Génie sans frotter (Caro_Carito)
Je viens de refermer la porte de la salle de bain. Habits jetés pêle-mêle. Evier où s’incrustent des trainées de dentifrice rose.
Si je pouvais ne pas les entendre pendant une minute, si leurs cris cessaient.
« Les clés ! Où as-tu rangé les clefs ? Ton cartable ! Quoi tu n’as plus d’effaceur ! Tu vas me rendre fou… »
J’empoigne le shampoing-douche.
Pour une fois, le mitigeur n’est pas complètement déréglé.
Grelotter une seconde avant que la tuyauterie semble se distendre et mugir comme si elle allait éclater. A chaque fois, ce boucan me rappelle l’envol d’un avion de ligne.
Sauf qu’en prenant ma douche, ça me tape sur les nerfs. Je pars pas en vacances, moi ! Je dois me dépêcher pour aller au boulot.
Ici, même se laver à la bonne température est devenu un enfer.
P…. ce savon est vraiment visqueux. Ca m’apprendra à essayer un vague truc bio. Pas de mousse. L’odeur est âcre et en plus, ça ne glisse pas sur la peau.
Je rêve où j’entends des voix ? N’importe quoi. Il faut que je dorme. J’entends même les gamins sous cette douche qui beugle. A croire qu’elle voudrait participer à la star Ac.
Mais si, j’entends bien une voix.
Un truc de ouf ça. On dirait un couinement.
Argh j’espère que c’est pas une souris.
C’est quoi ce truc coincé dans ma bouteille de gel douche ?!
Un génie !...
En tout cas, il est moche et il m’a pas l’air très malin, vu l’endroit où il a débarqué.
Je me doute bien qu’il ne voit rien et qu’il n’entend rien. Quelle andouille ! Et c’est quoi cette histoire de vœux.
Avant, il faut que je le sauve ? Ca pue l’arnaque tout ça. Quoi ! En plus, il y a une gradation dans les vœux ; ça me rappelle une histoire dans le même genre avec vœux et tout le toutim. Le truc finissait en eau de boudin.
Et d’abord qu’est-ce qui me prouve que c’est un génie.
Je l’entends à peine, si cette douche pouvait faire moins de boucan….
Ah pas mal, le coup de la douche.
Et mon autoradio, il ne pourrait pas, le génie embouteillé ?
Si !
Cool…
Ah oui, les deux autres, les trucs au rabais. Ben… J’ai pas le temps. Tu comprends, il faut que je me grouille : les enfants à déposer… Et puis tu sais peut-être pas mais c’est la crise, ça n’a pas dû arriver au pays des génies, cette histoire de conjoncture économique mondiale. Mais les patrons, en ce moment, ça les rend nerveux, cette histoire de conjoncture économique mondiale. Alors les retards j’évite. Mais t’inquiète, dans deux minutes, ma belle-doche rapplique et juste avant, je te délivre. Tu te débrouilleras avec elle.
Si, elle est sympa ? Oui, bien sûr… (Enfin c’est mon mari qui le dit.)
Allez, j’ôte le bouchon plastique, tu te débrouilleras bien pour sortir tout seul.
En attendant, je file. Ce fut un plaisir…