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Le défi du samedi
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13 décembre 2008

Suite de Pandora

Lila a fini ses cours, elle est dans le bureau du directeur. Il lui demande ce qui s’est passé ce matin. Elle se demande où il veut en venir. Il lui demande si elle se sent bien. Elle se demande quel temps il fait à La Baule.

Lila pense à la plage de galets, ceux qui sont si doux quand on les tient en mains. Le directeur pense qu’il en a assez de se coltiner tous les cas de l’académie.

Madame Miel, vous êtes avec moi ?

Lila sursaute, non elle n’était plus là. Elle se demande ce qu’il a bien pu lui raconter. Il se demande comment il va bien pouvoir d’en débarrasser.

Antoine regarde sa montre. Il est déjà 17 heures, la pile de gauche est maintenant beaucoup plus haute que celle de droite, l’objectif est presque atteint. Dans quelques minutes Mademoiselle Corentin viendra le voir pour lui demander s’il a encore besoin d’elle et il la libèrera. Il aime ces soirées où le service se vide et où le calme revient. Plus de téléphone pour l’interrompre en dehors de rares appels directs toujours problématiques. Le calme et la satisfaction d’une journée qui s’est écoulée sans encombre. Sans surprise mais sans encombre. Antoine n’aime pas les surprises.

Lila marche dans la rue, son gros cartable en bandoulière. Elle ne sait pas si les cours y sont encore ou si elle les a laissés sur son bureau. Ca n’a pas vraiment d’importance. Elle rentre doucement chez elle, mais elle ne marche pas sur les traits. Jamais.

Antoine enfile son pardessus et prend quelques dossiers avec lui. Il regarde si son bureau est bien rangé. Si les dossiers forment bien un rectangle parfait et si rien ne dépasse. Si le téléphone est bien à 45° par rapport au sous mains et si le stylo est à sa place. Il éteint la lumière et quitte le service en croisant la femme de ménage qu’il salue au passage. Antoine est toujours courtois avec ceux qu’on appelle le petit personnel. Il salue aussi le planton de garde à l’entrée qui lui propose de lui appeler un taxi mais Antoine préfère marcher.

Lila s’est assise quelques instants sur un banc pour regarder les pigeons qui volent. Et les charmants enfants qui jouent. Ceux-là même qui vont se transformer en horribles monstres quand elle les aura dans sa classe. Elle sort son roman pour en lire quelques pages mais elle est interrompue par quelques gouttes et la nuit qui tombent. Elle range le livre dans son grand cartable et prend le galet qui est au fond pour le tenir dans sa main en rentrant chez elle. Lila n’aime pas la pluie, elle n’aime que les embruns.

Antoine marche et s’arrête au quatrième passage piéton. Il remonte le col de son pardessus tandis que la pluie se fait plus épaisse. Une jeune femme pensive approche, un cartable sous le bras et un béret duquel quelques boucles blondes s’échappent sur la tête. Elle s’engage sur le passage sans regarder autour d’elle alors qu’un camion s’approche à toute allure. Antoine se précipite tandis que le camion les frôle dans un hurlement de freins et de klaxons.

Lila se sent brutalement tirée en arrière et hors de ses pensées dans un concert de décibels. Un homme en pardessus la tient contre lui et la regarde étrangement. Elle a manqué de se faire écraser. Elle ne sait pas quoi faire, c’est la première fois qu’un inconnu lui sauve la vie. Elle décide simplement de le remercier.

Il hésite entre la colère et l’attendrissement. Antoine n’aime pas les perturbations, même quand il se comporte en héros. Il ne sait pas quoi faire avec cette drôle de femme qui le regarde avec en souriant. Antoine n’aime pas perdre le contrôle.

Lila ne pense plus à la mer, ni aux embruns, ni aux galets. Elle caresse Chagall en pensant à cet homme brun en pardessus qui lui a demandé si gentiment comment elle allait. Et qui a insisté pour lui donner sa carte de visite.

Antoine n’arrive pas à se concentrer sur ce que lui racontent Valérie et les enfants. Il ne pense qu’à elle. Lila Miel. Un nom et un prénom qu’il se répète en boucle. Antoine n’aime pas les imprévus qui perturbent sa vie. Mais curieusement il commence à apprécier cette sensation étrange dont il n’a pas l’habitude.

Lila rêve à Antoine, le prénom de l’Homme en pardessus brun. Elle a regardé la carte et elle sait qu’elle l’appellera. Bientôt. Lila sourit en dormant.


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Commentaires
K
Les premiers frissons du sentiment amoureux...très beau.
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C
Miel, c'est la couleur de ton texte; j'aime qu'elle aime les embruns...
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T
Si tu savais comme ça fait du bien de lire cette suite... Tu le sais, forcément. Merci, merci beaucoup !
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P
Merci à tous ;-)
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T
J'aime les histoires qui finissent bien...
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P
Ah! Moi j'aime bien les jolies rencontres prometteuses ;o)
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J
Ca promet! ;)
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J
Belle rencontre, qui reste bien dans le ton donné par Tiphaine. Et chute comme je les aime : que faire ici-bas sinon donner à rire et à sourire ?
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M
"So romantic" !!!!
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J
La structure des phrases dans ce texte est intriguante. Presque chacune est une phrase simple, qui commence par le sujet suivi par le verbe. On peut relire exclusivement les premiers mots du texte pour souligner l'effet (i.e., premier paragraphe : Lila, il, elle, il, elle) ou,pour un autre exemple, 7e paragraphe ( Antoine, Il, Si, Si, Il, Antoine, Il) C'est comme le tic-toc d'une horloge.<br /> <br /> Intention ou coïncidence, la structure qui renforce, inconsciemment, deux vies mécaniques ?
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P
S'habituerait-on à tout, même au bonheur ?<br /> A voir !
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W
Ouais, on est bien avancés maintenant !<br /> La suite ! la suite !
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V
Ce n'est donc que le début de l'histoire, alors...
Répondre
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