tête en arrière, jetant sur les passants des regards de louves
tout cela ressemblait à un étrange phénomène atmosphérique elles se mirent à se partager le ballon et je vis leurs corps ruisselaient de sueur. La lune s’était endormie au pied de son moulin dont les ailes tournaient avec un bruissement de soie .
Le lendemain le parc avait été entièrement piétiné. je fus la seule à entendre leur soupir.