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Le défi du samedi
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26 mars 2011

Blancbec et Eurêka (Vegas sur Sarthe)


A force de ruses et de quelques exactions nous avions réussi Lulu et moi à gagner les meilleures places, celles qui touchaient le gros poële de fonte aux braises rougeoyantes et surtout celles qui rendaient illisible l'écriture calligraphiée de madame Blancbec au lointain tableau noir.

Forts de cette excuse et le cul au chaud, nous pouvions alors nous concentrer en toute impunité ou presque sur de passionnants travaux tels que la gravure sur table, la mastication des boulettes de sarbacane et la confection de planeurs en papier buvard.

Aujourd'hui c'était jour de Physique et un dénommé Archimède allait nous offrir une occasion formidable de jouer avec les encriers.
Cet Archimède me parut fort sympathique quand j'appris de la bouche même de Blancbec qu'il était aussi l'inventeur des vices sans fin!

Dans nos petits bidets de porcelaine où l'on n'avait jamais eu que le droit de tremper la plume du gradé - le fameux sergent major - il nous était enfin permis d'en explorer les profondeurs afin de vérifier la fameuse loi inscrite au tableau:
"Tout corps plongé dans un liquide...gna gna gna" la suite étant parfaitement indéchiffrable et c'était tant mieux. 

Blancbec n'eut pas le temps d'en achever l'énoncé que, dans l'abîme violette j'avais déjà ordonné la plongée d'une craie-bathyscaphe baptisée Eurêka pour la circonstance. En pilote confirmé je guidai mon engin vers le fond, bien décidé à vaincre cette force étrange dirigée de bas en haut et surtout pressé d'atteindre le fond avant mes camarades et néanmoins adversaires.
 
Une course s'engagea entre Lulu et moi et comme il semblait mieux maitriser son engin, j'envoyai un savant coup de pied dans son bureau ce qui vida le bidet en un superbe tsunami d'un bleu profond sur sa chemisette blanche...
Débarrassé de ce redoutable concurrent j'allais poursuivre mon exploration quand la main sèche de Blancbec s'abattit sur ma nuque telle un couperet.
Déjà Eurêka s'abimait, m'ôtant toute chance de découvrir l'ivresse des profondeurs d'une mer d'encre.
Lentement je refaisais surface, lourdement lesté d'une sanction exemplaire... deux cent fois!
Alors je plongeai gravement ma plume en un dernier adieu à mon bathyscaphe, diluai l'abîme violette de quelques larmes avant d'entamer la première d'une longue série de lignes:
"Tout corps plongé dans un liquide..."   
Une vocation venait de sombrer.



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Commentaires
S
La "craie-bathyscaphe" ! Cultivé quand même le cancre !<br /> <br /> Joliment écrit et raconté avec un bel entrain (on sent le vécu !!!)
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C
ah l'imagination débordante des enfants (pas sages) ! :-)
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P
euh... : j'aLLais, faire, bien sûr. Et d'ailleurs, finalement, je l'ai fait.
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P
j'ai bien fait de lire les comm' des autres avant : j'avais faire le même que Venise... du Doisneau littéraire. J'adore.
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V
@Lorraine : Bizarrement j'ai fait toute ma carrière dans l'industrie avant de "découvrir ma plume" à 60 ans !
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L
Le galopin que tu fus s'est détourné de la physique? Tant mieux! Il est tombé, au fond de l'encrier, sur un domaine bien plus talentueux: la littérature! Et il nous le prouve à chaque Défi avec un talent diversifié et facétieux!
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T
J'ai connu le poele et les courbes de ma maitresse était parfaitement déchiffrables !
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B
Encore des souvenirs à la lecture de ton texte, Je n'ai pas connu le poële en fonte mais les lignes... oui !!
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J
Ce qui est bien avec les poètes, c'est que lorsque l'enfant paraît le cancre n'est jamais las !
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V
on vient de rencontrer l'équivalent de Doisneau dans le récit d'enfance ; un petit bijoux !!
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3
un beau souvenir faisant sourire... quelques années plus tard... et impossible à nos petits-enfants d'en faire autant ... plus d'encrier blanc...
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M
Epatant ... Toute une atmosphère qui revit en écriture violette !
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W
Une plongée dans les souvenirs d'enfance, merci Vegas !
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B
Non, je n'ai pas connu. Parce que moi, j'étais très sage. SI.<br /> Tu m'as bien fait rire, Végas. Bravo.
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S
Moi oui, je l'ai connu, le coup de la craie et les lignes... On en rigole maintenant, à l'époque, je faisais moins la faraude...
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J
Je reconnais dans ton texte un monde que je n'ai pas connu, Vegas.
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