Président, Directeur et Général (Tiphaine)
- Monsieur le Ju..., Monsieur le ju..., Monsieur le juge, Mesda..., Mesda..., Mesdames et Messe et Messe et Messieurs les ju..., les ju..., les ju..., les ju....
Tout à coup le silence se fait dans la salle, je dois être très très vieux, tout le monde me regarde avec de gros yeux en fronçant les sourcils. Je dois avoir fait quelque chose de très très mal. Je ne sais pas quoi.
Mon avocat ouvre à nouveau la bouche :
- Monsieur Sark..., Monsieur Sark..., Monsieur Sark..., Hum... Mon cli..., mon clicli..., mon clicli..., mon CLIENT est innocent.
Grondement de stupeur dans l’auditoire. Les jurés osent même quelques sifflets. Il me semble que ces gens ont été très mal choisis. Mon avocat a dit que c’étaient des humbles, que c’était bon pour nous, pour mon image, ce type est un incapable, je vais me faire laminer...
Il reprend péniblement et explique que le crime dont je suis accusé n’est pas abominable et qu’il demande mon acquittement. C’est si long. J’entends quelques ricanements, mais qui donc a pu inventer cette loi sur la discrimination positive ?, quelle connerie, un avocat bègue pour MOI, mais quelle connerie...
- Monsieur Sark..., Monsieur Sark..., Monsieur Sark..., mon CLIENT n’est pas un dicta..., dicta..., dictateur. Certes, il s’est peu à peu à peu à peu imposé comme... comme... comme empereur par la force MAIS il n’a pas zob..., zob..., zob..., zobligé qui que ce soit à à à à ...
Ce salopard va me flinguer, il faut que je l’oblige à se taire. Je me lève soudain et je hurle :
- Casse-toi pauvre con !
L’avocat et la cour me fusillent du regard, le juge appelle la garde impériale à son secours, ils veulent me ramener dans ma cellule à coup de Kärcher, je pisse dans mon froc, je crie, je hurle :
- Mère ! Mère ! Ils ne savent pas ce qu’ils font !
.
Dans le lit de ses parents, le petit surdoué est en larmes.
Sa mère le caresse tendrement :
- Ce n’est rien mon petit, c’est juste un vilain cauchemar...
Son père voudrait bien se rendormir :
- Ne t’inquiète pas, fils, plus tard, tu seras PDG comme papa .
L’enfant s’interroge à voix haute :
- Ça veut dire quoi, PDG ?
« Président Directeur Général », répond le père avec une pointe de fierté dans la voix.
Le petit sèche ses larmes d’un geste nerveux et retourne dans sa chambre.
La nuit est calme. Il aligne ses peluches autour de son lit, en rang. Il leur murmure des ordres invisibles, il les déplace ou les renverse en éclatant soudain de rire.
Président, Directeur et Général...
Il s’endort le sourire aux lèvres...