Les feuilles mortes (EVP)
C’était une faible feuille, si chétive à son début.
D’un vert si pâle et la sève montait si ténue.
Autour d’elle, les autres, au contraire, allaient dru.
Empêchant le soleil, pauvrette, de lui donner son dû.
Son printemps fut fragile, elle faillit même mourir.
Les grandes vernissées, solides, se moquaient à plaisir :
Quand donc vas-tu pousser ? Un peu mieux te verdir ?
Vous m’ôtez le soleil, mais je verrais la neige m’éblouir.
La neige petite idiote ! Onc de notre espèce ne l’a connu !
Le tronc, lui, la connaît, il m’a dit qu’il l’a vu,
Qu’elle était froide et belle comme un amour perdu.
Quel idiot, ne sait-il pas que notre automne illumine son fût !
En octobre, elles chatoyaient de tous les ors de leur beauté,
Tâche grise, puis sépia, brunes, à la fin racornies, sont tombées.
Les rayons de miel caressaient enfin la petite attardée,
Et l’arbre, son ami, gentiment lui donnait sève et santé.
En novembre, elle ne tenait qu’à peine et se recroquevillait,
Contre la bise furieuse et le grésil mauvais.
Un matin, elle sentit une plume de pluie qui la couvrait,
Puis un édredon bien trop lourd au sol la précipitait…
Elle avait réussi, on peut dire youpi, et s’arrêter ici.
Mais elle est morte quand même !
Les histoires à deux sous, c’est bien joli :
Mais à la fin, on crève tout de même !