LE THURIFERAIRE (Venise)
Retiré sous le porche d’une maison le thuriféraire laissait passer la giboulée.
Une plénitude silencieuse se dégageait de lui. Je ne savais pas au juste ce qu’il tenait dans ses mains, mais une odeur d’encens remontait dans l’air.
J’entrevoyais une lassitude sur son visage d’enfant, épuisé désencombré des attachements.
Quelle parole, quel chant du cœur l’avaient mis sur ma route ?
Il était là comme un chant, un livre , une sculpture figée dans le temps.
J’avais devant moi un Rembrandt, et moi comme un peintre flamand, flairant le modèle parfait qui dormait dans l’atelier du Maitre je voulais toucher son âme.
Il s’est éloigné. Alors je me suis dit « si je le perds, je perds tout le reste , tout ce que le monde est en train d’oublier .
Alors à la manière d’un écureuil par bond et immobilité je l’ai suivi.
Je l’ai retrouvé figé dans la pierre au fronton de l’église comme un fantôme fatigué, plongé dans le ravissement d’un sommeil pur .
Un jour petit thuriféraire je parlerai de toi je montrerai comme tu m’as délivré de tout.