Kithara (par joye)
M57 est parmi les objets les plus connus du catalogue Messier. – Wikipedia
Appelez-moi M57, je vous expliquerai pourquoi.
Je pourrais vous parler des étoiles, mais je ne suis pas assez brillante.
Je pourrais vous parler de la musique, mais je n’ai pas assez noté.
Je pourrais vous expliquer pourquoi le gars sur la photo de la consigne est tout authentique, sauf pour son Samsung qu’on voit juste derrière lui sur la table, mais ce serait méchant et cynique, et aujourd’hui, je n’ai pas envie d’être méchante.
Non, aujourd’hui, j’ai envie de parler de tout sauf de cette image.
J’ai envie de parler des claques et des tracteurs et des cadavres des gamins cruellement rejetés sur la plage.
J’ai envie de parler des flots sur l’océan, des flots d’individus désespérés. Je veux parler des continents de plastique qui se trouvent sur la surface de l'eau, des continents où personne ne peut vivre mais où toute personne a vécu. J’ai envie de parler des montagnes disparues sous les pieds des hommes. Mais c’est trop triste. Peut-être quelqu’un d’autre pourrait-il en tisser de beaux vers fleuris, beaux comme des tapis, parsemés de l’espoir des rires. Pas moi.
J’ai envie de parler de la pluie et du beau temps. Tiens. L’automne arrive, doré. C’est la saison la plus épatante, la plus philosophique, la plus sage. L’automne ne nous ment pas, comme nous fait le printemps. Il ne nous punit pas, ne nous fiche pas de gelures et de brûlures comme font l’hiver et l’été. L’automne nous berce si nous le lui permettons. Et si l’on s’endort dans ses bras, on peut dormir pendant les mois et les mois de neige et de glace, afin de se réveiller juste avant l’arrivée du printemps avec ses petites duplicités qu’on apprend à pardonner.
Mais aujourd’hui, je ne dors pas. Je ne pardonne pas, et je ne demande pas à être pardonnée.
Aujourd’hui, je veux rire et pleurer, parler et me taire. Je veux aimer et haïr, comme bon il me semble.
Aujourd’hui, je veux marcher, trébucher, tomber, me relever, et marcher encore en rêvant.
En fait, aujourd’hui, le monde entier vient vivre dans ma tête, tout sauf l’homme sur cette image, habillé comme au passé, avec son instrument et son smartphone.
Appelez-moi donc M-57, car aujourd'hui, je suis bien la nébuleuse de la Lyre.