-
Lieutenant !
- Oui
qu’est-ce qu’il y
a ?
- Un appel
d’un vigile qui
signale un véhicule abandonné dans le parking souterrain qu’il
surveille.
- Et alors ?
- Ben et
alors il faut aller
contrôler...
- Contrôler
quoi, j’y
comprends que dalle Durand, de quoi tu m’parles ?
- Ben quand
une voiture est
« abandonnée » (il marqua ces guillemets d’un double aller retour
rapide de l’index et du majeur de chaque main comme si son ton n’y
suffisait
pas), il faut qu’on aille enquêter sur place pour s’assurer du pourquoi
et du
comment, voiture volée, accident du proprio, et caetera...
- Et c’est à
moi de m’y
coller ? Y a pas quelqu’un d’autre, un bleu ?
- Désolé
Lieutenant mais
pour enquêter il faut un OPJ et vous êtes le seul dispo ce soir, le
gardien ne
put retenir un léger sourire, tiens, autant pour les bleus.
A peine arrivé sur place, le
parking était situé au sous-sol d’un immeuble de bureau dans la zone du
pôle
technologique, le vigile lui sauta littéralement dessus.
- C’est moi qui a découvert le véhicule suspecte
Inspecteur !
- Bonjour, LIEUTENANT François Roste, où se trouve la
voiture ?
Le vigile guida le
lieutenant jusqu’à la place numérotée deux cent trente six au deuxième
sous-sol,
il aurait put le suivre les yeux fermés tant il exhalait l’aftershave
bon marché
à plein nez.
On se serait cru dans un
épisode particulièrement mauvais de Plus Belle La Vie, des kilomètres de
rubalise rouge et blanche étaient tendus entre les piliers, les
conduites d’eau
usée et les chemins de câbles électriques à tel point qu’il fallut
quasiment que
le lieutenant passe dessous à plat ventre pour approcher de l’étrange
voiture
stationnée derrière.
Encore un qui s’est fait
bouler du concours de gardien de la paix et qui s’est consolé en
trouvant une
place de vigile, la bombe lacrymo c’est moins classe que le Sig Sauer
mais ils
ont l’uniforme se lamenta-t-il silencieusement.
- C’est quoi comme marque ?
- J’sais pas, j’connais pas, une étrangère à coup sûr, lâcha le
vigile
avec une pointe de mépris, moi j’dis qu’on devrait retirer la
nationalité
française à tous ceux qu’achètent pas franç....
- Elle est fermée ?
- J’en sais rien moi, j’ai touché à rien en vous
attendant...
Le lieutenant enfila un gant
jetable, saisit la poignée du bout des doigts, ouvrit la portière
conducteur et
se pencha à l’intérieur. L’habitacle embaumait comme le rayon cosmétique
d’un
Monoprix !
- Ouais, rien touché... Vous n’auriez pas vu un truc intéressant
des fois
par une vitre ? Ca m’éviterait de perdre mon temps à
chercher...
- Ben c’t à dire, i’s’pourrait bien qu’il y ait un agenda dans la
boîte à
gants, ma femme c’est toujours là qu’elle le range le sien quand on
prend la
Fuego...
- Merci, allez m’attendre dans votre...
- P.C., c’est notre P.C. comme qui dirait, j’ai du café chaud si
vous
voulez ?
- Merci, je verrai plus tard.
Le lieutenant ouvrit la
boîte à gants qui sans surprise contenait un agenda. Bon, qu’est-ce
qu’il y a
d’intéressant là-dedans ? Pas de nom, pas d’adresse ni de téléphone ni
au
début ni à la fin bien sûr, bon, huit, neuf, ah ! samedi 10
juillet.
09h15
Teinturier
09h30 Appeler Uwe
Schröder
10h00 Ernst aux incubateurs / vérifier tension échantillon
de
référence
12h30 Déjeuner avec Estrosi
15h00 Ernst vérifier MEP
cartouche
réacteur
16h15 Poubelle salle de pause
16h30 Teinturier
17h00
VOYELLE
Ça m'a l'air d'être du beau
linge mon client. Je vais peut-être pas taper Cricri tout de suite, en
demandant
au vigile ou au gardien à l'entrée dans le hall de l'immeuble, y en a
bien un
des deux qui connaîtra le sieur Ernst, c'est pas si courant comme
patronyme.
Le lieutenant se dirigea
vers le « P.C. » où l’attendait le vigile.
- Re. Est-ce que par hasard vous connaîtriez un dénommé Ernst ?
Il
doit travailler avec le ou la propriétaire de la voiture.
- Nan, désolé mais ça m’dit rien ce blase. Vous savez, les gens
sont pas
très loquaces en général, c’est à peine si ils me voient. Mais
heureusement que
j’suis là pour surveiller parce que des fois y a quand même des trucs
pas clairs
dans les parkings souterrains...
- OK, merci quand même. Il doit y avoir un gardien là-haut pour
les
bureaux ?
- Ouais, c’est Roro ! Robert Francis en fait, mais comme on est
pote
je l’appelle Roro vous voyez. Vous voulez lui parler ?
- J’aimerai bien oui. Où est-ce que je peux le
trouver ?
Après un bon quart d’heure
d’indications ponctuées d’anecdotes toutes plus « savoureuses » les
unes que les autres, le lieutenant finit pas avoir un plan complet de
l’immeuble
et savoir qu’il suffisait de prendre l’escalier en face du bocal du
vigile pour
trouver juste en face de la porte le bureau du gardien.
Celui-ci, sans doute
consciencieusement prévenu par téléphone par le vigile, attendait le
lieutenant
un énorme cahier dans les mains.
- Bonjour Capitaine, Robert Francis, j’suis l’gardien. Nono m’a
appelé
pour me dire que vous cherchez Ernst c’est ça ?
- Bonjour, LIEUTENANT Roste, oui c’est ça, vous le
connaissez ?
- Pour sûr que j’le connais, j’connais tout l’monde ici. Tenez,
regardez ! Et il tendit le grand cahier à spirales au lieutenant. Ernst Moritz Arndt, il bosse chez
B.N.G, Bioengineering for New Generations. Ils ont un demi étage
rien que
pour eux, au huitième. Vous pouvez prendre l’ascenseur là-bas si vous
voulez.
- Merci bien. Vous savez ce qu’ils fabriquent ?
- J’ai pas trop bien compris, ils sont pas très causant sur le
boulot.
- Encore merci Monsieur Francis, je vais voir ça avec eux
directement,
bonne journée.
- Appelez moi Roro Capitaine, à vot’ disposition.
Le lieutenant se
dirigea vers l’ascenseur indiqué en essayant de traduire le nom de la
société.
Bioengineering ? j’aurais mieux fait de bosser un peu plus mon anglais
moi...