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Le défi du samedi
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21 mars 2015

En avant, marche! (Vegas sur sarthe)


On se souvient que Blanche qu'on appelait Cappuccetto Rosso était partie chercher ingrédient ou deux pour sa marâtre afin de confectionner ce fameux masque de beauté de Cesare Frangipani à base de frangipane et de beurre en pot.
Chemin faisant et après bien des péripéties - ces histoires abracadabrantes qu'on raconte aux enfants pour les empêcher de dormir - elle arrive en vue d'un bien étrange patelin.

Avisant une femme assise là, elle s'approche, bien décidée à se rancarder sur ledit patelin quand la vieille l'apostrophe (avec deux points et des guillemets) :  “Commence par t'essuyer les pieds avant de monter au village, petite!”
Blanche examine ses pantoufles - cadeau de sa great-mother dont la droite est en verre et la gauche en vair pour ne pas les confondre - mais la vieille insiste: “J'ai fait les marches hier au dépoussiérant Please et je ferai pas ça tous les jours!!”
“Qui es-tu, la vieille pour m'apostropher ainsi?” s'étonne Blanche.
“Apprends que je suis concierge de mon état, petite... en quelque sorte en état de marches. Je sais tout, je raconte tout car mon domaine c'est ce patelin en escalier”.
Blanche est rassurée d'avoir rencontré celle qui va enfin l'aider à trouver ingrédient ou deux pour sa marâtre.
“Et comment fait-on pour arpenter le patelin?” demande Blanche.
“C'est facile” ricane la vieille “dès que tu auras pris la première marche, tu verras la marche à suivre”.
“Euh... c'est bien gentil mais la première marche est trop haute pour une petite fille” fait remarquer Blanche.
“C'est toujours comme ça la première fois, petite et puis tu n'as pas les bonnes chaussures” gronde la vieille “quitte tes pantoufles de verre pour des chaussures de marche!”
“Et où trouverai-je des chaussures de marche?”  s'inquiète Blanche.
“Chez le marchand de chaussures de marche” répond la vieille sans se démonter.
Dans les contes, ceux qui se démontent ne se remontent pas et c'est pourquoi les contes finissent par disparaître.

“Et où trouverai-je un tel marchand?” insiste Blanche.
“Je vais te montrer” chuchote la vieille concierge sur le ton de la confidence “laisse moi ouvrir la marche”.
Précédant Blanche, la vieille ouvre en effet la marche - la première comme il se doit - celle munie d'une petite porte de magasin de chaussures de marche.
“Y'a quelqu'un dans le giron?” crie la vieille.
Pour les novices, le giron est employé dans la formule de Blondel pour déterminer le confort d'un patelin en escalier, ce dont on se fiche royalement pour tous les patelins à plat.
Un petit homme - suffisamment petit pour se tenir debout dans la contremarche - sort du giron.
 “C'est pour quoi?” marmonne t-il d'une voix lasse.
“A ton avis?” répond la vieille “Tu t'es encore levé du mauvais pied, petit homme?”.
“Non...” dit-il en soupirant” c'est à cause de cette marche funèbre... ce matin on enterrait ma femme”.
“Première nouvelle” s'étonne la vieille concierge qui d'ordinaire n'ignore rien des évènements du patelin.

Déformation professionnelle oblige, le petit homme dévisage les pantoufles de Blanche.
“J'ai encore jamais vu ça” dit-il, ébahi “des pantoufles de verre et de vair”.
“Ce ne sont que des loups-bouquetins” précise Blanche.
“Si tu lisais un peu les contes, petit homme tu ne serais pas surpris” reprend la vieille” Trouve donc des chaussures de marche pour cette petite”.



Blanche est fin prête:”Et maintenant, que vais-je faire... de tout ce temps que...”
“Qu'est-ce que tu nous chantes?” coupe la vieille “paie et partons d'ici”.
Comme Blanche n'a rien pour payer elle refile un Bécaud au petit homme, au risque d'enfreindre les bonnes manières propres aux contes.
“Et maintenant?” reprend-elle, un peu vénale et bien plantée devant les marches.
La vieille soupire:”C'est pourtant fastoche. Il suffit que tu montes en marche!”

Blanche a un mouvement de recul: “Monter en marche? Mais c'est interdit”
La vieille la regarde, incrédule:”Ca fait quarante ans que je fais ça. Et vu qu'on n'a pas encore inventé l'escalator je ne vois pas comment on pourrait faire autrement, à part monter en marche dans un sens et  descendre en marche dans l'autre sens!”.
Blanche lève les yeux vers l'improbable sommet. Les cheminées des maisonnettes vapotent tranquillement. Une belle végétation rampe le long du limon en une large courbe qui vire à droite, comme dans tous les patelins de droite.

« Tu es à une heure de marche, en marchant bien » lui chuchote la vieille sur ce fameux ton de la confidence qui caractérise les vieilles concierges.
“Et je trouverai la frangipane et le beurre en pot?” s'inquiète Blanche.

Dans les contes, on réserve souvent un espace pour le soupir d'espoir des enfants.
(Espace)

“Sans doute” répond la vieille sur un ton rassurant avant d'ajouter: ”sinon, ce sera pour une autre fois... ou une autre Il était une fois”
 

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Commentaires
Y
Ah oui, l'escalator... quelle belle invention !!
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W
Cette histoire de marches se passe à Ancone, je présume ?
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K
nous gravissons ton récit marche après marche !! <br /> <br /> ça marche !!<br /> <br /> bisousssssss
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P
Quel joli conte qui monte en puissance tout au long de sa marche.... bravo j'adore !
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J
Bravo pour ce manifeste politique habilement voilé où le fantôme de Chi (abracadabrantesque) parle avec Betancourt pour annoncer le retour du nain de Blanche (neige, hein, pas le petit chaperon rouge - car les Cocos n'ont plus aucun pouvoir) remportera les prochaines présidentielles contre la méchante sorcière du Sud !<br /> <br /> <br /> <br /> Comment ? J'hallucine ? Moi ?<br /> <br /> <br /> <br /> Non.<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai tout simplement lu trop de littérature classique ! ;-)
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M
Extra Vegas!!!!! Ça marche !!! (place pour un soupir d'aise !) :- )
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B
Oh ! Non ! Vegas c'est déjà fini ! Alors en avant marche pour la semaine prochaine j'espère une petite suite si c'est pas trop demandé <br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ce conte du grand Vegas j'adore
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E
Tout allait bien dans ce conte réjouissant jusqu'à ce que tu parles de Gilbert Bécaud. ça fait une paye que je l'avais pas entendu. Mais ça marche quand même.
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