Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le défi du samedi
Visiteurs
Depuis la création 1 050 282
Derniers commentaires
Archives
13 mars 2021

Zounia Ben Lemna se raconte - tiniak

- Episode inédit, extrait d’un feuilleton en cours sur ‘poLétiquement vôtre-

 
Exergue : Parce que c’est tous les jours 8 mars, #machoman...
***

 

Renfilant sa vieille gabardine (“toute pourrie, nan mais, wak Bob ?” comme le lui dit souvent sa partenaire), le lieutenant Merle se tourna vers l’agente Ben Lemna qui faisait de même, avec son perfecto rapé à bien des endroits, et lui proposa :
“- Dis-moi, major, ça te dirait-y pas de s’enfiler une bière ou deux avant de rentrer à nos vies misérables de poulets déplumés ? Après tout ça, c’est pas péché, hein ?”
Zounia lui retourna son sourire en coin qui signifiait “Vouiche, mais on s’éternise pas Bob, ok ?”
Du coup, elle répondit :

“ - Alors on y va, mais en scoot, sinon, c’est mort !”
Robert Merle entendit l’avertissement. Il avait pourtant bien envie de bringuer un brin, ce soir. “Mais bon…”

 

Un quart d’heure plus tard, les deux agents de police, rendus à leur vie civile, étaient attablés à la table que le patron du lieu avait pris soin de leur libérer dès qu’ils avaient pénétré dans son établissement, un bar à l’irlandaise, lui-même étant de (lointaine) origine de “la divine Erie des poètes”, comme il aimait à le faire entendre. Un peu trop souvent, de l’avis même de ses habitués.

Leur deuxième bière à la main (et la troisième en attente, commandée discrètement par Robert au nom de ce vieux principe cher aux piliers de bar : “jamais deux…”), après avoir pris quelques nouvelles l’un de l’autre, concernant leurs vies privées, ils se laissaient bercer par une ballade gaëllique. Parce que l’absence de discussion est souvent la marque d’une amitié véritable. “Et même d’un véritable amour…” songeait, à ce moment, l’homme enfin un peu plus détendu.
Soudain, un type, à l’évidence pas familier de l’endroit, s’adressa directement à Zounia en demandant :
“- Pardon si je dérange, mais ça vous dirait que je vous offre la prochaine, mademoiselle. Si monsieur n’y voit pas d’objection, bien sûr ? ajouta le bougre en envoyant à Merle un clin d'œil des plus malvenus.”

Robert n’eut pas le temps de réagir que déjà Zounia répliquait, avec un sourire calculé :

“- Toi, c’est sûr, t’as tous tes vaccins à jour sauf celui contre la goujaterie. Mauvaise pioche, garçon. Va tenter ta chance ailleurs, j’y serai pas.”
Le type en resta coi quelques secondes durant lesquelles Zounia eut encore cette pensée : “Il se trouvera bien quelque écervelée sur ton passage pour satisfaire tes projets pour la soirée, connard !”. Pensée qu’elle n'extériorisa pas verbalement, mais qui explosait dans son regard dont le brun foncé s’était profondément assombri, peut-être jusque à un noir abyssal.

Le type renvoyé à ses pénates, Robert Merle saisit l’occasion (“pas la première, mais bon… allons-y !”) pour poser une question qu’il n’arrivait pas à s’autoriser à poser à sa partenaire chérie :
“- C’est marrant, commença-t-il comme pour dédramatiser la nature de la question intrusive qui allait suivre, un beau brin de fille, euh… de femme comme toi, intelligente, pas bégueule, fine et cultivée, depuis six ans qu’on se connait, hein ? je ne t’ai jamais vue avec… disons… quelque attache pour quelqu’un. Tu vois ce que je veux dire. T’es pas obligée de répondre, note… Juste note que ça m’étonne, quoi. Pardon, mais… la preuve ! t’es suffisamment bien gaulée… J’ai pas dit, belle hein ? J’ai dit…”

“- Ouais ok ok, Bob… Attends, le coupa Zounia, fermement, mais en douceur.”

Elle l’avait appelé “Bob”, c’était déjà ça, songea Merle. “Elle ne m’en veut pas d’avoir posé c’te foutue question, se consola-t-il d’avoir osé en venir, pour la première fois entre eux, à ce point sur le terrain de l’intimité.”

Voyant combien Zounia se ramassait, il sut qu’elle se préparait à bondir. Il l’avait déjà vue faire. Mais jamais pour aucun des dialogues, publiques ou privés, qu’ils avaient tenus l’un envers l’autre. “Six ans, putain ! ‘Faut pas qu’ ça casse, hein ? ON est d’accord, ma belle ?” se dit en frémissant, à des endroits inconnus de son corps et de ses sentiments, le lieutenant qui ne voulait absolument pas en être un. Pas là. Pas ce soir.

“Juste pas maintenant ! ...Juste Bob…” implora-t-il secrètement.

Alors, Zounia Ben Lemna, négligeant de remarquer qu’une troisième tournée de bière prenait place à leur table, le menton calé dans ses poings serrés à blanc, dit à Robert Merle :
“- Ok, d’acc’… Je vais te le dire à toi, Bob… A TOI… Personne n’en sait rien ici, et personne ne doit jamais savoir, ok ? Parce que la frontière entre le blabla et la trahison, c’est du fifrelin. C’est ok, Bob ? ...JAMAIS !”
Zounia lui avait semblé avoir hurlé en pleine face, mais à voix basse. Robert Merle (homme d’âge mûr, tout de même lieutenant de police, supérieur de la jeune femme, là, devant lui, qui était devenue sa partenaire à compter du jour où elle avait posé “son petit cul de banlieusarde... ou dieu sait d’où !.. sur la banquette passager de ‘son’ véhicule de fonction…”) Robert... Non, “Bob” ! se dit alors qu’il aurait mieux fait de fermer son foutu bec… de poulet ?


“- On se refait pas, en vrai, lâcha Robert, pour lui seul, mais de fait, à haute et distincte voix.
“- Ouais, c’est ça, Bob. C’est tout pile juste ça, abonda Zounia dans un soupir, un sombre magma coulant sous un repli de sa lèvre inférieure et un volcan en éruption à l’orée de ses grands yeux tous ronds. De ses deux yeux si bruns, et cependant si doux, malgré tout.”

***

- Et voici ce que l'épisode suivant développera de la confession de Zounia à Robert -


Robert Merle se racla le gosier avant d’entamer sa troisième binouze. Manifestement, Zounia prenait son temps. A coup sûr, la gravité des propos qu’elle allait lui tenir, comme venait tout juste de l’annoncer sa partenaire de patrouille, nécessitait qu’elle en choisissât avec soin les paroles. Il attendit donc, patiemment, qu’elle se mît à parler.

Le bar se remplissait toujours davantage, de gens de passage, mais surtout des habitués, familiers du lieu et de son placide patron. Robert, ne quittant pas Zounia du regard, en reconnut quelques-uns du coin de l'œil, mais ne les salua ni ne leur rendit leurs saluts.

Zounia Ben Lemna se saisit alors de la bouteille près de son verre à bière et dit en se servant à boire :

“- Jamais deux sans trois, hein ? Ok, Bob… Bon voilà : entre l’âge de treize et quinze ans, j’ai été abusée sexuellement par mon oncle paternel, d’abord, puis par chacun de ses trois fils.”

Le lieutenant Merle se sentit soudain prêt à reprendre du service dans l’instant. Le Robert Merle en civil, de prime abord abasourdi par cette déclaration inattendue, décida cependant de ne pas réagir. De laisser à Zounia le loisir de développer ou non. Ce qu’elle ne manqua pas de faire, puisqu’elle s’était lancée.

Zounia Ben Lemna s’ouvrit donc à son collègue et ami, après lui avoir fait de nouveau l’injonction de ne parler de ce qui allait suivre à personne, “absolument personne !”

Merle réitéra sa promesse d’un hochement pesant de la tête, le regard encore effaré de ce qu’il venait d’entendre.

Et Zounia raconta…

***

On finit en chanson, hein ?
https://www.youtube.com/watch?v=8d-blfWHSng&list=RDvBHild0PiTE&index=3

Publicité
13 mars 2021

Lichette ribambelle et fifrelin (Ilonat)


« less is more »… en attendant Godot

(Deux personnages insolites, un peu minables, sur un chemin de campagne)

- c’est encore loin ?
- chouia…
- mais encore ?
- plus ou moins…
- c’est vague
- « less is more ! »
- comprend pas
- c’est une litote
- ça nous avance guère
- avancer ou pas…
- c’est kif kif bourricot
- là, tu vas loin !
- c’est une image…
- non monsieur, c’est une métaphore
- tu crois qu’il sera là ?
- qui ça ?
- ben, Godot !
- on verra
- et s’il n’est pas là !
- on fera avec
- il reste du café dans le thermos ?
-  une lichette
-  c’est tout ?
- tu préfères une mouillette ?
- toi alors…On s’arrête un peu ?
- comme tu veux
Courte pause dans leur cheminement
- y a pas grand monde dans le coin
- pas bezèf
- avant, y en avait des flopées
- des ribambelles
- et maintenant y a plus person
- macache bonbon, ça rime
- t’as encore de la thune ?
- pas un radis
- un ti picaillon ?
- pas un fifrelin
- pourtant, t’as touché un paquet !
- quand ça ?
- l’autre jour, au tacotac
- trois francs six sous
- il devrait t’en rester
- que dalle !
- qu’est ce qu’on va manger ?
- des clopinettes
- ça nourrit pas son homme
-  t’as encore faim ?
- un tantinet
- bravo ! alors là, bravo !
- pourquoi ?
- pour la recherche lexicale
- ça m’fait une belle jambe
- profitons-en !
- pour quoi faire ?
- on se remet en route
Ils se remettent en route…
- c’est encore loin ?  - chouia…
- mais encore…  - plus ou moins  
- « less is more », tu l’as déjà dit   
- t’as tout compris…

 

13 mars 2021

Pas beaucoup plus qu'un fifrelin? (Laura)

 

Mes livres ne me rapportent pas beaucoup plus qu'un fifrelin
Peut-être moins que ce que peut gagner un margoulin
A peine de quoi, je suis sûre, acheter un agnelin
Certains disent que je devrais effacer tout ça avec un sopalin

Mais pour le fantôme et moi, ça vaut plus qu'un fifrelin
Au moins plusieurs draps, voire des camelins.
Les sommets que vois en écrivant en deviennent capitolins
Je devrais alors gagner des francs suisses ou des carlins.

Pourquoi ne pas écrire sur du vélin
Avec des lettres en caractère carolin
Pour gagner plus qu'un fifrelin
Et avoir mon nom gravé sur du marbre cipolin?

Je voudrais écrire sur le ciel en rouge carolin
Mes paysages pour en faire un tremplin.
Mais les gens préfèrent acheter des craquelins
Que mes mots qui n'ont pour eux rien de cristallin

Suis-je, depuis le début de ma vie sur le déclin
Si je ne parviens pas à faire entendre ma voix, drelin
Drelin: écoutez-moi et vous serez peut-être enclin
A me faire gagner quelques francs ou esterlins?

Si je réussissais à dompter ma peur comme un félin,
Je parviendrais  sûrement à modeler des vers figulins.
Je marche comme un équilibriste accroché à un filin
Qui vise la lune à atteindre à la Saint Glinglin

J'ai visité beaucoup de manufactures sans voir de gobelins
Mes objectifs sont tout ce qu'il y a de hyalin:
Vendre pour un jour visiter le Kremlin

Voyage qui coûte plus qu'un fifrelin

 

13 mars 2021

Attention, c'est du Laclos (Vegas sur sarthe)


La définition exacte c'est « Qui ne vaut pas tripette » en huit lettres.
Instinctivement j'ai pensé à Germaine.
Elle rentre pile poil dans les cases … pour une fois qu'elle rentre dans quelque chose sans forcer à part dans la porte du garage.
Sauf que ça commence par un F et que ça ne peut être que moi qui l'ai mis là, ce F.
Si je change le F pour un G, ça bouzille le peu de mots que j'ai déjà eu du mal à placer et j'ai horreur de ne pas terminer les mots croisés ; ça me fout en rogne pour la journée et c'est Germaine qui déguste!
Faut dire que j'avais mis la barre très haut en m'attaquant aux mots croisés de Laclos sous l'oeil moqueur de Germaine.
« A quoi ça servirait que Laclos se soit décarcassé ? » disait-elle en parodiant une vieille pub des années 70.

Alors j'ai écarté Germaine au propre comme au figuré pour repartir sur des bases saines et j'ai trouvé Fusibles. S'il y a quelque chose qui ne sert à rien c'est bien le fusible.
« Ça fait que sauter » dit Germaine sans rien parodier, pas même une pub de Youporn.
Combien de fois ai-je dû farfouiller dans le coffret à fusibles de la bagnole après que Germaine ait essayé de brancher son fer à friser sur l'allume-cigare !

« Qui ne vaut pas tripette » … ça ne peut pas être Fusibles au pluriel sinon Laclos aurait écrit « Qui ne valent pas tripette ».
« Y'en a là dedans » dit parfois Germaine en me collant une pichenette derrière les oreilles ; c'est sa manière à elle de m'encenser.
Elle dit que je joue petit bras, que je babiole, que je broutille, ce sont ses mots pour dire que je vaux mieux et que je le vaux bien en parodiant une vieille pub cosmétique des années 70.
Elle en a une autre qui dit « On se lève pour Jeannette » mais je ne l'ai jamais comprise car notre femme de ménage ne s'appelle pas Jeannette et y'a pas de Jeannette dans notre entourage, y'a personne dans notre entourage.

Il y aurait bien le mot Bagatelle vu que sur ce terrain avec Germaine ça vaut pas grand chose mais ça commence par B comme Brimborion et en plus ça déborde des cases.
J'aimerais tant que ça déborde avec Germaine – pas seulement la casserole de soupe – j'aimerais qu'implose le couvercle, que s'échappe la vapeur pour nous emporter dans des volutes aphrodisiaques et … où en étais-je ?
J'ai trouvé Futilité en pensant toujours à Germaine, à ses Feux de l'amour, à son Euro Million, à son Pékin Express, à son Modes&Travaux, à son marché du dimanche matin, à ses raviolis du lundi, enfin à tous ces petits riens mis bout à bout qui ne font pas grand chose.

J'hésite encore car il y a le mot Fixation qui conviendrait bien et Fixation ça rentre dans les cases comme une cheville de 12 dans un carreau de plâtre, comme cette cheville trop longue qui traverse le mur quand Germaine se déchaîne avec le marteau en criant «Tu vas rentrer, salope ? »
Je hais tous ces mots crus qu'elle réserve à une pauvre cheville de 12 ...
Ça finit toujours par rentrer ; après tout c'est que du plâtre, du papier à cigarette dit Germaine quand les voisins se chauffent un peu trop et qu'on doit supporter leurs ébats.
J'aimerais tant que ça déborde avec Germaine.

Allez ! J'opte pour Fixation d'autant plus que ça finit par N comme le mot Fin et ça m'arrange.


13 mars 2021

Inégalable Fricassée (Lecrilibriste)

 

Fifres joyeux et tambourins

Entreront dans la farandole

Pour faire danser les demoiselles

Et tourner les jupes de lin

sur les jupons de dentelle

Ils se retrouveront le soir

Pour partager la fricassée

De trompettes et de fifrelins

Que la Mère aura préparés

C’est le Père qui les a trouvés

c’est lui qui connaît tous les coins

mais son secret est bien gardé

Le seul qui sera initié

C’est son fillot bien aimé 

qui le suit sans perdre sa trace

et qui s’accroche à ses basques

parce qu’il aime flâner en forêt

profiter de tous ses attraits

respirer le grand air

sentir le vent de liberté

et repérer les odeurs

des trompettes de la mort

sans oublier de trouver

des boutons de culotte

dans les ronds de sorcières

des girolles  et des fifrelins

pour étoffer la fricassée

inégalable de la Mère

Et croyez-moi, ce n’est pas rien

Quand on connait les fifrelins !

 

Publicité
13 mars 2021

Fortune (JAK)

 

Obeline depuis l’aurore  est d’attaque, mais ce n’est pas pour contempler le lever du soleil.

Non, elle est aux fourneaux, son emploi du temps rigoureux et chargé, l’y oblige. Elle doit  toujours trouver de nouvelles tambouilles, sinon ça rouspète dur autour d’elle

 Soixante  bouches à nourrir, elle doit   cogiter afin d’apporter du changement  à leur  subsistance. Mais son cœur de nullipare avec dévouement veille sur tous ces estomacs à remplir 

il faut dire qu’elle est cuisinière dans un internat  pour enfants déshérités, une   ribambelle de gamins que la vie n’a pas gâtés

Elle bosse dur, sans rechigner.

Ce n’est pas Léon, l’homme à tout faire, un fifrelin de la pire espèce qui ne pense qu’à courir le guilledou, qui peut lui donner un coup de mains. 

En douce pour se stimuler, elle lampe de temps à autre une lichette de rogomme

Cela lui réchauffe le coeur, et les membres.

Membres endoloris, engourdis par  l’arthrose.

Il lui semble alors être moins patraque

Son médecin lui a bien dit de ne pas forcer sur la dive bouteille, mais elle n’en a rien à faire, et évite de le rencontrer.

 Pourtant  , le mois dernier, elle a  bien dû  le voir  à  cause d’un sal virus, qui lui avait mis le tournis.

 

Bon, cela s’est passé au mieux  et  la voici de retour après 15 jours d’observation, qui a   repris sa besogne pour nourrir sa marmaille.

Ses galapiats qui ont  toujours bon appétit !

Mais ce matin, pour des raisons indéterminées, que même le psy du service ne pourrait analyser, elle en a  soudainement ras la casquette.

Elle a envie de crier Stop.

Dans sa petite cahute, de longue date, avec Jules le facteur, lui aussi arthrosique  ils ont pris l’habitude de faire la causette chaque jour,  juste avant le coup feu,

Il lui  évoque souvent sa prochaine retraite : il  réfléchit  à se retirer aux Caraïbes où il a un lointain cousin.

Il n’a rien d’un foutriquet  ce Jules, avec sa belle moustache gominée.

Obeline  s’octroie ces moments sans se désheurer.

 

Pendant qu’il pose le courrier, elle lui sert, un petit vulnéraire  alcoolisé, versé avec déférence  dans l’unique verre de cristal qu’elle a hérité d’une vieille tante, Itou, elle  s’en rempli  un douteux  gobelet  Durex. Et ils trinquent à leur santé respective,

Une sorte d’inclination a surgit en elle pour ce primesautier préretraité, et il lui semble que c’est réciproque

Et depuis qu’Obeline s’est remise de la corona elle voit tout différemment.

Aujourd’hui, pour Obeline, c’est décidé, toute honte bue, ce tantôt, elle va lui faire une proposition, à laquelle elle songe depuis peu:

 Elle projette lui offrir  toutes les économies de son escarcelle, et de partir avec lui !

Ce fin gourmet aurait une cuisinière indéfectible, c’est là son argument infaillible  

 Dans son rêve elle s’imagine dépaysée dans une thébaïde embaumée, se voit  décorant une hutte avec des hibiscus, et sur une  table en bois, avec seulement…. deux assiettes.

 

On  sonne à la porte, elle s’y  rend en courant ….

-Ah !

Une charmante blondinette est là, courrier à la main

 

-Jour M’dame, je suis la nouvelle préposée.

 

Je remplace Jules qui est parti la semaine dernière avec sa bourgeoise  aux Caraïbes.

 

Adieu vaches cochons couvées, il ne reste plus alors à la naïve

Obeline que de pleurnichailler dans son arrière-cuisine

 

13 mars 2021

Participation d'Emma

13 mars 2021

Pf ! (Kate)

 

Pas un fifrelin

Ah ! Ah !

Et un "tu l'auras"

Sera mieux qu'"un tien"

Bredouille

En somme

Pauvre grenouille

Ma pomme

Pas la moindre girolle

Aucun grain de poivre

Nul vaccin en vue

Nulle actrice connue

Sinon quelques paroles

Qui me navrent

 

Pas un fifrelin

Zéro joueur de fifre

Absence de sous-fifre

La solitude, tiens !

Alors "À l'aide

Wiki et compagnie !"

Mais "with Madonna in bed"

Ne m'aide pas ici

0 2

Succombons

À nos vieux démons

Chevauchons

Et cravachons

Schtroumpfons

Par vaux et par monts

 

Première assertion :

" Si les Schtroumpfs vivent dans des champignons"

Deuxième assertion :

"Alors les fifrelins leur servent de maisons"

À tort ou à raison

Pourtant leur nom

Nom d'un Schroumpf !

Presque une chaussette

Non, pas à six schroumpfs

Pas noire ni verte

0-2 2

Allons donc !

Avouons ma passion

Mon trip mon démon

C'est la seconde mutation

Consonantique

Pf ! De la linguistique

Des langues cousines germaniques

Pas un pfennig

Pas de bol

On navigue

On s'envole

Et flûte !

Et zut !

Le fifrelin

Ne vaut pas rien !

13 mars 2021

L comme lichette (Adrienne)

 

Le père, on l'a déjà dit ici, c'est celui qui est passionné de gastronomie et compulse ses bibles culinaires pour en extraire tous les repas de fêtes de la famille élargie: chacun.e compte sur son savoir-faire pour rendre gustativement inoubliables les réveillons, les communions, les anniversaires du filleul et autres réunions autour d'une table.

 

Dans la cuisine, l'Adrienne a toujours été son son petit second et le voyait peser, mesurer, compter, vérifier.
"La gastronomie est une science exacte", disait-il.

Puis il y a eu belle-maman, qui avait aussi sa réputation de fine cuisinière à tenir.
Qui pesait à peu près.
Oubliait de regarder l'heure.
Prétendait voir quand un mets était prêt.

L'Adrienne souriait et se disait qu'elle avait trouvé là l'exact opposé de son père.

Mais elle se trompait.

Elle s'en est rendu compte le jour où elle a assisté à la confection du cozonac de Nouvel An chez l'amie Violeta, et ça s'est confirmé avec la baklawa.

Oui, il y a une recette, des ingrédients à peser et à mesurer.
Mais on ajoute un peu plus de ceci.
Puis de cela.
Pour compenser.
Parce que c'est devenu trop sec.
Ou trop liquide.
On goûte.
Y a-t-il assez de sucre?
Non, il n'y en a jamais assez :-)
On en rajoute.
On regoûte.
On fait goûter.
On rajoute.

Et c'est ainsi, que de lichette en tantinet, de soupçon en larme ou en nuage, on devient la reine du pifomètre.

13 mars 2021

Pour ce que ça vaut (joye)

pour ce que ça vaut

13 mars 2021

Fifrelin (petitmoulin)


Il était une fois, un jeune musicien qui jouait du fifre en habit de lin. Nul ne connaissait son nom. On l'appelait Fifrelin.
De petites salles en festivals, Fifrelin jouait du fifre dans son habit de lin.
Son nom ne brillait pas sur les façades des grands boulevards mais Fifrelin n'était jamais plus heureux que sur la scène. L'émotion silencieuse des spectateurs lui caressait l'âme.
Toute modestie remisée, il recevait les "Bravo Fifrelin ! Bravo Fifrelin ! " avec enthousiasme.
Hélas ! Un vent mauvais souffla sur le monde.
Tous aux abris, c'est la guerre.
Le soleil disparut sous un grand masque de nuages.
Le ciel devint sombre comme l'ennui.
Les étoiles furent confinées dans le puits profond des nuits sans lune.
Fifrelin fut enfermé dans la geôle du non essentiel.

Le jeune musicien ne joue plus de fifre en habit de lin.

13 mars 2021

Le jour du seigneur chez mes dabuches (Vanina)

 

C’était comme un rituel, chaque dimanche passé chez mes grands-parents. Après le déjeuner, Mémée débarrassait la cuisine, nettoyait la maison ou tricotait. Pendant ce temps, avec Grand-dabe -qui m’appelait « mon fisset »-, nous allions dans le salon, de chaque côté de la table de jeux, pliante et nous commencions ou continuions une partie d’échec. Grand-dabe avait son parler bien à lui, argotique, il avait connu la guerre, comme il le faisait remarquer à son dab -mon père-, pour affirmer qu’il était trop tard pour lui faire changer de langage.

La toute première fois, je l’entends encore me présenter les pièces: me donner leurs blazes!
C’est ainsi qu’il me présenta le boss, celui autour duquel tout se jouait et qui pourtant ne peut se déplacer que d’une case à la fois, mais dans tous les sens. La Berezina ne permettait presque plus au boss de bouger. Et lorsque tu pouvais aller te faire rhabiller chez plumeau, le jeu était fini.

Puis il me présenta la crinoline, au grand pouvoir de déplacement. Elle avance suivant les colonnes, les traverses ou les diagonales du nombre de cases qu’elle veut. Au départ, elles se font face, la crinoline blanche sur une case blanche, la noire sur une noire, en "d".

De chaque côté des tourtereaux, il y a les fêlés qui se déplacent selon la diagonale. Puis viennent les ramasse-crottin qui sautent d’une case à l’autre, inutile de décrire ici leur déplacement. Pour finir cette traverse, il y a  les guitounes, leur déplacement suit les colonnes ou les traverses.

Sur la deuxième traverse, en "2" pour les blancs ou "7" pour les noirs, me montrait-il sur la Parfaite se trouvent pour chacun huit fifrelins qui vont droit devant une seule case à la fois.

Une fois la présentation faite, il a retiré toutes les pièces et m’a demandé de les remettre en place, pendant que je gambergeais pour ne pas faire d’impairs, Papy bonimentait, expliquait le coup.
Cette première séance fut mémorable tant le vocabulaire était riche juste pour positionner les deux fois seize pièces sur les 64 cellules, et maîtriser leurs déplacements. 

Chaque semaine je progressais.

Mais la vraie surprise, je l’ai vécu à l’école en m’inscrivant au club d’échec, quand je découvris que les termes que je prenais pour acquis n’étaient pas ceux d’usage...

 

13 mars 2021

Un Fridolin nommé Fifrelin ! (Joe Krapov).

DDS 654 Vide-poche

C’est comme les vide-poches fluorescents que les imprimeurs déposaient à la Bibliothèque Nationale en 1929. Qui pourrait imaginer que ça a bel et bien existé, que les gens avaient ça chez eux ? On a tellement d’images en noir et blanc de cet entre-deux guerres, sans doute parce que la couleur coûtait un pognon de dingue, qu’on croit que les gens eux-mêmes vivaient en noir et blanc !

Et justement, il y a eu aussi une période, à la fin de 1920, où l’expression «Ça ne vaut pas un Fifrelin» ne signifiait en rien que le Fifrelin fût une quantité négligeable. Bien au contraire. Mais on parle de Fifrefin, non de fifrelin. La majuscule ici est capitale.

Ce fut même un phénomène artistique majeur que le Fifrelinisme. On sortait de la grande guerre, c’étaient les années folles, l’arrivée du jazz, on dansait le charleston et le shimmy, il y avait eu Dada, il y aurait Picasso, Braque et peut-être le Surréalisme… ou peut-être pas.

Parce que soudain Adolphe Fifrelin était apparu, en provenance directe de l’Allemagne battue et qu’il avait lancé la vogue du Fifrelinisme.

***

- Tout ça, c’est de l’art dégénéré, disait Adolphe en parlant du cubisme et de l’art déco. Ca ne vaut pas un pfennig !

Et pour montrer son dégoût de la chose, il ne prononçait même pas la majuscule de Pfennig et il écrivait le mot sans la mettre alors qu’en allemand tous les noms communs en comportent une à leur initiale.

C’était un homme d’emportements que ce Fifrelin et c’était là monnaie courante à l’époque où le ressentiment était partagé par une grand partie du peuple allemand dépité d’avoir dû rendre l’Alsace et la Lorraine. Mais ses jugements à l’emporte-pièces ne dépassaient pas jusque-là le cadre agréable et bavarois en diable de la bonne cité de München (Munich für die Franzosen !) où il exerçait la profession de militaire, très petit gradé puisque seulement soldat de 1ère classe mais dans les tavernes qu’il fréquentait on l’appelait "Le Caporal".

Tout aurait pu aller à peu près bien pour lui s’il ne s’était pas mis en tête de devenir un peintre reconnu. Il avait depuis toujours un talent certain de dessinateur et il l’exerçait dans le temps libre que l’armée lui laissait. Il composait de jolies toiles figuratives mais… Comment dire ? De même que chez Mozart il y a parfois «too many notes», trop de notes, il y avait chez Adolphe Fifrelin trop de réalité dans ses représentations.

Dans sa dernière toile, une nature morte intitulée «La banane et le rouleau de papier adhésif» «Die Banane und das Klebeband» on était saisi autant par l’hyperréalisme de la représentation que par l’originalité de la composition, un gros plan d’une toile vierge dans l’atelier de l’artiste sur laquelle la banane était fixée avec de l’adhésif brillant.

Casting Tintin 06

Ses portraits de pirates des mers du Sud sentaient la poudre, la sueur, le sang, le rhum, le fouet et la sodomie et fichaient la trouille aux mômes. Mais quelle ressemblance avec le modèle une fois que le tableau était achevé. On n’avait jamais vu ça ! Seulement…

Seulement les marchands de tableaux juifs se marraient quand il venait leur proposer sa production.

- Au cas où vous ne sauriez pas, Monsieur le militaire, il y a un truc qui s’appelle la photographie. Ça donne des résultats similaires à ce que vous faites mais ça n’est pas ça que les gens veulent, voyez-vous. Ça ne se vendra jamais, vos marins d’eau douce ! Croyez-moi, cré tonnerre de Brest-Litovsk ! Trop ressemblants !

Adolphe ne disait rien, remballait ses toiles mais intérieurement il les envoyait se faire foutre en songeant : «Je me vengerai, un jour !».

***

Et il semble bien que le jour est venu. Hier soir un couple d’aristocrates français est venu frapper à sa porte. Très jeunes tous les deux, lui belle prestance de petit ambitieux de province, elle très gouailleuse et jolie comme un cœur. Ils avaient avec eux un interprète polonais, sans doute un youpin, qu’ils ont présenté comme Maurice Mendjizki. Ils ont regardé toutes ses toiles, en ont acheté deux, un paysage et un portrait – "Die alte Mühle an der Saar" (Le vieux moulin de la Sarre) et "Der Ritter Franz von Schellfisch" (le chevalier François d’Aiglefin). Et surtout ils lui ont promis la fortune et la gloire s’il acceptait de venir s’installer à Paris, tous frais payés, pendant un mois, atelier personnel à Montparnasse. Principale obligation en retour : faire le portrait de Mme de McMacron, Kiki, qui adore poser nue pour les peintres. Et aussi : changer de nom.

- Wo ist der Haken ? a demandé Adolf à l’interprète.

- Je ne sais pas où elle est, l’entourloupe, a répondu celui-ci. Ils demandent juste que tu signes tes toiles du pseudonyme de Fifrelin et que ton prénom devienne Adolphe. Je serais toi j’accepterais. Le type a ses entrées partout au ministère de l’Intérieur, plein de pognon et des certitudes sur tout. Et Kiki, c’est la reine de Montparnasse. Pas encore mais presque !

***

Casting Tintin 14Hitler n’a pas hésité longtemps. Une semaine après, il avait obtenu sa permission de s’absenter un mois de la caserne, ses bagages étaient prêts ; il avait pris le train avec l’acompte fabuleux qu’ils lui avaient laissé.

- Qu’est-ce que je leur dis à vos copains du DAP s'ils viennent prendre vos ordres ? lui avait demandé sa concierge.

- Dites-leur que je suis parti envahir la France !


N.B. Les deux dernières illustrations sont dues au talent de M. Ludo D. Rodriguez

13 mars 2021

Fifrelin (TOKYO)

 

La seule chose capable de me sortir du lit ce matin c’est ce fifrelin.

Un vrai joueur de flute que je suivrai jusqu’au bout du monde. Il a toujours une solution ammoniaquée pour réveiller les dieux de l’argent et transformer le mien en papier insolvable.

 Les riches chose inconcevable et exaspérante dont je fais partie ont un don absolument unique pour attirer ce genre de fifrelin.

 J’avais espéré depuis cette rencontre une bonne réduction sur l’impôt pour frais divers engagés dans relation amoureuse douteuse, mais rien n’y a fait. Ma situation financière était comateuse, il y était largement pour quelque chose.

Il fallait songer à construire des douves autour de mon domicile pour que ce magicien aux fibres empathiques ne vienne plus troubler mes neurones vieillissants.

Inventer un tour de passe passe pour le faire disparaitre fut un jeu d’enfant. J’en ai les larmes aux yeux c’est comme si j’avais appris dans la nuit à imprimer des faux billets.

 Le hic c’est que la bête, le cave ou le fifrelin ne l’entend pas de cette oeille.il a franchit les douves le bougre !! je l’ai aspergé d’essence de térébenthine. Qu’est ce que je n’étais pas prête à faire pour le séparer de mes économies.  

v1

13 mars 2021

Le transbordement (Pascal)


Pleine mer. Entre les deux escorteurs, côte à côte, la manœuvre du jour, c’était le transbordement de l’aumônier sur l’autre bord. Avec les élingues plus ou moins tendues, selon les mouvements de roulis des deux navires, l’opération était périlleuse. Sur sa chaise sans porteur, je voulais croire que l’homme de Dieu n’en menait pas large.  Pourtant, tel Jésus sur la croix, endurant le martyr du transfert de personnel, s’il se tenait bien accroché aux montants de sa cage, il ne paraissait pas plus inquiet que cela…

Sans filet de protection, imaginez ce délicat transbordement, au milieu de nulle part ; imaginez l’eau s’engouffrant entre les deux coques comme un torrent en furie, et créant des vagues plus hautes que le pont, les ordres précis et les coups de sifflets donnés de part et d’autre des navires pour accomplir avec succès ces acrobatiques manœuvres de haut vol. Fallait-il que son âme et sa foi envers son Seigneur, sa vie qu’il remettait entre les mains des boscos, soient si inébranlables ? Pour arranger mes vérités, je pense qu’il devait prier pour être aussi courageux ; entre nous, sa participation enthousiaste à ce transport valait bien toutes les leçons de catéchisme du monde. Il avait le visage radieux, un peu comme si une auréole sécuritaire baignait de lumière toute sa personne. Était-il insouciant ou bien ne craignait-il pas la mort ? Si, malheureusement, le grand plongeon était inéluctable, allait-il retrouver son Seigneur et batifoler sur le tapis déroulé des Verts Pâturages ? C’était autant de questions qui se bousculaient dans mon incompréhension de minuscule catholique, mal converti à l’athéisme moderne…

Quand ceux des nôtres balancèrent la cage au-dessus de l’eau, il y eut un terrible ballant, capable de faire dégringoler n’importe quel jeune casse-cou de ce fragile piédestal. Mais non, tel un coquillage amoureux de son rocher, le ministre du culte scotché, à ses convictions, tint bon. En face, sur le bateau récepteur, une poignée de gaillards tiraient sur le boute pour amener rapidement le précieux colis vers eux. Il faut dire qu’avec tout son attirail de bondieuseries, il avait emporté avec lui le courrier du bord…
En cas de défaillance du matériel, de chute, le pauvre bonhomme, enfermé dans sa cage, celle-ci retenue par une élingue d’un côté, et frottant contre la coque de l’autre, dans l’enfer, le tumulte et l’eau glacée, même avec Dieu à ses côtés, il n’aurait pas survécu longtemps à son désastre. Son « Plus près de toi, Seigneur… » n’aurait été que ses dernières volontés sur l’autel sans fleur des disparus en mer…

Avez-vous connu cette extraordinaire situation, somme toute infernale, où vous désirez par-dessus tout que rien n’arrive de fâcheux à l’événement, et que vous n’êtes, pourtant, qu’un minuscule spectateur visionnant l’éventualité du tragique fait divers ? Tout à coup, on l’aime, ce héros anonyme, cette marionnette équilibriste entre le ciel et la mer, seulement suspendu par quelques « ficelles » et par l’opération du Saint Esprit. Il y a des choses divines qui supervisent les vies, je crois ; l’emploi du temps de notre existence est régi par un je ne sais quel devoir supérieur d’être présent, celui d’être maître ou seulement pion assujetti aux circonstances, qu’on soit pleutre ou brave, grand ou petit, jeune ou vieux ; d’autres l’appellent l’instinct…

Nous, on serrait les dents ; perdre notre ecclésiaste, ce serait un peu comme perdre la foi. Virtuellement, on tirait sur le boute qui l’amenait sur la plage avant du bateau adverse. Dans les deux camps, sur la passerelle, sur le pont et dans les compartiments machines et chaufferies, tous aux postes de manoeuvre, du manœuvrier à la barre, au chauffeur devant la façade, l’équipage était au réel sacrifice de cette réussite…

Maintenant, écartelé comme un hérétique entre les deux bateaux, il était dans le vide, en plein au milieu de son transfert ; sous lui, c’était l’intense bouillon, la cataracte insupportable, l’enfer aqueux entièrement dévolu à son engloutissement. Devant, des deux étraves, giclaient des myriades d’éclaboussures en confettis, créant des arcs-en-ciel éphémères ; une passerelle pour le paradis, me disais-je. Il n’empêche, suspendu dans le vide, il était spectaculaire, ce fragile héros, entre deux ponts, entre deux fanions, entre deux prières. Rempli d’humidité, mais accumulant les miracles, maintenant, il marchait sur l’eau…

Tout à coup, oscillation perverse ou gîte contondante, le bas de la cage vint heurter violemment la crête des vagues affamées qui tentaient déjà de le happer, comme des langues assidues léchant goulûment la blanche hostie à portée de leurs gueules ! Dans des gerbes d’écume, il ballottait, l’aumônier, comme un ricochet en record de rebonds, comme un roseau pris dans les remous d’un coup de queue de monstrueux brochet ! ! Son Dieu, tout là-haut, le mettait-il à l’épreuve ?... Lavait-il le moindre de ses péchés sous cet orage méditerranéen ?...

Nous, les voyeurs de la plage arrière, avec nos gros mots de basse ville, on sollicitait nos démons à l’apaisement, pour que le futur fait divers se termine en fait de gloire ! Voyez-vous, c’était triste et gigantesque en même temps. Pendant ces secondes de purgatoire, sa vie ne pesait pas le poids d’une plume, elle ne valait pas un bouton de culotte, un fifrelin dans la corbeille du bedeau pendant la quête dominicale, à la représentation de onze heures. Et son épitaphe déjà gravée titillait nos pensées : « Mort en partant en croisade, entre Toulon et les faubourgs de Jérusalem… »  
Pourtant, son aura multicolore le maintint à flot ; un autre coup de roulis le fit s’élever brutalement dans les airs, comme un élastique se détendant d’un coup. Fragile projectile, pierre dans la fronde de David, il aurait pu se faire éjecter tout aussi facilement... Enfin, les boscos du bateau receveur le hissèrent à leur bord ; délivré et debout, un peu chancelant, pas mal frigorifié mais complètement trempé, il salua notre bateau comme s’il lui donnait sa bénédiction. Alléluia ! Il avait fendu la mer ! Il était de l’autre côté ! Cela me fit tout drôle sur les épaules ; c’était un éphémère manteau de frissons aux pouvoirs surnaturels de félicité. Oui, l’aumônier de l’escadre, il avait une sacrée paire de c…

Transbord avec le Picard 76

Transbord avec le Picard 76_1

13 mars 2021

Affaire non conclue (Yvanne)

y

 
Ma chère cousine.

J'espère que tu n'as pas trop froid dans ton Québec d'adoption. Ici le printemps se manifeste franchement depuis quelques jours et cela met du baume au cœur. Nous tentons d'oublier le plus possible la morosité ambiante, Christelle et moi en faisant de longues promenades dans la campagne.

Cependant je ne t'écris pas, tu le penses bien, pour te parler de la pluie et du beau temps. Venons-en donc aux affaires qui nous occupent.
La tante Geneviève étant décédée en décembre comme tu le sais,  le notaire m'a convoqué dans son étude pour régler la succession de notre parentèle sans enfant. Tu as bien voulu me donner procuration pour régler à ta place cette situation. Je vais te faire un bref résumé des résultats de l'entretien.
Étaient également présents les deux neveux de la tante. Qui n'ont pas daigné m'adresser la parole mais tu les connais...

La tante Geneviève, à qui il manquait toujours – apparemment - cinq sous pour faire un franc possédait en fait un joli magot. L'oncle Jules n'ayant pas laissé de directives quant à l'argent du ménage, elle s'était empressée, la garce, de léguer les disponibilités sur les comptes bancaires, les assurances-vie et autres à ses neveux en propre. Encore heureux qu'ils se soient occupés des frais d'obsèques !

La maison et les terrains appartenaient exclusivement à notre oncle. J'ai appris qu’il avait déposé,  peu avant sa mort il y a cinq ans un testament chez le notaire nous faisant héritiers de ses biens, toi et moi. J'ai fait estimer ces derniers et hélas, nous ne ferons pas fortune avec le produit de la vente. Je joins à ma lettre les diverses expertises effectuées. Tu me diras ce que tu comptes faire.

Les neveux m'ont demandé quelques meubles et je n'ai pas refusé. Comme de toute façon ces derniers ne valaient pas tripette, je les ai laissés prendre ce qu'ils voulaient. Je dois dire que ça m'arrangeait plutôt de les voir débarrasser la maison. Ces profiteurs fouinaient partout tu t'en doutes.
Au moment où ils s'apprêtaient à faire main basse sur la petite bibliothèque de l'oncle je m'y suis fermement opposé. Ils n'ont pas osé aller au-delà et sont partis avec leur butin. Grand bien leur fasse !

Je n'ai pas voulu leur laisser emporter la bibliothèque car elle représente beaucoup pour moi. Et si tu n'y vois pas d'inconvénient, je souhaite la garder. J'imagine que tu penses tout de suite à la magnifique collection de tabatières que possédait l'oncle Jules. Tu te rappelles ? Elles occupaient, au grand dam de la tante, toute une étagère dans le fond, à l'abri des regards. C'était un plaisir de Jules de nous les montrer quand nous allions chez eux en visite étant enfants. Les neveux n'en connaissaient sans doute pas l'existence.
J'ai découvert aussi derrière les trésors de l'oncle une jolie ménagère, très complète, en argent massif. Je pense qu'elle devait appartenir à notre grand-mère maternelle.

Comme je sais que tu n'as guère d'appétence pour les objets et les souvenirs et ne pouvant pas imposer à ma femme ces reliques, j'ai décidé de me présenter à l'émission « affaire conclue » sur France 2 dont je t'ai déjà parlé. Et bien figure-toi que ma candidature a été acceptée et je suis donc allé à Paris avec  mes « merveilles ».

Crois-moi, chère cousine, j'ai eu la honte de ma vie. Je me demande vraiment ce qui m'a pris. Bien entendu – et heureusement – je ne suis pas passé à la télévision, l'expert m'ayant fait comprendre que les tabatières et la ménagère ne valaient pas un fifrelin. Les unes sont en corne, métal doré  ou porcelaine sans valeur alors que je les voyais encore avec mes yeux d'enfant admiratif et les croyais en ivoire, en or ou en porcelaine fine.  Quant à la ménagère, elle est tout simplement en métal argenté...très désargenté.

Je ne viens pas, par la présente t'annoncer un héritage fabuleux tu t'en rends compte. J'espère que tu ne te moqueras pas trop de ton cousin toujours aussi incroyablement naïf et que ma mésaventure te fera quand même sourire.

En attendant une réponse de ta part pour régler les affaires en cours, je t'embrasse chère cousine.

                                                                                                     Paul.


Ps : j'ai donné tabatières et ménagère à Emmaüs. Elles feront peut être le bonheur de quelqu'un. Qui sait ?
 

 

13 mars 2021

Ces petits riens par bongopinot

b


Ma petite monnaie
Petit fifrelin
Ça n’a rien de laid
Mais ça ne vaut rien

Mais elles sonnent pourtant
Raisonnent dans mon cœur
Données par grand-maman
Pour moi avait de la valeur

Pour acheter de petits rien
Qui font des souvenirs
Garder tous ces biens
Qui me font sourires

Encore aujourd’hui
Ces petites bricoles
J'avoue c’est inouï
Ont valeur de pistole

Souvenir d’enfance
De mes grands-parents
J'ai eu de la chance
De recevoir autant

6 mars 2021

Défi #654


Celui-ci, j'ai failli le rater, d'un
 

Fifrelin

6541

 

6 mars 2021

Ont passé la brosse à reluire...

6 mars 2021

L’Amour (Pascal)

 

 

Et vous, vous parlez d’Amour, sans vraiment savoir de quoi il en retourne ; seule, entre deux trains, entre deux gares, deux paysages, vous pourriez le chercher éternellement, jamais vous ne le trouveriez. Les pieds si posés sur terre, vous avez votre assurance, vos schémas, votre expérience et, nullement, la passion ne pourrait vous détourner de votre quête aux aspirations paradisiaques. Pourtant, après avoir effeuillé toutes les marguerites, consulté tous les horoscopes, balancé toutes vos bouteilles à la mer, la correspondance, l’alter ego mâle vous fuit. Vous êtes toujours bredouille ; ce n’est qu’un doux mirage que vous entretenez avec des jolis mots de fioriture, seulement utiles à votre quête ; votre généreux prince charmant est toujours dans un autre train. Aussi, si vous pouvez tout entendre et tout comprendre, sans crainte d’être mal traduit, ici, je peux m’épancher sur le verbe aimer, ses ramifications romantiques, ses conciliations et ses chicanes, ses éclairements et ses mélancolies, ses pluies et ses soleils…  

Aimer, c’est perdre le compte des pétales, c’est confondre le jour et la nuit, la terre et la mer, le ciel et l’enfer, c’est entendre des voix, c’est apprivoiser l’univers ; c’est le Covid multiplié par mille, c’est ne rien comprendre de cette maladie si brutale et si soudaine.
C’est laisser tirer les fils de sa marionnette, dans les mains de cette inconnue sublime. Enfiévré, votre cœur s’essouffle, vous avez des frissons, vous avez l’impression que vous êtes absorbé par les abysses les plus ténébreux, mais il vous pousse des ailes ! À la fois ange et démon, vous avez des sentiments contradictoires, des allants de hussard et des attentions de poète, des chagrins insondables et des joies de jours de Fête…

À l’empreinte de l’Amour, un instant, imaginez tous vos sentiments les plus beaux, je dis bien tous, réunis dans une chaussure de verre et, à l’unisson de vos désirs, que vous ayez trouvé le pied parfait qui entre dedans. Sans les entraves des a priori et défait des obligations, tout à coup, naïf et sincère, vous avez tous les courages ; plus rien ne fait barrage… « On fait table rase !... On oublie tout !... On repart à zéro !... » ou encore : « Allez chercher toutes les hydres, sortez du brouillard les châteaux impénétrables, les plus encombrés de ronces, je saurai les combattre, je saurai les prendre et réveiller la belle !... » Sans échelle, vous êtes capable d’aller décrocher la lune et, sans respirer, de rapporter les étoiles de mer les plus profondes…  

L’Amour, cette flèche plantée si adroitement dans votre cœur, c’est votre reflet en mieux, en lumineux, en couleur d’utopique, celui que vous n’osez pas admirer dans la psyché de l’étang, tant il éblouit. C’est votre main brûlante, tissée dans celle de l’autre, et qui forme une trame multicolore aux pouvoirs indestructibles ; ce sont des serments écrits sur le sable, des secrets murmurés dans l’oreille ; c’est une chanson aux couplets entêtants, un hymne à la vie, une ritournelle qu’on voudrait éternelle. Il a libéré vos sens ; la peinture, la musique, la poésie, tout à coup, vous savez tout traduire. Il est le coquillage scintillant, le ressac lancinant, le friselis de la dune, le parfum des algues ; il est ce voilier au loin qui déplie ses ailes, et vous ne savez plus bien s’il glisse dans les nuages ou s’il vole sur l’eau…  

L’Amour, c’est l’eau à la bouche, c’est le sang du Christ dévergondé ; c’est le soleil capturé, la pluie bienfaitrice, l’arc-en-ciel tendeur de lumières aphrodisiaques ; c’est le passé, le présent et le futur modelés dans la statue de chair que vous caressez ; c’est le glouglou de la fontaine amplifié à l’infini, la tirade amoureuse de ce merle au bout de sa branche, le courant d’air parfumé qui embrasse l’ambiance de ses senteurs les plus tourmenteuses ; c’est cet infini dans les mains, c’est l’unisson qui glisse déjà entre vos doigts ; et pour conjurer le sort, vous avez des mots d’Amour, comme des chapelets de messe, et vous donnez l’aumône aux nécessiteux, et vous joutez sur tous les prés, et vous pourriez partir en croisades pour élever votre drapeau de fanatisme, aux quatre coins du monde…

L’Amour, entre frissons de volupté et aube sensationnelle, c’est un désir extraordinaire, un aboutissement qui débute, c’est une prière exaucée ; mais qu’est-ce qu’une prière dans ce monde où tout s’échoue, où tout a une fin, ou tout meurt par arrêt de l’Arbitre ?
Il n’y a pas de guérison à l’Amour. Ne tournez pas la page de votre livre qui n’en contient qu’une ; la fin n’est jamais le début d’une autre histoire, ce serait si simple. Vous pouvez vous soûler dans les plus infâmes bouges, rouler dans la fange ; illusoires, pâles copies, prendre d’autres maîtresses, des brunes, des blondes, partir à la guerre contre des chimères, vous pouvez aller vous cacher jusqu’au fin fond du bout du monde, il reste accroché à vous, plus saignant qu’un approximatif tatouage, plus inguérissable qu’une cicatrice, plus corrosif qu’un mauvais cancer. Pire, pour perdurer dans l’anathème, vous complaire dans l’ensorcellement, vous baigner dans la fascination, infatigable derviche, avec des bouteilles mensongères, vous l’encaustiquez d’une brillance qu’il n’a plus. Vous pouvez prendre toutes les potions, consulter toutes les cartomanciennes, renier votre Dieu, vous flageller, entrer dans la cellule d’un ermitage la plus cadenassée, immense, indélébile, intenable, sur l’autel des laissés pour compte, le mal d’Amour est en vous, pour toujours et à jamais...  

Et vous, séductrice anonyme, vous me parlez d’Amour comme si vous saviez tout de cet ouvrage d’Art ; merveille du monde, s’il s’allume avec une seule petite étincelle de bluette, il n’est pas l’œuvre d’un simple batifolage. C’est un train emballé dans une descente infernale, et vous voudriez que l’autre saute dans le vôtre, à votre rythme, à votre vitesse, à votre goût, et dans votre direction. Vous avez besoin d’Amour, de loyauté et de complicité ; vous en parlez comme d’un pansement ; vous vous nourrissez de l’autre, vous profitez de la vie, en parfaite épicurienne égoïste. Mais non, ça ne marche pas comme ça ; avec votre goût immodéré des grands voyages, vous me faites penser à une machine qui empoisonne les petites fleurs des ballasts…

Aimer, c’est tout remettre en question ; c’est mettre à bas ses désirs, c’est s’oublier, c’est offrir sans attendre, c’est se fondre dans le creuset de l’autre. C’est inventer son train à deux, c’est forger les mêmes aiguillages, c’est rester en équilibre sur les rails, c’est donner des prénoms aux gares, des couleurs aux paysages, des larmes à la compassion. Pied de nez à l’univers ou délicatesse du Hasard, de ces deux astres qui se télescopent en pleine course, c’est une passion aveuglante, irrésistible, incompréhensible et fulgurante qui naît entre le Néant et l’Éternité, et qui va sur son erre d’étoile filante, en laissant dans son sillage des myriades d’étincelles heureuses…

À vous, je peux le dire, puisque vous pouvez tout entendre et tout comprendre. Jadis, pendant quelques mois de bonheur solitaire, j’ai approché ce grand Amour ; dans un croisement de ma route, j’ai eu la chance de le reconnaître comme le point culminant de ma vie. Ébloui, j’ai touché cette Beauté ineffable, en l’admirant de trop près, dans son costume de princesse inaccessible. Devant son château, il y avait trop de ronces, trop de gargouilles menaçantes et trop de différence d’âge. J’étais dans un souterrain, une galerie profonde où, seul, débordé par une imagination d’argonaute et des sentiments d’un autre siècle, je voulais en extraire les pépites. Voyez-vous, je me suis brûlé les ailes et je suis tombé en flammes. J’en suis sorti exsangue, défait, bon à jeter aux chiens, irrécupérable. « Cette fille, elle t’a tordu le cœur pour qu’il ne puisse plus jamais servir à personne !... », m’a-t-on crié… 
Aussi, je ne puis me satisfaire des caprices de l’une, des impatiences de l’autre, et des doléances de toute la gente féminine. Un jour, j’ai croisé mon étoile ; il n’y avait que quelques années d’écart dans le cadastre de l’univers… si pervers…

 

Publicité
<< < 1 2 3 4 > >>
Newsletter
Publicité
Le défi du samedi
Publicité