UNE IDEE GENIALE (Martine27)
UNE IDEE GENIALE
Bon ce matin là je m'étais retrouvée, allez savoir pourquoi, à quatre
pattes devant mon meuble de salle de bain en train de faire du tri dans
tout le bazar amoncelé depuis un certain temps, pour ne pas dire un
temps certain. J'étais donc à la bourre lorsque je tombai sur un
bizarre flacon de parfum que je ne me souvenais pas avoir acheté ou
reçu en cadeau.
Bref,
erreur fatale, je le débouchai et alors flooouf un nuage quasi
asphyxiant de parfum se répandit dans la salle de bain, les yeux
larmoyants, je réussis à me traîner dehors et en me retournant je vis,
à ma grande stupéfaction, un truc, une chose, un bidule, enfin quelque
chose qui paraissait humain au dessus de la ceinture et qui ressemblait
à un culbuto en dessous, tranquillement installé sur le rebord de ma
baignoire.
"Bien le bonjour gente dame" me dit le, la, enfin bon l'individu ?
Je réussis à croasser "Z'êt ki ?"
Ce qu'il réussit à traduire par "Qui êtes-vous"
"Votre
génie personnel, Chère, très Chère sauveteuse qui m'avez extirpé de ce
flaçon dans lequel je marinais à mon grand dam depuis fort longtemps"
"Un g'nie" bredouillai-je pas trop rassurée.
"Mais oui, un génie pur jus, prêt à vous servir"
'C'ta dire" je sais mon vocabulaire et mon élocution ne s'arrangeaient pas.
"Je
vais Très Chère petite Madame rester attaché à vos charmants pas
jusqu'à ce que vous ayiez fait 4 voeux, deux gentils, deux moins
gentils".
J'aspirai un grand coup d'air et réussi enfin à reprendre le contrôle de ma voix.
"Comment ça deux gentils et deux moins gentils, je croyais que le tarif syndical c'était trois voeux".
"Les temps changent que voulez-vous. Bien que puis-je pour vous ?"
"Désolée, on verra ça ce soir, parce que là je suis en retard".
Je
pris la poudre d'escampette, grimpai dans ma voiture et manquai
d'emboutir le premier réverbère lorsque discernant du coin de l'oeil un
mouvement à côté de moi, je m'aperçus que le génie était installé près
de moi.
"Je
crains, Chère petite Madame que vous n'ayiez pas bien compris la
situation, je dois rester près de vous jusqu'à l'accomplissement de vos
voeux"
Ahurie, sans piper mot, je repris le contrôle de ma voiture, plus ou moins celui de mes nerfs et mon chemin jusqu'au boulot.
Bien sûr étant plus tard que d'habitude, la circulation était fortement ralentie.
"Et zut " m'exclamai-je fort imprudemment "ils ne pourraient pas être déjà arrivés tout ceux-là ?"
"Mais pas de problème" sussura mon génie.
Et hop, le chemin se retrouva dégagé devant moi.
"Vous
voyez Chère Petite Madame, en voilà déjà un d'accompli, grâce à vous
tous ces braves gens sont déjà arrivés à leur destination, plus que
trois !"
Une idée machiavélique me traversa l'esprit.
"Hem, vous pourriez-vous arranger pour que ma chef reste coincée dans sa salle de bains toute la matinée ?"
J'eus le droit à un sourire rayonnant.
"Pas de problème, la clenche de la porte vient de casser, pas de chance pour elle !"
Eh, mais en fin de compte ce n'était peut-être pas si mal que ça d'avoir un génie dans les pattes.
La
matinée se passa tranquillement, pas d'interférences hiérarchiques ce
qui me permit d'abattre bien plus de travail que prévu. Mais je me
méfiais et tournais 7 fois ma langue dans ma bouche avant de parler, le
génie m'épiant du coin de l'oeil.
Ceci étant, ce n'était pas facile de se concentrer avec ce culbutos dans les parages.
Que souhaiter, pas évident du tout !
Il
me restait un gentil et un moins gentil voeu à formuler. Et franchement
je ne savais pas trop quoi demander. Bon, un peu d'argent à la banque
ne serait pas de trop, mais allez savoir ce que les impôts penseraient
d'un compte qui grossit sans prévenir.
En fin de compte je me décidai.
En
rentrant à la maison, toujours encombrée de mon culbutos génial, je lui
demandai de repeindre tous les murs intérieurs et d'installer un
parcours de santé le long des murs pour Mademoiselle Thalis ma chatoune.
Ce fut fait dans la seconde à mon grand plaisir, et hop un paquet de corvées en moins.
Bon dommage plus qu'un vilain voeu à trouver.
La
soirée se passa, je ne dirai pas tranquillement, il faut dire qu'il
commençait à me chauffer les oreilles ce génie à me regarder avec des
yeux de merlan frit.
"Vous ne pourriez pas me laisser un peu tranquille ?"
"Hélas non, j'attends votre dernier voeu"
"Vous savez que vous êtes un tantinet fatigant ?"
"C'est ce qui fait tout mon charme non ?"
J'allai me coucher remettant au lendemain la formulation du dernier voeu, comme on dit la nuit porte conseil.
Le lendemain matin, mon génie était toujours là solide au poste.
"Pas moyen que vous me laissiez hein ?" demandai-je ?
"Eh non, Chère Petite Madame, eh non !"
"Bon tant pis pour vous alors, voilà mon dernier voeu"
Je le lui murmurai à l'oreille et le vis pâlir avec un plaisir indicible.
Sereine,
je repartis au travail. Je savais que ma chef resterait bloquée toute
la journée dans ses toilettes, encore une clenche en carafe ! Dommage !
Et en rentrant, ma pelouse et mes arbres seraient nickels ainsi que le
ménage fait.
Pour
tout vous dire, j'avais décidé d'enquiquiner un peu mon génie. Mon
dernier voeu pas gentil consistait en 2 voeux gentils supplémentaires
et deux voeux moins gentils en prime !
Le
pauvre était bien marri, parce qu'il n'avait pas trouvé le moyen de
tourner la difficulté et mon voeu qui il faut le reconnaître n'était
pas sympa pour lui puisqu'il le gardait prisonnier au moins un jour de
plus.
Je
pense que je vais continuer encore comme ça quelques temps, quand
toutes mes petites corvées seront terminées et que toutes les clenches
de chez ma chef seront changées, je me ferais un plaisir de lui
souhaiter bon vent avec comme dernière condition pas gentille qu'il
arrête d'embêter les gens !