Participation de Nhand
LES APARTÉS DE MARIE & MARLÈNE (2)
C'était quelque chose, hein, l'Elysée !
Alors, tu l'as vu ?
Ça, pour l'avoir vu... Oh, pas dans sa totalité bien sûr, mais c'était déjà très impressionnant.
On dit qu'il n'est pas si grand que ça, pourtant.
Tu plaisantes !
...
En tout cas, ça valait le coup, d'avoir attendu quatre heures sous la pluie.
...
Et Jacques qui n'en finissait plus de pester... Ah, celui-là, je te jure !
« Pas dans sa totalité »... tu veux dire qu'il s'est contenté d'un « coucou » depuis une fenêtre, qu'il s'était caché sous la veste de son garde du corps de peur qu'on lui lance des tomates, ou qu'il avait encore son casque sur la tête parce qu'il rentrait tout juste d'une virée coquine à scooter ?
...
Alors ?
Je te parle de l'Elysée, Marlène. Tu sais, cet espèce de palais qui est accessoirement la résidence du Président de la République.
Ah oui, d'accord... Mais... Mais François, tu l'as vu ?
François, François... Tu me rappelles ces pécores surexcitées qui n'étaient venues que pour lui !
Quand même...
Elles ont vite déchanté, les pauvres chéries !
Quoi, il n'était pas là ?
Si tu veux, il avait mieux à faire, avec l'enlèvement de Gourdel, la guerre contre l'état islamique, et... Ses rendez-vous galants ! Tu ne crois pas ?
J'aurais été vachement déçue, moi, de me taper la queue pendant autant de temps, pour au final ne même pas lui serrer la main !
Et tu lui aurais raconté quoi, s'il te plaît ?
Je ne sais pas, moi... Je lui aurais dit « bonjour M. le Président », par exemple...
C'est la meilleure ! Voilà le plus impopulaire des présidents, celui que tout français censé rêve d'étrangler, et toi, tu rêves de lui serrer la main ! Remarque, tu n'es pas la seule parmi les inconscients. Fallait voir, le monde, la file d'attente s'étendait jusqu'à la Concorde. On déteste le président, mais plus que jamais, on veut le voir, l'approcher, le toucher... Il y avait carrément des bonnes femmes, devant nous, qui s'étaient ramenées avec des photos de lui... Comme s'il allait leur signer un autographe !
Pourquoi pas...
C'était les journées du Patrimoine, pas la saint-François !
Oui, c'est sûr...
Voilà !
Et sinon, c'est comment, l'Elysée ?
Magique ! Grandiose ! Toutes ces dorures, tout ce mobilier magnifique, ce bon goût... Le comble du chic made in France ! Et la Salle du Conseil des Ministres, le bureau du Président, les jardins... C'est plus beau qu'à la télé. J'y vivrais bien, moi !
Tu n'es pas blonde, tu es plutôt mignonne et bien foutue, tu en as dans le ciboulot, tu as de jolis chicots, tu as la quarantaine... Tu as tout ce qu'il faut pour lui plaire, écris-lui, vends-toi auprès de lui, envoie-lui une photo suggestive, ça se pourrait bien qu'il morde à l'hameçon... Et si par hasard tu deviens la 1ère Dame, ton vœu sera exaucé, tu pourras t'installer sous les lambris de la République, à ta guise... Mais dépêche-toi, il ne te reste plus que deux ans et demie !
Quoi ? Tu rêves ! Qu'est-ce que tu veux que j'aille foutre avec ce têtard qui ne ressemble à rien ?
Mais il a le pouvoir...
La belle affaire !
Parce que ton Jacques, tu trouves qu'il ressemble à quelque chose, toi ? Tu parles d'un patrimoine !
Enfin, Marlène !
Même s'il me proposait une journée porte ouverte pour visiter sa mauvaise humeur permanente, sa barbe qui pue la bave ou son marcel imbibé d'Azzaro, je n'en voudrais pas, perso... Je me demande comment tu fais !
...