B comme belliciste (Adrienne)
- Et qu’allons-nous faire aujourd’hui ? demande Madame après les salutations d’usage.
- Aujourd’hui on va s’entraîner à écrire ! répond petit Léon.
- D’accord… et on fait quoi, exactement ? Une dictée ?
- Non ! Vous me montrez une image ou vous me donnez une phrase et moi je dois inventer une histoire.
- Ah ! Bon !
Madame a pris la première chose qui lui tombait sous la main : un épais fascicule publicitaire reçu avec son magazine. On y voit des familles, heureuses de faire du camping à mille milles de toute région habitée, entourées d’un tas de matériel utile et inutile.
- Voilà, fait-elle, en lui proposant une photo de paysage idyllique, avec de la verdure, une montagne au loin, un beau soleil couchant. C’est bon ? Ça te va ?
- C’est très bien, approuve petit Léon avec tout le sérieux de ses onze ans.
Et il se met à écrire.
- Fini ! crie-t-il tout joyeux, trois minutes plus tard.
Madame lit. Des extra-terrestres sont venus, la famille a été pulvérisée et des zombies sont sortis de terre. Petit Léon est content de lui et Madame est assez perplexe.
- Bien, bien, fait-elle. Tu en as, de l’imagination ! Mais pourquoi ils sont tous morts ?
Quelques explications et corrections plus tard, petit Léon réclame une autre photo.
Et bien, croyez-le, que vous lui montriez le sable du Sahara, une vue de la mer du Nord, des palmiers au soleil ou un pont de bois à Lucerne, petit Léon vous inventera chaque fois le même genre d’histoire : le pont explosera, des zombies sortiront du sable, des soucoupes volantes déverseront des hordes d’aliens hostiles et les derniers humains deviendront cannibales…
- Moi j’aime les films d’horreur, explique-t-il.