LA HARPE (Lorraine)
Il prit sa harpe et joua. Toute la Mésopotamie déferla dans le navire. L’homme ferma les yeux ; la forme éthérée de la Dame, déesse de la Nature, ondula, fugitive, impalpable, belle tout simplement.
Elle est immortelle, il le sait, il l’a toujours su. Il a aimé ce pays dont les étincelles du soleil créent des myriades d’images et des divinités aux forces souveraines. Ils n’étaient pas cruels, les dieux d’alors, tels le croissant lunaire personnifiant le dieu Sin, ou le rocher incarnant le dieu de la montagne, ou encore l’arbre , dieu suprème de la forêt.
Les soirs de douceur, les filles égrenaient à lèvres closes les mélopées qui peu à peu devenaient chants, houle, puissance, ivresse de vivre, amour. Il reconnaît l’odeur des bois où dansaient les elfes et les fées.
Et le génie de la harpe le ramena brusquement des milliers d’années en arrière, là où il était né, au seuil de la cabane que sa mère balayait à gestes mesurés.
Alors un bonheur infini l’envahit. Et il sut que tout était bien.