Le sens de l’orientation (Mamido)
Dans la nature, à pied, je suis nulle et je pourrais me perdre et tout un groupe avec moi.
Mais, mettez-moi une carte routière entre les mains, asseyez moi à côté du chauffeur dans une voiture, et là je me révèle un assez bon copilote, sachant vous trouver les itinéraires les plus courts, les plus rapides ou les plus sympas, en fonction de la demande.
Il faut dire que je pratique cette activité depuis mon plus jeune âge. J’étais malade en voiture et mes parents se sont rendus compte très vite qu’en m’asseyant devant et en m’occupant cela me passait. Aussi, c’est tout naturellement et par la force des choses qu’ils m’ont appris à lire les cartes routières et les panneaux pour donner les directions. Je suis douée pour calculer les meilleurs itinéraires et j’adore ça.
Et puis étudier la carte à la veille de partir, c’est déjà voyager un peu.
Bien sûr, dans mon zèle à vouloir à tout prix trouver l’itinéraire le plus court possible, j’ai quelquefois entrainé mes partenaires de voyage dans de drôles de situations : des petites routes de montagne, sinueuses et étroites, bordées par de profonds ravins au-dessus de gorges vertigineuses, dans des coins perdus et inquiétants, au milieu de nulle-part, qui, au lieu de nous faire gagner du temps, ont dangereusement fait chuter notre moyenne, sans compter qu’elles auraient pu nous faire chuter tout court !
Mais, il faut admettre que le plus souvent mes erreurs nous ont fait traverser des endroits superbes, des paysages d’une beauté sauvage, à couper le souffle, nous donnant, au passage, le sentiment exaltant de la découverte. Si bien qu’après m’avoir maudite, on finissait toujours par me remercier!
Depuis quelques temps déjà, je suis remplacée par la dame du GPS. C’est bien confortable. Je ne suis pas jalouse et, l’âge aidant, plutôt soulagée.
Mais, il arrive que quelquefois, cette mécanique à la voix sensuelle et grave, s’enraye.
Il suffit, par exemple, qu’il y ait des travaux sur l’itinéraire prévu et c’est l’affolement général. Il faut dire que la dame est têtue et obstinée. Elle ne supporte pas du tout que, soudain, vous ne l’écoutiez plus pour suivre la déviation. Elle veut, à tout prix, vous ramener dans ce qu’elle estime être le droit chemin, celui qui justement se trouve être en travaux. Elle vous martèle alors, d’une voix que vous trouvez, subitement, répétitive et désincarnée : « faites demi-tour dès que possible ! », « faites demi-tour dès que possible ! », « faites demi-tour…» Grrr !
Il arrive aussi que des améliorations routières n’aient pas été prises en compte par son programme obsolète. Il faut voir alors sa petite aiguille bleue affolée s’égarer et errer sur des voies inexistantes, alors que celle où vous roulez est tout ce qu’il y a de plus réel.
Enfin, il se produit, quelquefois, des bugs inexplicables. Ainsi, il nous est arrivé, dans la périphérie d’une petite ville de suivre un de ses itinéraires qui, sans cesse, nous ramenait au point de départ. Peu familier des lieux, il nous a fallu trois tours pour nous en rendre compte !
Dans ces cas-là, mon expertise et mon esprit d’initiative sont à nouveau requis. Je reprends la carte en main et trouve l’itinéraire bis qui va nous sortir de l’errance artificielle et obstinée dans laquelle dame GPS s’obstine indéfiniment.
Un conseil : ne faites jamais totalement confiance au GPS, ayez toujours des cartes routières dans la voiture. Et transmettez aux générations futures l’art du copilotage…