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Le défi du samedi
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27 mars 2021

Généalogix (Kate)

 

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Dans les Combrailles (comme ailleurs*) depuis le Moyen-Âge (voire avant), on fabriquait du charbon de bois pour aller le vendre dans la plaine de Limagne.

On vivait de peu : quelques légumes, quelques poules, quelques lapins, quelques vaches... J'ai des souvenirs durables du début des années 70 ("Seventies") où des cousins vivaient dans une pièce unique dans une masure au sol en terre battue, où le lit tutoyait la table et où je disais que je n'avais pas soif pour ne pas boire de l'eau dans un verre aussi culotté, gens humbles et chaleureux que mon père aimait.

Mon arrière-grand-mère Anne descendue au marché de la petite ville vendre le contenu de son panier y est restée. La vie y était rude aussi : le froid, le travail, la pauvreté. Les hommes voulaient partir : à l'armée, aux colonies ou finissaient par arriver à Paris au départ de Pont-du-Château avec les bateliers de l'Allier puis de la Loire et souvent restaient à la capitale où Dame Misère les attendait aussi.

Ils ont fait porteurs d'eau pour les bourgeois : eau froide, eau chaude... Et puis le métier s'est éteint. Ils ont porté des sacs, roulé des tonneaux sur les quais de Bercy : du bois, du charbon, du pinard, du sable, du bois... Certains ont pu accéder à un petit commerce "Bois, charbons" et d'autres travailleurs venus du Massif Central et d'ailleurs ont grossi leurs rangs.

Les bougnats, comme on les a surnommés. Ils étaient plutôt les "Auvergnats de Paris" mais "bougnat", c'est plus court. S'ils ont transporté de tout, certains, plus entreprenants, ont monté des bistrots dans le sud de Paris : 11ème, 12ème, et même le Flore au Quartier Latin et tant d'autres...

À la fin du 19ème siècle, les "filles-mères" n'avaient souvent d'autre recours que d'abandonner leur enfant non désiré. Ma grand-mère est née ainsi à Paris 14ème de père inconnu et a été mise directement à l'Assistance Publique par sa mère Claudine. Comme le décrit si bien Ivan Jablonka dans "Ni père, ni mère", elle a, comme tant d'autres été placée dans une ferme loin de Paris où l'on travaillait plus qu'on ne mangeait, comme il se doit...

Comment a-t-elle pu rencontrer mon grand-père en ville ? Par le bal, par hasard... Je ne sais. Mon père, qui aimait bien tout savoir (et aimait raconter), ne l'a jamais su : on était plutôt du genre "taiseux" sur ces choses-là. D'une servitude à l'autre, ils se sont mariés et le chef de cette famille était Anne. Veuve prématurément, elle allait monter un café pour gagner des sous... Pas grand chose : ma grand-mère malheureuse, mon grand-père sombrant dans l'alcoolisme, deux de leurs trois enfants aux destins tragiques.

Parmi tous les monuments de Paris que mon père aimait, du Père Lachaise à Montmartre, des Champs Elysées au Louvre, des quais à Saint Michel, j'ai mis longtemps à comprendre pourquoi le Lion de Denfert figurait sur la liste : les branches cassées de ses origines maternelles, peut-être...

(*) et encore dans la forêt anglaise au XXIème siècle évoquée  dans l'épisode de "Inspecteur Barnaby" (dont je ne retrouve pas le titre) où Joyce va chercher du charbon de bois pour organiser un barbecue pour l'anniversaire de John et se retrouve nez à nez avec des crânes humains...

(**) dont ma première rencontre en 2018, suite à La Grande Librairie, avait été "En camping car"...

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Commentaires
B
Merci pour ce partage si intéressant une vie difficile mais tellement riche . Merci et Bravo Kate
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P
Merci Kate pour cette belle histoire que tu racontes si bien, avec une évidente émotion. Cette période rude n'est finalement pas si lointaine quand des témoins peuvent encore l'évoquer. J'aime beaucoup ton texte.
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M
Tu racontes comme quand la télévision n'existait pas...à la veillée, tous se racontaient leurs histoires de vie, sauf les "taiseux" bien sûr !
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V
La saga est intéressante. Merci pour ce bon moment
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L
Une vie difficile, et comme le dit Adrienne, si proche et si lointaine à la fois
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V
Merci pour ces extraits de vie que l'on a tendance à oublier aujourd'hui dans la Capitale... Sourire
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A
merci pour cette magnifique leçon d'histoire!<br /> <br /> c'est à la fois si proche et si lointain...
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J
Originale généalogie, <br /> <br /> Certes, sombre, mais qui éclaire bien sur les origines éventuelles <br /> <br /> de nos arrières -arrières grands parents ☺
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T
Evocation majeure d'une 'gamme', trop souvent déclinée en mode mineur.<br /> <br /> C'est l'Onc' Joe qui va être content, tiens :)
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K
Merci Joye ! ❤️🌞🌼 Je ne savais pas que Capitaine Marleau était si connue ! Oui, elle est top ! Je l'ai aimée aussi dans un film formidable avec Audrey Lamy.<br /> <br /> Sinon, merci infiniment pour l'attention que tu portes à mes textes, c'est un plaisir pour moi de participer au défi de la semaine ! ☺️
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J
Mes premiers plus grands succès en français étaient de pouvoir lire Astérix et capter la plupart des vannes...je me souviens encore d'avoir saisi' "Abraracourix" - TRIOMPHE !<br /> <br /> <br /> <br /> Maintenant, c'est la Capitaine Marleau. Je l'adore et mon mari regarde avec moi. Malheureusement, il ne saisit pas toutes les astuces culturelles (les chiens de garde qui s'appellent Léon et Zitrone, par exemple). Moi, je trime pour comprendre tout ce qu'elle dit dans sa barbe (eh eh), mais je l'adore, encore et toujours. <br /> <br /> <br /> <br /> Un peu comme tes textes et leur auteure. 🌼🌸❀✿🌷
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J
Belle évocation de ces années dures qu'on pu connaître nos grands-parents.<br /> <br /> <br /> <br /> C'est rigolo de penser que j'ai été à l'origine d'une grande histoire d'amitié entre une famille du Pas-de-Calais et des mineurs de Messeix !
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W
Marrant : mon frère a fait l'inverse : né dans le bassin houiller du Hainaut, il a émigré en Auvergne à sa retraite. Bon, il n'y fabrique pas de charbon de bois, il fume des jambons et des saucissons.
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