11 mai 2013

Participation de Berthoise

J'ai cherché mon chapeau, enfilé mon  manteau que j'ai laissé ouvert. J'étais déçue. Vaguement déçue. Étonnée  d'en être si marrie. J'ai échangé quelques mots avec ma voisine, c'est  elle qui m'avait refilé la place en me demandant de l'accompagner.  C'était bien sympa de sa part. Une sortie, même en semaine, ça ne se  refuse pas. Mais j'étais déçue. Je lui ai dit que je trouvais le jeu  brillant. Oui,  ça je pouvais le dire. La nana, elle jouait vachement bien. Du reste,  le public ne s'y trompait pas, qui applaudissait encore. Pouvais-je  vraiment lui avouer que Tchaikovsky n'était pas ma tasse de thé, que  Chostakovitch me pompait un peu l'air ? Je n'ai rien dit, je suis polie,  je l'ai remerciée encore de cette bonne soirée, d'avoir pensé à moi. On  a quitté le théâtre où il faisait sacrément chaud. On a traversé le  parking. J'ai boutonné mon manteau et remonté le col. Il tombait une  neige mouillée qui s'écrasait sur le sol en laissant une boue sale. Dans  la voiture, on a parlé de choses et d'autres. De rien, de tout, du  boulot, des enfants, des maris. Elle m'a déposé devant la grille de la  maison. J'ai trottiné pour traverser la cour. Je suis rentrée, contente  d'être arrivée. C'est en ôtant mon manteau et mon chapeau que je me suis  aperçue que j'avais perdu mes gants.

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21 janvier 2012

À demain, mon amour (Berthoise)

La nuit quand tout le monde dort, je ne dors pas. J'attends. J'attends que l'agitation s'apaise, que les respirations se calment, que les rêves s'éveillent. Alors, quand tout se fige, quand plus rien ne bouge que les poitrines qui montent et descendent au rythme du souffle, alors je me lève sans bruit. Je quitte la chambre à pas légers. Je me vêts avec soin, je me pare de mes plus beaux atours. Je sors. Je rejoins mes amants. Je rejoins celui du moment.

Sous la lune complice, dans la fraîcheur qui pince mon visage, je vole à travers les rues, la ville, la campagne pour retrouver celui du moment.

J'offre mon corps à ses caresses, j'offre mes caresses à son corps. Je soupire, je geins et me pâme sous ses baisers. Quand nos jeux se tarissent, je rentre au château. Je me glisse sans un bruit dans le lit conjugal. Il est chaud, doux, accueillant. Je me colle contre le corps paisible de mon mari endormi. Il pousse un soupir et m'enlace. Je m'endors enfin rassasiée dans la tiédeur sereine de notre couche, tout en haut de la tour. En me dévêtant, j'ai laissé au pied du lit, ma paire de souliers aux semelles usées par ma course nocturne.

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05 novembre 2011

C'est aussi par la fenêtre qu'on rentre‏ (Berthoise)

À l'École Normale des Filles (ENF) où je fis mes études, les dortoirs étaient à l'étage, des box de 7m2 à tout casser, fermés d'un rideau avec un lit, une table, un placard, un lavabo et une demi-fenêtre. Nous avions le droit de sortir le soir, jusqu'à 10 heures, je crois, sous réserve de signer le registre de sortie. À vrai dire, je ne sais plus bien quelle était l'heure limite. Ce dont je me souviens, c'est qu'il n'était pas difficile de quitter le bâtiment mais qu'en revanche, si on ratait l'heure de rentrée, on se retrouvait le bec dans l'eau du caniveau à devoir dormir sous les ponts ou bien à l'autre bout de la ville, à l'ENG ( École Normale des Garçons) qui, elle, restait ouverte toute la nuit. Bien sûr, nous avions trouvé un truc, nous laissions ouverte la fenêtre d'un atelier à la cave, ce qui nous permettait de rentrer à pas d'heure. Car passer la nuit chez les garçons pouvait être rigolo mais franchement, on n'y dormait pas beaucoup. Le truc de la fenêtre de l'atelier était vieux comme mes robes, autant vous le dire. Ma mère, qui fréquenta les mêmes lieux, usait déjà de la même astuce. Toutefois, il arriva qu'un jour, l'accès à la cave fut condamné par un cadenas inopportun. Qu'à cela ne tienne, nous trouvâmes vite une autre voie. Garder des jeunes filles dans un internat est aussi difficile que de retenir l'eau entre ses doigts.

C'est ainsi qu'une nuit, Clotaire (sans rire, il s'appelait vraiment Clotaire), le directeur de l'ENF me reçut en pyjama dans son bureau. Faut avouer à sa décharge qu'il n'était pas loin d'une heure du matin et que j'avais dû le tirer du lit. Il devait souffrir d'insomnie car je suis bien certaine d'avoir été discrète. Il m'avait trouvée à califourchon sur la fenêtre du hall et m'avait demandé d'une voix ensommeillée mais néanmoins courroucée, ce que je faisais là. " Je rentre, Monsieur le Directeur, je rentre. "

Quelques semaines plus tard, nous prenions un appart en colocation, Soumarine et moi, Clotaire m'ayant fortement suggéré d'aller me faire voir ailleurs.

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29 octobre 2011

Ça fait toujours plaisir. (Berthoise)

Ça fait toujours plaisir.



printemps1

 

Ces quelques fleurs sont pour toi.

 

J'aime offrir des fleurs aux hommes.

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22 octobre 2011

L'invitation (Berthoise)

Ben voilà ! J'ai encore oublié ! Tu ne m'en veux pas, dis, tu sais bien que j'ai jamais la tête à ça. Pourtant, je note, je fais des croix sur le calendrier, je me promets que cette année, je ferai gaffe, craché-juré et puis non, le jour J, c'est comme l'année d'avant, je n'y pense pas. Va pas croire que c'est parce que je ne t'aime pas, non, non. C'est pareil avec tout le monde. Avec Pierre, avec Jean, avec Marc, avec Luc,je ne connais pas de Matthieu, y'a qu'avec Noël que j'oublie pas. Faut dire que ses parents manquaient un peu d'imagination : appeler son moufflet Noël parce qu'il est né le 25 décembre. Il a toujours tout en même temps, pas moyen de le rater : la fête, l'anniversaire, Noël. Pauvre Noël ! Ils devaient pas aimer faire la fête, ces gens-là.

Mais bientôt, quand tu viendras à Paris, nous irons tous les deux, rien que tous les deux " Au loir dans la théière" pour fêter ton non-anniversaire. J'ai plus de chance de ne pas me tromper.

Suivant Restaurant - Le Loir dans la Théière

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02 juillet 2011

Quotidien‏ (Berthoise)

Bon je pourrais vous parler des lunettes qui m'ont rendue à la joie de la lecture. Oui, je pourrais.

Je pourrais aussi vous dire mon amour pour le rouge à lèvres, mais j'en ai déjà parlé, je crois.

Je pourrais vous louer ma montre qui ne me quitte jamais, obsédée que je suis par le temps qui passe. Celle que je porte est la troisième du même modèle, avec un cadran à aiguilles qui s'éclaire la nuit. Mais, non.

 Je sais quel objet je vais vous vanter. Mon agenda.

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Choisi avec soin en janvier, je n'avais rien trouvé qui me plaise en septembre. Beau. Pratique. Efficace quand je pense à l'ouvrir et que je n'ai pas oublié d'y noter les rendez-vous.

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Mon agenda, mon compagnon. J'y note les rendez-vous, mais aussi les petits faits importants de ma vie routinière. Tous les ans, j'achète un agenda. Je garde ceux des années précédentes. Je les feuillette parfois. Je m'étonne de redécouvrir des noms, des lieux, des évènements. J'y retrouve des billets de spectacles, des tickets d'entrée pour des expositions, des petits dessins de mes enfants, parfois même des photos. Ma vie.

 

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28 mai 2011

Sur la route (Berthoise)

Sur la route

Autant vous le dire, nous partons rarement en voyage. Et quand il nous arrive de rouler vers une destination inconnue, il n'est pas rare que nous nous perdions. Ce n'est pas grave, on a des cartes. Et beaucoup de mauvaise foi.

Quand on s'étonne que nous n'ayions pas encore investi dans un GPS, nous répondons en choeur et avec un grand sourire : " Un GPS ? Ah non ! On préfère s'engueuler! "

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21 mai 2011

Oubli (Berthoise)

Il y a des choses qui deviennent très compliquées. Des textes que je ne comprends pas, même à la seconde lecture. Des allusions vides de sens pour moi. J'entends les conversations sans plus vraiment les écouter. Je me tais. J'oublie, je me perds dans mes souvenirs. Oh, bien sûr, je connais mon nom, mon adresse, le prénom de mon mari, la date de naissance de mes enfants mais, il y des gens que je ne reconnais pas. On me parle d'anecdotes. On me dit que je les ai vécues. Que j'ai réagi ainsi. C'est crédible. Du reste, je le crois mais je ne me souviens pas. Alors, je hausse les sourcils, mais je ne réponds pas. Est-ce le début de l'appauvrissement de mes neurones ? Vais-je comme l'oncle de Boris Vian pleurer sur la sauce blanche de mon cerveau ?
Je n'ai plus rien à dire, mes mots sont pauvres. Mais écrire. Et bien non. Ne plus écrire. Je croyais que mon ami l'ordinateur m'aiderait. Il parle lui. Il raconte encore et toujours les mêmes histoires. Je feuillette les albums de photos si bien rangés. Il faut bien que quelque chose soit rangé dans cette maison. Je vois des gens sourire, des paysages. Il se dégage de tout cela de la tendresse, de la douceur. Mais c'est un peu impersonnel. Je les trouve beaux, ces gens souriants ; j'aimerais me promener dans ces lieux. On me dit que je les ai côtoyés, que je les ai fréquentés. Tout s'obscurcit. Je regarde comme un documentaire, et découvre à chaque fois de nouveaux visages. Hier encore, pendant ma promenade, on m'a saluée respectueusement. C'est étrange. J'ai hoché la tête. C'est vexant pour les autres de voir qu'on ne les reconnait pas. Ils croient qu'ils ne sont pas importants. Alors, je fais semblant. Mon fils a voulu me faire des fiches dans l'ordi avec les photos, les adresses, les dates et les évènements importants pour chaque personne que je suis appelée à rencontrer. Il m'a dit : "Ne t'en fais pas, si tu ne te souviens pas, l'ordi le fera pour toi. " Il est gentil mon fils, il ressemble de plus en plus à son père. Des fois, je me trompe et l'appelle du prénom de mon mari. Il ne s'énerve jamais. " Mais non, maman, c'est moi Sylvain." Alors oui, il me semble bien que son père avait les yeux plus verts.

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07 mai 2011

Chouette et autres volatiles (Berthoise)

Et me voici sautant au plafond telle une élégante cabrette. Et vous brûlez de connaître la raison de ma joie. Quelle chouette nouvelle allège mon quotidien ? Sachez que qu'il faudrait plus qu'une cage pour enfermer mes émerveillements, une volière n'y suffirait pas. Quoi ! Diantre ! Emprisonner la joie ? Mais vous n'y pensez pas ? Ben, si, j'y pense.Vous êtes fous, comment voulez-vous faire cohabiter tous ces oiseaux-là :

Un colibri joli pour la chanson que j'ai entendue ce matin à la radio.

Une mésange bleue pour le baiser qu'il m'a déposé dans le cou.

Un pingouin dandinant pour la dame qui m'a fait rire à la caisse du supermarché.

Une hirondelle bavarde pour le coup de téléphone de Poulette.

Une pie pour les jacasseries partagées sur le banc pendant la récréation.

Un merle pour les ouvriers qui travaillent chez les voisins en échangeant des blagues.

Une mouette pour le ciel bleu et cette sensation d'infini qui vient quand je le regarde.

Non, non, chers amis, pas de cage, fut-elle dorée, ces oiseaux ont besoin de liberté pour nous enchanter.

 

 

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02 avril 2011

La pêche (Berthoise)

 

Spécial Test: c'est quoi ton ontologie?

 


 


Nature morte à la carpe, Abraham Van Beyeren, XVIIe siècle  

 

Je ne veux pas aller à la pêche. Ni à la pêche à la baleine, ni à la pêche aux moules et encore moins à la pêche au coup. Qu'est-ce qu'on s'emmerde à la pêche au coup. On doit rester sans bouger, sans parler. Je ne veux pas y aller. Tu auras beau dire que la panoplie me va comme un gant. Je transpire dans les bottes en caoutchouc et après j'ai les pieds qui puent. En plus, tu veux qu'on se lève tôt, et on va encore se cailler les miches dès potron-minet. Alors, il faut que tu te le mettes dans la caboche une bonne fois pour toutes, je n'irai pas me geler les arpions au bord de la rivière à pas d'heure. Je n'irai pas m'esquinter les quinquets à lorgner sur un bouchon pour attraper un malheureux poiscaille imbouffable, plein d'arêtes et qui en plus ne m'a rien fait. Vas'y, toi, à la pêche. Moi, j'ai mieux à faire. Faire la grasse matinée, pour une fois, ça devrait me plaire. Avoir le grand lit rien que pour moi et bouger les jambes autant que je veux sans te déranger. Vas'y toi, à la pêche puisque ça te plaît. Je te promets qu'à ton retour, j'extasierai sur ta bourriche. Je te jure que si tu es bredouille, je ne me moquerai pas. Je ne veux pas aller à la pêche, vas'y sans moi.

 

 

 

Un grand merci à Jacques Prévert, Boby Lapointe , Georges Brassens et bien sûr Abraham Van Beyeren du 17ème siècle.









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