Défi #327
Gilbert Stuart remit durant quinze ans l'achèvement de ce tableau.
Et vous, êtes-vous sujet à la
PROCRASTINATION
ou avez-vous des exemples autour de vous ?
Racontez-nous cela à
samedidefi@gmail.com
A tout bientôt !
Ont trouvé leur objet
Venise ; Fairywen ; Vegas sur sarthe ; Joe Krapov ;
Zigmund ; JAK ; bongopinot ; Walrus ; EnlumériA ;
Chuis tire-bouchon (par joye)
On m'avait dit : « Tu n'es qu'un tire-bouchon.
Prendr'd'la bouteille, ce n'est pas toujours bon.
A quoi ça sert de vouloir tout ouvrir ?
Laiss' les bocaux, ils ne sont pas pour rire. »
On m'avait dit : « On ira voir Liège. »
Et chuis toujours tombé dans le piège.
Maman m'a dit : « Fais gaffe à ton hélice ! »
Et j'ai grandi, craignant les capsules à vis.
Qui a le droit, qui a le droit,
Qui a le droit de dire ça
Aux tire-bouchons à queue de cochon ?
C'est du bla-bla !
On passe sa vie sans dire merci,
Merci à qui ? Ben, à moi !
Malgré la pluie ou le beau temps
Chuis tire-bouchon exécutant !
On m'avait dit de rester au tiroir
Qu'un tire-bouchon, ce n'est qu'un simple « pour boire »
Mais c'est pas vrai, sans moi aux canicules
Tu meurs de soif ou bien tu bois des bulles.
A toi aussi, j' suis sûr que l'on t'a dit,
Qu'un tire-bouchon n'ira pas au paradis
Parce que maintenant, on retrouve dans les boîtes
De la picole presque adéquate...
Qui a le droit, qui a le droit
Qui a le droit d'faire ça
Aux tire-bouchons un peu folichons
C'est pas sympa !
On passe sa vie sans dire merci
Merci à qui ? Ben, à moi !
Malgré la plage et le beau sable
Chuis tire-bouchon indispensable !
Une certaine idée de la danse (EnlumériA)
Je vins au monde aux soieries Abraham, en 1925, quelque part dans la vallée du Rhône. Cette période ma jeune vie est assez floue. J’ai le vague souvenir d’une origine animale puis de mon passage dans d’étranges machines composées de cadres et de rouleaux enchevêtrés et virevoltants dans une stupéfiante danse mécanique. Je me souviens avoir peu à peu acquis ma couleur hyacinthe et ma forme définitive quelques mois plus tard. Lorsque je fus devenu une splendide écharpe, on me plia soigneusement et l’on me déposa dans une boîte de carton fleurant la colle fraîche et l’encre d’imprimerie. Je revis la lumière peu de temps après quand une modiste niçoise m’exposa dans sa vitrine. Je n’attendis pas longtemps pour qu’une cliente de passage m’adoptât par un bel après-midi de mai contre monnaie sonnante et trébuchante. C’est là que je pris conscience de ma véritable valeur.
La dame, fine et gracieuse malgré ses 50 ans, semblait survoler le sol plutôt que d’y marcher. Quelle sensation que le contact de son cou gracile et le doux balancement de sa démarche de danseuse. Malgré les deux tours que je faisais autour de son cou, je battais de mes pointes ses mollets gracieux, juste en dessous de l’extrémité de sa robe de lin.
Dès lors, ma vie fut un tourbillon de lumières, de rires et de musique ponctuée de phrases chantantes susurrées d’une voix de contre-alto par ma maîtresse. Étrange destin que celui d’une écharpe de soie hyacinthe devenue la parure d’une star aux pieds nus, vieillissante et bisexuelle.
Un jour, ma maîtresse s’enticha d’un garagiste du nom de Benoît Falchetto de vingt ans son cadet. Décidée à croquer son jeune mécanicien, elle acquit sur son conseil une Amilcar GS 1924, élégante automobile bleu azur équipée de gracieuses roues à rayons, prétexte à multiplier les rencontres avec son prince de la mécanique.
Un après-midi de septembre, sous un soleil propice aux amours improbables, Isadora m’enroula autour de son adorable cou et quitta son studio de danse au volant de son Amilcar, la tête pleine d’indicibles projets. J’entends encore ses dernières paroles : « Je vole vers l’amour ! » Le cœur rempli d’allégresse, elle me laissa danser au vent de son bolide. C’est en arrivant sur la Promenade des Anglais que, mue par une curiosité soudaine, je m’approchai inconsidérément de la roue arrière droite. La griserie de l’air filant autour de moi s’interrompit si brutalement que j’en ressenti un douloureux tiraillement. Par un incompréhensible concours de circonstance, je m’enroulai autour de cette roue de malheur sans parvenir à lâcher la gorge d’albâtre que j’ornais de ma chatoyance. On raconte que la soie dont je suis faite est une des plus résistantes au monde et que c’est pour cela que ma dame trouva la mort, la nuque brisée net.
Ainsi s’acheva ma destinée d’écharpe de soie et l’existence d’Isadora Duncan morte d’avoir été trop élégante et trop amoureuse de la vie.
Évreux, 27 novembre 2014
La chose en soi (Walrus)
L'âge aidant, je l'ai oublié, mon âge.
Mon nom aussi d'ailleurs !
C'est gênant pour les présentations.
Ce l'est d'autant plus que je suis enfermé, seul, dans une vitrine du charmant petit béguinage d'Anderlecht.
Vitrine qui attire immanquablement les regards et me vaut d'ouïr à chaque fois le dialogue standard :
- Oh ! Qu'est-ce que ça peut être ?
- J'en sais fichtre rien !
Mais, attends ! Il y a une étiquette !
Ah... Merde !- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Ils savent pas non plus, ils disent que si on sait, on le leur fasse savoir.
NDLR : Si vous savez, vous pouvez aider !
Ma vie de petite boite par bongopinot
MA VIE DE PETITE BOITE
Je me revois dans les mains de cet artiste
Moi, simple morceau de bois
Je devins une magnifique boite
Terminée en mille neuf cent trente trois
Il me donna à sa femme
Qui aimait tant me garnir
De ses lettres de ses poèmes
Que je vis doucement jaunir
Ensuite elle m’offrit à sa fille pour un anniversaire
Je me souviens elle me remplissait de beaux petits cailloux
Qu’elle ramassait au cours de ses balades solitaires
Souvent pour regarder ses trésors elle me posait sur ses genoux
Les années passèrent et moi je me suis retrouvée avec sa fille
Elle, elle me remplissait de crayons de couleur pastel
Lorsqu’elle m’ouvrait le matin à son réveil
Moi la petite boite je me sentais immortelle
J’ai vécu dans sa chambre des années
Puis je fus exposée dans son salon
Avant d’être confiée à sa fille ainée
Qui me couvrit de bijoux, de ses créations
De génération en génération je suis invitée
A partager la vie de petites filles et de demoiselles
J’espère que ma vie sera encore longue et animée
Et toujours magnifique et exceptionnelle.
Sous le joug (JAK)
Je suis toujours là pour répondre à ton désir,
Dans ta main déliée tu me courbes tout à loisir
D’un style cursif et souple comme une plume d’oie
Tu me palpes de tes mains, me caressant parfois
Crayonnant des volutes sur ma peau de vélin
Dans un geste possesseur tu me soumets enfin
Toi l’abject, Moi l’unique, qui suis ta femme-objet
Le prisonnier (Zigmund)
Au décrochez-moi ça, articles de voyages (Joe Krapov)
Que ne ferais-tu pas pour séduire Artémise,
Homme, présomptueux ver de terre, qui boîtes ?
Depuis la nuit des temps tu m’admires et convoites,
Tu voudrais m’accrocher aux pans de ta chemise
Mais c’est plaisanterie, ce sont carabistouilles,
Ballets de mots passants, contes de la bécasse,
Forfanteries de Cyrano ou de Fracasse,
Orgueil de fanfaron enivré de chatouilles !
Si tu veux me toucher, entre dans la cabine,
Espèce d’animal ! Fais vrombir le delco,
Promets-moi de l’amour, du miel, Acapulco !
Approche-toi de moi, montre-moi ta bobine !
Parcours cette distance en petite foulée !
N’oublie pas de m’offrir, en guise de pastis
Un bouquet de poèmes ou de myosotis
Mais surtout pas de valse, encor’ moins d’azalée. *
Ah, te voilà enfin, sortant de ta nacelle,
De ton petit module enfin posé chez Diane.
Emu par ma tranquillité si océane
Tu as fait un grand pas… Patatras ! Tu chancelles !
Un petit Papou l’homme,
Un grand Papou Lune habitée !
* Parce que "l'azalée c'est une valse" ne rajeunit personne
et surtout pas les vieilles lunes !