Défi de Lou
« Dis grand-père, c’est quoi la pièce en fer qu’il y a dans la vitrine de ta chambre ? »
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- Oh, ce n’est pas n’importe quelle pièce ; c’est une très vieille pièce ; elle vient de Chine. Elle a une très grande valeur ; à mes yeux elle est encore plus que ça…
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« Oh racontes
moi papy, dis moi…c’est quoi cette pièce ? »
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- Tu sais c’était il y a maintenant bien longtemps et je m’en souviens comme si c’était hier : Je n’ai jamais beaucoup fréquenté les musées ou autres lieux culturels mais par contre j’ai toujours aimé la culture asiatique. Il se trouvait qu’en 2008, il y avait une exposition à Paris, à la Pinacothèque, sur l’armée de soldats du premier empereur de Chine.
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Je n’ai jamais beaucoup aimé prendre les transports en commun mais pour y aller, il me fallait les utiliser ; pourtant je ne sais pas pourquoi, cette exposition m’attirait. Ni une ni deux, me voilà dans ces métros puants pour me rendre du côté de La Madeleine pour trouver cette fameuse Pinacothèque.
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L’exposition se situait dans un lieu plutôt petit, je voyais ça bien plus grand ; mais dès l’entrée dans la salle, je fus de suite subjugué par des soldats faits en terre cuite qui semblaient tout droit sortis de l’histoire… je ne faisais qu’à peine attention aux autre visiteurs qui s’empressaient autour de ces statues. De plus, lorsque je payais mon entrée, on m’annonça que puisque j’étais le 10 000ème visiteur, j’aurai droit à une surprise…Moi qui n’ai pas une chance exceptionnelle, je me retrouvais au milieu de cette histoire asiatique l’esprit en ébullition, me demandant quelle serait cette surprise, et les yeux comme ceux que tu fais lorsque tu t’arrêtes devant quelque chose qui te plait…
Toute l’exposition présentait non seulement les fameux soldats de terre, mais aussi tout ce qui entourait cette grande civilisation qui donna naissance à la Chine. On pouvait y admirer l’art de cette époque, art particulièrement mis en évidence dans tout ce qui avait trait au culte des ancêtres par exemple.
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Aussi, d’espace en espace, de vitrines en vitrines, j’absorbais avidement tout ce que je pouvais apprendre sur ces civilisations qui me fascinaient.
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« Oui papy ; mais la pièce, c’est quoi la pièce ? »
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- J’y viens mon petit … Cette pièce est une pièce de monnaie ; oui, tu as bien entendu. Et c’est cette pièce que j’ai choisie comme cadeau, car en fait la surprise qui m’était réservée était de pouvoir choisir parmi les éléments exposés à la Pinacothèque…
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« Mais elle est moche ta pièce papy ; elle est toute vieille et toute moche.. »
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- C’est vrai qu’elle est très vieille, et très laide ; elle ne ressemble pas à ces pièces d’aujourd’hui ; mais je vais te dire pourquoi j’ai choisi cette pièce plutôt que tout autre objet : Lorsque je regardais les nombreuses vitrines, j’ai pu contempler certaines pièces de musée très ouvragées, d’autres plutôt grossièrement travaillées ; mais qu’importait, j’avais devant mes yeux des siècles d’histoire et rien que cela faisait prendre à toute cette collection un aspect presque irréel mais de toute beauté.
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Pourtant, alors que je restais en admiration devant un vieux moule qui servit à fabriquer cette fameuse pièce, de l’autre côté de la vitrine, l’espace d’un court instant, il me sembla apercevoir deux yeux qui croisèrent mon regard. Plus que de les voir, je ressentis leur présence…tout d’abord mal à l’aise (je pensais avoir rêvé, emporté comme je l’étais par ce tourbillon d’histoire), je restais un peu plus à admirer cette pièce que tu as vu dans ma vitrine. Et cette fois, je me rendis compte que je n’avais pas rêvé : ces yeux regardaient la même chose que moi mais croisaient mon regard aussi subrepticement que je pouvais le faire de mon côté.
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Dans la pénombre de l’exposition et malgré les quelques reflets dans la vitrine, je pouvais voir à quel point ce regard était clair et beau ; je n’ai jamais vu des yeux d’une telle intensité, ce genre de regard qui semble sonder jusqu’à l’âme tout en offrant une compréhension presque palpable…
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« Ça veut dire quoi tout ça papy ; c’était quoi ces yeux ? »
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- Et bien, mon petit, ce regard est celui de la personne qui éclipsa jusqu’aux bijoux d’émeraudes exposés ce jour là ; ces yeux sont ceux de la personne qui fut pour moi comme une renaissance ; ces yeux mon petit, sont ceux de ta grand-mère ; et ces regards échangés à la Pinacothèque furent les premiers que nous échangeâmes.
Depuis ce jour où nos vies se sont croisées au travers de cette vitrine où trônait cette petite pièce, nous ne nous sommes plus quittés. Voilà pourquoi j’ai choisi cette pièce, mon enfant ; parce qu’elle a traversé les siècles pour me faire rencontrer ta grand-mère.
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« Elle est belle papy ta pièce……… »
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Plus tard, j’aimerai pouvoir être ce grand-père….
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1 cynique a 0 (Lou)
« Mesdames et messieurs bonsoir, je reçois aujourd’hui Hervé Spazienne qui, après les 5 années de désert qui ont suivi la sortie de son très controversé « Pamphlet pour une saucisse de Toulouse », nous revient avec un nouveau roman intitulé « La paire de Mers ».
Bonsoir Hervé ; alors cette longue traversée du désert, était-ce volontaire après le succès mitigé de votre précédent ouvrage ou n’était-ce qu’un coup de semonce de votre éditeur ? »
- Tout d’abord bonsoir aux auditeurs qui auront notés la délicatesse avec
laquelle vous m’avez présenté.
« Pardonnez moi, Hervé, je ne voulais pas être blessant ; mais avouez que votre précédent ouvrage vous a sans doute fait perdre quelques lecteurs non ? »
- Sachez, Marc O, que mes lecteurs me soutiennent depuis ces nombreuses années où vous-même n’étiez encore que sur un banc d’école à apprendre comment assembler deux trois syllabes.
« Bien, et donc ? Pendant cette lente croisière en solitaire, vous avez tout de même réussi à produire ce pavé de quelques 500 pages qui risque de plaire plutôt aux haltérophiles…N’avez-vous pas peur que les lecteurs n’arrivent jamais au bout de ce roman ?
- Dites vous bien que pour ne pas noyer mes lecteurs avec ce pavé, comme
vous dites, j’ai procédé par étapes, prenant parfois à contrepieds mes
personnages principaux afin de maintenir un suspense constant…Et cela, jeune
homme, ne souffre aucun hasard ; tout doit être planifié et pour cela il
faut du temps.
« C’est clair que c’est très Sex, Drugs and Rock’n’Roll, avec des personnages tout droit sortis des seventies ; un petit parfum de nostalgie ? »
- Evidemment, aujourd’hui, ce serait plutôt Rap, Bling Bling et belles
meufs comme on dit ; mais permettez à mon âge avancé de se souvenir des
moments qui lui ont parus les plus appropriés pour le déroulement de l’histoire
de « La paire de mers » et laissez à la jeunesse d’aujourd’hui le
soin de s’exprimer comme elle-même l’entend.
« Soit ! Alors racontez nous en un peu plus sur cette histoire ; un polar ? Un livre d’amour ? Un documentaire ? J’ai eu l’impression de retrouver certaines références à des évènements historiques disséminées ça et là… »
- Je constate que malgré votre penchant à vouloir à toutes fins jouer de
piques de langages envers vos invités, vous avez tout de même une éducation qui
vous permet de trouver les ingrédients qui constituent un roman ; c’est
tout à votre honneur, jeune homme.
« Euh…oui …merci Hervé…en fait je me pose les questions que vos potentiels lecteurs se poseraient au moment de l’achat de votre roman ; on n’achète pas un pavé de 500 pages comme on achète un kleenex »
- Marc O, sachez que si vous aviez été mon fils, nul doute que c’est avec
ce pavé que je vous aurais mouché, et non pas avec un kleenex. Que voulez vous,
que je vous dise que ce roman n’est pas à vendre ? j’ai mis 5 longues années à le rédiger, et
pendant ces 5 ans, vous n’en étiez qu’aux essais devant les caméras ;
aussi, jeune homme, laissez donc au spectateurs le choix de se retrouver dans
cette histoire qui mêle amour et policier et contentez vous des édito des
hebdomadaires…
« Mesdames et messieurs, c’est sur ces saines paroles que nous allons accueillir notre prochain invité, l’Abbé Cédaire, pour son parcours hors du commun. Nous souhaitons à Hervé Spazienne de connaître bien plus de succès avec « La Paire de Mers » qu’avec « Pamphlet pour une saucisse de Toulouse en espérant le compter parmi nos invités dès que son actualité le permettra.
En attendant nous allons laisser passer une courte page de pub et nous nous retrouvons avec l’Abbé Cédaire…Ne zappez pas et à tout de suite.