Ordalie (petitmoulin)
Il m'importe peu que l'ordalie
Me promette aux Enfers
Je plaide coupable
Oui j'ai volé plus d'un rêve
Dans la besace
Du firmament
Pour habiller mes insomnies
Oui j'ai couvert mes yeux
De lâche brume
Quand les jours trop rugueux
Perdaient pied
Oui j'ai brûlé la page blanche
Quand les mots
Tournaient le dos
À l'impatience
Du vide
Oui j'ai brisé le sablier
Des souvenirs
Quand il nourrissait le regret
Et brutalisait le présent
Jusqu'à la dernière lampe
Il m'importe peu que l'ordalie
Me promette aux Enfers
Debout face au vertige
J'essaie de ne pas tomber
Un geste à l'endroit
Un geste à l'envers
Oremus ! (Lecrilibriste)
A Oran, à Orange et à Orleans, ainsi que dans l’Oregon un horodateur marque l’heure de l’ordalie pour les orfèvres chercheurs d’or en barre. C’est l’oracle qui l’a dit et il parle d’or !
L’ordonnateur de l’ordalie, nul en orthographe, mais fan de Dali et fort en orgies - il est sur le livre des records le plus gros mangeurs de rôtis Orloff - donc, l’ordonnateur en ordalie, perché sur un parterre de boutons d’or tourné vers l’Orient et vêtu de ses oripeaux, en l’occurrence sa chasuble d’orfroi, ordonnera avec des cris d’orfraie, que le premier jour d’orage à l’éclosion des oréades, on frotte très fort à l’ortie les oreilles des orfèvres qui ont été à l’origine de la recherche de l’or en barre au milieu de l’or noir alors qu’il fallait impérativement, pour faire régner l’ordre, rechercher les pépites d’or à la batée dans l’Orne! Et il n’y a aucun médiator pour négocier ni ni aucun orpailleur pour ergoter ! Alors l’ordalie aura lieu.
C’est horrible ! C’est l horreur !
Oremus ! frères et sœurs pour que l’or dure et ne soit pas remplacé par le fer blanc par nos mentors et cadors politiques.
Dame Brunehilde de Comborn (Yvanne)
L'ancienne forteresse de Comborn s'érige en majesté sur un éperon rocheux. Elle surplombe une boucle de la Vézère, rivière aux eaux sauvages et tumultueuses. Ici, vécurent durant des siècles les seigneurs de Comborn, race féodale à l'esprit guerrier, tyranniques et puissants.
Archambault, vicomte de Comborn reçoit le droit de justice sur d'immenses territoires. Il chasse et sème la terreur partout où il passe. Toutefois il est pieux et distribue de somptueux dons aux abbayes voisines. Sans doute pour que les moines prient pour lui. Il pense ainsi racheter ses fautes et méfaits. Il choisit, à 20 ans de prendre pour épouse dame Brunehilde de Turenne qui lui apporte dans sa corbeille de noces une fortune conséquente et de nombreux biens mobiliers et immobiliers.
Dame Brunehilde, dont les longues nattes blondes encadrent un visage pâle et mélancolique, aux yeux bleus immenses, semble accepter le sort qui est le sien : être la compagne d'un homme au caractère ombrageux qui la néglige en prenant d'innombrables maîtresses. Et ce jusque parmi les dames de compagnie de la malheureuse vicomtesse. Elle s'ennuie mortellement surtout au cœur de l'hiver où elle reste prostrée près de la grande cheminée de sa chambre. Les douceurs de son château d'enfance dans le bas pays lui manquent. De plus, elle semble bréhaigne ce qui la disqualifie aux yeux de son époux qui souhaite ardemment un héritier.
Archambault consent, à la demande de sa femme, dont il constate subitement le déclin, à organiser de grandes fêtes au château. L'on y rencontre de fameux troubadours tels que Bertran de Born, Gaucelm Faidit et bien sûr Bernard de Ventadour. Tous vantent les beautés éthérées de la jeune femme et composent pour elle chansons et poèmes.
Brunehilde revit, s'épanouit et l'on voit bientôt son ventre s'arrondir. Un miracle ! Le vicomte la couvre de cadeaux. Cependant des rumeurs ne tardent pas à circuler parmi ses hommes : on aurait vu à maintes reprises Bernard de Ventadour sortir furtivement des appartements de la dame. Soupçonneux, Archambault ordonne un jugement par ordalie à la naissance de l'enfant. On emmène le nouveau né au bord de la Vézère, le pose sur un bouclier qui va dérivant sur les eaux tourmentées de la rivière. Bientôt le modeste batelet est englouti : l'enfant est donc un bâtard. Le vicomte, fou de rage, convoque Brunehilde et pour la punir de son adultère présumé - il a droit de châtiment - lui tranche la main droite. La jeune femme réussit à s'échapper et plus personne ne la revoit jamais.
Peu de temps après, les villageois des alentours demandent audience au vicomte. Ils sont effrayés et sollicitent son aide. Une bête, sans doute une louve, rôde dans les environs le jour et la nuit. Ils affirment que c'est une créature du Diable à la puissance infernale qui s'en prend surtout aux petits bergers et bergères gardant leurs troupeaux. Elle ne les tue pas mais les enfants apeurés hurlent tant qu'ils font fuir l'animal sans qu'elle ne puisse jamais les approcher. Le vicomte convie tous les seigneurs du voisinage et organise une battue. L'animal traqué ne peut s'échapper. L'un des chasseurs plonge sa dague dans son poitrail. C'en est fini. Il lui coupe la patte droite qu'il conserve dans le sac en cuir qu'il porte à la ceinture. Ce sera un trophée à exhiber à Comborn.
Lors du banquet qui suit la chasse fructueuse, le chasseur victorieux sort soudain de sa besace la patte de la louve. Le silence se fait dans la grande salle suivi d'exclamations de surprise et d'horreur. Une main humaine apparaît et Archambault, très pâle, reconnaît l'anneau de mariage qui ornait le doigt de son épouse. C'est Dieu qui le frappe à son tour. Il s'enferme dans sa forteresse et meurt peu après de démence. Il n'a pas d'héritier. Ainsi s'éteint la race des seigneurs de Comborn en Corrèze.
Défi n° 758 - Keizono
Si nul ne sait de quoi s'affuble la vérité,
Combien de pécheurs tomberont,
Enflammés par la morsure d'eaux mortelles ?
Vous, religions à la folie disséquée,
Aux tortures étudiées,
De quelles croyances étiez-vous donc les témoins ?
Lorsque les ordalies jugaient,
Innocentant quelques coupables,
Les hommes noyaient de sang
L'ineptie de leurs propres lois.
Victimes et bourreaux coexistaient,
Prostrés sous le même ciel,
Dans l'attente d'une réponse à
La Question.
Or, jadis et encore maintenant,
Dieu se gausse.
Ordalies pourtant abolies (Kate)
Ordalies pourtant abolies
Abolies les ordalies
Odieuses vilainies
Terminées les tortures
Horribles forfaitures
Finies les flagellations
Infâmes lacérations
Pour hommes et femmes
Si depuis la Révolution
Elles sont illégales
Hors la loi de la nation
Profondément immorales
Pourtant les duels
Se sont perpétrés
Entre tel ou tel
Se sentant outragé
Déshonnoré
Diffamé
Ordalies
Pourtant abolies
Jusque dans notre langage
Elles restent en héritage :
Qui, voué aux gémonies
Qui, cloué au pilori...
Si mis sur la sellette
On n'y risque plus sa tête
Au pire on videra son sac
Sera au bout du rouleau
Mais on ne sera pas mis en sac
Pour subir le supplice de l'eau
Tel François Villon
Mauvais garçon
Avec ses bas ses hauts
A connu outre la prison
Le bannissement, l'exclusion
L'ordalie de l'eau
Si l'on a lu et entendu
Sa Ballade des Pendus
Dans Le Lais (*)
Ainsi se définissait :
"Je ne suis homme sans défaut..."
Loin s'en faut
On pourra au pire être tenu
Pour gibier de potence
Certes mis à nu
Mais gardant son droit à la défense
Jurer qu'on en mettrait sa main au feu
Et garder la tête sur les épaules
Dire ce que l'on veut
Jouer plusieurs rôles...
Certains mots ne restent-ils pas en travers de la gorge
Ce n'est pas pour ça qu'on vous égorge
Et l'on peut enfin baisser les bras
Sans se retrouver la tête en bas
Alors pourquoi ne pas faire amende honorable
Trouver une solution amiable
Sans encourir le coup de grâce
Et pouvoir encore pouvoir se regarder dans la glace
Enfin se faire tirer l'oreille
Ne gâchera guère le sommeil
Et le code de Hammurabi
D'ailleurs ou d'ici
La loi du talion
(Oeil
Pour oeil
Dent
Pour dent...)
Ne nous empêchera pas de tourner rond
Si les ordalies
Sont abolies
Elles teintent toujours nos paroles
D'allusions à des atteintes folles...
(*) Le Lais, VIII (Le Petit Testament, François Villon)
(Illustration issue de :
99 dragons : exercices de style. 76, Interrogatif (Joe Krapov)
Qui aurait pu imaginer qu’il s’agissait là d’un commissariat de police installé à côté d’une douane ? Cela ne ressemblait-il pas plutôt à un alignement de tentes de Romains tout droit sorties d’un album d’aventures d’Astérix le Gaulois ? Est-ce que vous trouvez normal que Caïus Maigretus, le responsable de la brigade locale, ne ressemble ni à Jean Gabin, ni à Bruno Cremer ni même à Rowan Atkinson ?
Aucune lampe n’est braquée dans les yeux du suspect, aucun coup asséné avec brutalité ne vient endommager le crâne du gars qu’on vient d’arrêter et qu’on cuisine à petit feu, on n’entend pas de questions-réponses cinglantes et saignantes signées Michel Audiard, ça vous étonne ? Ça vous gêne ? Avez-vous oublié qu’on est en 303 après Jésus-Christ, quelque part dans ce qui deviendra plus tard la Libye alors que le légionnaire arrêté n’en a pas, d’alibi ?
- Vous permettez, citoyen Da Lydda que je vous fasse part de mon étonnement et de mes questionnements sur votre situation ? N’êtes-vous pas, positivement, ce qu’on appelle un déserteur de l’armée romaine et, simultanément, un adepte de cette nouvelle religion chrétienne ? Est-ce au nom de votre croyance que vous vous êtes mêlé, sans ordre de votre hiérarchie et sans arguments autres que votre prestance de cavalier et vos armes de combats, à une affaire de règlement de comptes entre autochtones ? Ne pensez-vous pas que nous avons autre chose à faire, alors que l’Empire romain, frappé de décadence et de réchauffement climatique, s’en va petit à petit, inexorablement puisque dépourvu de sèche-linge, vers ce qu’on appellera son déclin et sa chute, que l’armée d’occupation n’a rien de plus urgent à accomplir que de compter les moutons du père Mathurin comme vous l’avez fait et d’endormir les enfants avec des sornettes ? N’avez-vous pas l’impression de vous être occupé de ce qui ne vous regardait pas et d’avoir agi de façon droit de l’hommiste, expéditive et inconsidérée dans ce qui relevait de la simple gestion municipale ?
Alors c’est réellement ça, le Christianisme, des considérations du genre « Aide ton prochain comme s’il était ton frère » « Interviens pour faire régner sur terre la justice et la paix », « Chasse les marchands du temple » et « Bousille la nature et les animaux comme tu veux, ils n’ont pas d’âme » ? Est-ce que ces éléments de doxa justifient le meurtre, fût-il celui d’un animal pas très joli - et quand je dis « fût-il » alors que je devrais dire « serait-il » ou « même si c’est celui d’un animal » c’est sans doute aucun de ma part un lapsus linguae car je pensais « futile » qui est le qualificatif possible de votre comportement, non ? -.
Avez-vous jamais été effleuré par le concept de BIODIVERSITÉ, Georges Da Lydda ? Croyez-vous que la noctuelle doit être éliminée à l’aide de pesticides au prétexte des dégâts qu’elle occasionne aux cultures paysannes ? Pensez vous que « le thon, c ‘est bon » et que de ce fait on peut le surpêcher, quitte à provoquer sa disparition à long terme ? Que le dodo s’en remettra après un petit somme ? Que les abeilles donneront toujours du miel parce que votre Dieu a voulu qu’il en soit ainsi ad vitam aeternam et vas y que je t’envoie mon latin de cuisine, mon santo spiritu dominus meus rundupus ite missa est exoneratus of the futuram generationem aux vieux crabes qui roulent en cycle amen ?
Ce fait d’armes légendifère, ce combat à l’épée et au cheval blanc, cette rose qui pousse dans le sang de la bête vaincue et abattue, ce village de quelques pedzouilles dont le trouillomètre était à zéro et qui, en remerciement de votre « exploit » se sont convertis à votre foi, ce prosélytisme de pacotille, cette hagiographie pour petits enfants friands d’images pieuses et de hauts faits de chevalerie, votre prequel de « Tous à la croisade !» qu’on racontera peut-être par la suite de 99 manières différentes, toute cette fête de la pusillanimité vaut-elle quelque chose vis-à-vis du crime que vous venez de commettre : faire disparaître LE DERNIER DRAGON VIVANT DE NOTRE PLANÈTE ?
Vous imaginez la perte que vous venez de faire subir à la future histoire des sciences ? Cette incurie de pâle freux niais, ce crime contre l’histoire au nom d’une religion noire, cet écocide de corneille, vous ne croyez pas que ça mérite un châtiment exemplaire, une ordalie digne du Salvador, une mise au pilorible, un supplice du tréponème pâle pour le détestable que vous êtes ? Tu pensais peut-être qu’on allait te tendre la joue gauche, te pardonner cette offense au vivant ? Pas question mon pote, tu vas juste finir martyr et pourrir un peu, c’est logique, non ?
***
Et toi aimable lecteur, bien-aimée lectrice, n’as-tu pas de la chance qu’après avoir pondu un bon paquet déjà de variations stupides autour de ce canevas je t’aie toujours épargné jusqu’à ce jour la description du supplice que l’armée romaine, l’ayant repris, appliqua à celui qui devint Saint-Georges ?
N’es-tu pas bienheureux ou bienheureuse du fait que, personnellement, je ne ferais pas de mal à une mouche et que ces histoires de fer rouge, d’eau bouillante, de gavage au pain complet et à la cancoillotte, ces bûchers, ces garrots, ces supplices de l’eau, ces vierges données en guise de quatre heures aux lions, ces jugements de Dieu, ces castagnes, ces bastons, ces vendetta et ces vent d’états me lèvent le coeur ?
A'r'nage (Vegas sur sarthe)
Au Moyen Âge dans un petit bourg de la Sarthe – à la sortie du Mans en direction d'Angers – les villageois avaient décidé de soumettre une méchante sorcière au jugement de Dieu en la jetant dans la rivière La Sarthe.
A l'époque on appelait ça plaisamment La baignade.
Si la prétendue sorcière coulait elle était innocente mais noyée, si elle flottait elle était coupable !
Dans un cas comme dans l'autre, être soumis à la question n'offrait aucune réponse convenable.
Sourde comme un pot elle n'eut pas le temps de dire «vous pouvez répéter la question ? » qu'elle fut jetée à l'eau mais à l'aide de ses pouvoirs maléfiques et malgré ses entraves, elle sut refaire surface et les villageois effrayés s'écrièrent en choeur «A’r’nage» !
Ainsi fut baptisé le village, Arnage célèbre aussi par son virage – le virage d'Arnage – une épingle très serrée jamais modifiée depuis 1923 et que les pilotes des 24 Heures négocient en première vitesse pour le plus grand plaisir des fans qui y viennent en pélerinage.
Chaque année au mois de mars le carnaval de la sorcière perpétue cette légende.
Dépêchez-vous ! Cette année les festivités se dérouleront du 10 au 26 mars
Dico philo perso (Walrus)
Ordalie : Pratique judiciaire médiévale qui tendrait à démontrer si pas l'inexistence de Dieu, son impuissance, ou, a minima, son désintérêt total pour nous. Cela, si elle ne mettait d'abord en évidence la connerie des hommes, laquelle, il nous faut bien l'avouer, ne sévit pas qu'à lépoque médiévale, ainsi que nous le démontrons tou·te·s brillamment à un moment ou un autre de nos existences (à commencer par moi en écrivant ceci).