Ont piétiné le parquet
Cavalier ; Vegas sur sarthe ; Laura ; TOKYO ; Kate ;
joye ; petitmoulin ; Walrus ; Yvanne ; Joe Krapov ;
Soudain dans sa vie il fit moche. 5 (Joe Krapov)
- Waoouh ! Ce quadrille des homards m’a tuer ! déclara Alice en se rasseyant.
Et puis, tout étourdie encore par la cavalcade, elle s’aperçut que le voisin à chapeau qui lui avait galamment proposer de gardé son sac pendant la danse n’était plus là.
Son sac non plus du reste. Comment allait-elle faire pour rentré au pays des merveilles sans sa clef ?
Ce petit dessin colorié à l'encre est signé d'Ilarion Pavlovitch Krapov.
Chère Marquise (Yvanne)
Oserais-je m'entretenir avec vous comme avec une amie ? J'ai trop de respect pour votre personne pour avoir cette audace. J'aimerais simplement que ma lettre vous soit un mince divertissement dans l'ailleurs où vous êtes aujourd'hui. Ailleurs où, je présume vous étourdissez les anges par votre esprit et votre talent.
Je n'affûterai pas ma plus belle plume d'oie pour vous écrire. Me croirez vous ? Ces volatiles ne sont plus plumés par de diligentes mains et de plume d'oie il n'y a point. Des machines barbares dépouillent ces volailles en un rien de temps. Ah ! Je vous devine : vous étouffez un petit rire discret derrière votre main joliment gantée de blanc. Je ne vous ferai cependant pas l'offense d'utiliser ce moyen moderne que l'on nomme informatique pour m'adresser à vous. Il reste encore, fort heureusement un peu d'encre au fond de mon encrier, non à vrai dire, de mon stylo.
Madame, si vous voyez le monde depuis le Paradis où vraisemblablement Dieu vous garde près de lui, vous ne cessez sans doute d'être étonnée. Horrifiée même certainement tant notre planète va à vau-l'eau. Mais quand vous tournez votre regard pour ne plus voir ce qui se passe ici bas, comment occupez vous votre temps ?
Vous écrivez encore et encore à votre fille et à tous vos amis, épistoliers fervents tout comme vous. Je vous imagine, penchée sur votre écritoire, tantôt sereine, tantôt triste ou amusée laissant « trotter votre plume la bride sur le cou » pour narrer avec spiritualité et impertinence les potins du jour.
Avez vous retrouvé votre livre du carrousel que vous aviez prêté ? Il me semble que vous l'avez finalement reçu. Il y figurait, je crois la quadrille que votre fille Madame de Grignan destinait à son frère Charles. Je comprends l'importance de cette brochure pour vous. Ne détaillait-elle pas les divers participants présentés par des madrigaux qui commentaient les devises choisies. On y retraçait n'est-ce pas la composition des diverses quadrilles commandées par le Roi avec leurs emblèmes. Ceci pour la fête grandiose, le Grand Carrousel, donnée dans la cour des Tuileries les 5 et 6 juin en l'honneur de la naissance du Dauphin Louis.
Vous dirais-je Madame que « quadrille » - enfin le mot - s'est masculinisé ? Il ne désigne plus un tournoi ou autre spectacle équestre comme vous aviez l'habitude de les vivre. Il est devenu plus tard une danse de salon avec quatre couples formant un carré. Aujourd'hui on parle de quadrille plutôt pour une danse folklorique. Mais je suis sûre que vous poufferiez encore comme alors quand vous contempliez les bourrées paysannes en vous exclamant : « ce sont des postures à pâmer de rire ». Je n'ose concevoir ce que vous penseriez des sauteries d'aujourd'hui !
Mais brisons là Madame. D'aucuns comme Monsieur Proust se moquerait en clamant que j'ai assez « fait ma Sévigné. » Ah ! Une dernière chose cependant. Voyez vous, malgré nos technologies modernes et sophistiquées nous n'avons pas encore réussi à communiquer avec l'au-delà. Et cela me chagrine quelque peu. Je n'ai pas peur de mourir, non, mais j'aimerais savoir ce qui se passe là haut et surtout comment l'on s'y distrait et s'amuse. Un petit billet de votre plume serait le bienvenu. Je vous laisse le soin de choisir votre messager.
Adieu donc, Marquise.
Sonnez le boute-selle ! (Walrus)
Initialement, j'avais choisi "Quadrige". Vous connaissez : cet attelage de char à quatre chevaux (non pas Renault !) de front.
Mais je vous ai vus venir : immanquablement vous alliez me ramener Ben Hur et sa course de chars et je déteste Charlton Heston.
Donc, j'ai opté pour une sonorité voisine : "Quadrille" !
De toute manière, le "Quadrille des Lanciers" étant le seul qui me soit connu, on reste dans la cavalerie, d'où le boute-selle.
Pourquoi je connais le quadrille des Lanciers ? Parce que dans mon patelin (Charleroi) de l'immédiat après-(dernière)guerre, on le dansait encore régulièrement. Aujourd'hui, je crains qu'en dehors du gala annuel de l'école polytechnique de Paris (l'X pour les connaisseurs), on ne le danse plus guère avec ses cinq figures : 1. les tiroirs, 2. les lignes, 3. les saluts, 4. les visites, 5. les lanciers.
Si vous creusez un peu, vous apprendrez qu'il a été imaginé à Dublin au début du 19ème siècle et qu'importé en France, il faisait fureur (mais non pas Führer) à la cour impériale de Napoléon III (le Petit, si j'en crois Hugo).
Quoi ? À quoi ressemblait un lancier de l'époque ? Facile, y a qu'à demander :
Comment ? Il n'a pas de lance ? Et alors, est-ce que les pompiers portent une pompe ? Non, sérieusement : normal, lui, c'est le chef, il porte un sabre, les lances, c'est pour le petit personnel tout flou au fond de l'image.
Ce qui est étrange, c'est qu'à l'époque de cette enfance que j'évoquais plus haut, deux autres danses, bien moins compassées que le quadrille, faisaient elles aussi un malheur : la danse atomique , sans doute en souvenir d'Hiroshima et la danse du Spirou. Deux trucs assez remuants. Remuants au point que dans certaines communes on avait fini par les interdire (c'étaient toujours les danseuses qu'on projetait vigoureusement qui se ramassaient sur le "dancing floor" comme on dit aujourd'hui).
Bon, c'est pas tout ça, faut que je vous laisse, j'ai un tiroir à ranger !
Quadrille (petitmoulin)
Des mots bien lavés
Dansent un quadrille
Au seuil de la pensée
Ceux figés
Dans le carcan
De leur habit
Du dimanche
Ceux qui lèvent à peine
Leur jupon
Et laissent au mystère
Son mystère
Des mots inconnus
Les pieds liés
Aux racines
D'une autre danse
Tremblent au bord des lèvres
Et loin
Très loin
Des mots enfouis
Dans leur nudité
Avancent pas à pas
Et entrent par surprise
Des mots
Qui se taisent
Et sommeillent
Sur la magie
Du silence
Légère panique à l'X
Légère panique à l'X
J'y étais
Pour de vrai
Belle comme un trophée
Là-bas
Au bras
De mon cavalier
Rêvé
Xavier
De la Gambille
En place pour le quadrille
Que nous avions répété
Et tant dansé
Avec les quinze autres couples
Parmi les plus souples
Port altier
Sourire léger
Maquillage appuyé
Souliers cirés
Grande soirée
Nos familles assemblées
Mon père Félix
Anxieux pour son Alix
Ma mère Elena
Si heureuse d'être là
Les parents de Xavier
Qu'on n'avait pas rencontrés
Mais en coulisses
Xavier dérape
Et glisse
Un cri s'échappe :
"Ma cheville !"
Vite de la glace
Plus de quadrille
Je te remplace
S'écrie François
J'ai la même taille que toi
Vite il s'habille
Et prévient Alix :
"En place pour le quadrille
Du bal de l'X !"
Allez François
Les dés sont jetés
C'est toi et moi
Tenons-nous prêts
Sa main
Serre la mienne
Et soudain
Transportée à Vienne
Plus rien ne me sert
De croire être amoureuse
De Xavier
Je suis trop heureuse
Même si je tentais de l'en dissuader
Il voulait se déclarer
Ce soir à sa mère Consuelo
Directrice de Sup de Co
À son père Angelo
Responsable de Sciences Po
J'aurais été obligée
De tergiverser...
Mais François
Surgi du bois
Comme ça
Ce gars
Trouvé trop bien pour moi
Qui nous avait récité
Avec facilité
La tirade de Pantagruel
Qui questionne
Sur mariage
Et cocufiage
Et auquel
Ne lui répond personne
Il nous avait transportés
De rire
Et je ne peux m'empêcher
Encore d'en sourire
(extrait de
Quadrille (TOKYO)
Où est passé notre quadrille ma mie ?
Et ton joli jupon brodé, et tes petits pieds
Contre les miens. Quelque chose t’étonne ma mie,
Quelque chose qui s’en est allé ?
Prends donc mon bras ma mie que les forces te reviennent et la joie avec elles.
Nos souffles portés pas plus léger que nous te souviens -tu ?
La flûte de baptiste, cette innocente musique, il faut du temps pour que ce printemps revienne .
Pour que tes mains si calmes se posent comme une hirondelle sur mon épaule il faut du temps tu sais.
Je regarde amusé ces jeunes gens se tortiller, c’est peut-être par nécessité qu’ils ne se rapprochent plus.
Nous avions moins peur qu’eux. Allons ma mie faire du bruit comme notre quadrille, égarons nous dans les ruelles et d’un pas de paysan comme si nous étions chez nous partout le reste est sans importance ma mie .
Quadrille (Laura)
Ce mot m’a tout de suite fait penser à Constantin Guys et à Baudelaire, même si je n’ai pas trouvé d’œuvre ressemblant à un quadrille de cet artiste mais je remercie le défi du samedi de me replonger dans cet univers moderne de tableaux parisiens. Quand je me remets dans « Les fleurs du mal », Nerval arrive avec son monde de théâtre et c’est là que surgit Eugène Lami qui fut (entre autres) décorateur et a dessiné le quadrille de Marie Stuart. Lami a aussi dessiné « La nuit de mai » que j’ai sans doute vue au Château de Malmaison. De mot en nom et de nom en lieu, je vous emmène à Pantin sur les pas de Nerval qui y avait vu des « quadrilles joyeux. »