Adrienne et Victor : à chacun son expertise ! (Adrienne)
En 1835, la Belgique est la première sur le continent européen à avoir une ligne de chemin de fer pour le transport des voyageurs. Elle va de Bruxelles à Malines.
En 1837, Victor Hugo fait la connaissance de nos transports en commun belges et écrit ceci:
Je suis réconcilié avec le chemin de fer ; c’est décidément très beau. Le premier que j’avais vu n’était qu’un ignoble chemin de fabrique. J’ai fait hier la course d’Anvers à Bruxelles et le retour. […]
C’est un mouvement magnifique et qu’il faut avoir senti pour s’en rendre compte. La rapidité est inouïe. Les fleurs du bord du chemin ne sont plus des fleurs, ce sont des taches ou plutôt des raies rouges ou blanches ; plus de points, tout devient raie ; les blés sont de grandes chevelures jaunes, les luzernes sont de longues tresses vertes ; les villes, les clochers et les arbres, dansent et se mêlent follement à l’horizon ; de temps en temps, une ombre, une forme, un spectre debout paraît et disparaît comme l’éclair à côté de la portière ; c’est un garde du chemin qui, selon l’usage, porte militairement les armes au convoi. On se dit dans la voiture : c’est à trois lieues, nous y serons dans dix minutes. Le soir, comme je revenais, la nuit tombait. J'étais dans la première voiture. Le remorqueur flamboyait devant moi avec un bruit terrible, et de grands rayons rouges, qui teignaient les arbres et les collines, tournaient avec les roues. Le convoi qui allait à Bruxelles a rencontré le nôtre. Rien d'effrayant comme ces deux rapidités qui se côtoyaient, et qui, pour les voyageurs, se multipliaient l'une par l'autre; on ne voyait passer ni des wagons, ni des hommes, ni des femmes, on voyait passer des formes blanchâtres ou sombres dans un tourbillon. De ce tourbillon sortaient des cris, des rires, des huées. Il y avait de chaque côté soixante wagons, plus de mille personnes ainsi emportées, les unes au nord, les autres au midi, comme par l'ouragan. (Victor Hugo, Choses vues)
Début 1976, j’ai pris pour la première fois le train. Toute seule. C’était pour aller explorer les villes universitaires avant de décider où j’irais faire mes études. En revenant de Louvain, j’ai vu trop tard que j’étais arrivée à « ma » gare. Je l’ai donc ratée. A l’arrêt suivant, il n’y avait plus de train pour retourner chez moi. Un dernier bus m’a rapprochée d’une douzaine de kilomètres. Les quinze kilomètres suivants, j’ai dû les faire à pied, dans la nuit noire et froide de la fin du mois de janvier.
Cette mésaventure n’a altéré ni mon amour du train, ni mon amour pour Louvain. Mais depuis, j’ai toujours peur de rater « la sortie ». Ce qui fait que maintenant, je sors parfois une gare trop tôt.