Paul est un génie (Val)
Constance et Paul, jeunes mariés toujours pressés, ont l’habitude, en semaine, de faire leur toilette en même temps le matin. La salle de bain est un peu étroite pour eux deux, ils s’y bousculent sans cesse, mais il leur semble qu’ils gagnent de précieuses minutes. Evidement, il y a plus glamour que de voir son partenaire s’épiler les sourcils ou se nettoyer les oreilles, mais après sept années de vie commune on ne prends plus vraiment garde à ces petits détails-là.
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Constance avait froid, ce matin-là. La chaudière était en panne depuis quelques jours, et Paul, malgré des efforts incroyables et toute sa bonne volonté, n’avait pas encore réussi à identifier la panne. Constance lui avait demandé pourquoi il n’avait pas appelé un plombier, mais Paul avait répondu qu’il n’y avait tout bonnement pas songé.
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C’est à ce moment-là que Constance, aigrie par le froid, et tout en se maquillant les yeux devant le miroir, pensa :
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- Ah quelle nouille ! Ah non, mais quel con, ce
mec ! Si seulement j’avais pu épouser un génie…
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Aussitôt, Paul disparut dans un nuage de fumée, et réapparut quelques secondes après, vêtu d’un accoutrement bleu ciel digne d’un personnage de la parade d’Eurodisney. Constance poussa un petit cri de surprise, et son mari lui dit :
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- Ah, ça, ma chérie, c’est pas gentil ! Mais
soit ! Tu es exaucée !
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Incrédule, la bouche grande ouverte, Constance semblait vouloir dire quelque chose mais aucun son ne sortait de sa bouche.
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Paul reprit :
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- Il te reste encore trois vœux : deux gentils,
et un autre moins gentil. Tu as la journée pour y réfléchir, mon amour. Tu peux
m’appeler au bureau comme d’habitude si une idée te vient. Tu sais, même les
génies travaillent, mon ange. Bisous, et à ce soir, mon adorée.
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Paul partit au travail dans son attirail de carnaval, et Constance, après avoir repris ses esprits non sans mal, commença à réfléchir à ses trois vœux.
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Sur le trajet en voiture, elle se dit que c’était le moment ou jamais qu’il exauce son premier vœux. C’était trop bête, ce malentendu. Après tout, qu’il soit un peu plus intelligent, c’était ce qu’elle avait toujours souhaité. Oui, elle avait en effet voulu que son mari devienne un génie, mais d’un autre genre.
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Arrivée au bureau, elle l’appela aussitôt.
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- Chéri, tu sais pour les vœux, j’ai réfléchi…
- Ah ! C’est toi ! Je t’écoute, mon
amour !
- Eh bien, on s’est mal compris, ce matin… Lorsque
j’ai pensé que j’aurais voulu épouser une génie, je ne pensais pas à ce
génie-là…
- Ah ? Et à quoi pensais-tu donc?
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Décidément, pensa-t-elle, il n’avait vraiment aucune jugeote !
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- En fait, ce que j’aurais voulu, c’est plutôt… un
cerveau !
- Que ta volonté soit faite, mon amour ! Mais, tu
sais, tu es bien dure envers toi-même… T’était pas si bête que ça, tu
sais ! Faut pas se dévaloriser ainsi, ma chérie… Allez, tu as fait le plus
dur ! Il te reste maintenant les deux vœux gentils !
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Constance, devenue en quelques secondes très intelligente, comprit immédiatement la méprise, mais il était trop tard. Mince, elle avait encore gâché un vœu, et son mari était toujours aussi bête !
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Elle n’avait pas eu la tête au travail de la journée. Elle n’avait fait que réfléchir à ses deux prochains vœux. Il fallait vraiment qu’elle trouve le moyen d’utiliser ses deux derniers vœux à rendre son époux un peu plus intelligent. Surtout maintenant que ses capacités intellectuelles à elle avaient décuplé. Le soucis était que ce vœux devait être gentil…
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Comme elle était devenue très astucieuse, l’idée ne tarda pas à venir.
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Au soir, elle rentra chez elle et déclara à son époux qu’elle avait trouvé pour son troisième vœux.
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- Mon amour, j’aimerais que tu aies le même cerveau
que moi, afin que l’on se comprenne mieux, toi et moi.
- Oh, ça, c’est gentil, ma chérie !
Exaucée !!
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Effectivement, ils passèrent tous les deux une excellente soirée. Il s’entendirent sur tout, plaisantèrent et firent l’amour furieusement, comme au début de leur relation.
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Grisée par quelques verres de champagne, les bons mots de son époux et l’orgasme qu’elle venait d’avoir, Constance lui susurra amoureusement, au creux de l’oreille :
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- Chéri c’était parfait. Je t’aime encore plus qu’au
premier jour. Mais je t’aimerais encore un tout petit peu plus si tu voulais
bien ne plus porter ce costume ridicule. Il ne sied pas aux hommes aussi
brillants que toi, tu sais. Bonne nuit.
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Et elle s’endormit.
Le lendemain matin, ils prirent ensemble une douche brulante, aussi longue que terriblement érotique. Ils en sortirent un peu engourdis, mais terriblement comblés, et de très bonne humeur.
Paul, qui avait froid en s’essuyant, s’exclama :
- Oh, mince, mon amour ! Sais-tu ce que tu aurais
dû me demander hier ?
- Non ? Quoi ?
- Eh bien de réparer la chaudière ! Cela aurait
été si simple avec les vœux..
- C’est inutile, Paul, maintenant que tu es si
intelligent, tu vas pouvoir le faire, non ?
- Je ne pense pas. Tu oublies que dorénavant, j’ai un
cerveau de femme…